LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 janvier 2009), que la société Elf Aquitaine est titulaire de plusieurs brevets relatifs à un procédé, dit Stelf, d'obtention de chaleur et de froid, par un système mettant en oeuvre une réaction chimique entre solide et gaz ; que la société Paul X..., intéressée par l'application de ce procédé dans le domaine du textile, a, après avoir fait réaliser plusieurs études de faisabilité et un prototype de gilet, conclu avec la société Elf Aquitaine le 22 février 1993 un contrat de licence exclusive d'exploitation des brevets relatifs au procédé Stelf, à l'exception du brevet portant sur le réactif Impex, dont la société Elf Aquitaine était co-titulaire avec la société Le Y... Lorraine, pour lequel seule une licence d'utilisation était consentie ; qu'un avenant a été signé le 22 janvier 1998 afin d'autoriser la société Paul X... à utiliser un réactif comprenant du charbon actif ou un matériau pouvant absorber du CO2 et du graphite expansé ; que les sociétés Paul X... et Paul X... technologies ont assigné la société Elf Aquitaine et la société Elf Antar, devenue Total France, qui s'est substituée dans l'exécution du contrat à la société Elf Aquitaine, en annulation, caducité et résiliation du contrat de licence ;
Attendu que les sociétés Paul X... et Paul X... technologies font grief à l'arrêt d'avoir dit que les sociétés Elf Aquitaine et Total France avaient rempli leurs obligations contractuelles, d'avoir prononcé la résiliation sans indemnité du contrat de licence et de son avenant, et de les avoir condamnées in solidum au paiement d'une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen :
1°/ que le contrat de licence de brevet impose au breveté le respect d'une obligation de délivrance, consistant à mettre le licencié en jouissance du droit d'exploiter l'invention objet du brevet concédé ; que la licence d'utilisation d'un produit breveté, ayant par nature pour objet de permettre au licencié d'exploiter le produit breveté, oblige le titulaire du brevet à délivrer au licencié ledit produit ; qu'en l'espèce, en n'accordant à la société Paul X... technologies qu'une "licence d'utilisation" du réactif Impex et en s'en réservant la fabrication avec son co-breveté, la société Le Y... Lorraine, la société Elf Aquitaine s'est par là même engagée à assurer, de manière directe ou indirecte, l'approvisionnement de sa licenciée en Impex, sauf à priver celle-ci de son droit d'exploiter le produit breveté ; qu'en se bornant à énoncer, pour écarter tout manquement de la société Elf Aquitaine à son obligation de délivrance, que l'indisponibilité de l'Impex n'était pas imputable à faute à la société brevetée, celle-ci ne s'étant pas engagée à fournir ce réactif à la société Paul X... technologies, sans rechercher si en concédant à la société Paul X... technologies une licence d'utilisation du brevet couvrant le produit Impex, la société Elf Aquitaine n'avait pas par là même l'obligation générale de mettre matériellement ledit produit à la disposition de sa cocontractante afin que celle-ci puisse l'exploiter conformément à l'objet de la licence dont elle était bénéficiaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1719 du code civil ;
2°/ que l'obligation de délivrance, consistant à mettre matériellement le produit breveté à la disposition du licencié qui ne dispose sur celui-ci que d'un droit d'utilisation, est une obligation de résultat, dont la seule inexécution est en soi fautive ; qu'en l'espèce, la société Elf Aquitaine, en concédant la seule utilisation du réactif Impex à la société Paul X... technologies et en s'en réservant la fabrication, a contracté une obligation de résultat s'agissant de l'approvisionnement en Impex de sa cocontractante ; que cette obligation de résultat a été contractuellement assortie d'une obligation de moyens par laquelle la société Elf Aquitaine s'est engagée à faire ses meilleurs efforts pour que ce soit la société Le Y... Lorraine qui fournisse à la société Paul X... technologies les quantités d'Impex nécessaires à ses productions ; que l'échec de cette voie d'approvisionnement, même non fautif, ne dispensait nullement la société Elf Aquitaine de son obligation de délivrance de l'Impex, qu'il lui appartenait alors d'exécuter en recherchant une solution alternative à celle impliquant la société Le Y... Lorraine ; qu'en décidant cependant que la société Elf Aquitaine "justifie être intervenue conformément à son obligation de moyens en déployant ses meilleurs efforts pour obtenir des quantités nécessaires aux productions de la société
