LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 7 décembre 2007), que M. X..., engagé par la société Bois sciages de Sougy le 12 novembre 1987 en qualité d'opérateur sciage ou emballage, est devenu contremaître de production à compter du 1er avril 1994 ; que le 31 octobre 2003, l'employeur l'a convoqué à un entretien préalable qui s'est déroulé le 13 novembre au cours duquel divers reproches lui ont été formulés ; que le lendemain, le salarié a été placé en arrêt de travail pour dépression réactionnelle ; qu'ayant été déclaré par le médecin du travail le 31 mars 2004 inapte à tous les postes de l'entreprise avec danger immédiat, le salarié a été convoqué le 13 avril 2004 à un entretien préalable fixé au 22 avril 2004, puis licencié le 26 avril ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt d'avoir écarté le caractère professionnel de l'inaptitude et d'avoir rejeté ses demandes tendant au paiement, en application de l'article L. 122-32-6 du code du travail, d'un solde d'indemnité de licenciement, d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge a l'obligation d'indiquer les éléments de preuve sur lesquels il se fonde pour affirmer l'existence d'un fait ; que la cour d'appel ne pouvait donc se borner à affirmer «qu'un dysfonctionnement inadmissible pour l'employeur a été constaté le 30 octobre 2003 dans l'atelier dont M. X... avait la responsabilité» (violation de l'article 455 du code de procédure civile) ;
2°/ qu'est victime d'un accident du travail le salarié atteint d'une dépression nerveuse soudaine survenue de façon consécutive à un entretien auquel le salarié était soumis ; que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations selon lesquelles 1°/ M. X... avait été convoqué à un entretien le 13 novembre 2003 à 16 heures pour évoquer des problèmes dans l'atelier dont il avait la responsabilité ; 2°/ cet entretien professionnel avait remis en cause M. X..., 3°/ le salarié avait été victime d'une dépression réactionnelle, étant par ailleurs admis par l'employeur que l'entretien relevait de son pouvoir de direction et que le salarié avait supporté avec difficulté cet entretien critique, ce dont il résultait qu'il avait été victime d'un accident du travail (violation de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale) ;
Mais attendu que les juges du fond appréciant souverainement si un accident est survenu au moins partiellement par le fait ou à l'occasion du travail ont estimé, par une réponse motivée, que le caractère professionnel de la maladie n'était pas établi ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que la cour d'appel aurait dû rechercher, ainsi qu'elle y avait invitée, si le libellé même de la lettre de licenciement, notifiant à M. X... la rupture de son contrat «du fait de l'avis d'inaptitude délivré par le médecin du travail. Cet avis vous déclare inapte à tout poste dans notre entreprise, sans possibilité de reclassement, ce qui ne nous permet pas, face à cette position du médecin du travail, sans aucune consultation de notre part, de vous proposer un poste compatible avec votre état de santé», n'établissait pas que l'employeur s'était borné à prendre acte des conclusions du médecin du travail pour prononcer le licenciement et n'avait, ainsi, effectué aucune recherche sérieuse de reclassement (manque de base légale au regard des articles L. 122-14-2 et L. 122-24-4 du code du travail) ;
Mais attendu que la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a constaté que l'employeur avait recherché à reclasser le salarié notamment au sein de l'entreprise et au sein des trois sites de la société Monnet Sève avec laquelle elle formait un groupe ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu qu'il est enfin fait grief à l'arrêt d'avoir débouté le salarié de sa demande de prime d'intéressement au titre de l'année 2004, alors, selon le moyen, que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles une prime avait été versée aux salariés pendant 7 années consécutives, d'où il résultait que le principe du versement de la prime étant acquis, il était devenu obligatoire pour l'employeur (violation de l'article L. 121-1 du code du travail) ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté qu'aucune indication n'était donnée sur le mode de calcul des primes à montant très différent d'une année sur l'autre et sans suite logique, a tiré les conséquences légales de ses constatations ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Y..., avocat aux Conseils pour M. X...,
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir écarté le caractère professionnel de l'inaptitude de Monsieur X..., et d'avoir, en conséquence, rejeté ses demandes tendant au paiement, en application de l'article L. 122-32-6 du Code du travail, d'un solde d'indemnité de licenciement de 247,14 , d'une indemnité de préavis de 3.762,92 et des congés payés y afférents ;
Aux motifs que Monsieur X... avait été convoqué à un entretien le 13 novembre 2003 à 16 heures pour évoquer des problèmes de maîtrise, étant acquis qu'un dysfonctionnement inadmissible avait été constaté le 30 octobre 2003 dans l'atelier dont il avait la responsabilité ; que la teneur précise de cet entretien n'était pas connue ; que si, comme l'avait retenu le Docteur Z..., expert désigné par le tribunal du contentieux de la capacité, cet entretien professionnel avait remis en cause Monsieur X..., qui, selon ses collègues de travail, serait ressorti de cet entretien «ébranlé, choqué, abattu, blême», il ne prouvait pas pour autant une attitude violente et soudaine de la direction ; qu'aucune insulte, brimade humiliante et dévalorisante, qu'aucun propos ou geste menaçant ou démesuré, qu'aucune action soudaine ou inattendue n'était établie, dans un contexte où Monsieur X... venait rendre compte d'un dysfonctionnement de son atelier ; que la preuve de tels éléments ne pouvait résulter ni de l'existence d'une dépression réactionnelle, ni des propos que Monsieur X... aurait tenus à son épouse, ni d'injures fréquemment pratiquées dans la société, à les supposer établies ;
Alors d'une part, que le juge a l'obligation d'indiquer les éléments de preuve sur lesquels il se fonde pour affirmer l'existence d'un fait ; que la cour d'appel ne pouvait donc se borner à affirmer «qu'un dysfonctionnement inadmissible pour l'employeur a été constaté le 30 octobre 2003 dans l'atelier dont Monsieur X... avait la responsabilité» (violation de l'article 455 du Code de procédure civile).
