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03/11/2009 | FRANCE | N°08-18260

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 novembre 2009, 08-18260


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Albingia ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 juin 2008), que, par un acte du 18 février 2000, l'EURL Les Halles (EURL) a confié à M. X..., architecte, une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour la réhabilitation d'un immeuble ; que la société MCCM a été pressentie pour réaliser des travaux de réhabilitation ; que, le 27 août 2001, M. X... a remis les clés à la société Maçonnerie couverture charpente menuiserie (MCCM), qui a démarré le chantier ;

que, le 24 septembre 2001, des parties extérieures de l'immeuble se sont effondré...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Albingia ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 juin 2008), que, par un acte du 18 février 2000, l'EURL Les Halles (EURL) a confié à M. X..., architecte, une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour la réhabilitation d'un immeuble ; que la société MCCM a été pressentie pour réaliser des travaux de réhabilitation ; que, le 27 août 2001, M. X... a remis les clés à la société Maçonnerie couverture charpente menuiserie (MCCM), qui a démarré le chantier ; que, le 24 septembre 2001, des parties extérieures de l'immeuble se sont effondrées ; qu‘après expertise, l'EURL a assigné M. X..., son assureur la société Mutuelles des architectes français (MAF), la société MCCM, son assureur la société Aviva et les sociétés Azur et Albingia prises en leurs qualités respectives d'assureur de responsabilité civile de l'EURL et d'assureur de responsabilité du marchand de biens ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, ci après annexé :
Attendu qu'ayant constaté que la société MCCM était en charge d'un chantier de rénovation, la cour d'appel, qui a retenu que les démolitions entreprises étaient le préalable obligé à la rénovation de l'immeuble, ce qui n'impliquait pas que la société MCCM fût une société de démolition mais une entreprise de maçonnerie générale amenée dans le cadre d'un chantier déterminé à procéder à des démolitions ponctuelles d'existants, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique des deux pourvois incidents, réunis :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour dire que M. X... n'était pas responsable des dommages subis par l'EURL l'arrêt retient que si effectivement il reconnaît avoir remis les clés du futur chantier à la société MCCM, celle ci en tant que professionnelle savait qu'elle ne pouvait débuter les travaux sans ordre de service et aurait dû prendre les précautions d'usage pour ce type de travaux alors que l'expert a constaté, lors de l'effondrement des murs intérieurs, que "les travaux en cours n'ont fait l'objet d'aucune étude particulière, notamment au niveau sécurité et que les dispositions d'étayage ne tiennent absolument pas compte de l'état des ouvrages existants", que cette absence de précaution est évidemment sans lien avec la remise des clés, que l'architecte était d'autant plus fondé à ne pas s'inquiéter de la réalisation des travaux que l'entreprise MCCM n'avait pas reçu d'ordre de service pour les réaliser et qu'il était entendu qu'elle ne devait procéder qu'au nettoyage préalable du futur chantier, que la société MCCM n'a pas informé l'architecte de l'initiative qu'elle a prise en débutant les travaux puisqu'il a découvert leur état d'avancement lorsqu'il a été averti de l'effondrement de l'intérieur de l'immeuble et qu'il apparaît évident que le fait générateur des désordres réside dans l'absence de précautions prises par la société MCCM dans la réalisation et que la remise des clés par M. X... est sans lien causal direct avec le sinistre ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé si, à réception d'une télécopie du maître de l'ouvrage informant l'architecte le 20 septembre 2001 du démarrage du chantier à son insu, l'inertie de ce dernier qui n'y avait pas répondu, ne s'était pas enquis de la situation auprès de l'entrepreneur et ne lui avait pas interdit d'effectuer toute prestation supplémentaire, ne constituait pas une faute contractuelle en lien direct avec le dommage survenu postérieurement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a réformé le jugement en ce qu'il avait déclaré M. X... responsable des dommages subis par l'EURL à hauteur de 50 % et condamné la MAF à la garantir, en ce qu'il a dit que la remise des clés par M. X... à l'entreprise MCCM ne constituait pas une cause directe des dommages subis par l'EURL et en ce qu'il a dit que la société MCCM était seule responsable des dommages causés à l'immeuble de l'EURL, l'arrêt rendu le 5 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne, ensemble, M. X... et la société MAF aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne, ensemble, M. X... et la société MAF à payer à la société Aviva assurances la somme de 2 500 euros et à l'EURL Les Halles la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Aviva assurances.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRÊT infirmatif ATTAQUE d'avoir dit que Monsieur X... n'était pas responsable des dommages subis par l'EURL LES HALLES dans son immeuble du 37 rue de Paris à DOUAI ;
