LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Gilles de X... est décédé le 10 avril 1990 après avoir adopté, par jugement d'adoption simple du 15 octobre 1980, MM. Michaël et Paul Y... ; qu'à la suite de la déclaration de succession enregistrée le 12 février 1991, l'administration fiscale a notifié des redressements des droits de succession en remettant en cause le passif déclaré et le bénéfice des dispositions de l'article 786, alinéa 2, 3° du code général des impôts revendiqué par les adoptés ; qu'elle a mis en recouvrement les droits rappelés ; qu'après rejet de sa réclamation contentieuse, M. Paul Z... a assigné le directeur des services fiscaux de Paris Ouest en annulation des impositions ainsi mises à sa charge ;
Sur les premier et deuxième moyens réunis :
Attendu que M. Paul Z... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son exception de prescription du droit de reprise de l'administration, alors, selon le moyen :
1°/ que, selon l'article 1703 du code général des impôts, les comptables des impôts ne peuvent, sous aucun prétexte, différer l'enregistrement des actes et mutations dont les droits ont été payés ; qu'en l'espèce le demandeur faisait précisément valoir que la déclaration de succession de son père adoptif décédé le 10 avril 1990 avait été déposée dans les délais légaux, le 10 octobre 1990, à la recette des impôts, accompagnée d'un chèque de 248 515 916 francs représentant le montant des droits de succession, qu'en violation du texte susvisé l'administration fiscale avait attendu jusqu'au 12 février 1991, soit plus de quatre mois, pour procéder à l'enregistrement de cette déclaration, de sorte qu'il devait être réputé être intervenu le 10 octobre 1990, ce dont il résultait que la prescription abrégée expirait le 31 décembre 1993 et, par voie de conséquence, que la notification de redressement du 24 octobre 1994 était déjà tardive ; qu'en délaissant ces conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, ne satisfaisant pas ainsi aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que, selon l'article L. 181, alinéa 1er, du livre des procédures fiscales, lorsqu'une succession n'a pas été déclarée, le délai de reprise prévu par l'article L. 180 est décompté à partir du jour soit de la publicité d'un acte soumis à la formalité fusionnée et qui mentionne exactement la date et le lieu du décès ainsi que le nom et l'adresse de l'un au moins des héritiers et autres ayants droit, soit de l'enregistrement d'un écrit ou d'une déclaration portant les mêmes mentions ; que le demandeur faisait encore valoir que, avant même le dépôt de la déclaration de succession et son enregistrement, la clôture de l'inventaire contenant la totalité de l'actif et du passif de la succession ainsi que toutes les informations visées à l'article L. 181 du livre des procédures fiscales avaient été enregistrées le 16 novembre 1990, date qui constituait le point de départ de la prescription abrégée, laquelle par conséquent était acquise le 31 décembre 1993, le dépôt ultérieur de la déclaration de succession ne pouvant avoir pour conséquence d'ouvrir un autre délai ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions déterminantes dont elle se trouvait saisie, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, méconnaissant ainsi les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que, selon l'article L. 189 du livre des procédures fiscales, la prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement et cette notification fait courir, dans la limite du redressement initial, un nouveau délai de prescription, de même durée et de même nature que le délai interrompu ; qu'en conséquence, à supposer que la prescription ait été interrompue par la notification de redressement du 24 octobre 1994, elle était acquise le 31 décembre 1997 ; qu'en décidant qu'elle avait été interrompue par la notification de redressement du 24 octobre 1994 et ce jusqu'au 29 octobre 1999, date du dégrèvement, de sorte que le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit et ce quelle que fût la durée de la prescription du droit de reprise, abrégée ou décennale, la cour d'appel, qui a confondu interruption et suspension de la prescription, a violé l'article L. 189 du livre des procédures fiscales ;
