LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 7 décembre 2000, M. X..., salarié de la société Nunes et Fils (la société), a été victime d'un accident du travail alors qu'il travaillait à l'édification d'un mur pignon qui s'est effondré sous l'effet d'un vent violent sur l'échafaudage sur lequel il était monté ; qu'il a saisi la juridiction du contentieux de la sécurité sociale d'une demande d'indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de son employeur ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de M. X..., alors, selon le moyen :
1°/ qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat; que le manquement à cette obligation n'a pas le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur ne pouvait pas avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié ; qu'aussi, à défaut de conscience du danger, n'est pas du à une faute inexcusable de l'employeur l'accident dont a été victime un salarié qui a sauté d'un échafaudage au moment où une violente et soudaine rafale de vent causait la chute du mur à proximité duquel il avait été construit ; qu'en retenant, dans de pareilles circonstances, la faute inexcusable de la société Nunes et fils, la cour d'appel a violé l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ qu'il ne peut y avoir faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale que si la faute commise par l'employeur a été la cause nécessaire de l'accident ; qu'en l'espèce, en retenant la faute inexcusable sans avoir préalablement constaté que l'absence de dispositif de contreventement avait été une cause nécessaire de l'accident litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;
Que les énonciations de l'arrêt, qui ont fait ressortir que l'absence de dispositif de contreventement de l'échafaudage avait été une cause nécessaire de l'accident, caractérisent le fait que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il a exposé son salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que la cour d'appel a pu en déduire que la société avait commis une faute inexcusable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article L. 452 3 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte du dernier alinéa de ce texte que la réparation des préjudices allouée à la victime d'un accident du travail lui est versée directement par la caisse primaire d'assurance maladie qui en récupère le montant auprès de l'employeur ;
Attendu qu'en condamnant la société à verser à M. X... une provision d'un certain montant à valoir sur la réparation de ses préjudices, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la quatrième branche du moyen :
Vu les articles L. 144 5, R. 144 10 et R. 144 11 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que les dépenses de toute nature du contentieux général de la sécurité sociale, et notamment les frais d'expertise autre que celle prévue à l'article L.141 1 du même code, sont ou bien réglées directement par la caisse nationale compétente du régime général, ou bien avancées par la caisse primaire d'assurance maladie et remboursées par la caisse nationale compétente du régime général ou bien remboursées par la caisse nationale compétente du régime général au budget de l'Etat ; que la procédure est gratuite et sans frais sauf en cas de recours jugé dilatoire ou abusif ou de frais provoqués par la faute d'une partie ;
Attendu qu'en décidant, après avoir ordonné une expertise médicale de la victime afin d'évaluer les chefs de préjudice allégués par elle, que la société devrait consigner au greffe , à l'ordre du régisseur, une provision de 300 euros à valoir sur la rémunération de l'expert, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation à venir n'implique pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Nunes et fils à verser à M. X... une provision d'un montant de 5 000 euros à valoir sur ses indemnités définitives et dit que la société Nunes et fils devrait consigner au greffe une provision de 300 euros, l'arrêt rendu le 15 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la Caisse primaire d'assurance maladie du Béarn et de La Soule aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société Nunes et fils et M. Y....