AUX MOTIFS QU' il est établi que la société EURL LES HALLES a confié à Monsieur X..., architecte, une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation des travaux de réhabilitation de l'immeuble dont elle est propriétaire au 37 rue de Paris à DOUAI ; Que Monsieur X... avait pressenti l'entreprise MCCM pour lui confier les travaux de rénovation qui devaient débuter fin août 2001 ; Qu'il a, à la demande de l'entreprise, remis les clefs avant même que les documents contractuels ne soient signés par le maître de l'ouvrage ce qui a permis à la société MCCM d'entreprendre les travaux alors qu'elle n'avait respecté aucune des obligations administratives ou contractuelles puisqu'elle n'avait pas reçu d'ordre de service et n'avait pas procédé à la déclaration d'ouverture de chantier ; Que les premiers travaux de nettoyage ont été poursuivis par ceux de démolition d'une partie des existants, tel que prévu aux devis pour reconstruire et réaménager l'entier immeuble ; Que les travaux ayant été entrepris sans aucune précaution, ils provoquaient l'effondrement de l'intérieur de l'immeuble et justifiaient l'intervention en urgence afin de dégager ce qui menaçait ruine ; Qu'aux termes de ses opérations expertales, Monsieur Z... a conclu au partage de responsabilité entre l'architecte qui a commis une faute en remettant les clefs à l'entreprise et la société MCCM qui a réalisé les travaux ; Que Monsieur X... conclut à sa mise hors de cause au motif que la remise des clefs est sans lien avec la survenance des désordres qui doivent être imputés à la seule entreprise ; Que la responsabilité de l'architecte ne peut être recherchée que sur le fondement de l'article 1147 du code civil ; Que la responsabilité des dommages ne peut être mise pour partie à la charge de l'architecte que s'il est démontré que la remise des clefs, pour intempestive qu'elle soit, a une relation causale directe avec les désordres constatés ; Que si effectivement Monsieur X... reconnaît avoir remis les clefs du futur chantier à la société MCCM, celle-ci en tant que professionnel savait qu'elle ne pouvait débuter les travaux sans ordre de service ni sans déclaration d'ouverture de chantier et, en tout état de cause, elle aurait dû prendre les précautions d'usage pour ce type de travaux alors que l'expert a constaté, lors de ses visites des 24 et 25 septembre 2001, lors de l'effondrement des murs intérieurs, «les travaux en cours n'avaient fait l'objet d'aucune étude particulière, notamment au niveau sécurité et que les dispositions d'étayage ne tenaient absolument pas compte de l'état des ouvrages existants » ; Que cette absence de précaution est évidemment sans lien avec la remise des clés ; Que l'architecte était d'autant plus fondé à ne pas s'inquiéter de la réalisation des travaux que l'entreprise MCCM n'avait pas reçu d'ordre de service pour les réaliser et qu'il était entendu qu'elle ne devait procéder qu'au nettoyage préalable du futur chantier ; Qu'en tout état de cause, même si elle avait agi dans un cadre juridique conforme aux dispositions réglementaires, la société MCCM aurait réalisé les travaux de la même façon ; Que la société MCCM n'a pas informé l'architecte de l'initiative qu'elle a pris en débutant les travaux puisqu'il a découvert leur état d'avancement lorsqu'il a été averti de l'effondrement de l'intérieur de l'immeuble ; Qu'il apparaît évident que le fait générateur des désordres réside dans l'absence de précautions prises par la société MCCM dans la réalisation des travaux et que la remise des clés par Monsieur X... est sans lien causal direct avec le sinistre ;
ALORS premièrement QUE tout jugement doit à peine de nullité être motivé ; Que le motif hypothétique équivaut au défaut de motifs ; Qu'en exonérant l'architecte X... de toute responsabilité pour défaut de surveillance du chantier et de vérification de sa conformité aux dispositions réglementaires aux motifs qu' «en tout état de cause, même si elle avait agi dans un cadre juridique conforme aux dispositions réglementaires, l'entreprise MCCM aurait réalisé les travaux de la même façon », la cour s'est déterminée par des motifs hypothétiques pour écarter le lien causal entre le comportement de l'architecte et le sinistre, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS deuxièmement QUE le débiteur engage sa responsabilité à raison de l'inexécution de son obligation contractuelle ; Que pour écarter toute responsabilité de l'architecte, la Cour a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux, non dans la simple remise des clés par l'architecte à l'insu du maître de l'ouvrage ; Qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée par la société AVIVA, si la remise des clefs à fins de nettoyage, comme le prétendait l'architecte, ne constituait pas un début d'exécution du marché dès lors que ce nettoyage était prévu au devis et, partant, une faute contractuelle en lien direct avec le dommage, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
