LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Michel,
I-contre l'arrêt n° 77 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 24 janvier 2007, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de meurtre et vol avec tortures ou actes de barbarie, a prononcé sur une requête en annulation d'actes de la procédure ;
II-contre l'arrêt de la même chambre de l'instruction en date du 9 juillet 2009, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises des YVELINES sous l'accusation de meurtre et de vol avec tortures ou actes de barbarie ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
I-Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 24 janvier 2007 :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 105, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué (Versailles, 24 janvier 2007) a rejeté la demande de Michel X... tendant à l'annulation de la procédure ;
" aux motifs que le médecin légiste, ayant procédé à l'examen médico-légal du corps de Willy Y..., a conclu que celui-ci avait subi des sévices causés pour partie par un objet contondant angulaire, pour partie par un objet coupant et pour partie par un instrument perçant ; que, parmi les objets découverts sur les lieux du crime, figuraient une perceuse, un mandrin, une mèche et une masse ensanglantée ; que, de l'ensemble des constatations médicolégales, il ressortait que ces sévices avaient été subis ante mortem et avaient provoqué la mort ; que des constatations policières opérées sur les lieux, il résultait que les agresseurs avaient été au nombre de deux ; que c'est au vu de ces éléments que le procureur de la République a délivré un réquisitoire introductif en qualifiant les faits de meurtre accompagné, suivi ou précédé d'actes de torture et de barbarie ; que c'est à la faveur du rapprochement entre le profil génétique d'une des deux personnes dont les empreintes avaient été relevées en avril 1996 au domicile de Willy Y... et celui de Michel X..., inscrit au FNAEG, que celui-ci a été interpellé ; qu'avant de procéder à cette interpellation, une expertise génétique ordonnée par le juge d'instruction a conclu, le 10 juillet 2006, que ses caractéristiques correspondaient à celle du " deuxième homme " ; qu'en l'absence d'explication de la part de Michel X..., la seule présence de ses empreintes génétiques sur les lieux de la découverte du corps sans vie de Willy Y... n'était pas de nature à constituer à son encontre des indices graves et concordants d'avoir participé à des faits de vol et d'homicide volontaire avec tortures et actes de barbarie dont le juge d'instruction était saisi ; que le rapprochement génétique et les conclusions de l'expertise précités justifiaient, cependant, que Michel X..., à l'encontre duquel existait une raison plausible de le soupçonner d'avoir commis l'une des infractions objet de l'instruction, soit entendu sous le régime de la garde à vue afin que les enquêteurs le questionnent sur ces constatations ; que les pièces de l'information permettent de vérifier que Michel X... a été informé, dès son placement en garde à vue, que cette mesure se fondait sur la découverte, le 16 avril 1996 de son ADN dans le pavillon de Willy Y... ; qu'il a déclaré sur ce point : " j'ai bien pris acte du motif de ma présence dans vos locaux, à savoir l'enquête que vous effectuez sur commission rogatoire suite au meurtre de Willy Y... dont le cadavre a été retrouvé le 16 avril 1996 à son domicile du... de La Celle Saint-Cloud après qu'il ait subi des actes de torture et des actes de barbarie. Vous m'indiquez que mon ADN a été retrouvé sur les lieux, je peux vous fournir les explications suivantes. Je n'ai rien à voir avec ce que vous me reprochez, Je ne comprends pas " ; qu'il a alors spontanément affirmé n'avoir " rien à voir avec ce que vous me reprochez " ; que cette attitude de dénégation justifiait la poursuite de ses auditions et son maintien en garde à vue ; qu'il a été ensuite questionné sur ses activités professionnelles, sa situation personnelle à l'époque des faits, soit dix ans plus tôt ; que Michel X... a indiqué ne connaître ni la commune de La Celle Saint-Cloud ni la victime, assuré ne pas être allé dans les lieux où les faits s'étaient déroulés ; que ces contestations, venant en contradiction avec les éléments génétiques recueillis, dont