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14/01/2010 | FRANCE | N°08-18939;09-65388

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 janvier 2010, 08-18939 et suivant


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° B 08-18. 939 et n° K 09-65. 388 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme Y..., assuré par la société Mutuelle et Prévoyance, devenue société Areas assurances (l'assureur) ; qu'il les a assignées en réparation de son préjudice, ainsi que M. Y..., en présence de la caisse primaire d'assurance maladie des Landes et de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy

de Dôme ;

Sur le pourvoi en tant que dirigé contre l'arrêt du 26 avril 2007 :...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° B 08-18. 939 et n° K 09-65. 388 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme Y..., assuré par la société Mutuelle et Prévoyance, devenue société Areas assurances (l'assureur) ; qu'il les a assignées en réparation de son préjudice, ainsi que M. Y..., en présence de la caisse primaire d'assurance maladie des Landes et de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy de Dôme ;

Sur le pourvoi en tant que dirigé contre l'arrêt du 26 avril 2007 :

Vu l'article 978 du code de procédure civile ;

Attendu que la société Areas, M. et Mme Y... se sont pourvus contre l'arrêt du 26 avril 2007 mais que leur mémoire ne contient aucun moyen à l'encontre de cette décision ;

D'où il suit qu'il y a lieu de constater la déchéance partielle du pourvoi ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° K 09-65. 388, pris en ses première et deuxième branches :

Vu les articles 461 et 455 du code de procédure civile ;

Attendu que les juges, saisis d'une contestation quant à l'interprétation d'une précédente décision, ne peuvent, sous le prétexte d'en déterminer le sens, modifier les droits et obligations des parties ;

Attendu que, pour dire, en interprétation de l'arrêt du 14 avril 2008, que l'offre faite en octobre 2000 était incomplète, et, en conséquence, faire courir les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur la somme de 128 666, 66 euros jusqu'à la date de cette décision, l'arrêt attaqué se borne à déclarer recevable la requête en interprétation, à rappeler qu'un tiers de responsabilité a été laissé à la charge de la victime, et à indiquer que l'offre faite en octobre 2000 était incomplète ;

Qu'en statuant ainsi, sans préciser en quoi l'offre était incomplète, et alors que dans le dispositif de son arrêt du 14 avril 2008 elle fixait à 193 000 euros la somme sur laquelle devaient être calculés les intérêts au double du taux de l'intérêt légal, la cour d'appel, procédant à une nouvelle appréciation des éléments de la cause, a violé le premier de ces textes et méconnu les exigences du second ;

Et, sur le moyen unique du pourvoi n° B 08-18. 939 :

Vu les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances, dans leur rédaction alors applicable ;

Attendu qu'en application du premier de ces textes l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu, dans un délai maximum de huit mois à compter de l'accident, de présenter une offre d'indemnité à la victime qui a subi une atteinte à la personne ; qu'en application du second, lorsque l'offre n'a pas été faite dans ce délai, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ;

Attendu que, pour condamner l'assureur au paiement des intérêts au double du taux de l'intérêt légal, sur la somme allouée à M. X... et à compter du 6 avril 1995, l'arrêt énonce que l'assureur invoque avoir versé cinq provisions au total, qu'une offre indemnitaire doit être précise, ferme et complète, et que les propositions de l'assureur ne présentent aucune de ces caractéristiques, l'accident étant du 5 août 1994 et les offres de provisions ne constituant pas des offres indemnitaires ;

Qu'en se déterminant ainsi, tout en constatant qu'une première offre avait été faite le 16 octobre 2000, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen du pourvoi n° K 09-65. 388 :

CONSTATE la déchéance partielle du pourvoi en tant que dirigé contre l'arrêt du 26 avril 2007 ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 décembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe la CMA Areas à payer à M. X... les intérêts au double de l'intérêt légal sur la somme de 193 000 euros à compter du 6 avril 1995, l'arrêt rendu le 14 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. X... aux dépens

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes présentées de ce chef ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassé et partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi n° B 08-18. 939 par Me Le Prado, avocat de la société Areas assurances et de M. et Mme Y...,

Le moyen fait grief à l'arrêt :

D'AVOIR fixé le préjudice de M. X... à la somme de 193. 000 €, avec intérêts au double de l'intérêt légal à compter du 6 avril 1995 et d'avoir condamné solidairement M. Y..., Madame Y... et la compagnie d'assurance AREAS ASSURANCES-CMA à payer les 2 / 3 de cette somme sous déduction du montant des provisions déjà versées (30. 489, 80 €) ;