ALORS troisièmement QUE le débiteur engage sa responsabilité à raison de l'inexécution de son obligation contractuelle ; Que pour écarter toute responsabilité de l'architecte, la Cour a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux, non dans la simple remise des clés par l'architecte à l'insu du maître de l'ouvrage ; Qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée par la société AVIVA si, à réception d'une télécopie du maître de l'ouvrage informant l'architecte le 20 septembre 2001 du démarrage du chantier à son insu, l'inertie de ce dernier qui n'y avait pas répondu, ne s'était pas enquis de la situation auprès de l'entrepreneur et ne lui avait pas interdit d'effectuer toute prestation supplémentaire, ne constituait pas une faute contractuelle en lien direct avec le dommage survenu 4 jours après, alors qu'entretemps l'entrepreneur continuait ses travaux, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
ALORS quatrièmement QUE plusieurs fautes successives imputables à des auteurs différents peuvent concourir à la production d'un même dommage ; Que la faute initiale sans laquelle l'accident ne se serait pas produit est en relation avec le préjudice subi par la victime qui peut en demander réparation à son auteur ; Que pour écarter toute responsabilité de l'architecte dans la destruction de l'immeuble qu'il avait reçu pour mission complète de rénover, la Cour a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux, que la simple remise des clés à cet entrepreneur par l'architecte est sans lien direct avec le sinistre ; Qu'en statuant ainsi après avoir néanmoins constaté que cette remise s'était déroulée à l'insu du maître de l'ouvrage qui n'avait signé aucun document contractuel et donné aucun ordre de service, d'où il résulte que sans cette faute initiale de l'architecte, qui n'a ensuite pas surveillé l'entrepreneur, les travaux n'auraient jamais débuté, le sinistre ne se serait en conséquence pas produit, et que la victime peut ainsi en demander réparation, la Cour n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, en violation des articles 1147 et 1151 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRÊT ATTAQUE d'avoir dit que la société AVIVA sera tenue de garantir l'entreprise MCCM pour les dommages subis par l'EURL LES HALLES dans l'immeuble du 37 rue de Paris à DOUAI dont elle a été déclarée responsable ;
AUX MOTIFS QUE la société MCCM est assurée auprès de la compagnie AVIVA ; Que celle-ci dénie sa garantie au motif que la société MCCM n'est pas assurée pour l'activité de démolition alors que le devis de gros oeuvre comprend un poste démolition qui représente la moitié du coût global des prestations ; Mais si l'argumentation de la compagnie AVIVA serait recevable si l'activité principale de la société était la démolition ; Qu'en l'espèce, alors que la société MCCM est en charge d'un chantier de rénovation, il va sans dire que les démolitions entreprises sont le préalable obligé à la rénovation de l'immeuble ce qui n'implique pas que la société MCCM soit une société de démolition pure mais une entreprise de maçonnerie générale amenée dans le cadre d'un chantier déterminé à procéder à des démolitions ponctuelles d'existants ; Que le sinistre est intervenu alors que l'entreprise procédait à la création d'une ouverture et aucunement à la démolition de l'immeuble ;
ALORS QUE si le contrat d'assurance responsabilité obligatoire que doit souscrire tout constructeur ne peut comporter des clauses d'exclusion autres que celles prévues à l'article A. 243-1 du Code des assurances, la garantie de l'assureur ne concerne que le secteur d'activité professionnelle déclaré par le constructeur ; Que la garantie est exclue lorsque les travaux au cours desquels se produit le sinistre sortent de l'activité déclarée au contrat ; Qu'ayant constaté que la société MCCM avait souscrit dans le cadre de sa responsabilité civile une police dont les conditions particulières signalaient qu'elle n'exerçait les travaux de démolition qu'à titre accessoire et complémentaire, la Cour ne pouvait retenir que la garantie de l'assureur s'appliquait à un sinistre survenu à l'occasion d'un chantier où le poste démolition représentait plus de la moitié du coût global de la prestation ; Qu'en accordant cependant la garantie d'AVIVA au motif, général et inopérant, que les travaux de rénovation comportent nécessairement une part accessoire de démolition, la Cour a violé ensemble les articles 1134 du Code civil et 241-1 du Code des assurances ;

