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23/09/2009 | FRANCE | N°08-41877

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2009, 08-41877


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 22 février 2008), que M. X..., engagé le 15 mars 1993 par la société Erems en qualité de médecin attaché commercial, a été licencié pour faute grave le 8 juillet 2002 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement ne reposait ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond sont tenus d'analyser les pièces soumises à leur exam

en ; qu'en ayant écarté les griefs tirés du refus de M. X... de communiquer des information...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 22 février 2008), que M. X..., engagé le 15 mars 1993 par la société Erems en qualité de médecin attaché commercial, a été licencié pour faute grave le 8 juillet 2002 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement ne reposait ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond sont tenus d'analyser les pièces soumises à leur examen ; qu'en ayant écarté les griefs tirés du refus de M. X... de communiquer des informations, et de partager des informations commerciales, sans avoir examiné l'attestation de M. Y..., qui relatait l'existence d'une « volonté apparente » du salarié « de faire de la rétention d'informations (base de données, information clientèle) », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ; que pour décider que le grief tiré du refus de M. X... de collaborer avec un collègue n'était pas constitué, la cour d'appel a retenu que M. X... énonçait, « sans être démenti », qu'il ne s'était trouvé en compagnie de Mlle Z..., autre salariée de l'entreprise, que pendant deux jours et demi dans le courant de juin 2002 ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;

3°/ qu'un comportement peut être fautif, abstraction faite de sa brièveté ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'attestation de Mlle Z... pour exclure tout comportement fautif du salarié «décrit l'hostilité à laquelle elle s'est trouvée en butte de la part de M. X... lors de son arrivée dans l'entreprise en juin 2002 » ; qu'en écartant cependant toute faute grave du salarié à raison de son comportement envers Mlle Z..., au motif qu'il ne s'était trouvé en compagnie de celle-ci que pendant deux jours et demi dans le courant de juin 2002, la cour d'appel, quand cette circonstance, inopérante, n'excluait en rien que le comportement du salarié envers sa collègue ait justifié son départ immédiat de l'entreprise, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122 6, L. 122 8 et L. 122 9 du code du travail (Recodif. L. 234 1, L. 1234 5 et L. 1234 9) ;

4°/ que l'insuffisance de résultats peut constituer un motif de licenciement, sans qu'elle doive procéder d'une attitude volontaire du salarié ; qu'en écartant en l'espèce le grief de licenciement tiré d'une insuffisance de résultats, explicitement énoncé dans la lettre de licenciement en marge de la faute grave imputée au salarié, au motif, erroné, qu'il n'était pas établi que le salarié avait volontairement exécuté son travail de façon défectueuse, la cour d'appel a violé les articles L. 122 14 2 et L. 122 14 3 du code du travail (recodif. L. 1232 6 et L. 1232 1 et s.) ;

Mais attendu que la cour d'appel qui, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que les griefs tirés du refus de M. X... de communiquer des informations, et de partager des informations commerciales, n'étaient pas établis, et qui, sans inverser la charge de la preuve et sans être tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle avait décidé d'écarter, a retenu d'une part que, dés lors qu'il ne l'avait côtoyée que deux jours et demi, le comportement de M. X... à l'égard de sa collègue ne pouvait lui être reproché et d'autre part que l'employeur, qui avait choisi de se placer sur le terrain disciplinaire, ne démontrait pas que le salarié avait volontairement exécuté son travail de façon défectueuse, a pu décider que le licenciement n'était pas justifié par une faute grave rendant impossible le maintien de M. X... dans l'entreprise et n'a fait qu'user du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235 1 du code du travail pour dire qu'il était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une somme à M. X... au titre d'un logiciel qu'il aurait conçu pour son compte, alors, selon le moyen :

1°/ que le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ; qu'en retenant que la société était demeurée taisante sur la demande présentée par M. X... tendant au paiement d'un logiciel conçu par ses soins pour le compte de la société, pour en déduire qu'il y avait lieu en conséquence, en l'absence de toute contestation, de faire droit à la demande en question, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;

