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10/11/2009 | FRANCE | N°08-41249

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 novembre 2009, 08-41249


Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1134-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 15 juillet 1998 par la société Coder en qualité de monteur manutentionnaire ; que la société a été placée en redressement judiciaire et un plan de cession a été adopté par jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 7 novembre 2003 ; que M. X... a été licencié pour motif économique ; qu'estimant ne pas avoir été rempli de ses droits du fait d'une discrimination raciale dont il affirmait

avoir été victime, la salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une deman...

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1134-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 15 juillet 1998 par la société Coder en qualité de monteur manutentionnaire ; que la société a été placée en redressement judiciaire et un plan de cession a été adopté par jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 7 novembre 2003 ; que M. X... a été licencié pour motif économique ; qu'estimant ne pas avoir été rempli de ses droits du fait d'une discrimination raciale dont il affirmait avoir été victime, la salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour débouter le salarié, la cour d'appel a retenu que M. X... n'occupait pas le même emploi que M. Y... et n'avait pas le même niveau de qualification que ce dernier, ce qui rendait impossible toute comparaison de leur rémunération, y compris en ce qui concernait les primes ; que la comparaison ne portait que sur neuf mois, et était insuffisante pour laisser présumer une discrimination ; que les variations des primes d'ancienneté, de productivité et de qualité ne sont pas sujettes à caution et qu'il était certain que les primes de productivité et de qualité variaient en fonction de la prestation fournie par le salarié et du bénéfice de l'entreprise ;
Attendu cependant que, selon le texte susvisé, lorsque le salarié invoque une discrimination raciale, notamment en matière d'embauchage, de rémunération, de formation professionnelle, d'avancement, il appartient au salarié concerné, de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, et à la partie adverse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étranger à toute discrimination ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors que le salarié faisait valoir qu'il ne percevait plus, depuis 1998, la prime d'incommodité attribuée à tous les autres salariés et qu'il ne bénéficiait qu'irrégulièrement et pour des montants variables des primes de productivité et de qualité, sans cause connue, ce dont il se déduisait que ces éléments laissaient présumer l'existence d'une discrimination, en sorte qu'il appartenait à l'employeur de démontrer que les conditions d'octroi et le montant de ces primes étaient justifiés par des motifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Coder et M. Z..., ès qualités, aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, les condamne à payer à la SCP Gatineau et Fattaccini la somme de 2 500 euros, à charge par cette dernière de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes,
AUX MOTIFS PROPRES QUE le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille de diverses demandes relatives à des primes qu'il n'aurait pas perçues du fait d'une discrimination raciale dont il aurait été victime ; que l'article L. 122-45 du Code du travail dispose que le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination ; qu'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une atteinte au principe de non-discrimination ; que ces éléments de fait ne sont pas rapportés en l'espèce ; que le salarié se contente d'alléguer que les primes ne lui ont plus été versées que de façon aléatoire à compter de l'année 1998 ; que pour établir qu'il était le seul à pâtir de cette situation, il se contente de fournir un bulletin de salaire d'un autre salarié, Monsieur Y... ; qu'en l'espèce X... Mohamed occupait dans la société CODER un emploi de monteur manutentionnaire niveau II P1 ; que les bulletins de paie du salarié mentionnent le paiement de certaines primes : une prime d'ancienneté, une prime de productivité et une prime de qualité ; que X... Mohamed produit les bulletins de salaire de Monsieur Y... du mois de janvier 2003 au mois de septembre 2003 ; que ce salarié occupait l'emploi de peintre dans la société CODER avec la qualification niveau II P2 ; que tous les bulletins de salaire de Monsieur Y... du mois de janvier au mois d'août mentionnent le paiement d'une prime d'ancienneté, d'une prime d'incommodité, d'une prime de qualité ainsi que d'une prime de productivité ; que le bulletin de salaire du mois de septembre 2003 mentionne seulement le paiement d'une prime d'ancienneté et d'une prime d'incommodité ; qu'il résulte de ces éléments que X... Mohamed n'occupait pas le même emploi que Monsieur Y... et n'avait pas le même niveau de qualification que ce dernier, ce qui rend impossible toute comparaison de leur rémunération, y compris en ce qui concerne les primes ; que par ailleurs, la comparaison ne porte que sur neuf mois pendant lesquels Monsieur Y... a perçu ces primes régulièrement pendant les huit premiers mois ; que cet élément de comparaison est donc insuffisant pour laisser présumer une discrimination à l'encontre de l'appelant ; que par ailleurs à l'examen des bulletins de salaire fournis par le salarié, il apparaît clairement que le demandeur a touché des primes pendant la période considérée, de 1998 à 2003, date de son licenciement (départ volontaire pour motif économique) ; qu'apparaissent clairement les postes : primes d'ancienneté, de productivité et de qualité ; que les variations du montant de ces primes ne sont pas sujettes à caution ; qu'en effet il est certain que les primes de productivité et de qualité varient en fonction de la prestation fournie par le salarié et du bénéfice de l'entreprise ; qu'en outre, en examinant les bulletins de paie, on s'aperçoit que les primes sont également réduites en cas d'absences de l'entreprise pour diverses raisons (congés, maladies, congé sans solde) ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, il ne saurait donc y avoir discrimination puisque ces variations sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que contrairement aux affirmations de l'appelant, la charge de la preuve n'incombe pas à l'employeur mais doit être répartie sur les deux parties en cause ; que le salarié ne pouvant apporter le moindre commencement de preuve pouvant laisser croire qu'il aurait été victime d'une discrimination, il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas produire l'ensemble des bulletins de salaire des autres ouvriers de l'entreprise ; qu'en tout état de cause, le salarié n'avait aucun droit au maintien de la prime à un certain montant ; qu'en effet, ces gratifications, de par l'absence d'un caractère constant et général, ne sont pas devenues des éléments contractuels de salaire ; que l'inspection du travail a d'ailleurs bien relevé que ces primes n'étaient pas uniformes pour tous les salariés et variaient en fonction de différents critères objectifs (courrier du 26. 