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28/10/2009 | FRANCE | N°08-18614

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 28 octobre 2009, 08-18614


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix en Provence, 19 mai 2008), que, suivant un acte descriptif de division du 2 décembre 1998, la SCI Lapierre Lunel (SCI) a procédé à la division en volumes des parcelles qu'elle avait acquises, a fait édifier sur ces volumes deux immeubles contigus nommés Les Terrasses de Sextius et Les Jardins de Mozart et a fait construire dans la cour de l'immeuble Les Terrasses de Sextius un extracteur de désenfumage servant à l'immeuble Les Jardins de Mozart ; que le syndicat de

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix en Provence, 19 mai 2008), que, suivant un acte descriptif de division du 2 décembre 1998, la SCI Lapierre Lunel (SCI) a procédé à la division en volumes des parcelles qu'elle avait acquises, a fait édifier sur ces volumes deux immeubles contigus nommés Les Terrasses de Sextius et Les Jardins de Mozart et a fait construire dans la cour de l'immeuble Les Terrasses de Sextius un extracteur de désenfumage servant à l'immeuble Les Jardins de Mozart ; que le syndicat des copropriétaires des Terrasses de Sextius a assigné la SCI en enlèvement de cette installation et en paiement de dommages intérêts ; que, selon un acte du 22 janvier 2003, le "syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Sextius" a donné autorisation expresse et irrévocable, à titre de servitude réelle et perpétuelle, au "syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins de Mozart", d'implanter sur l'assiette de la copropriété "Les Terrasses de Sextius" l'extracteur de désenfumage ainsi que tous réseaux, conduites et canalisations nécessaires au bon fonctionnement de cet extracteur déjà mis en place et qui resteront la propriété de la résidence "Les Jardins de Mozart" ; que les 5 et 15 novembre 2004, le syndicat des copropriétaires Les Terrasses de Sextius a assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins de Mozart, le notaire, et la SCI en annulation de cet acte et paiement de dommages intérêts ; que les deux procédures ont été jointes ;

Sur les première, troisième et quatrième branches du moyen unique, ci après annexé :

Attendu qu'ayant constaté que les deux immeubles dépendant des copropriétés en cause étaient édifiés chacun dans différents volumes de l'état descriptif de division du 2 décembre 1998 et constituaient une opération unique, relevé que cet état créait différentes servitudes et permettait à la SCI Lapierre Lunel (SCI) de positionner différentes canalisations, appareillages et notamment toutes ventilations mécaniques nécessaires aux constructions édifiées sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'accord préalable des acquéreurs ou des syndicats puisqu'il était prévu que les servitudes existeraient de plein droit du seul fait de l'existence d'un des volumes, qu'il était intégré dans les règlements de copropriété des deux immeubles et était publié à la conservation des hypothèques, la cour d'appel, qui a retenu qu'il était opposable à l'ensemble des syndicats de copropriété et des acquéreurs, que l'extracteur de désenfumage lequel était indispensable à la sécurité de l'immeuble Les Jardins de Mozart relevait des servitudes qui y étaient prévues de plein droit et que ces servitudes étaient nécessaires à la réalisation de l'immeuble, a, procédant aux recherches prétendument omises, légalement justifié sa décision ;

Mais sur la deuxième branche du moyen :

Vu les articles 14 de la loi du 10 juillet 1965 et 1984 du code civil ;

Attendu que la collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile ; que le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ;

Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de l'acte du 22 janvier 2003, l'arrêt retient que cet acte intitulé "constitution de servitude" passé en vertu d'un mandat donné à la SCI conforme aux énonciations de l'article R. 261 5 du code de la construction et de l'habitation contenu dans les règlements de copropriété Les Terrasses de Sextius et dans l'ensemble des actes de vente, répond aux prévisions du mandat et formalise une servitude existant de plein droit en vertu de l'état descriptif de division en volumes et nécessaire à la réalisation de l'immeuble ;