4°/ que, même après l'arrêt avant dire droit du 23 mars 2007 par lequel la juridiction du second degré avait cru devoir mettre dans la cause le moyen tiré de l'article L. 189 du livre des procédures fiscales, l'administration persistait à soutenir que la seule prescription applicable était la prescription décennale et concluait même que la question de l'effet interruptif de la notification de redressement ne se posait pas ; qu'en décidant que la prescription avait été interrompue par la notification du 24 octobre 1994 et ce jusqu'au 29 octobre 1999, de sorte que le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit quelle que fût la durée de prescription du droit de reprise, abrégée ou décennale, la cour d'appel, qui a ainsi statué au mépris des propres écritures de l'administration, a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
5°/ qu'il résulte de l'article L. 181 du livre des procédures fiscales, texte spécial aux successions, que la prescription décennale n'est applicable que lorsque la succession n'a pas été déclarée ou lorsque des biens n'ont pas été mentionnés dans une déclaration de succession ; qu'en retenant que la prescription décennale était applicable tout en reconnaissant que le texte susvisé ne l'était pas dès lors que, concernant précisément la prescription décennale, il ne visait que deux cas précis, étrangers à l'espèce, la cour d'appel a violé l'article L. 181 du livre des procédures fiscales ;
6°/ que, selon le droit commun des articles L. 180 et L. 186 du livre des procédures fiscales, la prescription décennale n'est applicable qu'en cas d'omission ou d'inexactitudes de nature à influer sur la détermination de la base imposable ; qu'en déclarant que la prescription décennale était applicable pour la raison que l'administration n'était pas à même d'apprécier l'exactitude des mentions selon lesquelles, le défunt ayant contribué pendant cinq ans à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, il y avait lieu de faire application de l'article 786, alinéa 2, 3°, du code général des impôts, la cour d'appel, qui a confondu taux d'imposition et base imposable, a violé les articles L. 180 et L. 186 du livre des procédures fiscales ;
7°/ qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles la déclaration de succession se limitait à la mention suivante : "conformément à l'article 786-3° du code général des impôts, le défunt ayant contribué pendant cinq ans à l'entretien et à l'éducation de l'enfant : 40 %", ce dont il résultait que, au seul examen de la déclaration de succession, l'administration des impôts pouvait réclamer immédiatement des justifications concernant les conditions d'application de ce texte, la cour d'appel a violé l'article L. 180, alinéa 2, du livre des procédures fiscales ;
8°/ que le demandeur faisait valoir que, selon la doctrine administrative (D. adm. 13 L 1214 n°s 14 et 15), il n'était pas exigé que l'écrit révélateur contînt tous les éléments indispensables à la liquidation des droits, tandis que les recherches qui avaient pour but de recueillir les précisions utiles à la liquidation des droits révélés ne constituaient pas des recherches ultérieures faisant obstacle à la prescription abrégée ; qu'en délaissant de telles écritures, d'autant plus pertinentes que l'existence de cette doctrine était reconnue par l'administration elle-même qui la prétendait seulement inapplicable à l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, ne satisfaisant pas ainsi aux prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte de l'article L. 186 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la cause, que dans tous les cas où il n'est pas prévu un délai de prescription plus court, le droit de reprise de l'administration s'exerce pendant dix ans à partir du jour du fait générateur de l'impôt ; que, selon l'article L. 180 du même livre, ce droit de reprise s'exerce, en matière de droits de mutation, jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle de l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration ou de l'accomplissement de la formalité fusionnée définie à l'article 647 du code général des impôts, si l'exigibilité des droits et taxes est suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité ; que l'article L. 181 du livre des procédures fiscales précise, dans sa rédaction applicable, que lorsqu'une succession n'a pas été déclarée ou lorsque des biens n'ont pas été mentionnés dans une déclaration de succession, le délai de reprise prévu à l'article L. 180 est décompté à partir du jour, soit de la publicité d'un acte soumis à la formalité fusionnée, soit de l'enregistrement d'un écrit ou d'une déclaration portant certaines mentions mais qu'en aucun cas il ne peut en résulter