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société EURL Les Halles.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Monsieur X... n'était pas responsable des dommages subis par l'EURL LES HALLES dans son immeuble du 37 rue de Paris à DOUAI ;
AUX MOTIFS QU'il est établi que la société EURL LES HALLES a confié à Monsieur X..., architecte, une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation des travaux de réhabilitation de l'immeuble dont elle est propriétaire au 37 rue de Paris à DOUAI ; que Monsieur X... avait pressenti l'entreprise MCCM pour lui confier les travaux de rénovation qui devaient débuter fin d'août 2001 ; qu'il a, à la demande de l'entreprise, remis les clefs avant même que les documents contractuels ne soient signés par le maître de l'ouvrage ce qui a permis à la société MCCM d'entreprendre les travaux alors qu'elle n'avait respecté aucune des obligations administratives ou contractuelles puisqu'elle n'avait pas reçu d'ordre de service et n'avait pas procédé à la déclaration d'ouverture de chantier ; que les premiers travaux de nettoyage ont été poursuivis par ceux de démolition d'une partie des existants, tel que prévu aux devis pour reconstruire et réaménager l'entier immeuble ; que les travaux ayant été entrepris sans aucune précaution, ils provoquaient l'effondrement de l'intérieur de l'immeuble et justifiait l'intervention en urgence afin de dégager ce qui menaçait de tomber en ruine ; qu'aux termes de ces opérations expertales, Monsieur Z... a conclu au partage de responsabilité entre l'architecte qui a commis une faute en remettant les clefs à l'entreprise et la société MCCM qui a réalisé les travaux ; que Monsieur X... conclus à sa mise hors de cause au motif que la remise des clefs est sans lien avec la survenance des désordres qui doivent être imputés à la seule entreprise ; que la responsabilité de l'architecte ne peut être recherchée que sur le fondement de l'article 1147 du Code civil ; que la responsabilité des dommages ne peut être mise pour partie à la charge de l'architecte que s'il est démontré que la remise des clefs, pour intempestive qu'elle soit, a une relation causale directe avec les désordres constatés ; que si effectivement Monsieur X... reconnaît avoir remis les clefs du futur chantier à la société MCCM, celle-ci en tant que professionnel savait qu'elle ne pouvait débuter les travaux sans ordre de service ni sans déclaration d'ouverture de chantier et, en tout état de cause, elle aurait dû prendre les précautions d'usage pour ce type de travaux alors que l'expert a constaté, lors de ses visites des 24 et 25 septembre 2001, lors de l'effondrement des murs intérieurs, «les travaux en cours n'avaient fait l'objet d'aucune étude particulière, notamment au niveau sécurité et que les dispositions d'étayage ne tenaient absolument pas compte de l'état des ouvrages existants» ; que cette absence de précaution est évidemment sans lien avec la remise des clefs ; que l'architecte est d'autant plus fondé à ne pas s'inquiéter de la réalisation des travaux que l'entreprise MCCM n'avait pas reçu d'ordre de service pour les réaliser et qu'il était entendu qu'elle ne devait procéder qu'au nettoyage préalable du futur chantier ; qu'en tout état de cause, même si elle avait agi dans un cadre juridique conforme aux dispositions réglementaires, la société MCCM aurait réalisé les travaux de la même façon ; que la société MCCM n'a pas informé l'architecte de l'initiative qu'elle a prise en débutant les travaux puisqu'il a découvert leur état d'avancement lorsqu'il a été averti de l'effondrement de l'intérieur de l'immeuble ; qu'il apparaît évident que le fait générateur des désordres réside dans l'absence de précautions prises par la société MCCM dans la réalisation des travaux et que la remise des clés par Monsieur X... est sans lien causal direct avec le sinistre ;
1°) ALORS QUE tout jugement doit à peine de nullité être motivé et que le motif hypothétique équivaut à un défaut de motif ; qu'en exonérant l'architecte X... de toute responsabilité pour défaut de surveillance du chantier et de vérification de sa conformité aux dispositions réglementaires aux motifs qu' «en tout état de cause, même si elle avait agi dans un cadre juridique conforme aux dispositions réglementaires, l'entreprise MCCM aurait réalisé les travaux de la même façon», la Cour d'appel s'est déterminée par des motifs hypothétiques pour écarter le lien causal entre le comportement de l'architecte et le sinistre, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le débiteur engage sa responsabilité à raison de l'inexécution de son obligation contractuelle ; que pour écarter toute responsabilité de l'architecte, la Cour d'appel a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux et non dans la simple remise des clés par l'architecte à l'insu du maître de l'ouvrage ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la remise des clés à fins de nettoyage, comme le prétendait l'architecte, ne constituait pas un début d'exécution du marché dès lors que ce nettoyage était prévu au devis et, partant, une faute contractuelle en lien direct avec le dommage, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
