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13/01/2010 | FRANCE | N°08-44129

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 janvier 2010, 08-44129


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 27 septembre 2007), que Mme X... a été engagée le 1er novembre 1999 en qualité de responsable du café-restaurant Havana café ; qu'elle a acquis une part du capital social et est devenue associée minoritaire ; qu'elle a été licenciée le 21 août 2003 pour faute lourde pour avoir obtenu du président du tribunal mixte de commerce, à qui elle avait volontairement caché le maintien du gérant de la société dans ses fonctions, la dÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 27 septembre 2007), que Mme X... a été engagée le 1er novembre 1999 en qualité de responsable du café-restaurant Havana café ; qu'elle a acquis une part du capital social et est devenue associée minoritaire ; qu'elle a été licenciée le 21 août 2003 pour faute lourde pour avoir obtenu du président du tribunal mixte de commerce, à qui elle avait volontairement caché le maintien du gérant de la société dans ses fonctions, la désignation d'un mandataire ad hoc, qui était un de ses amis, ainsi que d'elle-même pour assurer la gestion courante de la société ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire le licenciement justifié par une faute grave, alors, selon le moyen :

1°/ qu'un fait relevant de la vie privée ne peut constituer une faute professionnelle ; que pour retenir une faute grave à l'encontre de Mme X..., engagée en qualité de responsable du restaurant exploité par la société Havana café, la cour d'appel a énoncé que la salariée avait saisi le juge commercial pour obtenir, par des mensonges, la nomination d'un mandataire ad'hoc en remplacement du gérant, ce qui manifestait son intention de dénier le lien de subordination existant entre elle et le gérant et de s'affranchir de l'autorité de ce dernier ; qu'en statuant ainsi quand le fait pour Mme X..., associée minoritaire de la société Havana café, de saisir en référé le tribunal de commerce en vue de la nomination d'un administrateur ad'hoc après avoir découvert que le gérant avait convoqué sans la prévenir, une assemblée générale aux fins de cession du fonds de commerce, relevait de la vie personnelle de l'intéressée et non du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles 9 du code civil et L. 1331-1 du code du travail ;

2°/ que le licenciement ne peut être fondé sur un fait commis postérieurement ; qu'en décidant que les termes de la télécopie adressée à l'employeur le 26 août 2003 confirmaient le peu de considération que Mme X... avait pour son employeur et ses directives et constituaient une faute grave, quand elle relevait que l'intéressée avait été licenciée le 21 août 2003, la cour d'appel s'est fondée sur un fait postérieur au licenciement et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-3 du code du travail ;

3°/ que (subsidiairement) dans ses conclusions d'appel, Mme X... faisait valoir qu'après l'avoir licenciée une première fois sans motif puis réintégrée, l'employeur qui vivait en métropole lui avait laissé la charge du restaurant sans lui donner les moyens de son fonctionnement, puis l'avait convoquée à un entretien préalable en présence d'un huissier et de membres du personnel pendant son arrêt maladie ; qu'en retenant l'existence d'une faute grave sans rechercher si le comportement de l'employeur pendant l'exécution du contrat de travail n'était pas à l'origine du manque de considération reproché à la salariée après son licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-3 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que la salariée avait sciemment menti au juge du tribunal mixte de commerce pour obtenir la désignation d'une part, d'un mandataire ad hoc en la personne d'un de ses amis et, d'autre part, d'elle-même pour "assurer la gestion courante de la société", a pu décider que les faits commis par l'intéressée et qui étaient en rapport avec son travail empêchaient son maintien dans l'entreprise et caractérisaient une faute grave ; qu'ainsi, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche, l'arrêt, qui n'a pas violé les textes visés par le moyen, est légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme X...

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Mademoiselle Sophie X... justifié par une faute grave et d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes dirigées contre la Sarl Havana Café ;