une prolongation du délai fixé par l'article L. 186 ; qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'une déclaration de succession a été enregistrée le 12 février 1991, que celle-ci ne mentionne pas la contestation, devant une instance juridictionnelle, des dettes portées au passif, que seules les investigations supplémentaires auxquelles a procédé le service fiscal et notamment l'inventaire communiqué le 30 décembre 1993, en réponse à sa demande, ont permis à ce dernier de découvrir le caractère litigieux de ces dettes, la cour d‘appel en a justement déduit que la prescription décennale prévue par l'article L. 186 du livre des procédures fiscales était applicable ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la prescription a commencé à courir à compter du fait générateur de l'impôt soit le 10 avril 1990, que le 24 octobre 1994, l'administration fiscale a notifié un redressement des droits de succession en réintégrant deux dettes à l'actif ainsi qu'en remettant en cause le bénéfice des dispositions de l'article 786, alinéa 2, 3° du code général des impôts et qu'après avoir, le 29 octobre 1999, procédé au dégrèvement des droits mis en recouvrement en précisant que cette décision ne préjugeait pas d'une reprise ultérieure de la procédure, elle a, le 3 février 2000, notifié un redressement des mêmes chefs puis a, le 29 juin 2001, mis en recouvrement les droits rappelés ; qu'ainsi, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les troisième et quatrième branches, la cour d'appel, répondant aux conclusions prétendument délaissées, a décidé à bon droit que le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. Paul Z... fait encore grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en retenant qu'est applicable, pour le calcul des droits de succession, le taux de 60 % sans abattement, alors, selon le moyen, que l'article 786, alinéa 1er, du code général des impôts, qui applique aux enfants adoptés simples le régime fiscal des successions entre tiers (60 % sans abattement), instaure une discrimination par rapport aux autres enfants, héritiers réservataires, bénéficiant du régime fiscal en ligne directe (40 % avec abattement), ce qui est prohibé par les articles 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 2.2 de la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies, et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et est contraire au principe de l'égalité des filiations rappelé par la CEDH ; qu'en considérant que, dans son deuxième alinéa, 3°, l'article 786 du code général des impôts rétablissait l'équilibre en prévoyant que l'alinéa 1er n'était pas applicable aux transmissions faites en faveur d'adoptés qui, soit dans leur minorité pendant cinq ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité pendant dix ans au moins, avaient reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus, quand cette disposition ne fait pas disparaître une discrimination entre les enfants, héritiers réservataires, que le droit civil a abolie, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Mais attendu que le second alinéa de l'article 1 du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme permet à l'Etat de légiférer en matière fiscale en sorte que le taux de 60 % des droits de mutation à titre gratuit, qui est celui applicable entre personnes dépourvues de lien de parenté ou parentes au-delà du quatrième degré, ne constitue pas une distinction discriminatoire dès lors qu'il repose sur une justification objective et raisonnable ; qu'ayant constaté que l'article 786 du code général des impôts ne tient pas compte du lien de parenté résultant de l'adoption simple pour les droits de mutation à titre gratuit et que le taux applicable est celui des successions entre tiers, mais que ce texte rétablit l'équilibre en prévoyant que cette disposition n'est pas applicable aux transmissions faites en faveur d'adoptés qui, pendant la durée minimale qu'il prévoit, ont reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le quatrième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour débouter M. Paul Z... de sa demande tendant, pour le calcul des droits de succession, au bénéfice des dispositions de l'article 786, alinéa 2, 3°, du code général des impôts, l'arrêt retient qu'il ne démontre pas avoir reçu de l'adoptant des secours et soins non interrompus pendant la durée minimale prévue par ce texte ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen soulevé, pris du caractère confiscatoire du taux de 60 %, avec atteinte au droit de propriété, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt n° 04/22001 rendu le 30 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne le directeur général des finances publiques aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. Z...