2°/ que dans le cadre de leur obligation de motivation, les juges du fond sont tenus d'indiquer l'origine et la nature des éléments de preuve sur lesquels ils se fondent pour affirmer l'existence d'un fait ; qu'en énonçant sans la moindre précision que « la création de ce logiciel ressort de plusieurs pièces versées aux débats », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui, sans se borner à relever que la société Erems était restée taisante sur la demande formée par M. X..., a constaté que la création du logiciel résultait de plusieurs pièces versées aux débats, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Erems aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Erems.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR décidé que le licenciement de Monsieur X... ne reposait ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QU' il appartenait à l'employeur, qui s'était placé sur le terrain disciplinaire, de justifier de l'existence et de la réalité des griefs ; que sur le comportement insolent, l'attestation de Madame A... produite par la SA Erems était inopérante, dès lors que celle-ci avait quitté l'entreprise en 2001, selon les termes mêmes de son attestation ; qu'aucune pièce ne venait établir l'existence d'un comportement insolent à l'égard du dirigeant de la SA Erems ; que l'existence d'un comportement insolent n'était en aucune façon démontrée par le contenu de deux courriers du 10 juin 2002 adressés par Monsieur X... au président de la société, dès lors que celui-ci, s'il présentait une série de demandes et d'observations sur l'exécution de son contrat de travail, utilisait une formulation mesurée exempte de tout reproche sur ce point ; que ce grief n'était pas davantage établi par l'attestation de Monsieur Y..., technicien biomédical, qui faisait état d'une « discussion venimeuse » entre M. et M. B... son supérieur hiérarchique, sur une contestation du recrutement d'un nouveau commercial, mais ne citait aucun élément permettant de faire apparaître un comportement insolent ; qu'enfin, une attestation du supérieur hiérarchique, qui ne pouvait qu'être examinée avec réserve, énonçait que Monsieur X... avait manifesté à plusieurs reprises des comportements « que l'on peut qualifier d'insolents » sans en dater la survenance et sans faire apparaître qu'ils avaient été dirigés contre lui-même ou contre le président de la société ; que ce premier grief n'est donc pas établi ; que sur le refus de Monsieur X... de communiquer des informations, pour établir ce grief, la SA Erems versait aux débats une note interne du 24 mai 2002 émanant de M. B... destinée à M. X... avec copie au président de la société dans laquelle étaient demandés les rapports d'activité du mois de mai, la mise à jour du fichier tournées, une copie des documents transmis au président concernant l'analyse commerciale et financière de l'activité Valab et un rapport concernant un déplacement à Paris dans la semaine 21 ; que Monsieur X... contestait avoir reçu ce document ; que celui-ci n'était pas émargé par ses soins et n'avait pas été adressé en courrier recommandé avec accusé de réception, alors pourtant que les discussions entre les parties avaient pris une intensité certaine depuis plusieurs mois ; qu'aucun autre élément n'était produit sur ce point, en dehors des propres affirmations de M. B... ; qu'il existait dans ces conditions pour le moins un doute sur la réalité de ce grief, lequel devait profiter au salarié ; que sur le refus de collaborer avec un collègue, la SA Erems versait sur ce point aux débats une attestation de Mlle Z..., qui décrivait l'hostilité à laquelle elle s'était trouvée en butte de la part de M. X... lors de son arrivée dans l'entreprise en juin 2002 ; que M. X... énonçait sur ce point, sans être démenti, qu'il ne s'était trouvé en compagnie de cette salariée que pendant deux jours et demi dans le courant du mois de juin 2002, qui avait précédé immédiatement son licenciement, étant rappelé qu'il avait été mis à pied à titre conservatoire le 27 juin 2002 ; que dans ces conditions, il ne pouvait être considéré que les faits en question puissent être constitutifs d'une faute ; que sur le refus de partager des informations commerciales, bien que la SA Erems ne fournisse pas de précisions particulières devant la cour sur ce grief, il fallait déduire de l'attestation de M. B... que le reproche porterait sur un refus de mettre à la disposition du supérieur hiérarchique la base de données commerciales contenant les coordonnées des prospects ou partenaires et l'historique des contacts avec les laboratoires hospitaliers et privés et le refus d'en faire une copie de sauvegarde à la société ; qu'outre le fait que cette unique attestation ne constituait pas une preuve suffisante, en dehors d'autres éléments matériels, le compte-rendu d'une réunion du 12 juin 2002 faisait apparaître que les données en question étaient sauvegardées dans l'entreprise ; que sur l'activité commerciale faible, s'inscrivant dans une exécution volontairement défectueuse du travail, aucune pièce ne venait établir que M. X... aurait volontairement exécuté son travail de façon défectueuse ; que ce grief n'était donc pas établi ;

