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10/11/2009 | FRANCE | N°08-43719;08-43720;08-43721

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 novembre 2009, 08-43719 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n°s M 08 43.719, N 08 43.720 et P 08 43.721 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Alcatel Submarine Networks (ASN) a connu une chute brutale de son activité au cours de l'année 2001 et a, au cours de l'année suivante et au début de l'année 2003, procédé à des licenciements de nombreux salariés pour des motifs personnels, semblables pour tous, et suivis de t

ransactions ; que MM. X..., Y... et Z... ont ainsi été licenciés respectivement...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n°s M 08 43.719, N 08 43.720 et P 08 43.721 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Alcatel Submarine Networks (ASN) a connu une chute brutale de son activité au cours de l'année 2001 et a, au cours de l'année suivante et au début de l'année 2003, procédé à des licenciements de nombreux salariés pour des motifs personnels, semblables pour tous, et suivis de transactions ; que MM. X..., Y... et Z... ont ainsi été licenciés respectivement par lettres du 2 août 2002, 27 juin 2002 et 21 juin 2002 ;
Attendu qu'après avoir annulé les transactions conclues avec les salariés, les arrêts disent les licenciements nuls, ordonnent la réintégration des intéressés et condamnent la société à les indemniser du préjudice résultant de la perte de salaire subie par eux entre le terme de leur préavis et leur réintégration, au motif que ces licenciements prononcés pour motif personnel résultent d'une fraude de l'employeur destinée à lui permettre d'éluder les dispositions impératives de l'article L. 321 4 du code du travail en sa rédaction antérieure au 1er mai 2008 qui l'obligent, à peine de nullité, dans les entreprises occupant au moins cinquante salariés, lorsqu'il décide pour des raisons économiques du licenciement d'au moins dix salariés dans une période de trente jours, à établir et mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ;
Qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions de l'employeur qui soutenait que les intéressés n'ayant pas deux ans d'ancienneté, les conséquences de leur licenciement illicite étaient régies par l'article L. 122 14 5 devenu en partie l'article L. 1235 14 du code du travail qui exclut la nullité du licenciement en cas de méconnaissance par l'employeur de ses obligations en matière de plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont dit nuls les licenciements de MM. X..., Y... et Z..., ordonné leur réintégration au sein de la société Alcatel Lucent Submarine Networks et condamné cette dernière à les indemniser du préjudice résultant de la perte de salaire subie par eux entre le terme de leur préavis et leur réintégration, les arrêts rendus le 3 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen commun produit au pourvoi n° M 08 43.719 par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour la société Alcatel Lucent Submarine Networks
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la transaction conclue le 8 août 2002, déclaré le salarié recevable en ses demandes, constaté la nullité de son licenciement, ordonné sa réintégration au sein de la société Alcatel Submarine Networks sur un poste équivalant à celui qu'il occupait à la date de la notification de son licenciement avec la rémunération correspondante actualisée, condamné la société à indemniser le salarié du préjudice résultant de la perte de salaire par lui subie entre le terme de son préavis et sa réintégration dans l'entreprise, condamné le salarié à rembourser à la société la somme de 50.000 euros en exécution de la transaction et renvoyé les parties à faire leurs comptes dans le délai de trois mois ; déclaré recevable l'intervention volontaire du syndicat union locale CGT de Chatou et condamné la société à verser à celui-ci la somme de 1.000 euros à titre de dommages intérêts ;
AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article 2044 du code civil la transaction est un contrat qui en conséquence doit satisfaire aux quatre conditions essentielles définies à l'article 1108 du même code pour emporter la validité d'une convention, à savoir le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter, un objet certain qui forme la matière de l'engagement, une cause licite dans l'obligation ; que sur cette dernière condition, il ne peut en effet être dérogé en vertu de l'article 6 du code civil par des conventions particulières aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs ; que partant, la cause d'une convention étant illicite dès que contraire à l'ordre public, il ne peut être transigé dans les matières intéressant celui-ci ; qu'en conséquence, la transaction ayant pour objet de mettre fin à toute contestation née ou à naître au titre d'un licenciement nul et pour cause un licenciement nul est nulle ; qu'or en considérant qu'est nul le