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07/07/2009 | FRANCE | N°08-40321

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 juillet 2009, 08-40321


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 20 novembre 2007), qu'en juin 2005, la société Manufacture Française de pneumatiques Michelin, appartenant au groupe du même nom, a décidé de transférer la production de son usine de Poitiers à celle de Joué lès Tours et a élaboré et mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ; que les salariés dont les emplois étaient supprimés et qui avaient refusé les mesures de reclassement proposées par l'employeur, ont été licenciés pour motif économique le 15 f

évrier 2006 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les salariés font grief ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 20 novembre 2007), qu'en juin 2005, la société Manufacture Française de pneumatiques Michelin, appartenant au groupe du même nom, a décidé de transférer la production de son usine de Poitiers à celle de Joué lès Tours et a élaboré et mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ; que les salariés dont les emplois étaient supprimés et qui avaient refusé les mesures de reclassement proposées par l'employeur, ont été licenciés pour motif économique le 15 février 2006 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de décider que les licenciements sont fondés sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que la nécessité économique de réorganiser l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité s'apprécie au niveau du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que pour déclarer les licenciements justifiés la cour d'appel a retenu que "la compétitivité de la société Michelin dans son ensemble" était menacée par des difficultés prévisibles à venir de son activité poids lourd ce qui rendait nécessaire le regroupement de l'activité de production de pneus poids lourd sur un site principal ; qu'en statuant ainsi sans établir que ces difficultés menaçaient la compétitivité du secteur d'activité du groupe Michelin, lequel s'étendait à la production sur le marché mondial de pneus de tous types (voiture de tourisme, camionnette, deux roues, avion, véhicule agricole et génie civil) et à l'édition d'outils de navigation (guides touristiques, cartographie, navigateurs routiers), sans se limiter à la seule production de pneus poids lourd sur le marché européen, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du code du travail (ancien), devenu L. 1233-3 du code du travail (nouveau) ;

2°/ que les menaces pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe doivent être appréciées au niveau mondial ; qu'en retenant que les licenciements pour motif économique étaient justifiés, quand la société MFPM faisait uniquement état de "l'existence de menaces sur la sauvegarde de la compétitivité de l'activité poids lourd en France" dans les lettres de licenciement, sans nullement évoquer de menaces pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe Michelin à l'échelle internationale, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-2, alinéa 2, et L. 321-1 du code du travail (ancien), devenus L. 1233 16 et L. 1233-3 du code du travail (nouveau) ;

3°/ qu'en se bornant à retenir que les difficultés prévisibles de la société MFPM justifiaient sa réorganisation, sans établir la gravité de ces difficultés, ni relever que la réorganisation était destinée à limiter les risques de licenciement à venir, la cour d'appel a statué par des motifs d'ordre général impropres à caractériser l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe Michelin et violé l'article L. 321-1 du code du travail (ancien), devenu L. 1233-3 du code du travail (nouveau) ;

4°/ que l'employeur doit assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leur emploi ; que présente un caractère abusif et frauduleux le licenciement pour motif économique prononcé du fait de l'existence de menaces pour la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise volontairement créées par l'employeur ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions que la société MFPM avait intentionnellement provoqué les risques excipés de baisse de compétitivité du site de Poitiers en y cessant tout investissement à compter de 2002 et en transférant ses segments les plus compétitifs vers d'autres sites dès 2003 ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions déterminantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a fait ressortir que le marché du pneumatique poids lourds constituait un secteur d'activité au sein du groupe Michelin et a constaté, sans limiter son examen à la situation existante sur le territoire national, que la compétitivité de ce secteur était menacée par la concurrence de sociétés étrangères dont les prix de vente étaient inférieurs et la productivité supérieure ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu décider que les difficultés économiques prévisibles à venir dans ce secteur d'activité rendaient nécessaire sa réorganisation pour en sauvegarder la compétitivité ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les salariés reprochent à l'arrêt de dire que la société a respecté ses obligations légales et conventionnelles de reclassement et en conséquence que les licenciements ont une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que ne satisfait pas à son obligation de reclassement, l'entreprise qui cantonne ses recherches à une partie des entreprises du groupe auquel elle appartient, en omettant notamment les établissements du groupe situés hors de France ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions d'appel que la société MFPM avait limité les recherches de reclassement à un nombre restreint d'entreprises et d'établissements du groupe Michelin, à l'exclusion notamment des postes à l'international ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions d'où il résultait que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en cas de refus d'une proposition de reclassement, l'employeur doit formuler de nouvelles propositions ou procéder au licenciement au motif de l'impossibilité de reclassement ; qu'en se bornant à retenir que le refus par les salariés des deux offres personnalisées de reclassement justifiait le licenciement, sans rechercher si l'employeur avait formulé de nouvelles offres ou en avait démontré l'impossibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 321-1, alinéa 3, et L. 321-4-1 du code du travail (ancien), devenus L. 1233-4 et L. 1235-10 du code du travail (nouveau) ;