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un héritier réservataire (M. Paul Z..., l'exposant), adopté simple, de sa demande tendant à l'annulation d'un redressement à lui notifié par l'administration fiscale ayant retenu pour le calcul des droits, non le taux de 40 % avec abattement applicable en ligne directe conformément à l'article 786, alinéa 2, 3°, du Code général des impôts, mais celui de 60 % sans abattement applicable entre non-parents, prévu par l'article 777 du même code, et, pour ce faire, d'avoir déclaré que le point de départ du délai de prescription était le 12 février 1991, prescription interrompue par la notification de redressement du 24 octobre 1994 jusqu'au 29 octobre 1999, de sorte que le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit et ce quelle que fût la durée de la prescription du droit de reprise, abrégée ou décennale ;
AUX MOTIFS propres QUE l'intitulé d'inventaire du 2 juillet 1990 et la clôture d'inventaire du 8 octobre 1990 avaient été enregistrés les 28 août et 16 novembre 1990 ; que la déclaration de succession avait été enregistrée le 12 février 1991 ; que, le 24 octobre 1994, un redressement des droits de succession avait été notifié à l'exposant par l'administration fiscale portant remise en cause du bénéfice de l'article 786, alinéa 3, du Code général des impôts ; que, le 29 octobre 1999, l'administration avait procédé au dégrèvement des rappels de droits objet de l'avis de mise en recouvrement du 22 avril 1996 portant la mention : « les droits sont dégrevés pour un motif de procédure. Cette décision ne préjuge pas d'une reprise ultérieure de la procédure » ; que, le 3 février 2000, l'administration avait notifié un nouveau redressement portant sur le même chef, à savoir la remise en cause du bénéfice des dispositions de l'article 786, alinéa 2, 3°, du Code général des impôts, faute par l'exposant d'apporter la preuve des secours et soins ininterrompus apportés par l'adoptant soit pendant cinq ans dans sa minorité soit pendant dix ans dans sa minorité et majorité ; que l'administration avait émis un avis de recouvrement le 29 juin 2001 ; qu'après rejet de la réclamation contentieuse de l'exposant le 22 février 2002, celui-ci avait saisi le juge compétent, par acte du 8 avril 2002 ; qu'il était constant que la notification de redressement du 24 octobre 1994 était intervenue dans les termes de l'article L.180 du Livre des procédures fiscales, c'est-à-dire avant l'expiration de la troisième année suivant celle de l'enregistrement de la déclaration de succession intervenue le 12 février 1991 et que, après avoir dégrevé le 29 octobre 1999, en réservant la possibilité d'une reprise de la procédure, l'administration avait notifié un nouveau redressement le 3 février 2000 portant sur le même chef ; qu'en application de l'article L.189 du Livre des procédures fiscales, la prescription était interrompue par la notification d'une proposition de redressement ; qu'il en découlait que cette notification faisait courir, dans la limite du redressement initial, un nouveau délai de prescription de même durée et de même nature que le délai interrompu et ce nonobstant l'abandon du redressement notifié ; que, du fait de la notification d'un nouveau redressement le 3 février 2000, alors que la prescription avait été interrompue par la notification du 24 octobre 1994 jusqu'au 29 octobre 1999, le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit quelle que fût la durée de prescription du droit de reprise, abrégée ou décennale ; que, dès lors, la discussion sur les conditions d'application du deuxième alinéa de l'article L.180 du même code, en ce qu'il indiquait que le délai de trois ans n'était opposable à l'administration que si l'exigibilité des droits avait été suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité, sans qu'il fût nécessaire de procéder à des recherches ultérieures, était sans objet ;