Qu'en statuant ainsi, sans que l'assemblée générale des copropriétaires ait donné mandat à la SCI de la représenter à cet acte, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le syndicat des copropriétaires Les Terrasses de Sextius de sa demande d'annulation de l'acte du 22 janvier 2003, l'arrêt rendu le 19 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Maintient la condamnation aux dépens prononcée par les juges du fond ;

Partage les dépens du présent arrêt ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires Les Terrasses de Sextius 135 avenue Armand Lunel à Aix en Provence.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté le syndicat des copropriétaires des Terrasses de Sextius de ses demandes tendant à l'annulation de l'acte du 22 janvier 2003, au paiement de dommages-intérêts, à la démolition de l'extracteur d'air édifié sur son terrain et à la remise en état des lieux, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

AUX MOTIFS QUE la SCI appelante fait grief au jugement querellé de n'avoir pas répondu à son moyen de droit tiré de la consécration de la servitude litigieuse existant de plein droit en vertu des énonciations de l'état descriptif de division en volumes du 2 décembre 1998 ; que les copropriétés intimées opposent à cette argumentation le fait que les servitudes particulières stipulées dans l'état descriptif de division ne mentionnent pas l'extracteur implanté sur le terrain de la résidence Les Terrasses de Sextius ; que, certes, les servitudes particulières stipulées dans l'état descriptif de division (page 13, chapitre V paragraphe d) ne visent pas l'équipement en cause ; que, cependant, les deux immeubles dépendant des copropriétés en cause ont été édifiés chacun dans différents volumes de l'état descriptif de division du 2 décembre 1998 et constituent une opération unique ; qu'à ce titre, l'état de division en volumes prévoit les droits et obligations des propriétaires des volumes et crée différentes servitudes ; qu'ainsi le cinquième paragraphe « servitudes » (page 11) stipule : « L'imbrication des volumes et des constructions à réaliser exige, au sein du présent état descriptif de division, la constitution des servitudes perpétuelles et réciproques de caractère réel au regard desquelles chaque volume dépendant de l'état descriptif de division sera tout à la fois fonds dominant et fonds servant, notamment en ce qui concerne : l'appui et l'accrochage, les vues et les prospects, les surplombs nécessaires aux constructions prévues à l'intérieur desdits volumes. Ces servitudes existeront de plein droit du seul fait de l'existence des volumes. a) servitude de canalisations, d'appareillages et de réseaux divers : les volumes, objet du présent état de division seront grevés l'un par rapport à l'autre, à titre réel et perpétuel, des servitudes concernant les canalisations, appareillages et réseaux divers : passage des divers réseaux notamment eau, gaz, électricité, PTT, éclairage, égout, ventilation mécanique contrôlée, chauffage, climatisation, etc. nécessaires aux constructions édifiées à l'intérieur desdits volumes » ; que, comme le soutient la SCI appelante, cet acte lui permettait de positionner différentes canalisations, appareillages et notamment toutes ventilations mécaniques nécessaires aux constructions édifiées sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'accord préalable des acquéreurs ou des syndicats puisque les servitudes en question « existeront de plein droit du seul fait de l'existence d'un des volumes » ; que l'état descriptif de division est intégré dans les règlements de copropriété des deux immeubles, publié à la conservation des hypothèques et donc opposable à l'ensemble des syndicats de copropriété et des acquéreurs ; que l'extracteur de désenfumage répondant aux prévisions de l'état descriptif de division en volumes et relevant des servitudes prévues de plein droit par ledit état descriptif a ainsi été installé sans méconnaître les droits des copropriétés intimées ; que la demande de suppression de cet équipement sera donc rejetée, d'autant qu'en cause d'appel, la SCI a justifié par les pièces produites devant la cour d'appel (courrier du bureau de contrôle Veritas du 27 avril 1999, télécopies de cet organisme des 20 avril et 20 juillet 2007) que cet extracteur, dont l'utilité n'avait pas été mise en évidence en première instance, est indispensable à la sécurité de l'immeuble Les Jardins de Mozart comme permettant d'évacuer les fumées en cas d'incendie des circulaires du rez-de-chaussée et du premier étage ;