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" et qu'elle ne "peut se voir reprocher de ne plus pouvoir proposer de l'Impex", n'ayant "aucune obligation de présenter des solutions alternatives", la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1719 du code civil ;
3°/ que les conclusions d'appel de la société Paul X... technologies ne prétendaient nullement que le réactif Soldex était dénué de toute application industrielle ; qu'elles faisaient en revanche valoir qu'il était connu et admis par les parties que le Soldex était notoirement impropre à la fabrication industrielle à grande échelle, étant réservé à la phase de mise au point, notamment pour permettre la réalisation de prototypes et que c'était le produit Impex qui devait être utilisé pour le développement et l'exploitation industriels de l'application envisagée du procédé Stelf, ce qui expliquait la licence d'utilisation dont ce produit avait fait l'objet ; qu'en retenant que l'argumentation des sociétés Paul X... et les motifs des premiers juges reposeraient sur le postulat que le procédé Stelf ne pouvait recevoir une "application industrielle" qu'avec le réactif Impex et que, même si les brevets relatifs à ce produit indiquaient que les procédés antérieurs utilisant le Soldex étaient d'application industrielle difficile, "l'absence de toute application industrielle du réactif Soldex n'est pas démontrée", sans rechercher si tout en étant susceptible d'une application industrielle, le réactif Soldex était efficacement exploitable dans le cadre d'un développement industriel du procédé Stelf, la cour d'appel, qui n'a pas ainsi répondu au moyen des conclusions des sociétés Paul X... et a statué par un motif inopérant, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant retenu qu'aucun des articles du contrat de licence et de son avenant ne portait engagement de la société Elf de fournir un réactif, mais que celle-ci avait l'obligation, aux termes de l'article 2-5, de faire ses meilleurs efforts, dans le cadre de son accord avec la société Le Y... Lorraine, pour que la société Paul X... obtienne les quantités de produit "Impex" nécessaires à ses productions, à des prix raisonnables, la cour d'appel en a déduit à bon droit que la société Elf n'avait contracté, en ce qui concerne l'approvisionnement en produit "Impex", qu'une obligation de moyens, et a, par ces motifs, légalement justifié sa décision ;
Et attendu, en second lieu, que la cour d'appel, qui a relevé que le procédé Stelf était techniquement réalisable et pouvait être mis en oeuvre avec plusieurs réactifs, la société Elf ne s'étant pas engagée à fournir ceux-ci, et que le domaine d'application industrielle pour des vêtements avait été choisi par la société Paul X... qui en assumait les risques industriels, n'avait pas à répondre à des conclusions inopérantes ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Paul X... et Paul X... technologies aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer aux sociétés Elf Aquitaine et Total France la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé et signé par Mme Tric, conseiller doyen, en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils, pour les sociétés Paul X... et Paul X... technologies.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que les sociétés ELF AQUITAINE et TOTAL FRANCE avaient rempli leurs obligations contractuelles à l'égard de la société PAUL BOYE TECHNOLOGIES, et d'avoir en conséquence prononcé la résiliation sans indemnité du contrat de licence du 22 février 1993 et de son avenant du 22 janvier 1998 et condamné in solidum les sociétés exposantes à verser à leurs adversaires une somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU' « il est constant que la société ELF est titulaire d'un ensemble de brevets, déposés en France et dans divers pays étrangers, relatifs à un procédé d'obtention de chaleur et de froid par un système mettant en oeuvre une réaction chimique entre solide et gaz par l'intermédiaire du graphite naturel expansé ; que ce procédé, appelé STELF, peut être utilisé avec plusieurs réactifs, l'élément commun étant l'usage du graphite naturel expansé ; que divers brevets de perfectionnement ont été déposés dont plusieurs relatifs à un réactif spécifique dit « IMPEX » puis « IMPEX M », la société ELF n'étant que cotitulaire de ce brevet avec la société CARBONE LORRAINE ; qu'il est tout aussi constant qu'avant de signer un contrat d'option de licence puis le contrat de licence, la société
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a fait procéder à différentes études de faisabilité et qu'un prototype de gilet a été présenté dans la presse en février 1993 ; qu'un avenant à ce contrat a été signé le 22 janvier 1998 pour autoriser notamment la société
