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24/06/2009 | FRANCE | N°08-40676

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 juin 2009, 08-40676


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 11 décembre 2007), que M. X... a été engagé le 17 juin 1991, sans contrat écrit, en qualité de commercial, par la société Expertises Galtier ; qu'occupant, à sa demande, depuis le 1er janvier 1997, un poste d'expert-régleur au coefficient 400 de la nomenclature des emplois des collaborateurs commerciaux et techniques de la convention collective des entreprises d'expertises en matière d'évaluations industrielles et commerciales du 7 décembre 1976, le salarié a pris ac

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 11 décembre 2007), que M. X... a été engagé le 17 juin 1991, sans contrat écrit, en qualité de commercial, par la société Expertises Galtier ; qu'occupant, à sa demande, depuis le 1er janvier 1997, un poste d'expert-régleur au coefficient 400 de la nomenclature des emplois des collaborateurs commerciaux et techniques de la convention collective des entreprises d'expertises en matière d'évaluations industrielles et commerciales du 7 décembre 1976, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail à raison de graves manquements de l'employeur à ses obligations contractuelles, par lettre recommandée du 2 novembre 2005 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en paiement au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, de rappel de repos compensateur non pris et des congés payés afférents, alors, selon le moyen :

1°/ que s'il résulte de l'article L. 212-1-1 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'il résulte des énonciations souveraines des juges d'appel qu'il a versé aux débats des décomptes de frais établis par son employeur de 2000 à 2005 ainsi qu'un décompte mensuel de kilomètres effectués de 2002 à 2005 ; qu'en déboutant néanmoins le salarié aux motifs que ces éléments ne permettaient pas d'appréhender son temps de travail effectif, de sorte qu'il n'étaient pas de nature à étayer ses demandes en matière d'heures supplémentaires et de repos compensateur, la cour d'appel a violé l'article L. 212-1-1 du code du travail ;

2°/ qu'il faisait valoir dans ses écritures d'appel qu'il apportait à son employeur un chiffre d'affaires de plus de deux fois supérieur à celui des autres experts régleurs de la société et qu'une telle performance ne pouvait se réaliser en travaillant 35 heures par semaine ; qu'en outre son employeur ne pouvait pas prétendre que les heures effectuées au volant n'étaient pas des heures de travail puisqu'il indemnisait les kilomètres parcourus, soit entre 500 et 2000 kilomètres par semaine, et lui payait son téléphone de voiture, sa carte télépéage ainsi qu'une partie de ses dépenses de téléphone à son domicile ; que la cour d'appel qui a laissé ce moyen sans réponse a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'il n'est pas nécessaire pour que les heures supplémentaires soient payées par l'employeur que celui-ci en ait fait la demande, explicite ou implicite dès lors qu'il était informé de leur accomplissement ; qu'en le déboutant de ses demandes de paiement d'heures supplémentaires et de repos compensateur au motif que les éléments produits ne permettaient pas d'appréhender son temps de travail effectif dans un cadre mensuel ou hebdomadaire sur la base d'une demande explicite ou implicite de l'employeur alors que l'intéressé produisait aux débats des décomptes de frais établis par l'entreprise permettant d'établir qu'il parcourait en moyenne entre 500 et 2000 kilomètres par semaine, la cour d'appel a violé l'article L. 212-1-1 du code du travail ;

Mais attendu que s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;

Et attendu que la cour d'appel qui a constaté que M. X... ne produisait aucun décompte de ses heures de travail, mensuel ou hebdomadaire et que les seuls éléments dont il se prévalait, relevés de frais justifiant du kilométrage parcouru, facturation des dossiers par lui traités et attestations imprécises, ne permettaient pas d'appréhender son temps de travail effectif, a souverainement décidé, sans encourir les griefs du moyen, que l'intéressé n'apportait pas d'éléments suffisants pour étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires et de repos compensateur ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X....

LE

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Jacques X... de ses demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, de rappel de repos compensateur non pris et des congés payés afférents

