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12/01/2010 | FRANCE | N°08-45346

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 janvier 2010, 08-45346


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 octobre 2008), que M. X..., engagé par la société Castorama France (la société) à compter du 4 janvier 2001 en qualité de directeur de gestion et de logistique, a été licencié pour faute grave le 15 octobre 2003 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'irrecevabilité de l'appel formé le 18 avril 2006 par une société du groupe Castorama, qui n'était pas partie en première instance, alor

s, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte de l'article 122 du code de procédure civile q...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 octobre 2008), que M. X..., engagé par la société Castorama France (la société) à compter du 4 janvier 2001 en qualité de directeur de gestion et de logistique, a été licencié pour faute grave le 15 octobre 2003 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'irrecevabilité de l'appel formé le 18 avril 2006 par une société du groupe Castorama, qui n'était pas partie en première instance, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte de l'article 122 du code de procédure civile que le défaut de qualité de l'appelant constitue une fin de non-recevoir affectant la validité même de l'acte d'appel qui ne peut dès lors produire aucun effet ; qu'en validant l'appel formé par une entité du groupe qui n'avait pas la qualité de partie en première instance et qui ne venait pas aux droits de cette dernière, la cour n'a pu déclarer l'appel recevable sans violer le texte susvisé ;

2°/ qu'aucune régularisation n'est permise une fois le délai d'appel expiré quand la déclaration d'appel a été formalisée par une entité n'ayant pas la qualité de partie au procès, ce qui constitue une irrégularité d'ordre public dont la régularisation est impossible en cours de procédure ; qu'en admettant la possibilité de régulariser en cours d'instance le défaut de qualité de l'appelant, la cour a derechef violé les articles 122 et 124 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a relevé que, dans l'acte d'appel, la société Castorama France avait mentionné son siège social et son établissement secondaire de Nanterre, l'indication erronée du numéro d''immatriculation ne constituant qu'une erreur matérielle, a pu décider que l'appel, ayant été formé par la société, qui avait été partie en première instance et qui avait qualité pour agir, était recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'aux termes de l'article L. 122-2-8 du code du travail (art. L. 1234-1), la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits qui constitue une violation du contrat de travail ou de la relation de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que dans les circonstances exceptionnelles de la cause et en l'absence du directeur du magasin, le fait pour le cadre requérant, responsable de la gestion et de la logistique, d'avoir conduit la procédure permettant la recherche des téléphones portables disparus en respectant l'intimité des vestiaires des salariés et en agissant avec prudence afin d'éviter une dénonciation calomnieuse à l'encontre d'un salarié, constituait un comportement normalement prudent exclusif de toute faute grave ; qu'en décidant le contraire à la faveur de motifs inopérants, la cour a violé le texte précité ;

2°/ que le cadre était normalement fondé à se fier aux investigations de la police sans qu'il soit rétrospectivement permis à l'employeur de prétendre mettre à sa charge une obligation particulière de délation et de veiller lui-même à la qualité des investigations de l'officier de police judiciaire dans l'exercice de ses prérogatives, d'autant qu'en l'espèce, la suspicion de détention de stupéfiants, que la police n'ignorait pas, ne s'était pas vérifiée à l'issue de la fouille ; qu'ainsi, la prétendue faute grave du requérant a été déduite de motifs erronés tendant à imposer au requérant des obligations non justifiées par sa tâche ni proportionnées au but recherché et de nature à porter atteinte à sa conscience ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour a derechef violé les dispositions de l'article L. 122-2-8 du code du travail, ensemble les dispositions de l'article L. 120-2 du même code ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a relevé que M. X..., qui exerçait temporairement les fonctions de directeur de magasin, avait, en usant de son pouvoir hiérarchique, permis à un salarié, qui s'était opposé à la fouille de son vestiaire au motif qu'il détenait des produits illicites, d'échapper à toute sanction, a pu décider que son maintien dans l'entreprise était impossible et que ses manquements à ses obligations constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à la cour d'avoir rejeté l'exception d'irrecevabilité de l'appel formé le 18 avril 2006 par une société du groupe Castorama qui n'était pas partie en première instance ;

