La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2009 | FRANCE | N°08-14163

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 25 juin 2009, 08-14163


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société les Assurances mutuelles de Picardie du désistement de son pourvoi en tant qu'il est dirigé contre la société Le Jaguar ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y..., son épouse, ont acquis un immeuble dont une partie était à usage d'habitation et l'autre partie était à usage commercial, donnée à bail à la société Le Jaguar, exploitée par M. X... et Mme Z... ; que M. X... a souscrit auprès de la société Assurances mutuelles de Picardie (l'assure

ur) une police multirisque professionnelle en qualité de propriétaire non-occupant, ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société les Assurances mutuelles de Picardie du désistement de son pourvoi en tant qu'il est dirigé contre la société Le Jaguar ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y..., son épouse, ont acquis un immeuble dont une partie était à usage d'habitation et l'autre partie était à usage commercial, donnée à bail à la société Le Jaguar, exploitée par M. X... et Mme Z... ; que M. X... a souscrit auprès de la société Assurances mutuelles de Picardie (l'assureur) une police multirisque professionnelle en qualité de propriétaire non-occupant, que la société Le Jaguar a souscrit une police multirisque professionnelle en qualité de locataire de l'immeuble et de propriétaire du fonds de commerce, et que M. X... et Mme Z... ont souscrit une police multirisque habitation en qualité de propriétaires occupants ; que le 11 janvier 1999, un incendie ayant détruit la majeure partie de l'immeuble, M. X..., Mme Z..., et la société Le Jaguar ont fait assigner l'assureur devant le tribunal de grande instance aux fins de le voir condamner à leur verser des provisions dans le cadre des polices souscrites ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour admettre par motifs propres et adoptés la recevabilité des demandes de M. X... et déclarer l'assureur tenu de réparer son préjudice, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté qu'en l'espèce, celui-ci a bien la qualité de propriétaire du bien sinistré ; qu'il est donc recevable à agir en paiement de l'indemnité d'assurance ou, à plus forte raison, d'une provision à valoir sur celle-ci, peu important que Mme Y... ne soit pas dans la cause ; qu'en outre, la garantie de l'assureur de dommages étant recherchée, il ne ressort pas des pièces contractuelles versées aux débats que Mme Y... ait la qualité de souscripteur, d'assuré ou de bénéficiaire des indemnités pour lesquelles une provision est demandée ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions par lesquelles l'assureur faisait valoir qu'en agissant seul devant les juges du fond, M. X... l'exposait à un double paiement, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Et sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1315 du code civil ;

Attendu que pour admettre par motifs propres et adoptés la recevabilité des demandes de Mme Z..., et déclarer l'assureur tenu de réparer son préjudice, l'arrêt retient que les conditions particulières du contrat d'assurance multirisque habitation versées aux débats ont été établies au nom des deux concubins ; qu'elles sont d'ailleurs signées par Mme Z... ; que certes, à la rubrique "Qualité", il est indiqué "propriétaire occupant", alors que Mme Z... ne justifie pas, ni même n'excipe, d'une telle qualité ; que toutefois, cette rubrique n'a pas été complétée de sa main, mais par le rédacteur du contrat, qui est l'assureur ou son agent ; qu'elle ne figure d'ailleurs pas sous la mention "Déclarations du sociétaire" ou "Déclarations complémentaires" ; qu'il est donc vain de faire grief à Mme Z... d'une "demi-vérité" qui peut aussi bien être le résultat d'une approximation simplificatrice de l'assureur ; que de plus, il convient d'observer que l'assureur n'en tire aucune conséquence de droit sur la validité ou l'opposabilité du contrat ;

Qu'en statuant ainsi, alors que Mme Z..., qui se prévalait de l'obligation de l'assureur, avait la charge de démontrer que sa mention comme propriétaire était le fait de celui-ci, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne M. X... et Mme Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des Assurances mutuelles de Picardie ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils pour les Assurances mutuelles de Picardie,

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu de déclarer Monsieur X... irrecevable en ses demandes et d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, déclaré la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE tenue à réparer le préjudice de Monsieur X..., résultant du sinistre survenu le 11 janvier 1999 ;

AUX MOTIFS QUE l'article L.121-13 du Code des assurances dispose que les indemnités dues à la suite d'assurance contre l'incendie sont attribuées, sans qu'il y ait besoin de délégation expresse, aux créanciers privilégiés et hypothécaires et interdit à l'assureur de payer l'indemnité à un autre que le propriétaire de l'objet loué, le voisin ou le tiers subrogé dans leurs droits tant que ceux-ci n'ont pas été désintéressés ; qu'il n'est pas contesté qu'en l'espèce, Monsieur X... a bien la qualité de propriétaire du bien sinistré ; qu'il est donc recevable à agir en paiement de l'indemnité d'assurance ou, à plus forte raison, d'une provision à valoir sur celle-ci, peu important que Madame Y... ne soit pas dans la cause ; qu'il convient d'observer, en outre, que la garantie des ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE est sollicitée en qualité d'assureur de dommages puisque la responsabilité de l'incendie n'a pas été établie, étant observé que l'article L.121-13 du Code des assurances prend d'ailleurs place dans un titre consacré aux assurances de dommages ; qu'il ne ressort pas des pièces contractuelles versées aux débats que Madame Y... ait la qualité de souscripteur, d'assuré ou de bénéficiaire des indemnités pour lesquelles une provision est demandée ;

