LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 1er décembre 2008) que le centre hospitalier Roger Prévot (le centre hospitalier), propriétaire de l'immeuble sis 8 impasse Gravel à Levallois-Perret ayant subi des dommages à la suite de l'effondrement le 14 juin 1998 d'un mur le séparant de l'immeuble voisin, a fait assigner par acte du 25 mars 2004 après expertise ordonnée en référé par le tribunal administratif, la société civile immobilière du 10 impasse Gravel (la SCI) et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du 10 impasse Gravel devant le tribunal de grande instance en réparation du mur mitoyen et en indemnisation de son préjudice ; que par acte du 23 mai 2005, la SCI et le syndicat des copropriétaires ont fait assigner en intervention forcée la société Assurances générales de France (l'assureur), aux fins de garantie dans l'instance introduite à leur encontre par le centre hospitalier ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite l'action qu'elle a exercée contre l'assureur, alors, selon le moyen :
1°/ que par exploit du 23 mai 2005, la SCI et le syndicat des copropriétaires du 10 impasse Gravel avaient assigné l'assureur en intervention forcée devant le tribunal de grande instance afin de leur voir donner acte « de ce qu'ils appellent en intervention forcée aux fins de garantie l'assureur dans l'instance introduite à leur encontre par le centre hospitalier Roger Prévot devant le tribunal de grande instance de Nanterre et enrôlée sous le numéro 04/04076 » ; que les demanderesses exposaient dans le corps de l'assignation : « il convient de préciser que le syndicat des copropriétaires a souscrit une police d'assurance de la propriété immobilière (contrat multipropriété immobilière n° 078090393) auprès de l'assureur afin d'assurer l'immeuble du 10 impasse Gravel. Or, il ne peut être discuté que le syndicat des copropriétaires est bien fondé à solliciter la garantie de son assureur en sa qualité d'assuré. De même, la SCI a également contracté une assurance auprès de la société AGF. Dans ces conditions, dans l'hypothèse extraordinaire de la condamnation du syndicat des copropriétaires et de la SCI, l'assureur devra garantir les sommes auxquelles les demandeurs pourront être condamnés » ; qu'ainsi, en énonçant que «l'assureur fait valoir avec pertinence qu'en première instance la SCI et le syndicat des copropriétaires ont réclamé sa garantie sur le seul fondement du contrat d'assurance n° 078090393 souscrit par le syndicat des copropriétaires», la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'assignation du 23 mai 2005, violant ainsi les dispositions des articles 4 du code de procédure civile et 1134 du code civil ;
2°/ que peu important que la SCI n'ait produit qu'en cause d'appel la police par elle souscrite auprès de l'assureur, l'assignation qu'elle avait fait délivrer à l'assureur le 23 mai 2005 « en intervention forcée aux fins de garantie » sur le fondement de la police d'assurance qu'elle avait «également contractée … auprès de la société AGF », qui contenait une prétention incompatible avec la prescription commencée, avait interrompu celle-ci ; qu'ainsi, en décidant que la SCI ne justifiait « d'aucun acte interruptif de la prescription depuis l'assignation dont elle a fait l'objet, le 25 mars 2004, avant le 17 décembre 2007 en ce qui concerne l'application du contrat d'assurance souscrit par elle », la cour d'appel a violé les articles 2244 du code civil et L. 114-1 du code des assurances ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'en première instance la SCI et le syndicat des copropriétaires avaient réclamé la garantie de l'assureur sur le seul fondement du contrat d'assurance souscrit par le syndicat des copropriétaires, et que la SCI s'était prévalue pour la première fois en cause d'appel du contrat souscrit par elle pour solliciter sa garantie, par conclusions du 17 décembre 2007, c'est à bon droit et sans dénaturer les termes de l'assignation du 23 mai 2005, non motivée en fait et en droit, que la cour d'appel a retenu que la SCI ne justifiait d'aucun acte interruptif de la prescription depuis l'assignation dont elle avait fait l'objet le 25 mars 2004 et que l'action exercée par elle contre l'assureur était prescrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI du 10 impasse Gravel aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI du 10 impasse Gravel ; la condamne à payer à la société Assurances générales de France la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé et prononcé par M. Breillat, conseiller le plus ancien non empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du dix décembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Jacoupy, avocat aux conseils pour la SCI 10 impasse Gravel
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit prescrite l'action exercée par la SCI DU 10 IMPASSE GRAVEL contre la COMPAGNIE ASSURANCES GENERALES DE FRANCE IARD,
AUX MOTIFS QUE
« Considérant que la COMPAGNIE AGF fait valoir avec pertinence qu 'en première instance la SCI et le Syndicat des Copropriétaires ont réclamé sa garantie sur le seul fondement du contrat d'assurance n° 078090393 souscrit par le Syndicat des Copropriétaires.