aux motifs qu'au cours de la procédure de première instance et selon convention en date du 18 octobre 2004, la société Castorama France (immatriculée au RCS sous le n° 378 175 822) a fait apport partiel, par la procédure des scissions, à la société CF2 de sa branche d'activité complète et autonome représentée par l'exploitation des magasins sous l'enseigne Castorama (l'activité immobilière étant de son côté transférée à la société CF1) étant précisé que la société CF2, dont le capital est détenu à 100 % par la société Castorama France, a été constituée et immatriculée au RCS de Lille sous le n° 451 678 973 dans le seul but de recevoir cet apport partiel d'activité ; que postérieurement à cet apport partiel d'actif, la société Castorama France, toujours immatriculée au RCS de Lille sous le n° 378 175 822 est devenue la société Castorama Holding ayant son siège social Zone Industrielle à Templemars (59) et la société CF2, immatriculée au RCS de Lille sous le n° 451 678 973 a pris la dénomination sociale de société Castorama France en fixant son siège social Zone Industrielle à Templemars (59) avec pour établissement secondaire le magasin exploité 61 avenue Joliot Curie Centre Commercial de l'Hôtel de Ville à Nanterre ;

Que Philippe X... ne peut invoquer l'irrecevabilité de l'appel relevé par la société Castorama France au seul motif que dans l'acte d'appel cette société a fait figurer le numéro d'immatriculation au RCS 378 175 822 qui correspond désormais au numéro d'immatriculation de la société Castorama Holding, dès lors qu'il est clairement démontré que c'est bien la société Castorama France exploitante des magasins à l'enseigne Castorama : qui a comparu en première instance en qualité d'employeur de Philippe X... (en déposant le 9 mars 2005 des conclusions en défense) sans contestation de sa qualité pour agir, qui a payé le montant des condamnations assorties du bénéfice de l'exécution provisoire, qui a mentionné dans l'acte d'appel son siège social et son établissement secondaire de Nanterre où Philippe X... a travaillé, qui a conclu devant la cour à l'audience du 11 septembre 2008 ;

qu'il convient donc de rejeter l'exception d'irrecevabilité, l'erreur matérielle affectant le numéro d'immatriculation au registre du commerce, rectifié avant la clôture des débats, ne privant pas la société Castorama France de sa qualité pour relever appel de la décision rendue par le conseil de prud'hommes de Nanterre ;

1°) alors que, d'une part, il résulte de l'article 122 du code de procédure civile que le défaut de qualité de l'appelant constitue une fin de non-recevoir affectant la validité même de l'acte d'appel qui ne peut dès lors produire aucun effet ; qu'en validant l'appel formé par une entité du groupe qui n'avait pas la qualité de partie en première instance et qui ne venait pas aux droits de cette dernière, la cour n'a pu déclarer l'appel recevable sans violer le texte susvisé ;

2°) alors que, d'autre part, aucune régularisation n'est permise une fois le délai d'appel expiré quand la déclaration d'appel a été formalisée par une entité n'ayant pas la qualité de partie au procès, ce qui constitue une irrégularité d'ordre public dont la régularisation est impossible en cours de procédure ; qu'en admettant la possibilité de régulariser en cours d'instance le défaut de qualité de l'appelant, la cour a derechef violé les articles 122 et 124 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir retenu l'existence d'une faute grave reprochable au salarié qui a, en conséquence, été débouté de l'ensemble de ses demandes ;

aux motifs que selon l'article L 1232-6, alinéas 1 et 2 du code du travail (anciens articles L 122-14-1, alinéa 1 et L 122-14-2, alinéa 1) que « lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception ; cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur » ; que selon l'article L 1232-1 du même code (ancien article L 122-14-3, alinéa 1 phrase 1) que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu'ainsi les faits invoqués et les griefs articulés à l'encontre du salarié doivent être exacts et établis et suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ; qu'enfin, selon l'article L 1235-1 (ancien article L 122-14-3, alinéa 1 phrase 1 et alinéa 2) « qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que si un doute subsiste, il profite au salarié » ; que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir de la faute grave de l'autre partie d'en rapporter seul la preuve et de démontrer qu'il a contraint le salarié à quitter son emploi dès la constatation de la faute ; qu'au cas présent, la société Castorama France a notifié à Philippe X... son licenciement pour faute grave en lui reprochant, aux termes de la lettre de licenciement reproduite intégralement dans l'exposé du litige, d'avoir manqué à ses obligations en sa qualité de directeur du magasin : en n'informant pas la police de la présence de drogue dans les vestiaires du magasin alors que cette information avait été portée à sa connaissance par le détenteur de la drogue, en interdisant aux représentants du personnel de faire état eux-mêmes de cette information devant les policiers, en ayant omis d'informer la direction régionale face à l'inertie de son supérieur hiérarchique informé de la situation ;