3°/ que, selon l'article 14-2 de la convention collective nationale du caoutchouc, si l'employeur n'est pas en mesure de fournir au salarié un poste équivalent au précédent et en rapport avec ses aptitudes, il doit s'adresser à son organisation professionnelle qui s'efforcera à son tour de reclasser l'intéressé ; que cette procédure conventionnelle doit être mise en oeuvre dès lors que la tentative de reclassement du salarié n'aboutit pas ; qu'en retenant au contraire que cette procédure ne s'applique pas lorsque le salarié a refusé les propositions de reclassement qui lui ont été faites, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

4°/ que le non respect de la procédure de reclassement prévue par l'article 14-2 de la convention collective nationale du caoutchouc prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article L. 321-1, alinéa 3, du code du travail (ancien), devenu L. 1233-4 du code du travail (nouveau) ;

5°/ que l'accord national de branche du 23 juin 2004 a institué une commission paritaire nationale de l'emploi qui, selon son article 3-2, doit être tenu informée de tout licenciement économique collectif dans la profession, en vue d'examiner les conditions de mise en oeuvre des moyens de reclassement et de réadaptation et participer, si nécessaire et possible, à leur mise en oeuvre ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions d‘appel que l'employeur avait omis de saisir cette commission paritaire en violation de son obligation conventionnelle de reclassement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que l'arrêt relève que la proposition personnelle de reclassement adressée préalablement aux licenciements et refusée par chacun des salariés portait sur deux emplois de même catégorie que l'emploi supprimé, était compatible avec leur niveau de qualification, maintenait leur rémunération et leur ancienneté et était assorti, en tant que de besoin, d'un plan de formation adapté ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider que l'employeur avait ainsi satisfait à son obligation ;

Et attendu, ensuite, qu'ayant constaté que les procédures conventionnelles de reclassement externe n'étaient mises en oeuvre qu'au cas où l'entreprise ne pourrait fournir un poste de reclassement interne, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à des conclusions inopérantes, a pu décider que ces obligations ne s'imposaient pas en cas de refus par le salarié d'un poste à l'intérieur de l'entreprise, équivalent au poste précédent et en rapport avec ses aptitudes ; qu'abstraction faite du motif surabondant critiqué dans la quatrième branche, elle a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes de dommages-intérêts pour violation de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, alors, selon le moyen :

1°/ que l'employeur ne peut modifier le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi à l'issue de la phase d'information et de
consultation des représentants du personnel prévue par les livres III et IV (anciens) du code du travail, fût-ce pour y apporter des améliorations ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions d'appel que l'employeur avait modifié le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi à la suite des observations de l'administration le 20 octobre 2005 sans consulter le comité central d'entreprise ni le comité d'établissement sur la version définitive du plan ; qu'en s'abstenant de vérifier si le comité central d'entreprise et le comité d'établissement avaient été consultés sur les modifications apportées au plan de sauvegarde de l'emploi à la suite des observations de l'administration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 321-3, L. 321-4 et L. 321-4-1 du code du travail (anciens), devenus L. 1233-30, L. 1233-32 et L. 1235-10 du code du travail (nouveaux) ;