le mis en cause avait pleinement connaissance, justifiaient encore la poursuite de la garde à vue, en l'absence d'indices graves et concordants à l'encontre de Michel X... ; que c'est lors de la quatrième audition que Michel X... a modifié sa position et accepté de reconnaître s'être trouvé sur les lieux le 16 avril 1996 ; que toutefois, il a fourni des faits une version ne concordant pas, notamment, avec les constatations relatives à la présence d'une autre personne dont les empreintes avaient été relevées ; que, sur ce point il a soutenu et jusqu'au terme de sa garde à vue, avoir été seul dans les lieux ; que, sur les circonstances entourant le décès de Willy Y..., il a décrit que celles-ci avaient eu pour origine l'agression dont lui-même avait fait l'objet de la part de celui-ci alors qu'il explorait le pavillon qu'il croyait vide d'occupant ; que, sur les violences, il indiquait " d'après mes souvenirs, je ne l'ai frappé qu'avec la perceuse " en ajoutant en fin d'audition, ne l'avoir frappé qu'au visage ; que, surtout, il a déclaré avoir laissé Willy Y... inconscient et prétendu avoir appelé le lendemain " pour avoir des nouvelles " ; qu'enfin, il a dit : " je ne sais même pas si j'étais au courant de sa mort ou pas " ; qu'ainsi, par ses déclarations, Michel X... niait la présence des traces d'un autre homme, ainsi que tout acte de torture et toute responsabilité dans Ie décès de la victime ; que la requête en annulation sera donc rejetée comme mal fondée ;
" 1°) alors que les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves et concordants d'avoir participé aux faits dont le juge d'instruction est saisi ne peuvent être entendues comme témoins, ni placés en garde à vue, mais doivent être mis en examen ou bénéficier du statut de témoin assisté ; que la chambre de l'instruction, qui a relevé que « le rapprochement génétique et les conclusions de l'expertise » constituaient « une raison plausible de soupçonner (Michel X...) d'avoir commis l'une des infractions objet de l'instruction », ce dont il résultait qu'il existait des indices graves et concordants d'avoir commis cette infraction, mais a considéré que son audition sous le régime de la garde à vue était valable, a, ce faisant, méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors que la chambre de l'instruction ne pouvait, sans se contredire, énoncer que les indices initialement recueillis, empreintes et explications de Michel X..., n'étaient pas suffisants pour justifier la mise en examen (arrêt p. 10) puis que les mêmes faits justifiaient sa mise en examen (arrêt p. 12) " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité prise de la violation de l'article 105 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction retient qu'en l'absence d'explication de Michel X..., la seule présence de son empreinte génétique sur les lieux du crime ne suffisait pas à caractériser, à son encontre, des indices graves et concordants des faits de meurtre et de vol avec tortures ou actes de barbarie dont le juge d'instruction était saisi ; que les juges énoncent que, si au cours de sa garde à vue, lors de sa quatrième audition, Michel X... a reconnu s'être trouvé sur les lieux du crime la nuit des faits, sa version ne concordait pas avec les constatations des enquêteurs, notamment celles relatives à la présence d'une autre personne ; qu'ils ajoutent qu'il a nié au cours des auditions suivantes qu'un autre individu ait été présent et que des actes de tortures ou de barbarie aient été commis ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations et dès lors que le juge d'instruction a la faculté de ne mettre en examen une personne déterminée qu'après s'être éclairé, notamment en faisant procéder à son audition en qualité de témoin, sur sa participation aux agissements incriminés dans des conditions pouvant engager sa responsabilité pénale, la chambre de l'instruction, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
II-Sur le pourvoi contre l'arrêt du 9 juillet 2009 ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 221-1, 311-1, 311-10 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juillet 2009) a prononcé la mise en accusation de Michel X... devant la cour d'assises des Yvelines pour avoir volontairement donné la mort à Willy Y... et volontairement soustrait divers objets, avec cette circonstance aggravante que les faits de vol ont été précédés, accompagnés ou suivis d'actes de torture et de barbarie ;