ALORS 1°) QUE les juges du fond sont tenus d'analyser les pièces soumises à leur examen ; qu'en ayant écarté les griefs tirés du refus de Monsieur X... de communiquer des informations, et de partager des informations commerciales, sans avoir examiné l'attestation de Monsieur Y..., qui relatait l'existence d'une « volonté apparente » du salarié « de faire de la rétention d'informations (base de données, information clientèle) », la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS 2°) QUE le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ; que pour décider que le grief tiré du refus de Monsieur X... de collaborer avec un collègue n'était pas constitué, la cour d'appel a retenu que M. X... énonçait, « sans être démenti », qu'il ne s'était trouvé en compagnie de mademoiselle Z..., autre salariée de l'entreprise, que pendant deux jours et demi dans le courant de juin 2002, (arrêt p. 4) ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;

ALORS 3°) QU'un comportement peut être fautif, abstraction faite de sa brièveté ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'attestation de Mademoiselle Z... pour exclure tout comportement fautif du salarié «décrit l'hostilité à laquelle elle s'est trouvée en butte de la part de M. X... lors de son arrivée dans l'entreprise en juin 2002 » ; qu'en écartant cependant toute faute grave du salarié à raison de son comportement envers Mademoiselle Z..., au motif qu'il ne s'était trouvé en compagnie de celle-ci que pendant deux jours et demi dans le courant de juin 2002, la cour d'appel, quand cette circonstance, inopérante, n'excluait en rien que le comportement du salarié envers sa collègue ait justifié son départ immédiat de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail (Recodif. L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9) ;

ALORS 4°) QUE l'insuffisance de résultats peut constituer un motif de licenciement, sans qu'elle doive procéder d'une attitude volontaire du salarié ; qu'en écartant en l'espèce le grief de licenciement tiré d'une insuffisance de résultats, explicitement énoncé dans la lettre de licenciement en marge de la faute grave imputée au salarié, au motif, erroné, qu'il n'était pas établi que le salarié avait volontairement exécuté son travail de façon défectueuse, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du Code du travail (recodif. L. 1232-6 et L. 1232-1 et s.).

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Erems à payer à Monsieur X... la somme de 6.000 au titre d'un logiciel qu'il aurait réalisé ;

AUX MOTIFS QUE la société était demeurée taisante sur la demande présentée par Monsieur X... tendant au paiement d'un logiciel conçu par ses soins pour le compte de la société ; qu'il y avait lieu en conséquence, en l'absence de toute contestation, de faire droit à la demande en question, dès lors que par ailleurs la création de ce logiciel ressortait de plusieurs pièces versées aux débats ;

ALORS 1°) QUE le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ; qu'en retenant que la société était demeurée taisante sur la demande présentée par Monsieur X... tendant au paiement d'un logiciel conçu par ses soins pour le compte de la société, pour en déduire qu'il y avait lieu en conséquence, en l'absence de toute contestation, de faire droit à la demande en question, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;

ALORS 2°) QUE dans le cadre de leur obligation de motivation, les juges du fond sont tenus d'indiquer l'origine et la nature des éléments de preuve sur lesquels ils se fondent pour affirmer l'existence d'un fait ; qu'en énonçant sans la moindre précision que « la création de ce logiciel ressort de plusieurs pièces versées aux débats », la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-41877
Date de la décision : 23/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 22 février 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 sep. 2009, pourvoi n°08-41877


Composition du Tribunal
Président : Mme Perony (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.41877
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