LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, en ce qui concernait le volume des dégâts, que plus de 56 hectares étaient touchés sur les 131 hectares 91 de la zone où ils étaient concentrés, soit plus de 11 % de l'ensemble de la propriété, sans parler des dégâts diffus, ce qui attestait à l'évidence de leur gravité, la cour d'appel, qui n'a pas indemnisé la dépréciation de l'ensemble de la propriété mais fixé la valeur de la propriété au cours du marché entre 2 500 et 3 000 euros l'hectare, a souverainement retenu, sans se contredire et abstraction faite d'un motif surabondant relatif aux propres évaluations du Parc national des Cévennes, que le montant de 384 127 euros auquel l'expert avait estimé les pertes strictement forestières, soit 362 097 euros selon la valeur d'attente ou prix de revient pour la zone de concentration des dégâts et 18 280 euros pour les dégâts diffus, outre les tiges de sorbier à 3 750 euros, n'avait nullement vocation à épuiser la valeur de la forêt, n'était pas utilement contesté par le Parc naturel des Cévennes et n'était pas hors de proportion avec les 11 à 13 % auxquels pouvait s'évaluer l'atteinte à l'outil productif que constituait la propriété ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que l'incontestable réalité des dégâts avait troublé la gestion normale d'un GFA de la dimension de celui d'Altefage, la cour d'appel, qui n'a indemnisé, sur cette période, que les seuls frais et formalités directement engendrés par la nécessité d'intégrer et de quantifier, dans la politique du GFA, le phénomène de surdensité des cervidés, a caractérisé un lien de causalité directe entre le préjudice et la création d'une zone d'interdiction de chasser ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Parc national des Cévennes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Parc national des Cévennes à payer au groupement forestier du Bois d'Altefage et aux consorts X... de Battefort de Laubespin, la somme de 2 500 euros ; rejette la demande du Parc national des Cévennes ;
Vu l'article 628 code de procédure civile, rejette la demande du groupement forestier du Bois d'Altefage et des consorts X... de Battefort de Laubespin ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Delvolvé, avocat aux Conseils pour le Parc national des Cévennes.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné le Parc national des Cévennes à payer la somme de 384.127 euros aux consorts de Y... à hauteur de 45% et au groupement forestier du bois d'ALTEFAGE à hauteur de 55%, pour les dégâts occasionnés par les cervidés par suite de l'institution d'une zone interdite à la chasse,
Aux motifs que le Parc national des Cévennes avait reproché à Monsieur Z..., expert judiciaire, une surévaluation des indemnités, par suite d'erreurs de méthode, de modélisations sylvicoles inadaptées, de prix du bois surévalués, de la prise en compte de dommages non avérés tels les tiges autres que celles utiles, les frais d'accompagnement des jeunes plantations, les dégâts diffus ; que cependant Monsieur A..., expert des consorts de Y..., avait adopté sur chacun des points une analyse différente de celle de Monsieur de B..., expert du Parc national des Cévennes ; qu'ainsi une même question à caractère scientifique pouvait avoir deux réponses différentes ; que tel était la cas pour les tiges autres qu'utiles, pour le prix du bois et pour les jeunes reboisements, et que l'on devait convenir de l'extrême difficulté à suivre le Parc national des Cévennes dans sa critique alors que la réalité des dégâts observés sur le terrain n'était pas discutée et qu'un expert privé dont rien ne démontrait l'incompétence avait soutenu pour les Y... la validité des chiffres retenus par Monsieur D...,
Alors, d'une part, qu'en se refusant ainsi à examiner des problèmes scientifiques, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil,
Alors, d'autre part, qu'en retenant néanmoins sans discussion l'avis de l'expert de l'une des parties au seul motif que son incompétence n'était pas démontrée et qu'il validait les chiffres de l'expert judiciaire et en écartant l'avis de l'expert de l'autre partie sans en fournir les raisons et sans le discuter, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
Alors, enfin, qu'en se déterminant ainsi, elle a méconnu le principe de l'égalité des armes devant le juge et l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné le Parc national des Cévennes à payer la somme de 384.127 euros aux consorts de Y... à hauteur de 45% et au groupement forestier du bois d'ALTEFAGE à hauteur de 55%, pour les dégâts occasionnés par les cervidés par suite de l'institution d'une zone interdite à la chasse,
Aux motifs que le Parc national des Cévennes avait évalué l'indemnité à 125.000 euros en seule zone de concentration des dégâts, pour une propriété qu'il évaluait lui-même à 955.000 euros, soit une indemnisation égale à 13% de la valeur du bien ; que, selon Monsieur Z..., expert judiciaire, 56 hectares étaient touchés sur 490 hectares, soit plus de 11% de l'ensemble de la propriété ; que la valorisation d'ALTEFAGE oscillait entre 2.500 et 3.000 euros l'hectare ; que les 384.127 euros auxquels l'expert judiciaire avait estimé les pertes strictement forestières n'étaient pas hors de proportion, référence faite aux 11 à 13% auxquels pouvait s'évaluer l'atteinte à l'outil productif que constituait la propriété, et que le montant total de 384.127 n'avait nullement vocation à épuiser la valeur de la forêt,
Alors, d'une part, que seul était réparable le préjudice causé directement par les dégâts de gibier résultant de l'institution de la zone interdite à la chasse ; qu'en appréciant l'indemnité par rapport à l'ensemble de la propriété, d'une superficie de 490 hectares, et non aux seuls parcelles atteintes par ces dégâts, la cour d'appel a méconnu le principe de la réparation du préjudice direct en violation des articles L.331-17 et R.331-58 du code de l'environnement ainsi que des articles L.241-12 et R.241-59 du code rural,
Alors, d'autre part, que selon les chiffres retenus par l'arrêt attaqué, la somme de 384.127 euros représente 31% de la valeur de l'ensemble de la propriété pour un prix de 2.500 euros à l'hectare et de 26% pour un prix de 3.000 euros, ce qui dépasse de deux à trois fois le pourcentage de 11 à 13% retenu par la cour d'appel et qu'en estimant néanmoins que l'indemnité n'était pas hors de proportion par rapport à ces taux, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile,
Alors, enfin, qu'en violation de l'article 4 du code de procédure civile, la cour d'appel a dénaturé les conclusions du Parc national des Cévennes ; qu'en effet, dans son mémoire récapitulatif, celui-ci avait contesté la prétention des consorts de Y... de faire un rapport entre le montant de l'indemnité et la valeur de la forêt tout entière et demandé que seule soit prise en considération la valeur des parcelles concernées par les dégâts.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné le Parc national des Cévennes à payer aux consorts de Y... et au Groupement forestier du bois d'ALTEFAGE une somme de 15.000 euros au titre des troubles de gestion,
Aux motifs que des frais et formalités avaient été directement engendrés par la nécessité d'intégrer et de quantifier le phénomène de surdensité des cervidés dans la politique de Groupement,
Alors qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu de nouveau le principe selon lequel seul le préjudice directement causé par les dégâts résultant de l'institution de la zone interdite à la chasse est réparable et a violé les articles L.331-17 et R.331-58 du code de l'environnement ainsi que les articles L.241-12 et R.241-59 du code rural.