Alors d'autre part, qu' est victime d'un accident du travail le salarié atteint d'une dépression nerveuse soudaine survenue de façon consécutive à un entretien auquel le salarié était soumis ; que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations selon lesquelles 1°) Monsieur X... avait été convoqué à un entretien le 13 novembre 2003 à 16 heures pour évoquer des problèmes dans l'atelier dont il avait la responsabilité ; 2°) cet entretien professionnel avait remis en cause Monsieur X..., 3°) le salarié avait été victime d'une dépression réactionnelle, étant par ailleurs admis par l'employeur que l'entretien relevait de son pouvoir de direction et que le salarié avait supporté avec difficulté cet entretien critique, ce dont il résultait qu'il avait été victime d'un accident du travail (violation de l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale).
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Monsieur X... en paiement de la somme de 46.000 à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail par l'employeur lors de l'entretien du 13 novembre 2003 ;
Aux motifs que le principe de cet entretien, dont il n'était pas dénié qu'il intervenait après la constatation d'un dysfonctionnement dans l'atelier dont Monsieur X... était responsable, n'était pas fautif ;
Alors que le juge méconnaît les termes du litige lorsqu'il énonce qu'un plaideur ne conteste pas un point, ou qu'il ne dénie pas un fait, alors que son système de défense comportait une discussion sur ce point ; qu'en ayant énoncé qu'il n'était pas dénié que l'entretien intervenait après la constatation d'un dysfonctionnement dans l'atelier dont Monsieur X... était responsable, cependant que le salarié avait expressément soutenu dans ses conclusions reprises à l'audience avoir été victime de reproches tous aussi infondés les uns que les autres, la cour d'appel a méconnu les termes du litige (violation de l'article 4 du Code de procédure civile).
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement de Monsieur X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que le médecin du travail, qui avait constaté l'inaptitude de Monsieur X..., avait préconisé un retrait du milieu de travail ; qu'une telle préconisation, alors que Monsieur X... était atteint d'un syndrome dépressif réactionnel, interdisait toute proposition de reclassement au sein de la société Bois Sciages de Sougy, même par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de poste de travail ; que pour autant, la société avait recherché une possibilité de reclassement auprès de la société Monnet Sève ; qu'aucun reclassement n'était apparu possible sur les trois sites de cette société dont il n'était pas contesté qu'elle formait un groupe avec la société Bois Sciages de Sougy ;
Alors que la cour d'appel aurait dû rechercher, ainsi qu'elle y avait invitée, si le libellé même de la lettre de licenciement, notifiant à Monsieur X... la rupture de son contrat «du fait de l'avis d'inaptitude délivré par le médecin du travail. Cet avis vous déclare inapte à tout poste dans notre entreprise, sans possibilité de reclassement, ce qui ne nous permet pas, face à cette position du médecin du travail, sans aucune consultation de notre part, de vous proposer un poste compatible avec votre état de santé», n'établissait pas que l'employeur s'était borné à prendre acte des conclusions du médecin du travail pour prononcer le licenciement et n'avait, ainsi, effectué aucune recherche sérieuse de reclassement (manque de base légale au regard des articles L.122-14-2 et L. 122-24-4 du Code du travail).
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande de prime d'intéressement au titre de l'année 2004 ;
Aux motifs que l'examen des bulletins de paie de Monsieur X... pour avril 1996 à avril 2003 indiquait la perception, ces mois là, des primes d'intéressement de montants respectifs de 877, 779, 1351, 2857, 3514, 6574, 3306 et 2353 ou équivalent ; que le salarié, demandeur au paiement d'une prime pour avril 2004, ne donnait aucune indication sur le mode de calcul des primes à montants très différents d'une année sur l'autre, sans suite logique, le caractère éminemment variable conduisant à écarter un usage d'entreprise ;
Alors que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles une prime avait été versée aux salariés pendant 7 années consécutives, d'où il résultait que le principe du versement de la prime étant acquis, il était devenu obligatoire pour l'employeur (violation de l'article L. 121-1 du Code du travail).