" aux motifs que les éléments retenus par le juge d'instruction pour ordonner la mise en accusation de Michel X... sont pertinents et seront adoptés ; qu'il suffira de rappeler qu'il résulte de l'information que Michel X... s'est trouvé présent sur les lieux du crime, son ADN y ayant été retrouvé ; que pendant sa garde à vue, Michel X..., à partir de sa quatrième audition, a déclaré avoir tué Willy Y... seul même s'il ne reconnaissait pas les actes de barbarie et qu'il expliquait être, au départ, entré avec la seule intention de voler ; que Michel X... a confirmé cette version lors de ses dernières auditions en garde à vue ; qu'ultérieurement il a demandé, en vain l'annulation de ces auditions ; qu'il a confirmé, lors de son interrogatoire de première comparution devant le juge d'instruction, en présence de avocat qu'il avait désigné, ses déclarations de garde à vue ; qu'il est, dès lors, mal venu à soutenir avoir subi les pressions de la police pour faire ces déclarations alors que non seulement il ne les a pas rétractées lors de sa présentation devant le magistrat instructeur mais les a confirmées ; que ce n'est qu'ultérieurement que Michel X... est revenu sur ses déclarations ; que s'il a donné sur Z... des détails permettant de penser qu'il l'a connu, force est de constater que les éléments donnés et leur vérification permettent de tenir pour hautement vraisemblable qu'il a connu Z... plusieurs années après les faits ; qu'ainsi, X... a déclaré qu'à l'époque des faits Z... utilisait des véhicules des sociétés Euroguard et Bac Sécurité alors que ce n'est qu'en 1999 que Z... a été salarié de Bac Sécurité et que ce n'est que longtemps après les faits que Z... a bénéficié d'un véhicule dans le cadre de son emploi d'agent de sécurité ; que les vérifications effectuées, notamment à la demande de Michel X..., n'ont pas permis de confirmer la présence de Z... sur les lieux des faits ou dans la voiture de la victime ; qu'ont notamment été vaines les recherches d'empreintes digitales et de traces de chaussures ; que, si le nombre de traces de pas, les premières impressions des enquêteurs (D 2, p. 2) et les constatations faites par l'expert ayant analysé le ruban adhésif ayant servi à ligoter la victime permettent de retenir que les faits ont été commis par au moins deux personnes, aucun élément autre que les déclarations tardives de Michel X... ne permettent de retenir que Z..., décédé avant l'arrestation d'X..., ait participé aux faits et ait été l'unique auteur des faits de meurtre et des actes de torture et de barbarie alors que, par contre, la présence de Michel X... est, elle, totalement avérée ; qu'il y a donc lieu de le mettre en accusation pour les faits qui lui sont reprochés, nonobstant les éléments à décharge que constituent les dénégations actuelles de Michel X... ; qu'il sera relevé que c'est à juste titre que les faits initialement qualifiés meurtre avec torture et actes de barbarie et vol ont été, dès le 14 septembre 2006, en vue de la mise en examen de Michel X..., requalifiés en meurtre et vol précédé, accompagné ou suivi d'actes de tortures et de barbarie ; que Michel X... ne sera pas, comme décidé par l'ordonnance entreprise, renvoyé pour meurtre avec cette circonstance que les faits ont été précédés ou accompagnés ou suivis d'un autre crime, cette circonstance aggravante ne lui ayant pas été notifiée ; qu'il n'est pas nécessaire de faire notifier cette circonstance aggravante à Michel X... dans la mesure où si cette infraction lui ferait encourir la réclusion criminelle à perpétuité, il encourt déjà pour les faits de vol précédé, accompagné ou suivi d'actes de torture et de barbarie ;
" alors que l'annulation de l'arrêt du 24 janvier 2007 entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt du 9 juillet 2009 " ;
Attendu que, le premier moyen ayant été écarté, le second moyen qui ne critique pas les motifs de l'arrêt attaqué est devenu sans objet ;
Et attendu que les arrêts sont réguliers en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Ponroy conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Pometan conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;