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20/01/2010 | FRANCE | N°08-45198

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 janvier 2010, 08-45198


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 1er octobre 2008), que M. X..., engagé par la société KP1 le 10 août 1983, en qualité de mouleur de béton, a été en arrêt de travail pour maladie professionnelle à compter du 14 septembre 2004 ; qu'à l'issue de deux visites de reprise les 29 mars et 12 avril 2006, le médecin du travail l'a déclaré "inapte définitif à tous les postes de l'entreprise pour maladie professionnelle, inapte à effectuer physiquement son préavis" ; qu'ayant

été licencié le 18 mai 2006, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 1er octobre 2008), que M. X..., engagé par la société KP1 le 10 août 1983, en qualité de mouleur de béton, a été en arrêt de travail pour maladie professionnelle à compter du 14 septembre 2004 ; qu'à l'issue de deux visites de reprise les 29 mars et 12 avril 2006, le médecin du travail l'a déclaré "inapte définitif à tous les postes de l'entreprise pour maladie professionnelle, inapte à effectuer physiquement son préavis" ; qu'ayant été licencié le 18 mai 2006, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamné à payer une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que les parties peuvent en cause d'appel produire toutes les pièces nouvelles de nature à prouver les faits qu'elles ont la charge d'établir ; qu'en l'espèce le salarié dans ses conclusions d'appel s'était borné à conclure que les représentants du personnel n'avaient pas été correctement informés et que l'employeur ne produisait pas la fiche de demande de reclassement adressée à chacun de ses établissements ; que le salarié ne faisait nullement valoir que tous les établissements n'auraient pas été consultés ou que certains n'auraient pas répondu ; que ce n'est qu'à l'audience que le salarié a invoqué une absence ou une insuffisance de consultation des établissements dans le périmètre de reclassement ; qu'en réplique, l'exposante a voulu produire la liste précise, à la date du licenciement, de ses établissements susceptibles d'accueillir M. X... afin de démontrer l'impossibilité de le reclasser ; qu'en refusant à la société KP1 le droit de produire en cause d'appel une liste différente de celle produite en première instance quand celle produite n'avait donné lieu à aucune contestation avant l'audience, la cour d'appel a violé l'article 563 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en toute hypothèse, le principe de l'oralité des débats autorise le défendeur a produire toute pièce nouvelle de nature à faire écarter un moyen ou un fait allégué, à la barre ; qu'en refusant cette autorisation, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne et de sauvegarde des droits de l'Homme ;
3°/ que lorsqu'un salarié fait clairement état de son refus de déménager, l'employeur ne saurait être tenu, dans le cadre de son obligation de reclassement, d'effectuer des recherches au-delà des environs du domicile du salarié dans la mesure où de tels emplois sont insusceptibles d'être acceptés par ce dernier ; dès lors, en se bornant à relever, pour conclure à un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement que ce dernier ne justifiait pas de toutes les réponses des sites, dépôts et agences de la société KP1 sans s'expliquer sur le fait que le salarié avait, par principe, exprimé un refus total de toute mobilité géographique et donc sans rechercher si la société, justifiait, par ailleurs, de vaines tentatives de reclassement répondant aux souhaits du salarié en matière géographique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-32-5 du code du travail ;
4°/ que lorsque l'entreprise appartient à un groupe, le reclassement du salarié déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment doit être recherché non dans tout le groupe mais dans les entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent à l'employeur d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas justifier de toutes les réponses des sites, dépôts et agences de la société KP1, sans préciser en quoi les activités, l'organisation, ou le lieu d'exploitation des sites, dépôts ou agences, dont la réponse n'était pas produite aux débats leur permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 122-32-5 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir rappelé que la question du reclassement était déjà dans le débat en première instance, a, dans l'exercice du pouvoir d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et sans encourir les griefs du moyen, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant critiqué par les première et deuxième branches du moyen, constaté que l'employeur ne s'expliquait pas utilement sur le périmètre du groupe et ne justifiait pas de toutes les réponses des sites, dépôts et agences ; que tirant les conséquences légales de ses constatations, elle a pu décider, que l'employeur ne justifiait pas de l'impossibilité de reclassement du salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société KP1 aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société KP1 à payer à Me Y... la somme de 2 500 euros à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société KP1.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société KP1 à verser à ce dernier la somme de 20.600 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