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à utiliser le procédé STELF pour un réactif alliant le couple CO2/charbon actif, objet d'un brevet déposé par cette société ; que la société
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a, ainsi, au regard des études et de la réalisation du prototype, eu connaissance des difficultés de mise au point du procédé breveté pour l'adapter à son domaine d'application ; que par l'article 2.1 du contrat de licence exclusive d'exploitation des brevets et de l'information technique, la licence est limitée à la « fabrication, l'utilisation et la vente des produits pompes à chaleur chimiques des brevets entrant dans le domaine d'application système de climatisation associé à un support textile » ; que selon l'article 4, ELF s'engageait également à « fournir par l'intermédiaire de l'expert ou de tout autre spécialiste… l'assistance technique et les conseils utiles, relevant du domaine des systèmes thermo-chimiques à la réalisation industrielle des produits » ; que selon ces dispositions, la société ELF s'est engagée, en sa qualité de titulaire des brevets et de donneur de licence à garantir la validité des brevets et leur possibilité d'exploitation technique et à donner une assistance technique ; qu'aucun des articles du contrat de licence et de son avenant ne porte engagement de la société ELF de fournir des réactifs « opérationnels » pour le domaine d'activité visé par le contrat ; qu'il n'est, par ailleurs, pas contesté que la société ELF a rempli son obligation d'assistance technique et que les brevets visés au contrat ont bien un résultat industriel ; que par le contrat de licence, le breveté s'est engagé à permettre l'exploitation de son procédé, de manière exclusive, pour l'appliquer au domaine précisé au contrat, mais ne s'est pas engagé à participer à la mise au point de l'application industrielle de son procédé, nécessaire pour les produits industriels, ni à fournir un réactif ; que le risque pris par l'industriel qui cherche à utiliser le procédé pour l'appliquer à des produits spécifiques n'est pas, sauf clause particulière, supporté par le breveté ; qu'ainsi en l'espèce, contrairement à ce que prétendent les sociétés
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, la société ELF n'a pas manqué à son obligation de délivrance ; que le tribunal ne peut davantage être suivi en ce qu'il a estimé que la société ELF n'avait pas procuré les moyens de permettre la phase de démarrage industriel ; qu'en effet, l'argumentation ainsi soutenue et les motifs des premiers juges reposent sur le postulat que le procédé STELF ne pouvait recevoir une application industrielle qu'avec le réactif intitulé IMPEX, alors que l'obligation de délivrance portait sur l'exploitation des procédés utilisant des réactifs comportant du graphite naturel expansé ; que le licencié fonde son argumentation, notamment, sur le fait que dans les brevets relatifs à l'IMPEX, il est mentionné que les précédents mélanges utilisant le graphite présentent des inconvénients (difficulté à obtenir des mélanges homogènes, manutention difficile, volume important occupé selon le brevet du 11 avril 1991, ou selon le brevet du 28 mars 1995 – IMPEX M de Y... LORRAINE, le procédé utilisant un graphite expansé de densité comprise entre 0,001 et 0,02 est difficilement applicable de manière industrielle, notamment pour des raisons de rendement) ; que toutefois un perfectionnement dans les procédés mettant en oeuvre le graphite ne supprime pas la portée inventive des précédents brevets ; qu'il n'est, d'ailleurs, pas dit que les procédés antérieurs sont dénués de tout résultat industriel, mais seulement qu'ils sont d'application industrielle difficile ; que le domaine d'application industrielle pour des vêtements a été choisi par la société PAUL X..., qui en assume, ainsi qu'il a déjà été dit, les risques industriels, même si, en définitive, elle estime ne pas pouvoir passer au stade d'une fabrication industrielle, ne disposant pas d'un réactif suffisamment adapté ou d'un réactif (en l'occurrence l'IMPEX) indisponible ; qu'il doit être en outre observé que la licence ne portait pas sur une autorisation de fabrication de l'IMPEX et qu'il avait déjà été réalisé un prototype utilisant le réactif « SOLDEX », avant la signature du contrat et que ce réactif était en 1999 et 2000 (peu avant l'assignation) fabriqué par un tiers, la société ALCALI ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que la société ELF n'avait pas d'obligation de fournir un réactif opérationnel pour le domaine d'activité choisi par la société PAUL X... et qu'au surplus, l'absence de toute application industrielle du réactif « SOLDEX » n'est pas démontrée ; qu'en