licenciement pour motif personnel résultant d'une fraude de l'employeur destinée à lui permettre d'éluder les dispositions impératives de l'article L. 321-4 du code du travail en sa rédaction antérieure au 1er mai 2008 qui l'obligent à peine de nullité dans les entreprises occupant au moins cinquante salariés, lorsqu'il décide pour des raisons économiques du licenciement d'au moins dix salariés dans une période de trente jours, à établir et mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité ; qu'en l'espèce, la société ASN expose elle-même qu'après une période d'explosion du marché des télécommunications, dont le point d'orgue a été l'année 2000, la déréglementation et la privatisation à l'échelle mondiale du secteur des télécommunications, qui s'est traduit par l'apparition de nouveaux opérateurs et fournisseurs de service, ont abouti à une baisse très rapide des prix des services de télécommunications et en conséquence à l'écroulement général du marché des câbles sous-marins de télécommunications – haute technologie – fabriqués sur le site de Calais de l'entreprise, que dans ce contexte de nombreuses sociétés clientes ont dû entre 2001 et 2002 déposer leur bilan avec des conséquences dramatiques pour elle, que le comité central de la société a été informé lors d'une réunion du 30 mai 2001 de cette dégradation brutale du marché, que lors de la procédure d'information et de consultation sur les prévisions d'activité de l'entreprise et leurs conséquences sur l'emploi mise en oeuvre en 2001, le CCE s'est fait assister par le cabinet Syndex dont le rapport a été discuté le 8 novembre 2001, que la crise économique persistant la société initia une procédure d'information et de consultation sur la situation économique et les perspectives de l'entreprise en remettant à la réunion extraordinaire du 3 octobre 2002 aux élus les documents nécessaires, que cette procédure sur le fondement du Livre IV initiée en 2003 a été suivie d'une procédure d'information et de consultation sur un projet de licenciement collectif pour motif économique avec mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi portant sur 310 suppressions d'emplois en 2003 et 76 en 2004 ; que la société ASN reconnaît ainsi ne pas avoir mis en place en 2002, nonobstant ce contexte économique et l'annonce d'une réduction drastique des effectifs, un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'il s'évince des pièces produites qu'en effet, elle annonçait lors de la réunion du CCE du 20 mars 2002 l'objectif de réduction des effectifs de 1.427 personnes à 1000 à fin 2002 et concernant le site de Calais lors de la réunion de son comité d'établissement du 26 mars de la même année une réduction de 728 salariés (…) à 418 ; qu'au mois le mois, selon les comptes-rendus de réunions mensuelles du comité d'établissement de Calais, les « départs » de plus de six personnes étaient à chaque fois constatés ; qu'en définitive au 31 décembre 2002 l'effectif du site de Calais était ramené à 321 personnes ; que le licenciement de M. X... pour des motifs personnels peu circonstanciés et semblables à ceux évoqués la même année pour le licenciement de nombreux autres salariés et par conséquent fictifs, dans le contexte économique caractérisé ci-dessus, procède d'une fraude manifeste à la loi en l'absence d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que ce licenciement est nul et partant, la transaction signée entre les parties nulle pour cause illicite ; qu'au demeurant, nonobstant l'indemnisation forfaitaire allouée, d'un montant d'ailleurs équivalent à celui admis pour de nombreux autres salariés licenciés dans le même contexte les ayant conduit à transiger, la nullité de l'acte procède également de l'absence de concessions réciproques, M. X... ayant dû renoncer, dans ce contexte, aux droits procédant du plan de sauvegarde pour l'emploi ensuite mis en oeuvre, à savoir aux mesures définies à l'article L. 321-4-1 précité en vue du reclassement interne des salariés, créations d'activités nouvelles par l'entreprise, actions favorisant le reclassement externe de celui-ci, actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par le salarié, actions de formation, de validation des acquis, de l'expérience, de reconversion ; d'où il suit, en conséquence de la nullité de la transaction, que l'action est recevable ; que du fait de la nullité du licenciement venant en violation de l'article L. 321-4-1 précité la réintégration dans l'entreprise de M.
X...
doit être ordonnée dans un poste équivalent à celui qu'il occupait à la date de la rupture avec une rémunération équivalente et réactualisée ;
ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société faisant valoir que l'illicéité du licenciement n'avait pas pour conséquence la nullité du licenciement pour les salariés ayant moins de deux ans d'ancienneté ni leur réintégration dans l'entreprise (pp. 27 et 32 des conclusions d'appel, cf. production), la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile.