ALORS QUE, de première part, selon l'article 1703 du Code général des impôts, les comptables des impôts ne peuvent, sous aucun prétexte, différer l'enregistrement des actes et mutations dont les droits ont été payés ; qu'en l'es33 pèce l'exposant faisait précisément valoir (v. ses conclusions signifiées le 5 mars 2008, pp. 16 et 17) que la déclaration de succession de son père adoptif décédé le 10 avril 1990 avait été déposée dans les délais légaux, le 10 octobre 1990, à la recette des impôts, accompagnée d'un chèque de 248.515.916 F représentant le montant des droits de succession, qu'en violation du texte susvisé l'administration fiscale avait attendu jusqu'au 12 février 1991, soit plus de quatre mois, pour procéder à l'enregistrement de cette déclaration, de sorte qu'il devait être réputé être intervenu le 10 octobre 1990, ce dont il résultait que la prescription abrégée expirait le 31 décembre 1993 et, par voie de conséquence, que la notification de redressement du 24 octobre 1994 était déjà tardive ; qu'en délaissant ces conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, ne satisfaisant pas ainsi aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, de deuxième part, selon l'article L.181, alinéa 1er, du Livre des procédures fiscales, lorsqu'une succession n'a pas été déclarée, le délai de reprise prévu par l'article L.180 est décompté à partir du jour soit de la publicité d'un acte soumis à la formalité fusionnée et qui mentionne exactement la date et le lieu du décès ainsi que le nom et l'adresse de l'un au moins des héritiers et autres ayants droit, soit de l'enregistrement d'un écrit ou d'une déclaration portant les mêmes mentions ; que l'exposant faisait encore valoir (v. ses conclusions préc., pp. 27 à 29, notamment) que, avant même le dépôt de la déclaration de succession et son enregistrement, la clôture de l'inventaire contenant la totalité de l'actif et du passif de la succession ainsi que toutes les informations visées à l'article L.181 du Livre des procédures fiscales avaient été enregistrées le 16 novembre 1990, date qui constituait le point de départ de la prescription abrégée, laquelle par conséquent était acquise le 31 décembre 1993, le dépôt ultérieur de la déclaration de succession ne pouvant avoir pour conséquence d'ouvrir un autre délai ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions déterminantes dont elle se trouvait saisie, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, méconnaissant ainsi les prescriptions de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, de troisième part, selon l'article L.189 du Livre des procédures fiscales, la prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement et cette notification fait courir, dans la limite du redressement initial, un nouveau délai de prescription, de même durée et de même nature que le délai interrompu ; qu'en conséquence, à supposer que la prescription ait été interrompue par la notification de redressement du 24 octobre 1994, elle était acquise le 31 décembre 1997 ; qu'en décidant qu'elle avait été interrompue par la notification de redressement du 24 octobre 1994 et ce jusqu'au 29 octobre 1999, date du dégrèvement, de sorte que le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit et ce quelle que fût la durée de la prescription du droit de reprise, abrégée ou décennale, la cour d'appel, qui a confondu interruption et suspension de la prescription, a violé l'article L.189 du Livre des procédures fiscales ;
ALORS QUE, enfin, même après l'arrêt avant dire droit du 23 mars 2007 par lequel la juridiction du second degré avait cru devoir mettre dans la cause le moyen tiré de l'article L.189 du Livre des procédures fiscales, l'administration persistait à soutenir que la seule prescription applicable était la prescription décennale et concluait même que la question de l'effet interruptif de la notification de redressement ne se posait pas ; qu'en décidant que la prescription avait été interrompue par la notification du 24 octobre 1994 et ce jusqu'au 29 octobre 1999, de sorte que le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit quelle que fût la durée de prescription du droit de reprise, abrégée ou décennale, la cour d'appel, qui a ainsi statué au mépris des propres écritures de l'administration, a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un héritier réservataire (M. Paul Z..., l'exposant), adopté simple, de sa demande tendant à l'annulation d'un redressement à lui notifié par l'administration fiscale ayant retenu pour le calcul des droits, non le taux de 40 % avec abattement applicable en ligne directe conformément à l'article 786, alinéa 2, 3°, du Code général des impôts, mais celui de 60 % sans abattement applicable entre non-parents, prévu par l'article 777 du même code, et, pour ce faire, d'avoir déclaré que la prescription décennale n'était pas acquise au moment où l'administration avait exercé son droit de reprise ;
