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16/12/2009 | FRANCE | N°08-43992

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2009, 08-43992


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 5 juin 2008) que M. X... a été engagé le 2 juillet 1987 en qualité de commis de cuisine par la société Hauterive Saint-James à Bouliac ; qu'il a été licencié pour motif réel et sérieux le 7 août 2002 ; qu'un accord transactionnel a été conclu le 16 août 2002 ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale le 24 septembre 2002 en nullité de la transaction, et demande en paiement de sommes au titre d'heures supplémentaires et domm

ages et intérêts pour licenciement abusif ;

Attendu que M. X... fait grief à l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 5 juin 2008) que M. X... a été engagé le 2 juillet 1987 en qualité de commis de cuisine par la société Hauterive Saint-James à Bouliac ; qu'il a été licencié pour motif réel et sérieux le 7 août 2002 ; qu'un accord transactionnel a été conclu le 16 août 2002 ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale le 24 septembre 2002 en nullité de la transaction, et demande en paiement de sommes au titre d'heures supplémentaires et dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou à naître en se consentant des concessions réciproques que les juges du fond sont tenus d'examiner ; que s'il importe peu que ces concessions soient d'importance inégale, elles ne doivent en revanche pas être dérisoires, sauf à entacher la transaction de nullité ; que ne constitue pas une concession réelle et chiffrable la dispense d'exécution par l'employeur du préavis que le salarié licencié pour cause réelle et sérieuse était tenu d'effectuer ; qu'il n'était pas contesté que M. X... avait été licencié pour cause réelle et sérieuse et que la société Hauterive Saint-James lui avait demandé dans la lettre de licenciement d'effectuer son préavis de deux mois ; que, pour considérer que la transaction conclue entre M. X... et la société Hauterive Saint-James comportait des concessions réciproques, réelles et appréciables, la cour d'appel a notamment relevé que l'employeur acceptait de dispenser le salarié de l'exécution de son préavis tout en lui versant la rémunération correspondante ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil, ensemble les articles L. 122-6 (devenu L. 1234-1) et L. 122-8 (devenu L. 1234-5) du code du travail.

2°/ que ne constitue pas une concession réelle le versement par l'employeur d'indemnités auxquelles le salarié peut prétendre ; que tel est le cas d'une indemnité de licenciement versée au salarié licencié pour cause réelle et sérieuse ; qu'en considérant néanmoins que la transaction conclue entre M. X... et la société Hauterive Saint-James comportait des concessions réciproques, réelles et appréciables, au motif que le salarié avait perçu l'indemnité légale de licenciement, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil, ensemble l'article L. 122-9 (devenu L. 1234-9) du code du travail.

3°/ que pour apprécier si des concessions réelles ont été faites et si celle de l'employeur n'est pas dérisoire, les juges du fond, s'ils ne peuvent procéder à un examen des éléments de fait et de preuve invoqués par l'employeur, sont néanmoins tenus d'apprécier le caractère vraisemblable des prétentions du salarié ; qu'à cet égard, M. X... avait fait valoir que la société Hauterive Saint-James avait reconnu avoir payé les heures supplémentaires dues à M. X... sous forme de primes et lui être redevable d'un solde de 121,30 euros et que les heures supplémentaires ne figuraient pas sur ses bulletins de salaire, de sorte que celles-ci, dont l'employeur reconnaissait qu'il les avaient effectuées, étaient présumées ne pas lui avoir été payées ; que cet élément, qui rendait vraisemblables les prétentions de M. X... en matière d'heures supplémentaires, était de nature à avoir une incidence sur l'appréciation du caractère réel ou dérisoire des concessions de l'employeur contenues dans la transaction, de sorte que les juges du fond étaient tenus de l'examiner ; que, dès lors, en se bornant à affirmer qu'elle ne pouvait examiner la réclamation relative aux heures supplémentaires sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, si ladite réclamation n'était pas rendue vraisemblable par le fait que la société avait reconnu avoir payé les heures supplémentaire dues à M. X... sous forme de prime et lui être redevable d'un solde de 121,30 euros et si les bulletins de salaire mentionnaient les heures supplémentaires effectuées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 2044 du code civil, ensemble les articles L. 212-5 (devenu L. 3121-22, L. 3121-24 et L. 3121-25), L. 324-10 (devenu L. 8221-5) et L. 324-11-1 (devenu L. 8223-1) du code du travail.