qu'il résulte du courrier transmis par Philippe X... le 30 septembre 2003 à l'inspection du travail et du compte-rendu de l'entretien préalable tenu le 10 octobre 2003 que ce salarié a été informé, au cours de l'enquête qu'il a diligentée à la suite de la plainte de deux salariés de l'entreprise pour vol de leurs téléphones portables, par Salim Z... de la détention dans son vestiaire d'une certaine quantité de drogue, motif de son refus opposé quelque temps auparavant à l'ouverture de son casier en présence des représentants du personnel ; qu'il résulte de l'attestation établie par David A..., délégué du personnel, que Philippe X... lui a expressément demandé de ne pas informer la police de la présence de drogue dans le vestiaire attribué à Salim Z... ; qu'en l'état de l'information qui lui avait été donnée personnellement et sans aucune réserve, Philippe X..., qui faisait fonction de directeur du magasin en l'absence de ce dernier en congés, ne pouvait se contenter de laisser les officiers de police judiciaire effectuer une fouille sommaire du casier de Salim Z... à la seule recherche des téléphones portables dérobés sans intervenir pour orienter les recherches vers la découverte de la drogue dont la présence était connue de tous les salariés présents et des représentants du personnel et sans procéder immédiatement à l'engagement d'une procédure disciplinaire à l'encontre de ce salarié qui a pu ainsi facilement faire sortir le sac contenant les stupéfiants grâce à la complicité d'Hichame B... dès le départ de la police puis refuser de démissionner de ses fonctions contrairement à son engagement en invoquant l'absence de toute découverte des produits interdits ; que l'attitude ainsi adoptée par Philippe X... constitue une faute grave justifiant l'engagement immédiat de poursuites disciplinaires après enquête effectuée par la direction régionale sur dénonciation de représentants du personnel puis la rupture du contrat de travail sans indemnités ; que la mise à pied à titre conservatoire de Philippe X... le jour même de son audition en présence des dirigeants de l'entreprise ne revêt pas de caractère abusif même si ce salarié a été prié immédiatement de quitter le magasin, aucune mesure vexatoire prise en présence des autres salariés n'ayant d'ailleurs été invoquée lors de la narration des faits auprès de l'inspection du travail le lendemain de l'engagement de la procédure disciplinaire ; qu'en conséquence, il convient d'infirmer le jugement déféré et de débouter Philippe X... de toutes ses demandes ;

1°) alors que, d'une part, aux termes de l'article L 122-2-8 du code du travail (art. L 1234-1), la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits qui constitue une violation du contrat de travail ou de la relation de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que dans les circonstances exceptionnelles de la cause et en l'absence du directeur du magasin, le fait pour le cadre requérant, responsable de la gestion et de la logistique, d'avoir conduit la procédure permettant la recherche des téléphones portables disparus en respectant l'intimité des vestiaires des salariés et en agissant avec prudence afin d'éviter une dénonciation calomnieuse à l'encontre d'un salarié, constituait un comportement normalement prudent exclusif de toute faute grave ; qu'en décidant le contraire à la faveur de motifs inopérants, la cour a violé le texte précité ;

2°) alors que, d'autre part, le cadre était normalement fondé à se fier aux investigations de la police sans qu'il soit rétrospectivement permis à l'employeur de prétendre mettre à sa charge une obligation particulière de délation et de veiller lui-même à la qualité des investigations de l'OPJ dans l'exercice de ses prérogatives, d'autant qu'en l'espèce, la suspicion de détention de stupéfiants, que la police n'ignorait pas, ne s'était pas vérifiée à l'issue de la fouille ; qu'ainsi, la prétendue faute grave du requérant a été déduite de motifs erronés tendant à imposer au requérant des obligations non justifiées par sa tâche ni proportionnées au but recherché et de nature à porter atteinte à sa conscience ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour a derechef violé les dispositions de l'article L 122-2-8 du code du travail, ensemble les dispositions de l'article L 120-2 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-45346
Date de la décision : 12/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 02 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jan. 2010, pourvoi n°08-45346


Composition du Tribunal
Président : Mme Perony (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.45346
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