AUX MOTIFS adoptés QUE, pour que la prescription abrégée fût applicable, il fallait que l'acte ou la déclaration établissent d'une manière complète l'exigibilité des droits omis et que l'administration fût en mesure de constater, par le seul contenu de documents enregistrés, l'existence du fait juridique imposable ; que l'article L.181 du Livre des procédures fiscales, spécial aux successions, qui prévalait sur les dispositions plus générales de l'article L.180, alinéa 2, n'était pas applicable dès lors qu'il visait deux cas précis, à savoir le non-dépôt de la déclaration de succession et l'omission de biens dans la déclaration, ce qui n'était pas le cas du redressement litigieux ; qu'en ce qui concernait la contestation par l'administration fiscale du bénéfice du taux de la ligne directe, les indications portées sur la déclaration de succession ne permettaient pas à elles seules à l'administration fiscale d'en apprécier l'exactitude puisqu'elles se limitaient à la mention suivante :
« conformément à l'article 786-3° du Code général des impôts, le défunt ayant contribué pendant cinq ans à l'entretien et à l'éducation de l'enfant : 40 % » ; que l'administration fiscale avait dû procéder à des recherches ultérieures pour considérer que ces mentions étaient inexactes et constater l'exigibilité des droits, notamment en procédant à l'examen des relations ayant existé entre l'exposant et le défunt par des échanges ultérieurs de courriers et l'examen extrinsèque de documents ne figurant pas dans la déclaration de succession ; qu'il y avait donc lieu de dire que la prescription décennale était seule applicable à l'espèce ;
ALORS QUE, de première part, il résulte de l'article L.181 du Livre des procédures fiscales, texte spécial aux successions, que la prescription décennale n'est applicable que lorsque la succession n'a pas été déclarée ou lorsque des biens n'ont pas été mentionnés dans une déclaration de succession ; qu'en retenant que la prescription décennale était applicable tout en reconnaissant que le texte susvisé ne l'était pas dès lors que, concernant précisément la prescription décennale, il ne visait que deux cas précis, étrangers à l'espèce, la cour d'appel a violé l'article L.181 du Livre des procédures fiscales ;
ALORS QUE, de deuxième part, selon le droit commun des articles L.180 et L.186 du Livre des procédures fiscales, la prescription décennale n'est applicable qu'en cas d'omission ou d'inexactitudes de nature à influer sur la détermination de la base imposable ; qu'en déclarant que la prescription décennale était applicable pour la raison que l'administration n'était pas à même d'apprécier l'exactitude des mentions selon lesquelles, le défunt ayant contribué pendant cinq ans à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, il y avait lieu de faire application de l'article 786, alinéa 2, 3°, du Code général des impôts, la cour d'appel, qui a confondu taux d'imposition et base imposable, a violé les articles L. 180 et L.186 du Livre des procédures fiscales ;
ALORS QUE, de troisième part, en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles la déclaration de succession se limitait à la mention suivante : « conformément à l'article 786-3° du Code général des impôts, le défunt ayant contribué pendant cinq ans à l'entretien et à l'éducation de l'enfant : 40 % », ce dont il résultait que, au seul examen de la déclaration de succession, l'administration des impôts pouvait réclamer immédiatement des justifications concernant les conditions d'application de ce texte, la cour d'appel a violé l'article L.180, alinéa 2, du Livre des procédures fiscales ;
ALORS QUE, enfin, l'exposant faisait valoir (v. ses conclusions signifiées le 5 mars 2008, p. 25) que, selon la doctrine administrative (D. adm. 13 L 1214 nos 14 et 15), il n'était pas exigé que l'écrit révélateur contînt tous les éléments indispensables à la liquidation des droits, tandis que les recherches qui avaient pour but de recueillir les précisions utiles à la liquidation des droits révélés ne constituaient pas des recherches ultérieures faisant obstacle à la prescription abrégée ; qu'en délaissant de telles écritures, d'autant plus pertinentes que l'existence de cette doctrine était reconnue par l'administration elle-même (v. ses conclusions signifiées le 7 mars 2008, p. 17) qui la prétendait seulement inapplicable à l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, ne satisfaisant pas ainsi aux prescription de l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un héritier réservataire (M. Paul Z..., l'exposant), adopté simple, de sa demande tendant à l'annulation d'un redressement à lui notifié par l'administration fiscale ayant retenu pour le calcul des droits, non le taux de 40 % avec abattement applicable en ligne directe conformément à l'article 786, alinéa 2, 3°, du Code général des impôts, mais celui de 60 % sans abattement, applicable entre non-parents, prévu par l'article 777 du même code ;
