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25/11/2009 | FRANCE | N°08-41382

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 novembre 2009, 08-41382


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 22 janvier 2008), que M. X... a été engagé le 28 octobre 1991 par la société Sotrapour, aux droits de laquelle vient la société Conneuil location, en qualité de conducteur routier ; qu'il a été licencié le 11 juin 2004 par lettre comportant les motifs suivants :"l'examen des disques de votre véhicule réalisé dans les premiers jours d'avril a permis de constater que vous laissez le chronotachygraphe en position de travail, alors que vous êtes en pause. Il en va de mÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 22 janvier 2008), que M. X... a été engagé le 28 octobre 1991 par la société Sotrapour, aux droits de laquelle vient la société Conneuil location, en qualité de conducteur routier ; qu'il a été licencié le 11 juin 2004 par lettre comportant les motifs suivants :"l'examen des disques de votre véhicule réalisé dans les premiers jours d'avril a permis de constater que vous laissez le chronotachygraphe en position de travail, alors que vous êtes en pause. Il en va de même pour les périodes où vous êtes à quai chez Dusolier à Tours. Vous aviez déjà été alerté dans le passé (courriers des 3 novembre 1998 et 26 juillet 2001), sur les erreurs de manipulation qui étaient constatées à la lecture de vos disques. Nous avons à déplorer des pertes de colis sur vos tournées des 17 mars et 15 avril 2004. De toute évidence vous n'avez pas vérifié la bonne fermeture ou le plombage de votre remorque" ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes tendant au versement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ que la lettre de licenciement énonçant les motifs de rupture fixe les limites du litige et les griefs non énoncés dans la lettre de licenciement ne peuvent être examinés par le juge ; qu'aux termes du règlement communautaire 3821/85 du 20 décembre 1985 concernant l'appareil de contrôle dans le domaine des transports par route, le signe «travail», qu'il est reproché au salarié dans la lettre de licenciement d'avoir actionné, ne se confond pas avec celui «temps de disponibilité», tous deux correspondant à des activités différentes ; qu'en reprochant néanmoins au salarié d'avoir actionné le commutateur sous le signe "temps de disponibilité" pour déclarer le licenciement justifié, la cour d'appel a violé l'article L. 122 14 2, devenu L. 1232 16 du code du travail ;

2°/ que la preuve du caractère réel et sérieux ou non du licenciement n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge ne peut se fonder exclusivement sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié ; que la cour d'appel a considéré que le salarié n'établissait pas ne pas être libre de vaquer à ses occupations personnelles durant ses temps d'attente dans les établissements Dusolier et en a déduit qu'il avait à tort positionné le commutateur sur la position «temps de disponibilité» ; qu'en se fondant sur ces seuls éléments fournis par le salarié pour dire le licenciement justifié, la cour d'appel lui a fait supporter la charge de la preuve et, partant, a violé l'article L. 122 14 3, alinéa 3, devenu L. 1235 1 du code du travail ;

Mais attendu, d'une part, que si la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux faits qui y sont énoncés, elle ne lie pas le juge quant aux qualifications qu'elle contient ; qu'ayant relevé que dans la lettre de licenciement qu'il avait adressée à son salarié, l'employeur lui reprochait des mauvaises manipulations du chronotachygraphe, c'est sans sortir des limites du litige que la cour d'appel a retenu que le salarié avait à tort positionné le commutateur sur la position "temps de disponibilité" ;