09. 2003) ; que si ces primes étaient certaines en leur principe, leur montant n'était pas garanti ; que le salarié ne peut donc demander un rappel de salaire correspondant à la différence entre ce qu'il a perçu et ce à quoi il estimait avoir droit ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ; que la règle générale « à travail égal, salaire égal » résulte des dispositions des articles L. 133-5 4° et L. 136-2 8° du Code du travail ; que ne méconnaît pas le principe « à travail égal salaire égal » l'employeur qui justifie par des raisons objectives et matériellement vérifiables la différence de rémunération entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale ; qu'en l'espèce, Monsieur X... occupait dans la société CODER un emploi de monteur manutentionnaire niveau II P1 ; que les bulletins de paie de Monsieur X... mentionnent le paiement de certaines primes : une prime d'ancienneté, une prime de productivité et prime de qualité dont le paiement comporte certaines irrégularités, sans qu'on en connaisse la cause ; que ce salarié occupait l'emploi de peintre dans la société CODER avec la qualification niveau II P2 ; que Monsieur X... produit les bulletins de salaire de Monsieur Y... du mois de janvier 2003 au mois de septembre 2003 ; que tous les bulletins de salaire de Monsieur Y... du mois de janvier au mois d'août mentionnent le paiement d'une prime d'ancienneté, d'une prime d'incommodité, d'une prime de qualité ainsi que d'une prime de productivité ; que le bulletin de salaire du mois de septembre 2003 mentionne seulement le paiement d'une prime d'ancienneté et d'une prime d'incommodité ; qu'il résulte de ces éléments que X... Mohamed n'occupait pas le même emploi que Monsieur Y... et n'avait pas le même niveau de qualification que ce dernier, ce qui rend impossible toute comparaison de leur rémunération, y compris en ce qui concerne les primes ; que par ailleurs, la comparaison ne porte que sur neuf mois pendant lesquels Monsieur Y... a perçu ces primes régulièrement pendant les huit premiers mois ; que dans ces conditions la discrimination salariale n'est pas démontrée ;
1. ALORS QU'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge les éléments de fait laissant supposer une discrimination et qu'il incombe à l'employeur, s'il conteste le caractère discriminatoire du traitement réservé au salarié, d'établir que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté par l'employeur que des primes d'ancienneté, de productivité, de qualité et d'incommodité non prévues par la convention collective étaient versées au personnel de l'entreprise sans distinction de catégorie ; qu'il résulte de l'arrêt que Monsieur X... ne percevait que les primes d'ancienneté, de productivité et de qualité, et qu'il les percevait de façon irrégulière sans cause connue, et pour des montants variables (arrêt, p. 4, deux derniers § et jugement, p. 5, § 5) ; qu'était ainsi rapportée la preuve d'éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1315 du Code civil et L. 122-45 alinéa 4, devenu L. 1134-1 du Code du travail ;
2. ALORS QU'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge les éléments de fait laissant supposer une discrimination et qu'il incombe à l'employeur, s'il conteste le caractère discriminatoire du traitement réservé au salarié, d'établir que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, le salarié ayant apporté des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination dans l'attribution et le montant des primes d'ancienneté, de productivité, de qualité et d'incommodité ; il appartenait à l'employeur de justifier des critères précis et objectifs étrangers à toute discrimination servant à l'attribution de ces primes et à la détermination de leur montant, et de démontrer que les variations dans les primes versées à Monsieur X... et le défaut de versement de la prime d'incommodité résultaient de l'application de ces critères ; qu'en se bornant, pour dire les variations dans le montant des primes justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, à relever qu'« il est certain que les primes de productivité et de qualité varient en fonction de la prestation fournie par le salarié et du bénéfice de l'entreprise » et qu'au vu des bulletins de paie, « les primes sont également réduites en cas d'absences de l'entreprise pour diverses raisons », sans exiger de l'employeur qu'il définisse précisément les critères présidant à l'attribution des primes litigieuses et explique en quoi Monsieur X... n'y répondait pas ou pas entièrement les mois où il avait perçu un montant plus faible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-45 alinéa 4 devenu L. 1134-1 du Code du travail ;
3. ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, dans sa lettre du 26 septembre 2003, l'inspecteur du travail a relevé que les primes de productivité et de qualité n'étaient pas uniformes, mais n'a aucunement indiqué qu'elles variaient en fonction de critères objectifs ; qu'en relevant à l'appui de sa décision que l'inspection du travail avait indiqué, dans son courrier du 26 septembre 2003, que ces primes n'étaient pas uniformes pour tous les salariés et variaient en fonction de différents critères objectifs, la cour d'appel a dénaturé ce document et violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-41249
Date de la décision : 10/11/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 nov. 2009, pourvoi n°08-41249


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.41249
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