AUX MOTIFS QUE les heures supplémentaires de travail sont celles qui sont accomplies au-delà de la durée hebdomadaire légale de travail effectif ou de la durée considérée comme équivalente ; le temps de travail effectif s'entend de toute période pendant laquelle le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; peu importe que le salarié ait tardé pour réclamer ses droits, l'acceptation sans protestation ni réserve du salaire n'implique pas de sa part renonciation à ses droits ; dans une entreprise de plus de 20 salariés, les heures supplémentaires se traduisent par une rémunération majorée au-delà de 35 heures et l'acquisition de droits à repos compensateur sous certaines conditions ; en l'espèce, Monsieur X... indique qu'il effectuait en moyenne 80 000 kilomètres par an, soit en prenant une moyenne de 60 km à l'heure, 1331 heures de conduite sur 11 mois de l'année soit 121 heures de conduite par mois, qu'il travaillait même à son domicile 7 jours sur 7, que cela porte son horaire minimal à 151H67 + 121 H = 272,67 H par mois, que c'est sur cette base qu'il a fixé sa demande pour une période non prescrite. Monsieur X... reconstitue ses heures de travail de façon très globale en référence à une moyenne mensuelle de temps passé sur la route et de temps passé par dossier ; Monsieur X... ne produit aucune décompte précis de ses heures de travail, que ce soit dans un cadre mensuel ou hebdomadaire, mais verse les pièces suivantes aux débats : - un décompte mensuel des kilomètres effectués de 2002 à 2005, établi de sa main, des décomptes de frais établis par l'entreprise de 2000 à 2005, des dossiers qu'il a traités à titre d'exemple, des attestations d'assurés sinistrés ; à la lecture de ces documents, il y a lieu de faire les constats suivants : - les dossiers et rapports produits par le salarié ne contiennent aucun élément d'information ou d'appréciation quant à la durée du travail, pas plus que les éléments de facturation afférents s'agissant d'une rémunération calculée non sur le temps passé sur une affaire mais sur la base d'un pourcentage appliqué au montant du sinistre remboursé ; les décomptes de frais permettent d'établir que Monsieur X... parcourait en moyenne entre 500 et 2000 kilomètres par semaine, qu'il franchissait des péages, qu'il déjeunait souvent en déplacement mais dormait très rarement à l'hôtel, ce sans mention explicite quant à la durée du travail ; les attestations d'une dizaine de clients établissent que Monsieur X... était un expert compétent et diligent, qu'il « travaillait beaucoup », organisait parfois plusieurs réunions sur un dossier, mais aucun témoin ne donne d'éléments d'appréciation précis et complets quant aux heures et jours travaillés ; ces seuls éléments produits par le salarié ne permettent pas d'appréhender le temps de travail effectif de Monsieur X..., dans un cadre mensuel ou hebdomadaire, sur la base d'une demande explicite ou implicite de l'employeur. Ils ne sont donc pas de nature à étayer les demandes de Monsieur X... en matière d'heures supplémentaires et de repos compensateur ; Ces documents versés par Monsieur X... ne validant pas la première étable du processus probatoire, la charge de la preuve ne peut être alors transférée sur l'employeur, d'autant qu'en l'espèce le salarié avait une totale liberté quant à son emploi du temps et l'organisation de son travail, qu'il n'était pas astreint à des passages réguliers au siège de l'entreprise ou d'un établissement et pouvait effectuer une partie de son travail à son domicile. Il était donc fort difficile pour la société EXPERTISE GALTIER d'établir et de produire un décompte objectif des horaires de travail de Monsieur X... sans l'aide du salarié ; une mission d'expertise comptable, telle que sollicitée par Monsieur X... n'a aucun intérêt en l'espèce, compte tenu de l'absence de contrôle possible en matière d'emploi du temps et alors que le salarié n'a pas relevé ses heures de travail et n'a pu tenter de les reconstituer qu'en référence à la notion de kilométrage qui est insuffisante en la matière. Concernant le chiffre d'affaire et le temps passé sur chaque dossier, hors les déplacements et réunions, le travail de Monsieur X... étant d'ordre purement individuel, rédactionnel et intellectuel, la notion de temps passé sur chaque affaire est assez subjective et dépendante des facultés et méthodes de chacun.

ALORS QUE s'il résulte de l'article L 212-1-1 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'il résulte des énonciations souveraines des juges d'appel que Monsieur X... a versé aux débats des décomptes de frais établis par son employeur de 2000 à 2005 ainsi qu'un décompte mensuel de kilomètres effectués de 2002 à 2005 ; qu'en déboutant néanmoins Monsieur X... aux motifs que ces éléments ne permettaient pas d'appréhender son temps de travail effectif, de sorte qu'il n'étaient pas de nature à étayer ses demandes en matière d'heures supplémentaires et de repos compensateur, la cour d'appel a violé l'article L 212-1-1 du Code du travail ;

ALORS SURTOUT que Monsieur X... faisait valoir dans ses écritures d'appel qu'il apportait à son employeur un chiffre d'affaires de plus de deux fois supérieur à celui des autres experts régleurs de la société et qu'une telle performance ne pouvait se réaliser en travaillant 35 heures par semaine ; qu'en outre son employeur ne pouvait pas prétendre que les heures effectuées au volant n'étaient pas des heures de travail puisqu'il indemnisait les kilomètres parcourus, soit entre 500 et 2000 kilomètres par semaine, et lui payait son téléphone de voiture, sa carte télépéage ainsi qu'une partie de ses dépenses de téléphone à son domicile ; que la cour d'appel qui a laissé ce moyen sans réponse a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

ALORS ENFIN qu'il n'est pas nécessaire pour que les heures supplémentaires soient payées par l'employeur que celui-ci en ait fait la demande, explicite ou implicite dès lors qu'il était informé de leur accomplissement ; qu'en déboutant Monsieur X... de ses demandes de paiement d'heures supplémentaires et de repos compensateur au motif que les éléments produits ne permettaient pas d'appréhender son temps de travail effectif dans un cadre mensuel ou hebdomadaire sur la base d'une demande explicite ou implicite de l'employeur alors que Monsieur X... produisait aux débats des décomptes de frais établis par l'entreprise permettant d'établir qu'il parcourait en moyenne entre 500 et 2000 kilomètres par semaine, la cour d'appel a violé l'article L 212-1-1 du code du travail ;

LE

SECOND MOYEN DE CASSATION :
fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande tendant à voir dire et juger que la rupture du contrat de travail à son initiative est fondée sur des manquements graves de la Société EXPERTISES GALTIER et à ce titre doit être qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse et en emporter les conséquences et de l'avoir débouté de toutes ses demandes en rapport avec les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais constituer de manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur ; en l'espèce, Monsieur X... ne peut prétendre qu'à une somme de 897,49 euros que lui devait son employeur à titre de rappel de rémunération ; en conséquence les faits invoqués par Monsieur X... ne justifiant pas une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail, cette rupture imputable au salarié produit les effets d'une démission ;

ALORS QUE la cassation à intervenir du chef des demandes de Monsieur X... au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents et du repos compensateur et des congés payés y afférents entraînera par voie de conséquence la cassation des dispositions de l'arrêt attaqué du chef de la rupture du contrat de travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40676
Date de la décision : 24/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 11 décembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jui. 2009, pourvoi n°08-40676


Composition du Tribunal
Président : M. Marzi (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.40676
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