3°) ALORS OUE le débiteur engage sa responsabilité à raison de l'inexécution de son obligation contractuelle ; que pour écarter toute responsabilité de l'architecte, la Cour d'appel a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux et non dans la simple remise des clés par l'architecte à l'insu du maître de l'ouvrage ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée si, à réception d'une télécopie du maître de l'ouvrage informant l'architecte le 20 septembre 2001 du démarrage du chantier à son insu, l'inertie de ce dernier qui n'avait pas répondu, ne s'était pas enquis de la situation auprès de l'entrepreneur et ne lui avait pas interdit d'effectuer toute prestation supplémentaire, ne constituait pas une faute contractuelle en lien direct avec le dommage survenu 4 jours après, alors qu'entre-temps l'entrepreneur continuait les travaux, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
4°) ALORS OUE plusieurs fautes successives imputables à des auteurs différents peuvent concourir à la production d'un même dommage ; que la faute initiale sans laquelle l'accident de ne se serait pas produit est en relation avec le préjudice subi par la victime qui peut en demander réparation à son auteur ; que pour écarter toute responsabilité de l'architecte dans la destruction de l'immeuble qu'il avait reçu pour mission complète de rénover, la Cour d'appel a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux, que la simple remise des clés à cet entrepreneur par l'architecte est sans lien direct avec le sinistre ; qu'en statuant ainsi après avoir néanmoins constaté que cette remise s'était déroulée à l'insu du maître de l'ouvrage qui n'avait signé aucun document contractuel et donné aucun ordre de service, d'où il résulte que sans cette faute initiale de l'architecte, qui n'a ensuite pas surveillé l'entrepreneur, les travaux n'auraient jamais débuté, le sinistre ne se serait en conséquence pas produit, et que la victime pouvait ainsi en demander réparation, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, en violation des articles 1147 et 1151 du Code civil.

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Maçonnerie couverture charpente menuiserie (MCCM).
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la remise des clés par M. X... à l'entreprise MCCM ne constitue pas une cause directe des dommages subis par la société EURL LES HALLES ;
Aux motifs que « M. X... avait pressenti l'entreprise MCCM pour lui confier les travaux de rénovation qui devaient débuter fin août 2001 ; qu'il a, à la demande de l'entreprise remis les clés avant même que les documents contractuels ne soient signés par le maître de l'ouvrage ce qui a permis à la société MCCM d'entreprendre les travaux alors qu'elle n'avait respecté aucune des obligations administratives ou contractuelles puisqu'elle n'avait pas reçu d'ordre de service et n'avait pas procédé à la déclaration d'ouverture de chantier ; que les premiers travaux de nettoyage ont été poursuivis par ceux de démolition d'une partie des existants tel que prévu aux devis pour reconstruire et réaménager l'entier immeuble ; que les travaux ayant été entrepris sans aucune précaution, ils provoquaient l'effondrement de l'intérieur de l'immeuble et justifiaient l'intervention en urgence afin de dégager ce qui menaçait ruine ; qu'aux termes de ses opérations expertales, M. Z... a conclu au partage de responsabilité entre l'architecte qui à commis une faute en remettant les clés à l'entreprise et la société MCCM qui a réalisé les travaux ; que M. X... conclut à sa mise hors de cause au motif que la remise des clés est sans lien avec la survenance des désordres qui doivent être imputés à la seule entreprise ; que la responsabilité de l'architecte ne peut être recherchée que sur le fondement de l'article 1147 du Code civil ; que la responsabilité des dommages ne peut être mise pour partie à la charge de l'architecte que s'il est démontré que la remise des clés pour intempestive qu'elle soit à une relation causale directe avec les désordres constatés ; que si effectivement M. X... reconnaît avoir remis les clés du futur chantier à la société MCCM, celle-ci en tant que professionnelle savait qu'elle ne pouvait débuter les travaux sans ordre de service ni sans déclaration d'ouverture de chantier et en tout état de cause elle aurait du prendre les précautions d'usage pour ce type de travaux alors que l'expert a constaté lors de ses visites des 24 et 25 septembre 2001, lors