Et attendu, d'autre part, qu'appréciant souverainement l'ensemble des éléments de fait et de preuve produits par les deux parties, la cour d'appel a exercé les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235 1 du code du travail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le second moyen, pris d'une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes tendant au versement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE qu'il est constant que la journée de travail de Pascal X... s'organisait habituellement de la manière suivante : vers 19 h, mise à quai de son camion sur le site de la société CALBERSON à Gerzat, départ pour Tours vers 19 h 30, arrivée au établissements DUSOLIER à Tours vers 0 h, temps d'attente durant le déchargement et le chargement du camion par le personnel de la société DUSOLIER, vers 1 h 30, départ des établissements DUSOLIER et arrivée à Clermont-Ferrand vers 5 h 30/ 6 h ; qu' il est aussi constant que durant son temps d'attente à Tours, Pascal X... n'actionnait plus depuis un certain nombre de mois le dispositif de commutation de son chrono tachygraphe sous le signe "interruption de conduite et période de repos journalier" ; qu'il résulte de l'examen de ses disques qu'il l'actionnait sous le signe "temps de disponibilité" ; qu'en premier lieu que la lettre de licenciement énonce de manière précise les motifs de celui-ci, contrairement à ce que soutient Pascal X... dans ses écritures ; qu'en effet, elle contient des griefs qui sont matériellement vérifiables ; qu'en outre, l'absence de cause réelle et sérieuse ne saurait résulter du seul fait que les mauvaises manipulations du chrono tachygraphe reprochées dans la lettre de licenciement n'ont pas été datées ; qu'en second lieu au regard de l'article 15.3 du règlement (CEE) n° 3821/85 du Conseil du 20 décembre 1985 concernant l'appareil de contrôle dans le domaine des transports par route, le temps d'attente est la période pendant laquelle les conducteurs ne sont pas tenus de rester à leur poste de travail, sauf pour répondre à des appels éventuels afin d'entreprendre ou de reprendre la conduite ou de faire d'autres travaux ; qu'aux termes de l'article 3 de la directive 2002/15/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002, relative à l'aménagement du temps de travail des personnes exécutant des activités mobiles de transport routier, le temps de disponibilité correspond aux périodes autres que celles relatives aux temps de pause et aux temps de repos durant lesquelles le travailleur mobile n'est pas tenu de rester à son poste de travail, mais doit être disponible pour répondre à des appels éventuels lui demandant d'entreprendre ou de reprendre la conduite ou de faire d'autres travaux ; qu'il résulte de l'article 15.3 du règlement précité que le conducteur a l'obligation d'actionner correctement le sélecteur d'activité permettant d'enregistrer de façon distincte les quatre périodes de temps précisées par le règlement (soit les temps de conduite, les temps de travail autres que de conduite, les temps de disponibilité, les interruptions de conduite et les périodes de repos journalier) ; qu'il ne résulte pas des éléments du dossier, et spécialement des pièces produites par Pascal X..., que durant son temps d'attente dans les locaux des établissements DUSOLIER, il devait rester à la disposition de son employeur pour notamment reprendre la conduite, ou faire d'autres travaux sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en effet il est constant que Pascal X... ne procédait pas au déchargement et au rechargement de la remorque de son camion ; qu'il ne ressort pas des attestations de Serge Y... et de Stéphane Z... qu'il a produites que durant les temps de déchargement et de chargement de sa remorque, il n'était pas libre de vaquer à ses occupations personnelles ; que le fait que les établissements DUSOLIER mettait à la disposition des chauffeurs de la société CONNEUIL LOCATION une salle d'attente, n'implique par pour autant que ces derniers étaient obligés de s'y trouver, durant les opérations de chargement et de déchargement, afin de répondre à des appels éventuels de leur employeur ; qu' en tous cas, Pascal X... ne rapporte pas la preuve contraire, en dehors de ses seules affirmations ; qu'en conséquence que Pascal X... en s'abstenant de positionner le commutateur de son chrono tachygraphe sous le signe "interruption de conduite", après avoir effectué lors de son arrivée dans les locaux des établissements DUSOLIER toutes les opérations autres que de conduite (remplissage de carburant, décrochage de sa remorque...), et durant les opérations de déchargement et de rechargement de son camion, a contrevenu aux prescriptions de l'article 15.3 précité ; qu'il ressort des éléments du dossier que la société CONNEUIL LOCATION, par lettre du 3 novembre 1998, avait déjà indiqué à Pascal X... qu'il devait actionner le commutateur de l'appareil de contrôle sur la positions "repos" et non pas "mise à disposition", lorsqu'il se trouvait "en période de repos" dans les locaux des établissements DUSOLIER ; que selon une autre lettre du 11 juillet 2001, la société CONNEUIL LOCATION l'informait qu'elle lui avait demandé à plusieurs reprises de se "mettre en coupure chez DUSOLIER-TOURS" ; que dans ce courrier, elle lui indiquait qu'il avait positionné correctement le commutateur du chrono tachygraphe en avril et au début du mois de mai 2001 mais que depuis le 14 mai 2001, il le positionnait sous le signe "mise à disposition" et elle lui rappelait qu'il devait se mettre "en coupure", lorsqu'il était à Tours, de 0h à 1h30 ; que par lettre du 24 juillet 2001, Pascal X... a répondu à ce courrier en soutenant apprendre pour la première fois qu'il disposait d'un temps libre "dès la fin de son premier service et jusqu'à 1 h 15" ; qu'il a ajouté la phrase suivante : "dans un souci d'apaisement de la situation conflictuelle que vous avez créée et dans le bénéfice du doute je conçois de devoir me positionner en coupure jusqu'à preuve du contraire (attente réponse inspection du travail des transports) durant la période précitée. Je me soumettrais donc à vos directives" ; que par lettre du 26 juillet 2001, la société CONNEUIL LOCATION accusait réception du courrier de Pascal X... en date du 24 juillet 2001, et lui rappelait qu'il devait effectivement se mettre "en repos" à la fin de son service, soit entre 0 h et 1 h 15, ainsi que cela ressortait du courrier de l'inspection du travail en date du 16juillet 2001 dont il avait reçu copie, et qu'aucun doute ne devait donc subsister ; qu'il résulte clairement de ces courriers que Pascal X...', s'était engagé à partir du mois de juillet 2001 à actionner, sur la demande de son employeur, le dispositif de commutation de son appareil de contrôle sous le signe "interruption de conduite » ; qu'il n'établit pas que par la suite, la société CONNEUIL LOCATION ait donné des instructions en sens contraire ; que c'est donc en toute connaissance de cause, et à l'insu de cette dernière, qu'il a décidé de repositionner le commutateur sous le signe "temps de disponibilité", dans les mois qui ont précédé son licenciement, contrevenant ainsi tout à la fois aux dispositions de l'article 15-3 du règlement précité et aux instructions que lui avait données la société CONNEUIL LOCATION ; qu'en conséquence pour ce seul motif, le licenciement de Pascal X... procède d'une cause réelle et sérieuse ;