2°/ qu'en écartant le moyen tiré du défaut de consultation du comité central d'entreprise sur les modifications apportées au plan de sauvegarde de l'emploi à la suite des observations de l'administration du 20 octobre 2005, quand la dernière réunion d'information-consultation du comité central d'entreprise a eu lieu le 25 août 2005, soit près de trois mois avant lesdites modifications, la cour d'appel a violé les articles L. 321-3, L. 321-4 et L. 321-4-1 du code du travail (anciens), devenus L. 1233-30, L. 1233-32 et L. 1235-10 du code du travail (nouveaux) ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a fait ressortir que le comité d'établissement avait été consulté sur les modifications apportées au plan à la suite des observations de l'administration du travail intervenues après l'achèvement de la procédure de consultation du comité central d'entreprise ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les demandeurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour M. X... et 80 autres demandeurs

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les licenciements pour motif économique présentaient une cause réelle et sérieuse et débouté les salariés de leur demande de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE les lettres de licenciements envoyées aux salariés demandeurs en février 2006 mentionnent que le licenciement a pour motif la réorganisation de l'activité poids lourd de la société dont la conséquence est la suppression de l'emploi de chaque salarié concerné ; qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu par les salariés, les lettres de licenciement sont suffisamment motivées ; qu'une réorganisation de l'entreprise ou d'un secteur d'activité de l'entreprise peut constituer un motif économique (valable) de licenciement au sens de l'article L. 321-1, alinéa 1er du code du travail si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise dans son ensemble ; que répond à cette condition la réorganisation mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi, ce qui suppose l'existence d'une menace sur la compétitivité de l'entreprise qui justifie la réorganisation mise en oeuvre ; qu'en l'espèce, la réorganisation en cause avait essentiellement pour objet de regrouper l'activité de production de pneus poids lourd en France éclatée en trois sites sur un seul site de manière à centraliser les équipements modernes et les investissements à l'effet d'améliorer l'outil de production poids lourd et de sauvegarder ainsi la compétitivité de toute l'entreprise en réalisant notamment des économies d'échelle ; qu'à cet égard, il ressort des pièces produites aux débats, et notamment du rapport d'expertise comptable établi à l'initiative du comité d'établissement de l'établissement de Poitiers, que le marché poids lourd remplacement en Europe sur lequel était particulièrement bien placée la société Michelin était atone en 2004 et 2005 ; que sur le marché poids lourd première monte qui connaissait, lui, une croissance particulièrement dynamique les concurrents immédiats de la société Michelin - le groupe Bridgestone et le groupe issu de la fusion Goodyear et Dunlop - menaçaient sérieusement le leadership historique de Michelin, en réalisant d'importants investissements et en augmentant ses parts de marché pour le premier, en bénéficiant d'importantes économies d'échelle issues de la fusion de nature à impulser une dynamique favorable sur le segment poids lourd pour le second ; que les prix de vente de la société Michelin étaient très sensiblement supérieurs à la concurrence, ce qui exposait la société Michelin à des pertes de marché dans ce contexte ; que la moindre productivité et surtout l'effet taille des sites entraient pour une part importante dans ces surcoûts de la société Michelin (respectivement 5 % et 8 %), Bridgestone et Goodyear produisant plus de 70 000 tonnes sur leurs sites les plus performants contre 60 000 tonnes à la société Michelin ; qu'il suit de ces éléments que la compétitivité de la société Michelin dans son ensemble était menacée par des difficultés prévisibles à venir de son activité poids lourd et que cette situation rendait nécessaire le regroupement de l'activité de production de pneus poids lourd sur un site principal pour sauvegarder sa compétitivité ; qu'il n'est, par ailleurs, démontré par aucune pièce du dossier que ce regroupement ait couvert une délocalisation de la fabrication des pneus poids lourd ;

1) ALORS QUE la nécessité économique de réorganiser l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité s'apprécie au niveau du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que pour déclarer les licenciements justifiés la cour d'appel a retenu que « la compétitivité de la société Michelin dans son ensemble » était menacée par des difficultés prévisibles à venir de son activité poids lourd ce qui rendait nécessaire le regroupement de l'activité de production de pneus poids lourd sur un site principal ; qu'en statuant ainsi sans établir que ces difficultés menaçaient la compétitivité du secteur d'activité du groupe Michelin, lequel s'étendait à la production sur le marché mondial de pneus de tous types (voiture de tourisme, camionnette, deux roues, avion, véhicule agricole et génie civil) et à l'édition d'outils de navigation (guides touristiques, cartographie, navigateurs routiers), sans se limiter à la seule production de pneus poids lourd sur le marché européen, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du code du travail (ancien), devenu L. 1233-3 du code du travail (nouveau) ;