4°/ que le versement d'une indemnité transactionnelle correspondant à un mois de salaire à un salarié licencié pour cause réelle et sérieuse et justifiant de quinze ans d'ancienneté revêt un caractère dérisoire eu égard à son montant, de sorte qu'elle ne constitue pas une véritable concession de la part de l'employeur et que la transaction est nulle ; qu'en jugeant le contraire, alors même qu'elle avait relevé que M. X..., engagé le 2 juillet 1987 et licencié le 7 août 2002, avait perçu une indemnité transactionnelle d'un montant de 2 300 euros, soit correspondant à un mois de salaire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article 2044 du code civil.

Mais attendu qu'ayant relevé que la transaction était destinée à mettre un terme à la contestation sur le bien-fondé du licenciement, que l'employeur acceptait de dispenser le salarié de l'exécution du préavis de deux mois tout en réglant la rémunération correspondante et de verser, en sus de l'indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité transactionnelle de 2 300 euros, la cour d'appel, qui a exactement retenu qu'elle ne pouvait examiner la réclamation relative aux heures supplémentaires sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, a pu décider qu'au regard des positions respectives des parties, l'indemnité transactionnelle n'était pas dérisoire ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté Monsieur X... de sa demande tendant à obtenir la nullité de la transaction du 16 août 2002 et d'AVOIR en conséquence déclaré celui-ci irrecevable en ses plus amples demandes.

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 2044 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ; qu'il est de principe que la validité d'une transaction est subordonnée à l'existence de concessions réciproques ; qu'en application des articles 2052 et 2053 du Code civil, les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée et elles ne peuvent être attaquées ou rescindée que lorsqu'il y a erreur sur la personne ou sur l'objet de la contestation ou dans tous les cas où il y dol ou violence ; qu'en l'espèce, le salarié soutient que la transaction est nulle en raison d'une part, d'un défaut de consentement et d'autre part, de l'absence de concessions réciproques ; que s'agissant du défaut de consentement, s'il est exact, comme le soutient le salarié, que celui-ci bénéficiait d'un traitement par LEXOMIL au 16 mai 2002, la Cour relève que l'intéressé a été déclaré apte à la reprise du travail le 18 juillet 2002 et qu'aucun élément médical ne corrobore la poursuite de ce traitement au 16 août, date de la signature de la transaction ; qu'au demeurant, il n'est nullement démontré que ce traitement aurait eu des conséquences sur l'altération du consentement ; que Monsieur X... prétend, en outre, que son consentement aurait été vicié par la pression dont il aurait fait l'objet caractérisée, notamment, par l'absence d'un délai suffisant de réflexion ; que la Cour estime, cependant, que le délai de 9 jours constaté entre la date du licenciement et celle de la signature de la transaction constitue un délai raisonnable pour prendre une décision en connaissance de cause ; qu'au vu de ces éléments, Monsieur X... ne peut valablement soutenir que son consentement a été vicié ; que ce moyen sera, en conséquence, écarté ; qu'en ce qui concerne les concessions réciproques, il appartient à la Cour de vérifier si la concession, notamment de la part de l'employeur, est effective et appréciable et s'il existait un aléa lors de la conclusion de la transaction ; que la lettre de licenciement en date du 7 août 2002 est ainsi rédigée : «Nous entendons procéder à votre licenciement pour le motif exposé lors de l'entretien préalable. En effet, nous avons été contraints de constater votre départ de l'entreprise deux heures seulement après votre reprise du travail. Vous avez quitté votre poste sans nous donner la moindre explication et sans avoir obtenu l'autorisation d'absence de votre hiérarchie. Lors de notre entretien, vous n'avez pu donner aucun motif véritable prétendant seulement ne plus pouvoir faire votre travail. Nous avons donc du noter votre refus pur et simple de reprendre vos fonctions à l'issue de votre arrêt maladie et ceci sans invoquer la moindre indisponibilité ou inaptitude…» ; qu'il ressort de l'accord transactionnel que le salarié a contesté les motifs invoqués dans ce courrier à l'appui de son licenciement ; qu'il existait donc un aléa sur le bien fondé du licenciement auquel la transaction a mis un terme effectif ; que l'accord mentionne, en outre, des concessions réciproques : le salarié renonce à toute action en justice et déclare avoir reçu toutes les sommes auxquelles il pouvait prétendre, y compris au titre des heures supplémentaires ; qu'à cet égard, la Cour ne peut examiner la réclamation relative aux heures supplémentaires sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction ; que l'employeur, de son côté, accepte de dispenser le salarié de l'exécution de son préavis tout en lui réglant la rémunération correspondante et de lui verser une somme de 2300 euros à titre d'indemnité transactionnelle ; que le salarié a perçu, de surcroît, l'indemnité légale de licenciement ; qu'au regard des positions respectives des parties, ces indemnités ne sauraient être considérées comme dérisoires ; qu'il apparaît, ainsi, que la transaction comporte des concessions réciproques réelles et appréciables et qu' elle n'est pas, de ce fait, entachée de nullité ; que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