AUX MOTIFS QUE l'exposant estimait qu'au sens de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde, de l'article 1er du protocole additionnel et de l'article 2 de la convention relative aux droits de l'enfant des Nations-Unies, le régime fiscal des successions entre tiers au taux de 60 %
selon l'article 777 du Code général des impôts, appliqué à l'enfant adopté simple, héritier réservataire, était discriminatoire ; que, selon l'article 786 du Code général des impôts, il était exact qu'il n'était pas tenu compte du lien de parenté résultant de l'adoption simple pour la perception des droits de mutation à titre gratuit et que, dès lors, le taux applicable était celui des successions entre tiers, soit 60 % ; que, cependant, dans son deuxième alinéa, 3°, ce même article rétablissait l'équilibre en prévoyant que cette disposition n'était pas applicable aux transmissions faites en faveur d'adoptés qui soit dans leur minorité pendant cinq ans au moins soit pendant leur minorité et leur majorité pendant dix ans au moins auraient reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus ; qu'en l'espèce l'exposant ne démontrait pas la réalité des secours et soins non interrompus pendant la durée minimale prévue par ce texte ;
ALORS QUE l'article 786, alinéa 1er, du Code général des impôts, qui applique aux enfants adoptés simples le régime fiscal des successions entre tiers (60 % sans abattement), instaure une discrimination par rapport aux autres enfants, héritiers réservataires, bénéficiant du régime fiscal en ligne directe (40 % avec abattement), ce qui est prohibé par les articles 14 de la convention des droits de l'homme, 2.2 de la convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies, et 26 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, et est contraire au principe de l'égalité des filiations rappelé par la C.E.D.H. ; qu'en considérant que, dans son deuxième alinéa, 3°, l'article 786 du Code général des impôts rétablissait l'équilibre en prévoyant que l'alinéa 1er n'était pas applicable aux transmissions faites en faveur d'adoptés qui, soit dans leur minorité pendant cinq ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité pendant dix ans au moins, avaient reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus, quand cette disposition ne fait pas disparaître une discrimination entre les enfants, héritiers réservataires, que le droit civil a abolie, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un héritier réservataire (M. Paul Z..., l'exposant), adopté simple, de sa demande tendant à l'annulation d'un redressement à lui notifié par l'administration fiscale ayant retenu pour le calcul des droits, non le taux de 40 % avec abattement applicable en ligne directe conformément à l'article 786, alinéa 2, 3°, du Code général des impôts, mais celui de 60 % sans abattement, applicable entre non-parents, prévu par l'article 777 du même code ;
AUX MOTIFS QUE l'exposant ne démontrait pas la réalité des secours et soins non interrompus pendant la durée minimale prévue par l'article 786 du Code général des impôts (arrêt attaqué, p. 6, dernier alinéa) ;
ALORS QUE l'exposant faisait valoir (v. ses concl. préc., p. 45) que le taux de mutation proportionnel de 60 % à titre gratuit prévu par l'article 777 du Code général des impôts constituait une atteinte grave aux droits de propriété et présentait un caractère confiscatoire, d'autant plus que, comme en l'espèce, le bénéficiaire de la transmission était un enfant adopté simple, héritier réservataire, cela en violation de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme du 28 juin 1789 et de l'article 1 du protocole additionnel n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde ; qu'en laissant sans réponse ces écritures, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, ne satisfaisant pas ainsi aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.