AUX MOTIFS QUE la Sarl Havana Café, qui exploite un fonds de commerce de café-restaurant à la « Pointe du bout » sur la commune des Trois Ilets, embauchait le 1er novembre 1999 Sophie X... en qualité de « responsable », sans détermination de durée ; que Sophie X... était licenciée le 10 septembre 2001 ; qu'à la suite d'une transaction, elle était réintégrée à son poste aux conditions antérieures, « avec prise d'effet au 1er octobre 2002 » ; que le 1er août 2003, elle se voyait remettre par un huissier de justice une convocation à un entretien préalable à « une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement » lui notifiant en outre sa mise à pied à titre conservatoire ; qu'elle était effectivement licenciée par lettre recommandée avec avis de réception du 21 août 2003 rédigée en ces termes : « Les faits de ces dernières semaines nous ont conduit à déposer plainte pénale contre vous et aujourd'hui à vous licencier pour faute lourde, pour les motifs cumulés suivants : En effet, vos agissements volontaires ont pris ces dernières semaines des tournures parfaitement préjudiciables à la société. Vous avez pris la décision d'attenter une procédure à l'encontre de la société. C'est parfaitement votre droit. En revanche, votre attitude consistant à cacher volontairement la signification de l'assignation, par l'intermédiaire d'une amie salariée, qui a, sur vos consignes, accepté de recevoir cet acte sans le communiquer au dirigeant en place, est constitutive d'une faute lourde. Le 31 juillet 2003, vous avez pris l'initiative de fermer le restaurant et de renvoyer chez eux les salariés sans aucun motif. Plus grave, vous avez changé les serrures de la réserve empêchant l'exploitation. Le lendemain, vous avez à nouveau renvoyé le cuisinier chez lui. Le samedi 2 août 2003, en présence des salariés et d'un huissier, vous avez proféré des menaces très graves vis-à-vis de tous les salariés au point que plusieurs ont envoyé un courrier pour annoncer qu'ils refusaient de travailler dans un tel contexte de menaces physiques. Vous avez insulté Monsieur Y... et une de vos collégues. Ces personnes ont déposé plainte pénale contre vous ; compte tenu des menaces personnelles que vous avez proférées à leur encontre et à celle de leurs proches. Celui-ci a noté lors de cette intervention que du matériel manquait (appareils vidéo etc…). Ces appareils étaient présents jusqu'au jour de l'ordonnance ayant nommé votre ami personnel administrateur judiciaire. L'huissier a également noté que le montant de la caisse n'était pas normal par rapport à l'activité des derniers jours. Vous invoquez votre arrêt maladie pour ne pas vous rendre à un entretien préalable et le samedi 2 août, c'est bien en dehors de vos heures de sortie qu'a eu lieu le scandale sur le site de l'exploitation. Votre attitude volontaire a un seul but : nuire à l'entreprise. Les conséquences immédiates de votre comportement rendent impossible la poursuite de votre activité au service de l'entreprise même pendant un préavis et justifie votre licenciement pour faute lourde. (…) » (cf. arrêt p.2 et p.3 § 1 à 4) ; qu'aussi surprenant que cela puisse paraître, la Sarl Havana Café s'abstient de verser aux débats le « procès-verbal huissier » visé dans le dispositif de ses conclusions, sans autre précision de date ni de contenu ; qu'aucun autre élément probant ne venant corroborer les griefs de l'employeur sur le comportement de Sophie X... les jeudi 31 juillet et samedi 2 août 2003, les allégations contenues dans la lettre de licenciement sur ces points ne peuvent être prises en considération ; que par contre, il résulte des pièces du dossier et des débats, notamment des ordonnances rendues les 3 juillet et 31 juillet 2003 par le président du tribunal mixte de commerce de Fort-de-France que Sophie X..., associé minoritaire de la Sarl Havana Café, a sciemment menti à ce juge en lui cachant le maintien de Monsieur Z..., démissionnaire, dans ses fonctions de gérant de la Sarl, pour obtenir par simple requête la désignation
- d'une part d'un mandataire ad hoc en la personne d'un de ses amis ;
- et d'autre part d'elle-même pour « assurer la gestion courante de la société » ;
que si rien ne permet à la cour de s'immiscer dans la gestion de la société pour dire que cette démarche traduisait une volonté de nuire à celle-ci, ce qui exclut qu'elle retienne la faute lourde, cette démarche manifeste sans contestation possible l'intention de la salariée de dénier le lien de subordination existant entre elle et le gérant de la société et de s'affranchir de l'autorité de ce dernier ; que les termes de la télécopie qu'elle lui adressait le 26 août 2003, le qualifiant de « petit escroc qui toute sa vie durant a trompé, volé et menti à plus d'une personne. (…) Je n'ai vraiment aucun respect pour les gens de votre espèce et l'addition est souvent douloureuse », bien que postérieur à la rupture, confirme bien le peu de considération qu'elle avait pour son employeur et ses directives ; que cette attitude caractérise une faute grave qui rendait impossible le maintien du contrat de travail ; que la faute grave étant privative de préavis, la demande présentée à ce titre doit être rejetée ; que le licenciement étant justifié, les demandes en dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par la rupture doivent également être rejetées ;

1°) ALORS QU 'un fait relevant de la vie privée ne peut constituer une faute professionnelle ; que pour retenir une faute grave à l'encontre de Mademoiselle X..., engagée en qualité de responsable du restaurant exploité par la Sarl Havana Café, la cour d'appel a énoncé que la salariée avait saisi le juge commercial pour obtenir, par des mensonges, la nomination d'un mandataire ad'hoc en remplacement du gérant, ce qui manifestait son intention de dénier le lien de subordination existant entre elle et le gérant et de s'affranchir de l'autorité de ce dernier ; qu'en statuant ainsi quand le fait pour Mademoiselle X..., associée minoritaire de la Sarl Havana Café, de saisir en référé le tribunal de commerce en vue de la nomination d'un administrateur ad'hoc après avoir découvert que le gérant avait convoqué sans la prévenir, une assemblée générale aux fins de cession du fonds de commerce, relevait de la vie personnelle de l'intéressée et non du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles 9 du code civil et L. 1331-1 du code du travail ;

2°) ALORS QUE le licenciement ne peut être fondé sur un fait commis postérieurement ; qu'en décidant que les termes de la télécopie adressée à l'employeur le 26 août 2003 confirmaient le peu de considération que Mademoiselle X... avait pour son employeur et ses directives et constituaient une faute grave, quand elle relevait que l'intéressée avait été licenciée le 21 août 2003, la cour d'appel s'est fondée sur un fait postérieur au licenciement et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-3 du code du travail ;

3°) ALORS QUE (subsidiairement) dans ses conclusions d'appel, Mademoiselle X... faisait valoir qu'après l'avoir licenciée une première fois sans motif puis réintégrée, l'employeur qui vivait en métropole lui avait laissé la charge du restaurant sans lui donner les moyens de son fonctionnement, puis l'avait convoquée à un entretien préalable en présence d'un huissier et de membres du personnel pendant son arrêt maladie ; qu'en retenant l'existence d'une faute grave sans rechercher si le comportement de l'employeur pendant l'exécution du contrat de travail n'était pas à l'origine du manque de considération reproché à la salariée après son licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44129
Date de la décision : 13/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 27 septembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jan. 2010, pourvoi n°08-44129


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44129
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