conséquence, ce grief sera rejeté, la société ELF ayant rempli son obligation de délivrance de brevets dont le procédé était techniquement réalisable et n'ayant aucune obligation de fournir un réactif particulier ; qu'il ne peut de ce point de vue lui être reproché, contrairement à ce qu'ont dit les premiers juges, de ne pas avoir permis le démarrage industriel en ne fournissant aucun réactif permettant la mise au point industrielle des produits ; que les sociétés intimées ne peuvent davantage être suivies dans leur argumentation selon laquelle la société ELF, s'étant portée fort de l'exécution de l'engagement passé par un tiers de fournir l'IMPEX, est tenue d'une obligation de résultat et que cet engagement n'a pas été respecté, la société CARBONE LORRAINE ayant décidé de cesser la fabrication de ce réactif qui aurait permis l'exploitation industrielle des produits ; qu'en effet, ainsi qu'il a déjà été dit, le réactif IMPEX n'est qu'un réactif parmi d'autres susceptible d'être utilisé dans l'application industrielle du procédé de climatisation spécifique pour des vêtements de protection, qui engendraient également des difficultés liées à la nécessité d'une aération et à l'aménagement du dispositif pour permettre la ventilation ; qu'il ne ressort d'aucune des clauses du contrat de licence et de son avenant du 22 janvier 1998 que la société ELF se serait portée fort d'un engagement d'approvisionnement en IMPEX par la société CARBONE LORRAINE de la société PAUL X... et serait responsable de la non-exécution de cet approvisionnement par la société CARBONE LORRAINE ; que ce second moyen sera écarté ; que par le contrat de licence (et son avenant), la société ELF était tenue d'une obligation de moyens en application de l'article 2.5 du contrat de licence sur les conditions d'approvisionnement en IMPEX (brevet DPI 5846) fabriqué par la société CARBONE LORRAINE ; qu'elle a, aux termes de cet article, l'obligation de « faire ses meilleurs efforts, dans le cadre de son accord avec la société CARBONE LORRAINE, pour que
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obtienne les quantités nécessaires à ses productions, et à des prix raisonnables » ; que la société ELF a, au cours des réunions du « club STELF » indiqué les demandes faites par elle auprès de la société CARBONE LORRAINE ; que celle-ci a présenté plusieurs propositions de prix en fonction des quantités prévisibles, interrogeant les sociétés du club « STELF » dont la société
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sur leurs besoins futurs ; que plusieurs des sociétés n'ont plus donné suite à leur projet, de telle sorte que les quantités prévisibles se sont réduites augmentant d'autant le coût de ce réactif ; qu'il ressort également des pièces versées aux débats qu'un différend sur des sommes dues est né entre la société
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et la société CARBONE LORRAINE, ce qui a gelé leurs relations ; que ce n'est qu'en 2000 que la société
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a repris contact avec cette société qui lui a alors indiqué qu'elle ne fabriquait plus ce produit ; que la société ELF qui justifie être intervenue conformément à son obligation de moyens en déployant des meilleurs efforts pour obtenir des quantités nécessaires aux productions de la société
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à des prix raisonnables, avant la rupture des relations entre la société
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et la société CARBONE LORRAINE, ne peut se voir reprocher de ne plus pouvoir proposer « l'IMPEX », alors que la société
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avait un différend avec ce fournisseur ; qu'elle n'avait, par ailleurs, aucune obligation de présenter des solutions alternatives, étant observé qu'elle a, en 1999, donné son autorisation à la société PAUL X... de consulter la société ALCALI pour la fourniture de réactifs, prototype ou de pré-séries « nécessaires au développement du domaine d'application » et que des fournitures ont été fournies par cette société en 1999 et en 2000 (selon un rapport du 1er mars 2000) ; que ce dernier rapport met encore en évidence que le procédé STELF est exploitable industriellement ; qu'ainsi, sans qu'il soit nécessaire de se référer à l'article 5 du contrat de licence qui exclut la responsabilité de la société ELF pur tout aléa et risque liés à la réalisation industrielle, aucune faute ne peut être imputée à la société ELF dans l'exécution de ses obligations de donneur de licence ; que le jugement sera, en conséquence, infirmé de ces chefs » ;