AUX MOTIFS QUE « sur la majoration des intérêts : M. X... avait formulé devant le Tribunal une demande afin que les indemnités qui lui sont allouées soit majorées des intérêts par application des dispositions des articles L. 211-13 du Code des assurances ; que le premier juge n'a pas fait droit à cette demande estimant que des propositions indemnitaires ont été formulées dès le mois de juillet 1995 ; que la CMA-AREAS dans ses conclusions devant la Cour mentionne qu'elle a versé à M. X... cinq provisions au total, le préjudice ne pouvant être examiné à ce moment là qu'en version provisionnelle, puisque la consolidation n'était pas acquise ; que cependant, il sera rappelé que l'offre indemnitaire doit être faite dans le délai de huit mois sans tenir compte de la date de la consolidation ; qu'enfin l'offre doit être précise ferme et complète, elle doit comprendre tous les éléments indemnisables, évaluer chaque préjudice et comprendre les créances de tous les tiers payeurs ; qu.. en l'espèce, les propositions de la compagnie adverse ne présentent aucune de ces caractéristiques : l'accident est du 5 août 1994 et les offres de provisions ne constituent pas des offres indemnitaires : comme l'indique la compagnie d'assurances, la première offre est du 16 octobre 2000 soit pratiquement six ans après l'accident : la compagnie sera donc condamnée aux intérêts au double de l'intérêt légal à compter du 6 avril 1995 (huit mois écoulés depuis l'accident) » ;

ALORS QUE, D'UNE PART, lorsque l'offre de l'assureur n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L211-9 du Code des assurances, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ; qu'ainsi lorsque l'assureur fait une offre tardive, cette offre arrête le cours des intérêts au taux doublé ; qu'en l'espèce la Cour d'appel a constaté que la société AREAS ASSURANCES avait fait une offre le 16 octobre 2000 ; qu'en prononçant le doublement des intérêts à compter du 6 avril 1995 sans limiter l'application de cette sanction au 16 octobre 2000, la Cour d'appel a violé l'article L211-13 du Code des assurances ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L211-9 du Code des assurance, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légale à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ; qu'ainsi lorsque l'assureur fait une offre tardive, le montant de cette offre constitue l'assiette de la pénalité de majoration des intérêts ; qu'en l'espèce la Cour d'appel a constaté que la société AREAS ASSURANCES avait fait une offre le 16 octobre 2000 ; qu'en prononçant le doublement des intérêts sur la somme totale qu'elle allouait à Monsieur X..., à savoir 193. 000 euros, au lieu de limiter la sanction du doublement des intérêts au montant offert par la société AREAS ASSURANCES dans son offre du 16 octobre 2000, la Cour d'appel a violé l'article L211-13 du Code des assurances. Moyen produit au pourvoi n° K 09-65. 388 par Me Le Prado, avocat de la société Areas assurances et des consorts Y...,

Le moyen fait grief à l'arrêt :

D'AVOIR jugé, en interprétation de l'arrêt du 14 avril 2008, que l'offre faite en octobre 2000 est incomplète et qu'en conséquence les intérêts doubles courent du 6 avril jusqu'à la date du présent arrêt sur cette somme de 128. 666, 66 € ;

AUX MOTIFS QUE « Concernant la majoration des intérêts, il est écrit en pages 8 et de l'arrêt : « cependant, il sera rappelé que l'offre indemnitaire doit être faite dans le délai de huit mois sans tenir compte de la date de la consolidation ; enfin, l'offre doit être précise ferme et complète, elle doit comprendre tous les éléments indemnisables, évaluer chaque préjudice et comprendre les créances de tous les tiers payeurs. En l'espèce, les propositions de la compagnie adverse ne présentent aucune de ces caractéristiques : l'accident est du 5 août 1994 et les offres de provisions ne constituent pas des offres indemnitaires. » ; que la précision de la durée totale pour le cours des intérêts doubles est la conséquence directe de cette motivation mais, n'étant pas reprise de façon explicite dans le dispositif, la requête en interprétation sera déclarée recevable ; Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la Cour indique, en interprétation de son arrêt rendu le 14 avril 2008 :- fixe le préjudice de M. X... à la somme de 193. 000 € et condamne solidairement M. Francis Y..., Madame Karine Y... et la compagnie d'assurances AREAS ASSURANCES-CMA à payer les deux tiers de cette somme à M. X..., soit la somme de 128. 666, 66 €, sous déduction du montant des provisions déjà versées (30. 489, 80 €) ;- l'offre faite en octobre 2000 est incomplète et en conséquence les intérêts doubles courent du 6 avril 1995 jusqu'à la date du présent arrêt sur cette somme de 128. 666, 66 € (2 / 3 de 193. 000 €) » ;

