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02/12/2009 | FRANCE | N°08-44969

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 décembre 2009, 08-44969


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée en qualité de prothésiste dentaire le 4 octobre 1978 et dont le contrat de travail a été repris par la SCP Hinoux Tolub à partir de 1980, a présenté le 21 juillet 2003 des troubles évoquant une allergie professionnelle due à certaines résines qu'elle utilisait pour fabriquer les prothèses dentaires ; que le 30 décembre 2003 la caisse primaire d'assurance maladie a reconnu le caractère professionnel de la maladie contractée par la salariée ; qu'à la

suite d'une rechute, la salariée a été déclarée, à l'issue de deux examen...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée en qualité de prothésiste dentaire le 4 octobre 1978 et dont le contrat de travail a été repris par la SCP Hinoux Tolub à partir de 1980, a présenté le 21 juillet 2003 des troubles évoquant une allergie professionnelle due à certaines résines qu'elle utilisait pour fabriquer les prothèses dentaires ; que le 30 décembre 2003 la caisse primaire d'assurance maladie a reconnu le caractère professionnel de la maladie contractée par la salariée ; qu'à la suite d'une rechute, la salariée a été déclarée, à l'issue de deux examens médicaux des 22 mars et 3 mai 2004, inapte définitive à son poste de travail ; qu'après avoir refusé un poste de reclassement d'aide dentaire à temps partiel, la salariée a été licenciée le 25 mai 2004 en raison de son inaptitude et de l'impossibilité de reclassement ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le moyen unique pris en sa deuxième branche :
Vu l'article L. 4121 1 du code du travail interprété à la lumière de la directive CE n° 89/391 du 12 juin 1989, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail ;
Attendu que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité ;
Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur a été informé le 18 août 2003 de la déclaration de maladie professionnelle de son employée et qu'il justifie avoir fait réaliser courant janvier et février 2004 les travaux nécessaires à l'aspiration et à l'évacuation des poussières de matériaux utilisés, que selon le médecin du travail l'aménagement du poste de travail était tout à fait correct, que l'employeur a fait procéder aux aménagements du poste de travail dans un délai raisonnable de sorte que l'inaptitude de la salariée au poste de travail ne résulte pas d'une carence qui lui est imputable ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier, si comme le faisait valoir la salariée, l'employeur n'avait pas commis de faute privant le licenciement pour inaptitude de cause réelle et sérieuse en s'abstenant de prendre des mesures qui auraient prémuni la salariée contre la réaction allergique et auraient évité la dégradation de son état de santé antérieurement à la reconnaissance de sa maladie professionnelle, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le même moyen pris en sa troisième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que la cour d'appel a débouté Mme X... de sa demande d'indemnité compensatrice sans aucun motif ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen unique :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande d'indemnité compensatrice, l'arrêt rendu le 26 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Hinoux Tolub aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Hinoux Tolub à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR débouté madame X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité compensatrice de préavis ;
AUX MOTIFS QUE madame X... a été licenciée pour inaptitude le 25 mai 2004 et ce à la suite d'un deuxième avis de la médecine du travail en date du 3 mai 2004, avis ainsi libellé : « inaptitude définitive à son poste de travail la mettant en contact avec le méthacrylate ; peut exercer toute autre activité » ; que conformément aux dispositions de l'article L.122-24-4 du code du travail, la SCP Hinoux Tolub a proposé à madame X... un poste d'aide dentaire à temps partiel, proposition de reclassement refusée en raison de l'insuffisance de l'horaire proposé (1 heure 30 par jour) ; que madame X... impute la responsabilité de la rupture du contrat de travail à l'employeur en faisant valoir que la maladie professionnelle (allergie) à l'origine de son inaptitude, résulte d'une carence de celui-ci dans la mise en place d'un système de ventilation approprié ; que madame X... invoque, notamment, les dispositions de l'article L 230-2 du contrat de travail aux termes duquel : « le chef d'établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé "physique et mentale" des travailleurs de l'établissement. Les mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, d'information et de formation ainsi que la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. Il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes » ; que par ailleurs il est établi que la SCP Hinoux Tolub a été informée le 18 août 2003 de la déclaration de maladie professionnelle de son employée ; que le 13 octobre 2003, la caisse primaire d'assurance maladie du Centre ouest a adressé à la SCP Hinoux Tolub une correspondance aux termes de laquelle il était indiqué à ladite société qu'un aménagement du poste de travail était indispensable ; que la SCP Hinoux Tolub justifie avoir fait réaliser courant janvier et février 2004, les travaux nécessaires à l'aspiration et à l'évacuation de poussières de matériaux utilisés ; qu'entre temps, la maladie de madame X... a été reconnue comme maladie professionnelle ; qu'il ressort d'un courrier en date du 19 avril 2004, courrier émanant du docteur Y..., médecin du travail, que « l'aménagement du poste de travail était tout à fait correct » ; qu'il résulte des éléments chronologiques qui précèdent, que la SCP Hinoux Tolub a fait procéder aux aménagements du poste de travail de madame X... dans un délai raisonnable ; que dès lors, l'inaptitude au poste de travail de madame X... ne résulte pas d'une carence imputable à l'employeur ; qu'il y a donc lieu de débouter celle-ci de l'ensemble de ses demande afférentes à la rupture du contrat de travail ;
1) ALORS QUE le salarié licencié en raison d'une inaptitude consécutive à une maladie professionnelle imputable à une faute de l'employeur a droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que l'employeur commet une faute lorsqu'il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel le salarié était exposé et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que la reconnaissance d'une telle faute s'apprécie au regard des mesures de prévention prises avant que la maladie professionnelle ne se déclare ; qu'en déduisant l'absence de faute de l'employeur de la réalisation de travaux d'aspiration des poussières de résine « courant janvier et février 2004 », soit après la reconnaissance par la caisse de la maladie professionnelle de madame
X...
due à une exposition pendant plus de 23 ans aux poussières toxiques de résine, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1, L. 1235-14 et L. 1226-8 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
2) ALORS QUE la faute de l'employeur à l'origine de l'inaptitude du salarié s'apprécie au regard de ses actions en matière de santé avant les premières manifestations de la maladie professionnelle, et non au jour d'une éventuelle rechute ; que la rechute n'est en effet que l'évolution naturelle des séquelles de la maladie professionnelle, indépendamment de tout événement extérieur ; qu'en retenant que l'employeur avait installé un système de ventilation quelques semaines avant la rechute de madame X... pour décider que l'inaptitude ne lui était pas imputable, sans vérifier si l'inaction de l'employeur pendant 23 ans, et notamment l'absence de mesures visant à préserver la salariée des poussières toxiques avant la reconnaissance de sa maladie professionnelle, en dépit de son obligation de résultat en matière de santé, n'était pas constitutive d'une faute privant le licenciement pour inaptitude de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1, L. 1235-14 et L. 1226-8 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
3) ALORS QUE, sauf refus abusif d'une proposition de reclassement, la rupture du contrat de travail consécutive à son inaptitude pour maladie professionnelle ouvre droit au salarié à une indemnité compensatrice de préavis ; qu'en déboutant madame X... de cette demande sans constater que son refus du poste de reclassement était abusif, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-14 et L. 1226-12 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44969
Date de la décision : 02/12/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 26 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 déc. 2009, pourvoi n°08-44969


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.44969
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