ET AUX MOTIFS QUE, concernant l'annulation de l'acte du 22 janvier 2003 prononcée par le jugement déféré, s'il est incontestable que seule l'assemblée générale d'une copropriété est habilitée à prendre des dispositions relatives à la constitution d'une servitude, ce principe n'a, en l'espèce, pas été méconnu eu égard aux données spécifiques de la cause, comme le font valoir la SCI et le notaire instrumentaire ; que l'acte litigieux a, en effet, été passé en vertu d'un mandat donné par la SCI Lapierre Lunel, conforme aux énonciations de l'article R. 261-5 du code de la construction et de l'habitation, contenu tant dans les règlements de copropriété Les Terrasses de Sextius que dans l'ensemble des actes de vente et stipulant notamment : « Les copropriétaires successifs, sans que cala ouvre à leur profit droit à une indemnité quelconque, reconnaissent ici expressément à la société réalisatrice tous pouvoirs : 1. Pour apporter au programme les modifications qui lui paraîtraient nécessaires, utiles ou opportunes. A cet effet, déposer toutes demandes de permis de construire modificatif ou complémentaire. Les plans et pièces complémentaires ou modificatifs qui résulteront de l'exercice par la société de ces droits seront déposés comme compléments des présentes, à ses frais, et sur sa seule comparution, au rang des minutes de l'office notariale dépositaire des présentes, auprès duquel sera requise la formalité de publicité au bureau des hypothèques. Une expédition de cet acte sera remise au syndic. 2. Pour passer tous actes de disposition portant sur les parties communes et qui se révéleraient nécessaires pour satisfaire aux prescriptions d'urbanisme, aux exigences du permis de construire et ses modificatifs, aux obligations imposées par les délibérations et les arrêtés pour l'aménagement de la ZAC Sextius Mirabeau dont dépend l'ensemble immobilier, objet des présentes, ainsi qu'à celles de l'administration et des services concédés. 3. Pour procéder à toutes acquisitions, cessions de mitoyenneté, de vue, de terrains, de droit de passage piétons, véhicules, canalisations tant aériennes que souterraines, de raccordement, de branchements aux réseaux de la propriété, et d'une manière générale, pour effectuer toutes cessions ou acquisitions, quels qu'en soient l'objet ou la forme qui se révéleraient nécessaires, utiles ou opportunes à la réalisation de l'immeuble ou de la ZAC Sextius Mirabeau dont il dépend. 4. Pour passer tous accords de servitude actives ou passives avec tous autres utilisateurs des voies et réseaux divers de l'immeuble et de la ZAC Sextius Mirabeau dont il dépend » ; que l'acte répond bien aux prévisions des paragraphes 3 et 4 du mandat et formalise une servitude existant de plein droit en vertu de l'état descriptif de division en volumes et nécessaires à la réalisation de l'immeuble ; que le contenu de l'acte fait apparaître qu'il n'a fait que confirmer la réalité de la situation au regard des constructions existantes ; qu'il est destiné à régir entre les deux copropriétés : les modalités d'intervention du syndicat des copropriétaires Les Jardins de Mozart sur l'ouvrage concerné, la prise en charge exclusive de l'intégralité des frais relatifs à cet ouvrage par la copropriété les Jardins de Mozart de sorte que le syndicat de copropriété Les Terrasses de Sextius ne puisse en aucun cas être recherché de ce fait ; que la nullité de l'acte en cause n'est donc pas encourue de sorte que le jugement sera infirmé de ce chef ainsi que de l'octroi de dommages intérêts à la copropriété Les Terrasses de Sextius ;