Qu'elle observe que la SCI s'est prévalue pour la première fois en cause d'appel du contrat d'assurance n° 77153152 souscrit par elle pour solliciter sa garantie, par conclusions du 17 décembre 2007.
Qu'elle en déduit que la prescription de deux ans prévue par l'article L 114-1 du Code des Assurances doit jouer dans la mesure où plus de deux années se sont écoulées depuis l'effondrement du mur le 14 juin 1998 et, au plus tard, depuis le recours exercé contre la SCI par le Centre Hospitalier aux termes de son assignation du 25 mars 2004.
Considérant que, lorsqu'une instance a été introduite par la victime contre l'assuré, seule la date de l'assignation doit être prise en compte comme point de départ de la prescription biennale fixée par le susdit article L 114-1, à l'exclusion de la date de paiement de l'indemnité mise à la charge de l'assuré, ainsi que l'a rappelé la 2ème chambre civile de la Cour de Cassation le 17 mars 2005 ; que la SCI ne peut utilement invoquer la date du jugement la condamnant à indemniser le Centre Hospitalier comme cause d'interruption du délai de prescription.
Que la SCI ne justifie en effet d 'aucun acte interruptif de la prescription depuis l'assignation dont elle a fait l'objet, le 25 mars 2004, avant le 17 décembre 2007 en ce qui concerne l 'application du contrat d'assurance souscrit par elle.
Qu'il s'ensuit que l'action qu 'elle exerce contre son assureur ne peut qu'être déclarée prescrite »,
ALORS, D'UNE PART, QUE
Par exploit du 23 mai 2005, la SCI DU 10 IMPASSE GRAVEL et le Syndicat des Copropriétaires du 10 Impasse Gravel avaient assigné la COMPAGNIE AGF en intervention forcée devant le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE afin de leur voir donner acte « de ce qu'ils appellent en intervention ,forcée aux fins de garantie la SOC.IETE AGF dans l'instance introduite à leur encontre par le Centre Hospitalier Roger Prévot devant le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE et enrôlée sous le numéro 04/04076 » ; que les demanderesses exposaient, dans le corps de l'assignation : « il convient de préciser que le SDC du 10 Impasse Gravel a souscrit une police d'assurance de la propriété immobilière (contrat multipropriété immobilière n° 078090393) auprès de la SOCIETE AGF afin d 'assurer l'immeuble du 10 Impasse Gravel. Or, il ne peut être discuté que le SDC est bien fondé à solliciter la garantie de son assureur en sa qualité d'assuré. De même, la SCI DU 10 IMPASSE GRAVEL a également contracté une assurance auprès de la SOCIETE AGF. Dans ces conditions, dans l'hypothèse extraordinaire de la condamnation du SDC et de la SCI DU 10 IMPASSE GRAVEL, les AGF devront garantir les sommes auxquelles les demandeurs pourront être condamnés » ; qu'ainsi, en énonçant que « la COMPAGNIE AGF fait valoir avec pertinence qu'en première instance la SCI et le Syndicat des Copropriétaires ont réclamé sa garantie sur le seul fondement du contrat d'assurance n° 078090393 souscrit par le Syndicat des Copropriétaires », la Cour d'Appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'assignation du 23 mai 2005, violant ainsi les dispositions des articles 4 du Code de Procédure et Civile et 1134 du Code Civil,
ALORS, D'AUTRE PART, QUE,
Peu important que la SCI DU 10 IMPASSE GRAVEL, n'ait produit qu'en cause d'appel la police par elle souscrite auprès de la COMPAGNIE AGF, l'assignation qu'elle avait fait délivrer à l'assureur le 23 mai 2005 « en intervention forcée aux fins de garantie » sur le fondement de la police d'assurance qu'elle avait « également contractée ... auprès de la SOCIETE AGF », qui contenait une prétention incompatible avec la prescription commencée, avait interrompu celle-ci ; qu'ainsi, en décidant que la SCI ne justifiait «d'aucun acte interruptif de la prescription depuis l'assignation dont elle a fait l'objet, le 25 mars 2004, avant le 17 décembre 2007 en ce qui concerne l'application du contrat d 'assurance souscrit par elle », la Cour d'Appel a violé les articles 2244 du Code Civil et L 114-1 du Code des Assurances.