ALORS QUE la lettre de licenciement énonçant les motifs de rupture fixe les limites du litige et les griefs non énoncés dans la lettre de licenciement ne peuvent être examinés par le juge ; qu'aux termes du règlement communautaire 3821/85 du 20 décembre 1985 concernant l'appareil de contrôle dans le domaine des transports par route, le signe « travail », qu'il est reproché au salarié dans la lettre de licenciement d'avoir actionné, ne se confond pas avec celui « temps de disponibilité », tous deux correspondant à des activités différentes ; qu'en reprochant néanmoins au salarié d'avoir actionné le commutateur sous le signe « temps de disponibilité » pour déclarer le licenciement justifié, la Cour d'appel a violé l'article L. 122-14-2, devenu L. 1232-16 du Code du travail ;

ALORS encore QUE la preuve du caractère réel et sérieux ou non du licenciement n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge ne peut se fonder exclusivement sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié ; que la Cour d'appel a considéré que le salarié n'établissait pas ne pas être libre de vaquer à ses occupations personnelles durant ses temps d'attente dans les établissements DUSOLIER et en a déduit qu'il avait à tort positionné le commutateur sur la position « temps de disponibilité » ; qu'en se fondant sur ces seuls éléments fournis par le salarié pour dire le licenciement justifié, la Cour d'appel lui a fait supporter la charge de la preuve et, partant, a violé l'article L. 122-14-3, alinéa 3, devenu L. 1235-1 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes tendant au versement d'un rappel d'heures supplémentaires, les congés payés y afférents et d'une indemnité de repos compensateur ainsi qu'à la remise de bulletins de salaire et d'attestation ASSEDIC rectifiés ;

AUX MOTIFS QU'au regard des conclusions de Pascal X..., l'existence des heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées se déduit du seul fait que le temps passé dans les locaux de la société DUSOLIER aurait été "constitutif d'un temps de mise à disposition et donc de travail" ; que pour les motifs sus-exposés, il apparaît que le temps passé par Pascal X... à Tours dans sa journée de travail entre environ 0 h 15 et 1 h 30 ne pouvait pas être considéré comme du temps de travail effectif ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen s'étendra aux chefs du dispositif relatifs aux heures supplémentaires, aux congés payés y afférents et à l'indemnité de repos compensateur, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-41382
Date de la décision : 25/11/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 22 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 nov. 2009, pourvoi n°08-41382


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.41382
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