ALORS QUE, D'UNE PART, les juges du fond, ne peuvent sous couvert d'interprétation ou de rectification, modifier les droits et obligations des parties tels qu'ils résultent de la décision rectifiée ou interprétée et se livrer à une nouvelle appréciation des éléments de la cause ; que la Cour d'appel, reprenant les motifs de l'arrêt interprété du 14 avril 2008, a omis qu'elle statuait sur une demande en réformation du jugement qui avait retenu que dès juillet 1995 des propositions de transaction ont été faites et des provisions versées et qu'après avoir jugé, en référence à ces propositions, que « les offres de provisions ne constituent pas des offres indemnitaires », elle avait ajouté que « la première offre est du 16 octobre 2000 soit pratiquement six ans après l'accident » ; qu'ainsi, la Cour d'appel, dans son arrêt du 14 avril 2008, a jugé que la compagnie d'assurance avait fait une offre le 16 octobre 2000 ; qu'en jugeant, sous couvert d'interprétation, que cette offre était incomplète, la Cour d'appel s'est livrée à une nouvelle appréciation des éléments de la cause et a ainsi violé les articles 461 et 462 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, en tout état de cause, les juges du fond ne peuvent statuer par un moyen relevé d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations ; que si les parties se sont opposées sur la qualification des propositions indemnitaires formulées dès le mois de juillet 1995, Monsieur X... lui-même a admis que « la première offre est du 16 octobre 2000 » (conclusions du 12 / 11 / 2007 p. 13 dernier §) et n'a jamais fait valoir que cette offre aurait été incomplète ; qu'en jugeant que cette offre était incomplète pour retenir que les intérêts doubles courent du 6 avril 1995 jusqu'à l'arrêt du 14 avril 2008, la Cour d'appel a violé les articles 4 et 16 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, ENSUITE, en tout état de cause, les juges sont tenus de motiver leur décision ; que l'arrêt n'énonce aucun motif pour retenir que l'offre faite en octobre 2000 aurait été incomplète ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, EN OUTRE, en tout état de cause, l'offre du 16 octobre 2000 est rédigée en ces termes : « Je fais suite au dépôt du rapport d'expertise médicale contradictoire des Docteurs Z...-A...et B.... Au vu de ce rapport et des éléments en ma possession, je suis disposé à vous faire l'offre suivante :

I-POSTES DE PREJUDICE SOUMIS AU RECOURS DES ORGANISMES SOCIAUX
-Frais médicaux et pharmaceutiques (créance provisoire) 1. 203. 244, 10 FF
+ IJ. de la CPAM :
- I. T. T. 32 mois X 1. 245, 94 F 39 : 870 F
-Gêne de la vie courante 32 mois X 2. 500 F : 80. 000, 00 F
-I. P. P. 16 % X 10. 000 F : 160. 000, 00 F
(y compris l'incidence professionnelle)
Total : 1. 483. 114, 10 F
dont 2 / 3 à notre charge : 988. 742, 72 F
à déduire créance de la CPAM : 1. 203. 244, 10 F
II-POSTES DE PRETUDICE PERSONNEL
Souffrances endurées 6 / 7 : 100. 000, 00 F
Préjudice Esthétique 5 / 7 : 100. 000, 00 F
Total : 200. 000, 00 F
dont 2 / 3 à notre charge : 133. 333, 00 F
à déduire provisions : 70. 000, 00 F
Solde : 63. 333, 00 F
arrondi à 64. 000, 00 F
Je rappelle que la provision de 5. 000 F. du 20 Janvier 1995 concernait les frais de Madame X... consécutifs à votre première hospitalisation à BORDEAUX. Ceux-ci ne rentrent donc pas en ligne de compte pour l'évaluation de votre propre préjudice.

Je reste dans l'attente de votre accord ou de vos observations sur cette offre d'indemnité » ; que cette offre est précise, ferme et complète, comprenant tous les éléments indemnisables et évaluant chaque préjudice et comprenant les créances de tous les tiers payeurs ; qu'en jugeant que cette offre était incomplète, la Cour d'appel l'a dénaturée et a violé l'article 1134 du Code civil ;

ALORS QUE ENFIN, et en tout état de cause, la cassation de l'arrêt du 14 avril 2008 entraînera la cassation par voie de conséquence de l'arrêt du 4 décembre 2008 en application de l'article 625 alinéa 2 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-18939;09-65388
Date de la décision : 14/01/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 04 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 jan. 2010, pourvoi n°08-18939;09-65388


Composition du Tribunal
Président : M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blanc, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.18939
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