2) ALORS QUE les menaces pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe doivent être appréciées au niveau mondial ; qu'en retenant que les licenciements pour motif économique étaient justifiés, quand la société MFPM faisait uniquement état de « l'existence de menaces sur la sauvegarde de la compétitivité de l'activité poids lourd en France » dans les lettres de licenciement, sans nullement évoquer de menaces pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe Michelin à l'échelle internationale, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-2 alinéa 2 et L. 321-1 du code du travail (ancien), devenus L. 1233-16 et L. 1233-3 du code du travail (nouveau) ;

3) ALORS QU'en se bornant à retenir que les difficultés prévisibles de la société MFPM justifiaient sa réorganisation, sans établir la gravité de ces difficultés, ni relever que la réorganisation était destinée à limiter les risques de licenciement à venir, la cour d'appel a statué par des motifs d'ordre général impropres à caractériser l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe Michelin et violé l'article L. 321-1 du code du travail (ancien), devenu L. 1233-3 du code du travail (nouveau) ;

4) ALORS QUE l'employeur doit assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leur emploi ; que présente un caractère abusif et frauduleux le licenciement pour motif économique prononcé du fait de l'existence de menaces pour la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise volontairement créées par l'employeur ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions que la société MFPM avait intentionnellement provoqué les risques excipés de baisse de compétitivité du site de Poitiers en y cessant tout investissement à compter de 2002 et en transférant ses segments les plus compétitifs vers d'autres sites dès 2003 ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions déterminantes (cf. conclusions de M. Y..., p. 605 § 2 et 3), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société MFPM avait respecté les obligations légales et conventionnelles de reclassement et débouté en conséquence les salariés de leur demande de dommagesintérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'obligation légale, les salariés mêlent dans leurs écritures et oralement à l'audience l'obligation prévue par l'article L. 321-1, alinéa 3, du code du travail, et l'obligation prévue par l'article L. 321-4-1 du même code qui ne sont pas de même nature ni de même contenu ; qu'il s'induit cependant du développement de leur argumentation que ce qui est en réalité invoqué, c'est l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi ne répondant pas aux exigences légales de l'article L. 321-4-1 ; qu'en toute hypothèse, il est établi par les pièces du dossier que chacun des salariés en cause dans la présente instance a reçu de la société avant la notification du licenciement une proposition personnelle, précise et écrite, contenant deux offres de reclassement, l'une sur le site de Joué les Tours, l'autre sur un autre site de la société, et portant sur des emplois de la même catégorie que leur emploi supprimé, compatible avec leur niveau de qualification, et assorti en tant que de besoin d'un plan de formation adapté, en sorte que la société a satisfait à son obligation résultant de l'article L. 321-1, alinéa 3 ; (…) ; qu'il ressort en l'espèce, du plan de sauvegarde de l'emploi établi et mis en oeuvre par la société Michelin que ce plan prévoyait, outre la proposition personnelle à chacun des salariés concernés de deux offres de reclassement dont l'une sur un site proche de celui de Poitiers : - des mesures de reclassement interne au sein de l'établissement de Joué les Tours, des autres établissements de la société MFPM, ou d'autres sociétés du groupe accompagnées d'une liste précise et concrète de l'ensemble des postes disponibles dans les établissements de la société ou d'autres sociétés et filiales (plus de 400 postes) avec maintien de l'ancienneté, de la qualification, de la rémunération, et aide financière à la mobilité géographique interne sans déménagement vers le site de Joué les Tours ou avec déménagement vers d'autres sites, l'aide étant alors complétée par des aides au logement, à la découverte de la région d'accueil, au conjoint salarié... ; - des mesures d'âge de nature à permettre à des salariés de partir à la retraite dès l'âge de 55 ans moyennant la perception d'une allocation de cessation d'activité ; - des aides financières au retour pour réaliser un projet de reconversion pour les salariés de nationalité étrangère ; - des mesures de revitalisation du bassin d'emploi de Poitiers pour permettre le maintien dans l'emploi sur le site de Poitiers, et par conséquent le reclassement externe du personnel concerné ; - la mise en place d'une cellule d'accompagnement à la recherche d'emploi pour favoriser le reclassement externe avec pour mission la formation aux techniques de recherche d'emploi, la réalisation de bilans individuels, l'accompagnement et la dynamisation de la recherche, la prospection du marché de l'emploi ; - des aides spécifiques complémentaires, telles que des aides financières à la recherche d'un emploi salarié, à la création ou la reprise d'activité, à la réalisation d'une formation qualifiante ; qu'il résulte, par ailleurs, des pièces du dossier que, pour tenir compte des observations qui avaient été présentées par la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de la Vienne, le plan de sauvegarde de l'emploi ainsi établi a été encore amélioré par la société sur de nombreux points pour faciliter la recherche et la mise en oeuvre des reclassements : qu'ainsi la durée du congé de reclassement a été allongée, que les prestations de la cellule de reclassement ont été étroitement précisées dans leur objet et leur finalité, que les aides spécifiques complémentaires ont été elles-mêmes précisées dans leur objet et complétées, les frais de formation qualifiante étant désormais intégralement pris en charge par l'employeur tandis qu'une allocation temporaire dégressive était instituée pour compenser la perte de revenu consécutive à un nouvel emploi,... ; qu'il suit de ces éléments que le plan de sauvegarde de l'emploi établi et mis en oeuvre par la société Michelin, qui était de nature à permettre le reclassement de l'ensemble des salariés concernés par les suppressions d'emploi, répondait aux exigences légales de l'article L. 321-4-1, étant tenu compte de ce que sa validité doit être appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ; qu'au demeurant, il est établi au dossier que 60 salariés ont été maintenus sur le site de Poitiers, 178 ont bénéficié d'un reclassement interne dont 152 sur le site proche de Joué les Tours, 129 ont bénéficié d'un départ anticipé à la retraite, 52 ont bénéficié d'une formation qualifiante ; que sur les 111 qui ont été licenciés, la plupart ont retrouvé un emploi après avoir bénéficié des services de la cellule de reclassement, et que les mesures de revitalisation du bassin d'emploi ont contribué à la création sur place d'un grand nombre d'emplois avec un objectif sur 4 ans de 600 emplois ; (…) ; qu'enfin, s'il est vrai que le plan de sauvegarde de l'emploi peut sembler réserver l'aide d'une cellule de reclassement aux salariés ayant adhéré au congé de reclassement, encore que la rédaction du plan sur ce point est incertaine et paraît seulement renvoyer aux termes de la loi (selon lesquels le congé de reclassement a pour objet de permettre au salarié de bénéficier d'une cellule d'accompagnement des démarches de recherche d'emploi) sans nécessairement exclure de ce bénéfice les salariés non adhérents au congé de reclassement, il résulte en toute hypothèse des pièces du dossier que la société s'est engagée à faire bénéficier de cette prestation tous les salariés qui le souhaiteraient indépendamment de leur adhésion à un congé de reclassement et a respecté cet engagement ; qu'au surplus, les salariés demandeurs à la présente instance sont sans intérêt à faire valoir cet élément de contestation à l'appui de leur demande en nullité du plan social dès l'instant qu'ils ont tous demandé à bénéficier d'un congé de reclassement et ont donc pu bénéficier de la prestation de la cellule de reclassement ;