ALORS QU' engage sa responsabilité et procède à un paiement qui n'est pas libératoire l'assureur qui indemnise intégralement une des victimes du sinistre, tout en sachant qu'il existe d'autres victimes du même sinistre que le montant de la garantie stipulée dans la police ne permettra pas de satisfaire ; que dans ses conclusions d'appel (signifiées le 18 avril 2007, p. 3 § 4 à 7), la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE faisait valoir que Monsieur X... était irrecevable en son action, dès lors qu'il partageait la qualité de propriétaire de l'immeuble sinistré avec son épouse, Madame Y..., qui n'était pas dans la cause ; qu'en déclarant la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE tenue d'indemniser Monsieur X..., tout en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si en agissant seul devant les juges du fond, Monsieur X... n'exposait pas la compagnie d'assurances à un double paiement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.121-1 et L.121-13 du Code des assurances.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu de déclarer Mademoiselle Z... irrecevable en ses demandes et d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, déclaré la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE tenue à réparer le préjudice de Mademoiselle Corinne Z..., résultant du sinistre survenu le 11 janvier 1999 ;

AUX MOTIFS QUE les conditions particulières du contrat d'assurance multirisque habitation versées aux débats ont été établies au nom des deux concubins ; qu'elles sont d'ailleurs signées par Mademoiselle Z... ; que certes, à la rubrique "Qualité", il est indiqué "propriétaire occupant", alors que Mademoiselle Z... ne justifie pas, ni même n'excipe, d'une telle qualité ; que toutefois, cette rubrique n'a pas été complétée de sa main, mais par le rédacteur du contrat, qui est l'assureur ou son agent ; qu'elle ne figure d'ailleurs pas sous la mention "Déclarations du sociétaire" ou "Déclarations complémentaires" ; qu'il est donc vain de faire grief à Mademoiselle Z... d'une "demi-vérité" qui peut aussi bien être le résultat d'une approximation simplificatrice de l'assureur ; que de plus, il convient d'observer que les ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE n'en tirent aucune conséquence de droit sur la validité ou l'opposabilité du contrat ; qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, de déclarer Mademoiselle Z... irrecevable en son action ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE dès lors qu'il était acquis que Mademoiselle Z... figurait dans la police d'assurance sous une qualité qu'elle n'avait pas en réalité, en l'occurrence celle de propriétaire de l'immeuble sinistré, il appartenait à l'intéressée de démontrer que cette circonstance était le fait de l'assureur ; qu'en constatant qu'"à la rubrique "Qualité", il est indiqué "propriétaire occupant", alors que Mademoiselle Z... ne justifie pas, ni même n'excipe, d'une telle qualité", puis en estimant que cette situation pouvait "aussi bien être le résultat d'une approximation simplificatrice de l'assureur", de sorte qu'il ne pouvait être imputé aucune fausse déclaration à l'intéressée (arrêt attaqué, p. 5 § 2), cependant que c'était à cette dernière d'établir positivement qu'elle n'était pas à l'origine d'une fausse déclaration, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE dans ses conclusions d'appel (signifiées le 18 avril 2007, p. 6 § 4), la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE faisait valoir que "Mademoiselle Z... n'a pas la qualité de propriétaire, qu'elle est donc irrecevable à solliciter une indemnisation pour un immeuble dont elle n'est pas propriétaire, alors qu'au surplus elle a souscrit une fausse déclaration en prétendant à l'assureur être propriétaire, ce qu'elle n'est pas" ; qu'en affirmant que l'assureur ne tirait de la déclaration erronée de Mademoiselle Z... "aucune conséquence de droit sur la validité ou l'opposabilité du contrat" (arrêt attaqué, p. 5 § 2), cependant que la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE tiraient de la circonstance susvisée toutes les conséquences de droit utiles, à savoir l'irrecevabilité de la demande d'indemnisation de Mademoiselle Z..., la cour d'appel a dénaturé les conclusions précitées et a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QU' en toute hypothèse, dès lors qu'il était acquis aux débats que Mademoiselle Z... avait présenté sa demande d'indemnisation sous une qualité qu'elle n'avait pas, en l'occurrence celle de "propriétaire occupant", cette demande devait nécessairement être jugée irrecevable, peu important le point de savoir à qui devait être imputée l'inexactitude de la mention figurant sur la police d'assurance ; qu'en déclarant que la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE était tenue d'indemniser Mademoiselle Z... à la suite du sinistre survenu le 11 janvier 1999, tout en constatant que l'intéressée n'avait pas la qualité de "propriétaire occupant" figurant sur la police d'assurance qu'elle invoquait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L.121-1 du Code des assurances et 1134 du Code civil ;

ALORS, EN DERNIER LIEU, QU' en ne caractérisant pas, en définitive, en quelle qualité Mademoiselle Z... se trouvait recevable à agir en indemnisation contre la Compagnie ASSURANCES MUTUELLES DE PICARDIE dans le cadre de la police qu'elle invoquait, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.121-1 du Code des assurances et de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-14163
Date de la décision : 25/06/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 10 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 25 jui. 2009, pourvoi n°08-14163


Composition du Tribunal
Président : M. Gillet (président)
Avocat(s) : Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.14163
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award