ALORS tout d'abord QUE la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou à naître en se consentant des concessions réciproques que les juges du fond sont tenus d'examiner ; que s'il importe peu que ces concessions soient d'importance inégale, elles ne doivent en revanche pas être dérisoires, sauf à entacher la transaction de nullité ; que ne constitue pas une concession réelle et chiffrable la dispense d'exécution par l'employeur du préavis que le salarié licencié pour cause réelle et sérieuse était tenu d'effectuer ; qu'il n'était pas contesté que Monsieur Y... avait été licencié pour cause réelle et sérieuse et que la société HAUTERIVE SAINT-JAMES lui avait demandé dans la lettre de licenciement d'effectuer son préavis de deux mois ; que, pour considérer que la transaction conclue entre Monsieur X... et la société HAUTERIVE SAINT-JAMES comportait des concessions réciproques, réelles et appréciables, la Cour d'appel a notamment relevé que l'employeur acceptait de dispenser le salarié de l'exécution de son préavis tout en lui versant la rémunération correspondante ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil, ensemble les articles L.122-6 (devenu L.1234-1) et L.122-8 (devenu L.1234-5) du Code du travail.

ALORS encore à cet égard QUE ne constitue pas une concession réelle le versement par l'employeur d'indemnités auxquelles le salarié peut prétendre ; que tel est le cas d'une indemnité de licenciement versée au salarié licencié pour cause réelle et sérieuse ; qu'en considérant néanmoins que la transaction conlue entre Monsieur X... et la société HAUTERIVE SAINT-JAMES comportait des concessions réciproques, réelles et appréciables, au motif que le salarié avait perçu l'indemnité légale de licenciement, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil, ensemble l'article L.122-9 (devenu L.1234-9) du Code du travail.

ALORS en outre QUE pour apprécier si des concessions réelles ont été faites et si celle de l'employeur n'est pas dérisoire, les juges du fond, s'ils ne peuvent procéder à un examen des éléments de fait et de preuve invoqués par l'employeur, sont néanmoins tenus d'apprécier le caractère vraisemblable des prétentions du salarié ; qu'à cet égard, Monsieur X... avait fait valoir que la société HAUTERIVE SAINT-JAMES avait reconnu avoir payé les heures supplémentaires dues à Monsieur X... sous forme de primes et lui être redevable d'un solde de 121,30 euros et que les heures supplémentaires ne figuraient pas sur ses bulletins de salaire, de sorte que celles-ci, dont l'employeur reconnaissait qu'il les avaient effectuées, étaient présumées ne pas lui avoir été payées ; que cet élément, qui rendait vraisemblables les prétentions de Monsieur X... en matière d'heures supplémentaires, était de nature à avoir une incidence sur l'appréciation du caractère réel ou dérisoire des concessions de l'employeur contenues dans la transaction, de sorte que les juges du fond étaient tenus de l'examiner ; que, dès lors, en se bornant à affirmer qu'elle ne pouvait examiner la réclamation relative aux heures supplémentaires sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, si ladite réclamation n'était pas rendue vraisemblable par le fait que la société avait reconnu avoir payé les heures supplémentaire dues à Monsieur X... sous forme de prime et lui être redevable d'un solde de 121,30 euros et si les bulletins de salaire mentionnait les heures supplémentaires effectuées, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 2044 du Code civil, ensemble les articles L.212-5 (devenu L.3121-22, L.3121-24 et L.3121-25), L.324-10 (devenu L.8221-5) et L.324-11-1 (devenu L.8223-1) du Code du travail.

ALORS en tout état de cause QUE le versement d'une indemnité transactionnelle correspondant à un mois de salaire à un salarié licencié pour cause réelle et sérieuse et justifiant de 15 ans d'ancienneté revêt un caractère dérisoire eu égard à son montant, de sorte qu'elle ne constitue pas une véritable concession de la part de l'employeur et que la transaction est nulle ; qu'en jugeant le contraire, alors même qu'elle avait relevé que Monsieur X..., engagé le 2 juillet 1987 et licencié le 7 août 2002, avait perçu une indemnité transactionnelle d'un montant de 2.300 euros, soit correspondant à un mois de salaire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article 2044 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-43992
Date de la décision : 16/12/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 05 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 déc. 2009, pourvoi n°08-43992


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.43992
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