ET AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'obligation conventionnelle de reclassement, aux termes de l'article 14-2 de la convention collective nationale du caoutchouc, " tant qu'à l'intérieur de l'établissement le volume de la production ou du travail dans le secteur de production où le salarié exerce son activité reste constant ou s'accroît, l'employeur devra s'efforcer, avant tout congédiement pour cause de suppression d'emploi, de modification de structure ou de réorganisation de ce secteur, de proposer à l'intéressé, dans l'entreprise, un poste équivalent au précédent et en rapport avec ses aptitudes. Au cas où l'entreprise ne pourrait fournir un tel poste à l'intéressé, elle s'adressera à son organisation professionnelle, qui s'efforcera à son tour de reclasser, dans le cadre local ou régional, le salarié congédié " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'information de l'organisation professionnelle à l'effet de tenter le reclassement externe du salarié ne s'impose à l'employeur que pour autant qu'il ne peut proposer à l'intéressé un poste équivalent au précédent et en rapport avec ses aptitudes, qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été vu précédemment, la société Michelin était en mesure de proposer aux salariés des postes équivalents à leur poste supprimé et l'a fait ; qu'au surplus, une telle obligation n'est prévue par le texte conventionnel qu'une fois le salarié licencié (= congédié), en sorte que sa méconnaissance ne pourrait priver le licenciement prononcé de cause réelle et sérieuse ; que la société n'a pas méconnu son obligation conventionnelle de reclassement, contrairement à ce qui est prétendu par les salariés ;