ALORS QUE, D'UNE PART, le contrat de licence de brevet impose au breveté le respect d'une obligation de délivrance, consistant à mettre le licencié en jouissance du droit d'exploiter l'invention objet du brevet concédé ; que la licence d'utilisation d'un produit breveté, ayant par nature pour objet de permettre au licencié d'exploiter le produit breveté, oblige le titulaire du brevet à délivrer au licencié ledit produit ; qu'en l'espèce, en n'accordant à la société PAUL BOYE TECHNOLOGIES qu'une « licence d'utilisation » du réactif IMPEX et en s'en réservant la fabrication avec son co-breveté, la société LE Y... LORRAINE, la société ELF AQUITAINE s'est par là même engagée à assurer, de manière directe ou indirecte, l'approvisionnement de sa licenciée en IMPEX, sauf à priver celle-ci de son droit d'exploiter le produit breveté ; qu'en se bornant à énoncer, pour écarter tout manquement de la société ELF AQUITAINE à son obligation de délivrance, que l'indisponibilité de l'IMPEX n'était pas imputable à faute à la société brevetée, celle-ci ne s'étant pas engagée à fournir ce réactif à la société PAUL BOYE TECHNOLOGIES, sans rechercher si en concédant à la société PAUL BOYE TECHNOLOGIES une licence d'utilisation du brevet couvrant le produit IMPEX, la société ELF AQUITAINE n'avait pas par là même l'obligation générale de mettre matériellement ledit produit à la disposition de sa cocontractante afin que celle-ci puisse l'exploiter conformément à l'objet de la licence dont elle était bénéficiaire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1719 du Code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, l'obligation de délivrance, consistant à mettre matériellement le produit breveté à la disposition du licencié qui ne dispose sur celui-ci que d'un droit d'utilisation, est une obligation de résultat, dont la seule inexécution est en soi fautive ; qu'en l'espèce, la société ELF AQUITAINE, en concédant la seule utilisation du réactif IMPEX à la société PAUL BOYE TECHNOLOGIES et en s'en réservant la fabrication, a contracté une obligation de résultat s'agissant de l'approvisionnement en IMPEX de sa cocontractante ; que cette obligation de résultat a été contractuellement assortie d'une obligation de moyens par laquelle la société ELF AQUITAINE s'est engagée à faire ses meilleurs efforts pour que ce soit la société LE Y... LORRAINE qui fournisse à la société PAUL X... TECHNOLOGIE les quantités d'IMPEX nécessaires à ses productions ; que l'échec de cette voie d'approvisionnement, même non fautif, ne dispensait nullement la société ELF AQUITAINE de son obligation de délivrance de l'IMPEX, qu'il lui appartenait alors d'exécuter en recherchant une solution alternative à celle impliquant la société LE Y... LORRAINE ; qu'en décidant cependant que la société ELF AQUITAINE « justifie être intervenue conformément à son obligation de moyens en déployant ses meilleurs efforts pour obtenir des quantités nécessaires aux productions de la société
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» et qu'elle ne « peut se voir reprocher de ne plus pouvoir proposer de l'IMPEX », n'ayant « aucune obligation de présenter des solutions alternatives », la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1719 du Code civil ;
ALORS QU'ENFIN, les conclusions d'appel de la société PAUL BOYE TECHNOLOGIES ne prétendaient nullement que le réactif SOLDEX était dénué de toute application industrielle ; qu'elles faisaient en revanche valoir qu'il était connu et admis par les parties que le SOLDEX était notoirement impropre à la fabrication industrielle à grande échelle, étant réservé à la phase de mise au point, notamment pour permettre la réalisation de prototypes et que c'était le produit IMPEX qui devait être utilisé pour le développement et l'exploitation industriels de l'application envisagée du procédé STELF, ce qui expliquait la licence d'utilisation dont ce produit avait fait l'objet ; qu'en retenant que l'argumentation des sociétés PAUL X... et les motifs des premiers juges reposeraient sur le postulat que le procédé STELF ne pouvait recevoir une « application industrielle » qu'avec le réactif IMPEX et que, même si les brevets relatifs à ce produit indiquaient que les procédés antérieurs utilisant le SOLDEX étaient d'application industrielle difficile, « l'absence de toute application industrielle du réactif SOLDEX n'est pas démontrée », sans rechercher si tout en étant susceptible d'une application industrielle, le réactif SOLDEX était efficacement exploitable dans le cadre d'un développement industriel du procédé STELF, la Cour d'appel, qui n'a pas ainsi répondu au moyen des conclusions des sociétés PAUL X... et a statué par un motif inopérant, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.