AUX MOTIFS QUE «Considérant qu'en vertu des articles L.1226-10 et suivants du Code du travail lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise ; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail ; que l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions ; considérant qu'il appartient donc à l'employeur de justifier de ce que le reclassement du salarié était impossible ; considérant qu'il résulte de la lecture du jugement déféré que Monsieur X... avait fait valoir à l'appui de sa demande, qu'avant de procéder à un licenciement pour inaptitude suite à une maladie professionnelle, il convenait conformément à l'article L.122-32-5 du Code du travail de « tout faire pour retrouver un emploi au salarié, de consulter les délégués du personnel et de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement » ; que la question du reclassement était donc déjà dans le débat en première instance ; considérant que la société KP1 a produit, sur sommation du salarié, une liste (pièce numérotée 29) de « sites », « dépôts » et « agences » répartis sur plusieurs régions de France ; que le salarié fait notamment valoir que l'employeur n'était pas en possession de toutes les réponses des établissements mentionnés dans cette liste ; considérant que la société KP1 ne saurait invoquer en cause d'appel le principe du contradictoire pour prétendre communiquer une autre liste que celle-ci, qui n'est pas datée, pourrait viser des sites qui n'existaient pas au moment du licenciement alors qu'il lui appartenait de verser aux débats toutes les pièces utiles afin de justifier des diligences accomplies dans le cadre des recherches de reclassement prévues par les textes susvisés et discutées par les parties ; considérant que la société KP1 ne s'explique utilement sur le périmètre du groupe dont il est fait état dans la lettre de licenciement alors qu'elle invoque une recherche exhaustive auprès de l'ensemble de ses établissements, dont certains situés à l'étranger, 2 réponses rédigées en allemand et non traduites en français qui concerne « KP1 Polska » étant versé aux débats ; considérant que si l'employeur a effectivement interrogé plusieurs établissements, il apparaît en tout état de cause, au vu des pièces produites, qu'il n'est pas justifié de toutes les réponses des sites, dépôts et agences figurant dans la liste qu'il a produite, qu'aucun autre élément ne permet de vérifier au sein de l'ensemble de ces différents sites, dépôts ou agences, l'absence de postes de reclassement adapté aux capacités du salarié ; que le licenciement est dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse, faute pour l'employeur de justifier de l'impossibilité de reclassement de l'intéressé »,
1) ALORS QUE les parties peuvent en cause d'appel produire toutes les pièces nouvelles de nature à prouver les faits qu'elles ont la charge d'établir ; qu'en l'espèce le salarié dans ses conclusions d'appel s'était borné à conclure que les représentants du personnel n'avaient pas été correctement informés et que l'employeur ne produisait pas la fiche de demande de reclassement adressée à chacun de ses établissements ; que le salarié ne faisait nullement valoir que tous les établissements n'auraient pas été consultés ou que certains n'auraient pas répondu ; que ce n'est qu'à l'audience que le salarié a invoqué une absence ou une insuffisance de consultation des établissements dans le périmètre de reclassement ; qu'en réplique, l'exposante a voulu produire la liste précise, à la date du licenciement, de ses établissements susceptibles d'accueillir Monsieur X... afin de démontrer l'impossibilité de le reclasser ; qu'en refusant à la Société KP1 le droit de produire en cause d'appel une liste différente de celle produite en première instance quand celle produite n'avait donné lieu à aucune contestation avant l'audience, la Cour d'appel a violé l'article 563 du Code de procédure civile ;
2) ALORS QU'en toute hypothèse, le principe de l'oralité des débats autorise le défendeur a produire toute pièce nouvelle de nature à faire écarter un moyen ou un fait allégué, à la barre ; qu'en refusant cette autorisation, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile et l'article 6 de la Convention Européenne et de Sauvegarde des Droits de l'Homme ;
3) ALORS, en tout état de cause, QUE lorsqu'un salarié fait clairement état de son refus de déménager, l'employeur ne saurait être tenu, dans le cadre de son obligation de reclassement, d'effectuer des recherches au-delà des environs du domicile du salarié dans la mesure où de tels emplois sont insusceptibles d'être acceptés par ce dernier ; dès lors, en se bornant à relever, pour conclure à un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement que ce dernier ne justifiait pas de toutes les réponses des sites, dépôts et agences de la société KP1 sans s'expliquer sur le fait que le salarié avait, par principe, exprimé un refus total de toute mobilité géographique et donc sans rechercher si la société, justifiait, par ailleurs, de vaines tentatives de reclassement répondant aux souhaits du salarié en matière géographique, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.122-32-5 du Code du travail ;
4) ALORS, encore, QUE lorsque l'entreprise appartient à un groupe, le reclassement du salarié déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment doit être recherché non dans tout le groupe mais dans les entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent à l'employeur d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas justifier de toutes les réponses des sites, dépôts et agences de la société KP1, sans préciser en quoi les activités, l'organisation, ou le lieu d'exploitation des sites, dépôts ou agences, dont la réponse n'était pas produite aux débats leur permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L.122-32-5 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-45198
Date de la décision : 20/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 01 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 jan. 2010, pourvoi n°08-45198


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.45198
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