1) ALORS QUE ne satisfait pas à son obligation de reclassement, l'entreprise qui cantonne ses recherches à une partie des entreprises du groupe auquel elle appartient, en omettant notamment les établissements du groupe situés hors de France ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions d'appel que la société MFPM avait limité les recherches de reclassement à un nombre restreint d'entreprises et d'établissements du groupe Michelin, à l'exclusion notamment des postes à l'international ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions d'où il résultait que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU 'en cas de refus d'une proposition de reclassement, l'employeur doit formuler de nouvelles propositions ou procéder au licenciement au motif de l'impossibilité de reclassement ; qu'en se bornant à retenir que le refus par les salariés des deux offres personnalisées de reclassement justifiait le licenciement, sans rechercher si l'employeur avait formulé de nouvelles offres ou en avait démontré l'impossibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 321-1 alinéa 3 et L. 321-4-1 du code du travail (ancien), devenus L. 1233-4 et L. 1235-10 du code du travail (nouveau) ;

3) ALORS QUE selon l'article 14-2 de la convention collective nationale du caoutchouc, si l'employeur n'est pas en mesure de fournir au salarié un poste équivalent au précédent et en rapport avec ses aptitudes, il doit s'adresser à son organisation professionnelle qui s'efforcera à son tour de reclasser l'intéressé ; que cette procédure conventionnelle doit être mise en oeuvre dès lors que la tentative de reclassement du salarié n'aboutit pas ; qu'en retenant au contraire que cette procédure ne s'applique pas lorsque le salarié a refusé les propositions de reclassement qui lui ont été faites, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

4) ALORS QUE le non respect de la procédure de reclassement prévue par l'article 14-2 de la convention collective nationale du caoutchouc prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article L. 321-1 alinéa 3 du code du travail (ancien), devenu L. 1233-4 du code du travail (nouveau) ;

5) ALORS QUE l'accord national de branche du 23 juin 2004 a institué une commission paritaire nationale de l'emploi qui, selon son article 3-2, doit être tenu informée de tout licenciement économique collectif dans la profession, en vue d'examiner les conditions de mise en oeuvre des moyens de reclassement et de réadaptation et participer, si nécessaire et possible, à leur mise en oeuvre ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions d‘appel que l'employeur avait omis de saisir cette commission paritaire en violation de son obligation conventionnelle de reclassement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les salariés de leur demande de dommages-intérêts pour violation de la procédure de licenciement pour motif économique ;

AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces du dossier que, pour tenir compte des observations qui avaient été présentées par la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de la Vienne, le plan de sauvegarde de l'emploi a été amélioré par la société sur de nombreux points pour faciliter la recherche et la mise en oeuvre des reclassements : qu'ainsi la durée du congé de reclassement a été allongée, que les prestations de la cellule de reclassement ont été étroitement précisées dans leur objet et leur finalité, que les aides spécifiques complémentaires ont été elles-mêmes précisées dans leur objet et complétées, les frais de formation qualifiante étant désormais intégralement pris en charge par l'employeur tandis qu'une allocation temporaire dégressive était instituée pour compenser la perte de revenu consécutive à un nouvel emploi ;