Il est fait grief à la décision attaquée :
D'AVOIR dit que l'accident du travail dont a été victime Monsieur José X... le 7 décembre 2000 est dû à la faute inexcusable de l'employeur, la SARL NUNES ET FILS, fixé au maximum la majoration de la rente allouée en disant que sa majoration suivra le taux d'incapacité de la victime, dit que la société NUNES ET FILS devra consigner au greffe une provision de 300 , condamné la société NUNES ET FILS au paiement à Monsieur X... d'une provision à valoir sur ces indemnités définitives d'un montant de 5.000 ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la faute inexcusable : En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail; le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Le 7 décembre 2000, Monsieur José X... a été blessé, alors qu'il travaillait à l'édification d'un mur pignon d'une maison d'habitation, positionné sur un échafaudage à une hauteur d'environ quatre mètres. Il est constant qu'un vent important s'est levé, le mur pignon fraîchement assemblé s'est alors effondré, entraînant l'échafaudage et Monsieur José X... dans la chute. Dans le cadre de son enquête, l'inspection du travail a constaté qu'aucun dispositif de contreventement destiné à stabiliser l'ouvrage contre les rafales de vent et à protéger les salariés n'a été mis en place et que l'échafaudage utilisé sur le chantier ne pouvait être monté conformément à la réglementation puisque différents éléments n'ont pas été achetés. Monsieur Y... a été condamné pénalement pour avoir infligé à Monsieur José X... des blessures involontaires causant une incapacité de plus de trois mois dans le cadre du travail le 7 décembre 2000 et pour non-respect des règles concernant la salubrité et la protection des salariés du bâtiment. Monsieur Y... a été pénalement condamné en sa qualité de gérant de la SARL NONES ET FILS, sa condamnation, de par les effets de la représentation attachée son mandat, est opposable à cette société. Monsieur Y... soutient qu'en réalité la cause de l'accident résulte de la rafale de vent soudaine qui a déstabilisé le mur pignon, lequel a chuté sur l'échafaudage, en conséquence la faute pénale sanctionnée, à savoir le non-respect des règles concernant les échafaudages, n'a pas été la cause déterminante de l'accident. Cependant il résulte de la condamnation pénale pour blessures involontaires et manquement aux règles de sécurité, qu'en ne respectant pas la réglementation du travail concernant les échafaudages, plus précisément absence de dispositif de contreventement destiné à stabiliser l'ouvrage contre les rafales de vent et à protéger les salariés, Monsieur Y... devait avoir conscience du danger auquel il exposait son salarié, peu important que la faute inexcusable ainsi commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident. En conséquence, il y a lieu de retenir la faute inexcusable de l'employeur et d'infirmer en conséquence la décision rendue par le Tribunal des affaires de sécurité sociale. Sur les conséquences de la faute inexcusable : Il convient de fixer au maximum la majoration de la rente en disant que par application de l'article L. 452-2 (alinéa 2 à 3) du Code de la sécurité sociale, la majoration de la rente suivra le taux d'incapacité de la victime. L'article L.452-3 du Code de la Sécurité Sociale énonce qu'indépendamment de la majoration de rente, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Il y lieu d'ordonner une expertise médicale dans les formes de l'article L. 452-4 du Code de la sécurité sociale, étant précisé que les évaluations des taux d'IPP et d'ITT ne relèvent pas de ces dispositions. Sur la demande de provision : Il convient d'allouer à Monsieur X... une provision à valoir sur ces indemnités définitives d'un montant de 5.000 .. » ;
1) ALORS QU'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat; que le manquement à cette obligation n'a pas le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur ne pouvait pas avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié ; qu'aussi, à défaut de conscience du danger, n'est pas du à une faute inexcusable de l'employeur l'accident dont a été victime un salarié qui a sauté d'un échafaudage au moment où une violente et soudaine rafale de vent causait la chute du mur à proximité duquel il avait été construit ; qu'en retenant, dans de pareilles circonstances, la faute inexcusable de la société NUNES ET FILS, la Cour d'appel a violé l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale ;
2) ALORS QU'il ne peut y avoir faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale que si la faute commise par l'employeur a été la cause nécessaire de l'accident ; qu'en l'espèce, en retenant la faute inexcusable sans avoir préalablement constaté que l'absence de dispositif de contreventement avait été une cause nécessaire de l'accident litigieux, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale ;
3) ALORS QUE les condamnation versées au profit de la victime d'un accident du travail du à la faute inexcusable de son employeur sont versées directement à l'intéressée par la Caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur ; qu'aussi en l'espèce, la Cour d'appel qui a condamné la société NUNES ET FILS a verser une provision à Monsieur X... a violé les articles L.451-1 et L452-3 du Code de la sécurité sociale ;
4) ALORS QUE les frais d'expertise sont réglés par les organismes sociaux, sans consignation préalable de provision à la charge d'une autre partie; qu'en l'espèce, en condamnant la société NUNES ET FILS a consigner au greffe une provision de 300 pour les frais afférent à l'expertise qu'elle ordonnait, la Cour d'appel a violé l'article R.142-39 du Code de la sécurité sociale.