de l'effondrement des murs intérieurs que « les travaux en cours n'avaient fait l'objet d'aucune étude particulière, notamment au niveau sécurité et que les dispositions d'étayage ne tenaient absolument pas compte de l'état des ouvrages existants » ; que cette absence de précaution est évidemment sans lien avec la remise des clés ; que l'architecte était d'autant plus fondé à ne pas s'inquiéter de la réalisation des travaux que l'entreprise MCCM n'avait pas reçu d'ordre de service pour les réaliser et qu'il était entendu qu'elle ne devait procéder qu'au nettoyage préalable du futur chantier ; qu'en tout état de cause même si elle avait agi dans un cadre juridique conforme aux dispositions réglementaires, la société MCCM aurait réalisé les travaux de la même façon ; que la société MCCM n'a pas informé l'architecte de l'initiative qu'elle a pris en débutant les travaux puisqu'il a découvert leur état d'avancement lorsqu'il a été averti de l'effondrement de l'intérieur de l'immeuble ; qu'il apparaît évident que le fait générateur des désordres réside dans l'absence de précautions prises par la société MCCM dans la réalisation et que la remise des clés par M. X... est sans lien causal direct avec le sinistre » (arrêt attaqué, pp. 5-6).
1°) Alors d'une part que tout jugement doit être motivé ; que le motif hypothétique équivaut à un défaut de motifs ; qu'en exonérant M. X... de toute responsabilité aux motifs « qu'en tout état de cause même si elle avait agi dans un cadre juridique conforme aux dispositions réglementaires, la société MCCM aurait réalisé les travaux de la même façon », la cour d'appel a manqué à son obligation de motivation, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) Alors d'autre part que le débiteur engage sa responsabilité contractuelle à raison de l'inexécution de son obligation contractuelle ; que pour écarter toute responsabilité de l'architecte, la cour d'appel a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux, et non dans la simple remise des clés par l'architecte à l'insu du maître de l'ouvrage ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée, si la remise des clés à fins de nettoyage, comme le prétendait l'architecte, ne constituait pas un début d'exécution du marché dès lors que ce nettoyage était prévu au devis et, partant, une faute contractuelle en lien direct avec le dommage, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
3°) Alors de troisième part que le débiteur engage sa responsabilité contractuelle à raison de l'inexécution de son obligation contractuelle ; que pour écarter toute responsabilité de l'architecte, la cour d'appel a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux, non dans la simple remise des clés par l'architecte à l'insu du maître de l'ouvrage ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée si, à la réception d'une télécopie du maître de l'ouvrage informant l'architecte le 20 septembre 2001 du démarrage du chantier à son insu, l'inertie de ce dernier qui n'y avait pas répondu, ne s'était pas enquis de la situation auprès de l'entrepreneur et ne lui avait pas interdit d'effectuer toute prestation supplémentaire, ne constituait pas une faute contractuelle en lien direct avec le dommage survenu 4 jours plus tard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
4°) Alors de quatrième part que plusieurs fautes successives imputables à des auteurs différents peuvent concourir à la production d'un même dommage ; que la faute initiale sans laquelle l'accident ne se serait pas produit est en relation avec le préjudice subi par la victime qui peut en demander réparation à son auteur ; que pour écarter toute responsabilité de l'architecte dans la destruction de l'immeuble qu'il avait reçu pour mission complète de rénover, la cour d'appel a considéré que le fait générateur des désordres résidait dans l'absence de précautions prises par l'entrepreneur dans la réalisation des travaux, que la simple remise des clés à cet entrepreneur par l'architecte est sans lien direct avec le sinistre ; qu'en statuant ainsi après avoir néanmoins constaté que cette remise s'était déroulée à l'insu du maître de l'ouvrage qui n'avait signé aucun document contractuel ni donné aucun ordre de service, d'où il résulte que sans cette faute initiale de l'architecte, qui n'a ensuite pas surveillé l'entrepreneur, les travaux n'auraient jamais débuté, le sinistre ne se serait en conséquence pas produit, et que la victime peut ainsi en demander réparation, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 1147 et 1151 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-18260
Date de la décision : 03/11/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 03 nov. 2009, pourvoi n°08-18260


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche, SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.18260
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