ET AUX MOTIFS QUE les salariés font encore valoir que la procédure de licenciement collectif pour motif économique a été conduite irrégulièrement pour différents motifs et sollicitent de ce chef une somme à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 122-14-4, dernier alinéa ; qu'il résulte, d'abord, des pièces du dossier, et notamment des procès-verbaux des réunions, que le comité d'établissement a tenu les réunions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 321-3 respectivement après la première et la deuxième réunion du comité central d'entreprise tenues en application du même alinéa, conformément aux dispositions de l'article L. 321-2, même si la procédure d'information consultation du comité d'établissement a été reprise intégralement à des fins de régularisation compte tenu du dépassement du délai de 28 jours fixé par la loi entre deux réunions qui n'avait pu être respecté ; qu'il est, par ailleurs, établi au dossier, comme l'avait déjà jugé dans son jugement du 22 mars 2006 le tribunal de grande Instance de Clermont-Ferrand saisi d'une demande d'annulation de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, que le comité central d'entreprise a disposé de tous les éléments d'information qui lui étaient nécessaires, étant observé qu'il n'a pas estimé utile de recourir à une expertise comme il le pouvait ; qu'il ressort, en outre, des procès-verbaux des réunions du 19 et 20 janvier 2006 qu'en tant qu'elles concernaient la mise en oeuvre du congé de reclassement, ces réunions n'avaient pour objet, sans comporter de nouveaux éléments qui n'aient été précédemment soumis à information et consultation, que d'apporter des informations (= des explications) complémentaires sur les modalités pratiques de ce congé, qu'elles ont donné lieu au surplus à un échange, en sorte qu'il ne peut être soutenu que la procédure aurait été violée au motif qu'il n'était pas expressément prévu par l'ordre du jour de ces réunions une consultation ; qu'enfin, il ne peut être sérieusement reproché à la société d'avoir méconnu les dispositions de l'article L. 321-1-3 du code du travail telles qu'issues de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 selon lesquelles l'employeur n'est soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique que lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail proposée pour l'un des motifs énoncés à l'article L. 321-1 et que leur licenciement est envisagé ; que, sans doute est-il vrai, qu'ayant décidé de regrouper l'activité de production pneus poids lourd sur le site de Joué les Tours sans pour autant supprimer totalement le site de Poitiers et pris l'engagement d'affecter sur Joué les Tours les salariés travaillant jusqu'alors sur le site de Poitiers qui le souhaiteraient, la société Michelin pouvait, soit, procéder comme elle l'a fait, c'est-à-dire considérer que les postes affectés à cette activité sur Poitiers étaient supprimés et établir d'emblée un plan de sauvegarde de l'emploi, soit, proposer à chaque salarié concerné une modification de son contrat de travail, attendre sa réponse, et n'établir un plan de sauvegarde que dans l'hypothèse où au moins dix salariés auraient refusé la proposition ; que la société a opté pour la première solution ; que ce choix ne caractérise pas en soi une violation de la procédure de licenciement collectif dès lors que les deux possibilités étaient ouvertes et qu'il n'apparaît pas que le choix opéré, qui n'était pas contraire à l'intérêt des salariés et leur était même favorable puisqu'il impliquait nécessairement l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi, ait procédé d'une intention frauduleuse ; qu'ainsi, il n'est pas démontré que la procédure de licenciement collectif pour motif économique n'a pas été respectée ;

1) ALORS QUE l'employeur ne peut modifier le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi à l'issue de la phase d'information et de consultation des représentants du personnel prévue par les livres III et IV (anciens) du code du travail, fût-ce pour y apporter des améliorations ; que les salariés ont fait valoir dans leurs conclusions d'appel que l'employeur avait modifié le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi à la suite des observations de l'administration le 20 octobre 2005 sans consulter le comité central d'entreprise ni le comité d'établissement sur la version définitive du plan ; qu'en s'abstenant de vérifier si le comité central d'entreprise et le comité d'établissement avaient été consultés sur les modifications apportées au plan de sauvegarde de l'emploi à la suite des observations de l'administration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 321-3, L. 321-4 et L. 321-4-1 du code du travail (anciens), devenus L. 1233-30, L. 1233-32 et L. 1235-10 du code du travail (nouveaux) ;

2) ALORS QU‘en écartant le moyen tiré du défaut de consultation du comité central d'entreprise sur les modifications apportées au plan de sauvegarde de l'emploi à la suite des observations de l'administration du 20 octobre 2005, quand la dernière réunion d'information-consultation du comité central d'entreprise a eu lieu le 25 août 2005, soit près de trois mois avant lesdites modifications, la cour d'appel a violé les articles L. 321-3, L. 321-4 et L. 321-4-1 du code du travail (anciens), devenus L. 1233-30, L. 1233-32 et L. 1235-10 du code du travail (nouveaux)


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40321
Date de la décision : 07/07/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 20 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 jui. 2009, pourvoi n°08-40321


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.40321
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