Moyen commun produit au pourvoi n° N 08 43.720 par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour la société Alcatel Lucent Submarine Networks
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la transaction conclue le 2 juillet 2002, déclaré le salarié recevable en ses demandes, constaté la nullité de son licenciement, ordonné sa réintégration au sein de la société Alcatel Submarine Networks sur un poste équivalant à celui qu'il occupait à la date de la notification de son licenciement avec la rémunération correspondante actualisée, condamné la société à indemniser le salarié du préjudice résultant de la perte de salaire par lui subie entre le terme de son préavis et sa réintégration dans l'entreprise, condamné le salarié à rembourser à la société la somme de 50.000 euros en exécution de la transaction et renvoyé les parties à faire leurs comptes dans le délai de trois mois ; déclaré recevable l'intervention volontaire du syndicat union locale CGT de Chatou et condamné la société à verser à celui-ci la somme de 1.000 euros à titre de dommages intérêts ;
AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article 2044 du code civil la transaction est un contrat qui en conséquence doit satisfaire aux quatre conditions essentielles définies à l'article 1108 du même code pour emporter la validité d'une convention, à savoir le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter, un objet certain qui forme la matière de l'engagement, une cause licite dans l'obligation ; que sur cette dernière condition, il ne peut en effet être dérogé en vertu de l'article 6 du code civil par des conventions particulières aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs ; que partant, la cause d'une convention étant illicite dès que contraire à l'ordre public, il ne peut être transigé dans les matières intéressant celui-ci ; qu'en conséquence, la transaction ayant pour objet de mettre fin à toute contestation née ou à naître au titre d'un licenciement nul et pour cause un licenciement nul est nulle ; qu'or en considérant qu'est nul le licenciement pour motif personnel résultant d'une fraude de l'employeur destinée à lui permettre d'éluder les dispositions impératives de l'article L. 321-4 du code du travail en sa rédaction antérieure au 1er mai 2008 qui l'obligent à peine de nullité dans les entreprises occupant au moins cinquante salariés, lorsqu'il décide pour des raisons économiques du licenciement d'au moins dix salariés dans une période de trente jours, à établir et mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité ; qu'en l'espèce, la société ASN expose elle-même qu'après une période d'explosion du marché des télécommunications, dont le point d'orgue a été l'année 2000, la déréglementation et la privatisation à l'échelle mondiale du secteur des télécommunications, qui s'est traduit par l'apparition de nouveaux opérateurs et fournisseurs de service, ont abouti à une baisse très rapide des prix des services de télécommunications et en conséquence à l'écroulement général du marché des câbles sous-marins de télécommunications – haute technologie – fabriqués sur le site de Calais de l'entreprise, que dans ce contexte de nombreuses sociétés clientes ont dû entre 2001 et 2002 déposer leur bilan avec des conséquences dramatiques pour elle, que le comité central de la société a été informé lors d'une réunion du 30 mai 2001 de cette dégradation brutale du marché, que lors de la procédure d'information et de consultation sur les prévisions d'activité de l'entreprise et leurs conséquences sur l'emploi mise en oeuvre en 2001, le CCE s'est fait assister par le cabinet Syndex dont le rapport a été discuté le 8 novembre 2001, que la crise économique persistant la société initia une procédure d'information et de consultation sur la situation économique et les perspectives de l'entreprise en remettant à la réunion extraordinaire du 3 octobre 2002 aux élus les documents nécessaires, que cette procédure sur le fondement du Livre IV initiée en 2003 a été suivie d'une procédure d'information et de consultation sur un projet de licenciement collectif pour motif économique avec mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi portant sur 310 suppressions d'emplois en 2003 et 76 en 2004 ; que la société ASN reconnaît ainsi ne pas avoir mis en place en 2002, nonobstant ce contexte économique et l'annonce d'une réduction drastique des effectifs, un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'il s'évince des pièces produites qu'en effet, elle annonçait lors de la réunion du CCE du 20 mars 2002 l'objectif de réduction des effectifs de 1.427 personnes à 1000 à fin 2002 et concernant le site de Calais lors de la réunion de son comité d'établissement du 26 mars de la même année une réduction de 728 salariés (…) à 418 ; qu'au mois le mois, selon les comptes-rendus de réunions mensuelles du comité d'établissement de Calais, les « départs » de plus de six personnes étaient à chaque fois constatés ; qu'en définitive au 31 décembre 2002 l'effectif du site de Calais était ramené à 321 personnes ; que le licenciement de M. Y... pour des motifs personnels peu circonstanciés et semblables à ceux évoqués la même année pour le licenciement de nombreux autres salariés et par conséquent fictifs, dans le contexte économique caractérisé ci-dessus, procède d'une fraude manifeste à la loi en l'absence d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que ce licenciement est nul et partant, la transaction signée entre les parties nulle pour cause illicite ; qu'au demeurant, nonobstant l'indemnisation forfaitaire allouée, d'un montant d'ailleurs équivalent à celui admis pour de nombreux autres salariés licenciés dans le même contexte les ayant conduit à transiger, la nullité de l'acte procède également de l'absence de concessions réciproques, M. Y... ayant dû renoncer, dans ce contexte, aux droits procédant du plan de sauvegarde pour l'emploi ensuite mis en oeuvre, à savoir aux mesures définies à l'article L. 321-4-1 précité en vue du reclassement interne des salariés, créations d'activités nouvelles par l'entreprise, actions favorisant le reclassement externe de celui-ci, actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par le salarié, actions de formation, de validation des acquis, de l'expérience, de reconversion ; d'où il suit, en conséquence de la nullité de la transaction, que l'action est recevable ; que du fait de la nullité du licenciement venant en violation de l'article L. 321-4-1 précité la réintégration dans l'entreprise de M.
Y...
doit être ordonnée dans un poste équivalent à celui qu'il occupait à la date de la rupture avec une rémunération équivalente et réactualisée ;
ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société faisant valoir que l'illicéité du licenciement n'avait pas pour conséquence la nullité du licenciement pour les salariés ayant moins de deux ans d'ancienneté ni leur réintégration dans l'entreprise (pp. 27 et 32 des conclusions d'appel, cf. production), la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile.

Moyen commun produit au pourvoi n° P 08 43.721 par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour la société Alcatel Lucent Submarine Networks
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la transaction conclue le 26 juin 2002, déclaré le salarié recevable en ses demandes, constaté la nullité de son licenciement, ordonné sa réintégration au sein de la société Alcatel Submarine Networks sur un poste équivalant à celui qu'il occupait à la date de la notification de son licenciement avec la rémunération correspondante actualisée, condamné la société à indemniser le salarié du préjudice résultant de la perte de salaire par lui subie entre le terme de son préavis et sa réintégration dans l'entreprise, condamné le salarié à rembourser à la société la somme de 50.000 euros en exécution de la transaction et renvoyé les parties à faire leurs comptes dans le délai de trois mois ; déclaré recevable l'intervention volontaire du syndicat union locale CGT de Chatou et condamné la société à verser à celui-ci la somme de 1.000 euros à titre de dommages intérêts ;
AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article 2044 du code civil la transaction est un contrat qui en conséquence doit satisfaire aux quatre conditions essentielles définies à l'article 1108 du même code pour emporter la validité d'une convention, à savoir le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter, un objet certain qui forme la matière de l'engagement, une cause licite dans l'obligation ; que sur cette dernière condition, il ne peut en effet être dérogé en vertu de l'article 6 du code civil par des conventions particulières aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs ; que partant, la cause d'une convention étant illicite dès que contraire à l'ordre public, il ne peut être transigé dans les matières intéressant celui-ci ; qu'en conséquence, la transaction ayant pour objet de mettre fin à toute contestation née ou à naître au titre d'un licenciement nul et pour cause un licenciement nul est nulle ; qu'or en considérant qu'est nul le licenciement pour motif personnel résultant d'une fraude de l'employeur destinée à lui permettre d'éluder les dispositions impératives de l'article L. 321-4 du code du travail en sa rédaction antérieure au 1er mai 2008 qui l'obligent à peine de nullité dans les entreprises occupant au moins cinquante salariés, lorsqu'il décide pour des raisons économiques du licenciement d'au moins dix salariés dans une période de trente jours, à établir et mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité ; qu'en l'espèce, la société ASN expose elle-même qu'après une période d'explosion du marché des télécommunications, dont le point d'orgue a été l'année 2000, la déréglementation et la privatisation à l'échelle mondiale du secteur des télécommunications, qui s'est traduit par l'apparition de nouveaux opérateurs et fournisseurs de service, ont abouti à une baisse très rapide des prix des services de télécommunications et en conséquence à l'écroulement général du marché des câbles sous-marins de télécommunications – haute technologie – fabriqués sur le site de Calais de l'entreprise, que dans ce contexte de nombreuses sociétés clientes ont dû entre 2001 et 2002 déposer leur bilan avec des conséquences dramatiques pour elle, que le comité central de la société a été informé lors d'une réunion du 30 mai 2001 de cette dégradation brutale du marché, que lors de la procédure d'information et de consultation sur les prévisions d'activité de l'entreprise et leurs conséquences sur l'emploi mise en oeuvre en 2001, le CCE s'est fait assister par le cabinet Syndex dont le rapport a été discuté le 8 novembre 2001, que la crise économique persistant la société initia une procédure d'information et de consultation sur la situation économique et les perspectives de l'entreprise en remettant à la réunion extraordinaire du 3 octobre 2002 aux élus les documents nécessaires, que cette procédure sur le fondement du Livre IV initiée en 2003 a été suivie d'une procédure d'information et de consultation sur un projet de licenciement collectif pour motif économique avec mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi portant sur 310 suppressions d'emplois en 2003 et 76 en 2004 ; que la société ASN reconnaît ainsi ne pas avoir mis en place en 2002, nonobstant ce contexte économique et l'annonce d'une réduction drastique des effectifs, un plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'il s'évince des pièces produites qu'en effet, elle annonçait lors de la réunion du CCE du 20 mars 2002 l'objectif de réduction des effectifs de 1.427 personnes à 1000 à fin 2002 et concernant le site de Calais lors de la réunion de son comité d'établissement du 26 mars de la même année une réduction de 728 salariés (…) à 418 ; qu'au mois le mois, selon les comptes-rendus de réunions mensuelles du comité d'établissement de Calais, les « départs » de plus de six personnes étaient à chaque fois constatés ; qu'en définitive au 31 décembre 2002 l'effectif du site de Calais était ramené à 321 personnes ; que le licenciement de M. Z... pour des motifs personnels peu circonstanciés et semblables à ceux évoqués la même année pour le licenciement de nombreux autres salariés et par conséquent fictifs, dans le contexte économique caractérisé ci-dessus, procède d'une fraude manifeste à la loi en l'absence d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que ce licenciement est nul et partant, la transaction signée entre les parties nulle pour cause illicite ; qu'au demeurant, nonobstant l'indemnisation forfaitaire allouée, d'un montant d'ailleurs équivalent à celui admis pour de nombreux autres salariés licenciés dans le même contexte les ayant conduit à transiger, la nullité de l'acte procède également de l'absence de concessions réciproques, M. Z... ayant dû renoncer, dans ce contexte, aux droits procédant du plan de sauvegarde pour l'emploi ensuite mis en oeuvre, à savoir aux mesures définies à l'article L. 321-4-1 précité en vue du reclassement interne des salariés, créations d'activités nouvelles par l'entreprise, actions favorisant le reclassement externe de celui-ci, actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par le salarié, actions de formation, de validation des acquis, de l'expérience, de reconversion ; d'où il suit, en conséquence de la nullité de la transaction, que l'action est recevable ; que du fait de la nullité du licenciement venant en violation de l'article L. 321-4-1 précité la réintégration dans l'entreprise de M.
Z...
doit être ordonnée dans un poste équivalent à celui qu'il occupait à la date de la rupture avec une rémunération équivalente et réactualisée ;
ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société faisant valoir que l'illicéité du licenciement n'avait pas pour conséquence la nullité du licenciement pour les salariés ayant moins de deux ans d'ancienneté ni leur réintégration dans l'entreprise (pp. 27 et 32 des conclusions d'appel, cf. production), la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-43719;08-43720;08-43721
Date de la décision : 10/11/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 nov. 2009, pourvoi n°08-43719;08-43720;08-43721


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.43719
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