ALORS, en premier lieu, QUE l'état descriptif de division en volumes du 2 décembre 1998 prévoyait uniquement la constitution de plein droit de servitudes réciproques liées à l'imbrication des volumes et des constructions et non pas la constitution de plein droit d'une servitude permettant l'édification par le promoteur, sur le terrain d'assiette de l'un des immeubles, d'une construction destinée à servir exclusivement un immeuble voisin ; que, dès lors, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si, aux termes de l'état descriptif de division en volumes, l'existence de servitudes de plein droit n'était pas limitée aux seules servitudes réciproques, de sorte qu'il n'autorisait pas la SCI Lapierre-Lunel à faire édifier sur les parties communes de l'immeuble Les Terrasses de Sextius un extracteur de désenfumage dans l'intérêt exclusif de l'immeuble Les Jardins de Mozart, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

ALORS, en deuxième lieu, QUE le mandat donné par les acquéreurs au vendeur d'immeuble à construire dans les conditions de l'article R. 261-5 du code de la construction et de l'habitation n'autorise pas le vendeur à conclure au nom du syndicat des copropriétaires de l'immeuble, personne juridique distincte des acquéreurs, une convention de servitude grevant les parties communes de l'immeuble ; qu'en refusant de prononcer la nullité de l'acte du 22 janvier 2003 passé par la SCI Lapierre-Lunel au nom du syndicat des copropriétaires, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les mandats signés par les acquéreurs, dont la SCI se prévalait, l'autorisaient à passer pour le compte du syndicat des copropriétaires un acte de disposition grevant les parties communes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1984 et 1988 du code civil et R. 261-5 du code de la construction et de l'habitation ;

ALORS, en troisième lieu, QUE, selon l'article R. 261-5 du code de la construction et de l'habitation, l'objet du mandat que le vendeur d'immeuble à construire peut exiger des acquéreurs est limité, soit à la passation des actes indispensables à la construction du bâtiment formant l'objet de la vente, soit à la passation des actes indispensables à la construction d'autres bâtiments mais à la condition que ces bâtiments comportent des parties communes avec celui objet de la vente ; qu'en l'espèce, le syndicat des copropriétaires des Terrasses de Sextius avait fait valoir que la SCI ne pouvait pas se prévaloir du mandat donné par les acquéreurs en application de l'article R. 261-5 du code de la construction et de l'habitation pour passer l'acte du 22 janvier 2003 dès lors que cet acte avait pour effet de créer une servitude au profit d'un bâtiment distinct qui ne comportait aucune partie commune avec celui objet de la vente ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, pourtant déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, en quatrième lieu, QUE le mandat prévu par l'article R. 261-5 du code de la construction et de l'habitation doit, en principe, être exprès et spécial ; qu'il ne peut être dérogé à cette règle que pour les actes de dispositions portant sur les parties communes et qui se révéleraient nécessaires à assurer la conformité du bâtiment, objet de la vente, aux règles d'urbanisme ou au permis de construire ou encore à assurer sa desserte ou son raccordement aux réseaux de distribution et aux services publics ; qu'appliquant ces principes, le jugement entrepris avait considéré que la SCI Lapierre-Lunel ne pouvait se prévaloir des mandats généraux donnés en application de l'article R. 261-5 du code de la construction pour consentir à un immeuble voisin une servitude grevant les parties communes de l'immeuble, objet de la vente, dès lors que cette servitude n'avait ni pour objet d'assurer le respect des prescriptions d'urbanismes ou du permis de construire, ni pour effet d'assurer la desserte du bâtiment ou son raccordement aux réseaux de distribution et aux services publics ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces motifs cependant que le syndicat des copropriétaires avait demandé la confirmation du jugement, sans ajouter de nouveaux moyens, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954, dernier alinéa du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-18614
Date de la décision : 28/10/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 28 oct. 2009, pourvoi n°08-18614


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.18614
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