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24/06/2009 | FRANCE | N°07-41925

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 juin 2009, 07-41925


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été employée depuis le 11 février 1997 par la société JIP Diffusion, aux droits de laquelle se trouve la société Adrexo, en qualité de distributeur de documents publicitaires et journaux gratuits, suivant contrat à durée indéterminée ne mentionnant pas s'il était conclu à temps plein ou partiel et prévoyant une rémunération au rendement en fonction du nombre de documents distribués ; que son contrat de travail a été suspendu entre le 9 mars 1999 et le

15 octobre 2000 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes ten...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été employée depuis le 11 février 1997 par la société JIP Diffusion, aux droits de laquelle se trouve la société Adrexo, en qualité de distributeur de documents publicitaires et journaux gratuits, suivant contrat à durée indéterminée ne mentionnant pas s'il était conclu à temps plein ou partiel et prévoyant une rémunération au rendement en fonction du nombre de documents distribués ; que son contrat de travail a été suspendu entre le 9 mars 1999 et le 15 octobre 2000 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant en leur dernier état notamment à la requalification de son contrat de travail en un contrat à temps plein et au paiement de rappels de salaires sur la base du SMIC, des congés payés afférents, de dommages-intérêts pour harcèlement moral ainsi que d'une indemnité pour travail dissimulé ;

Sur les premier et deuxième moyens réunis :

Attendu que la société Adrexo fait grief à l'arrêt d'avoir dit que Mme X... a droit au paiement d'un rappel de salaire outre les congés payés correspondants à compter de mars 2000, selon les modalités arrêtées aux motifs de l'arrêt (rappel de salaire brut sur la base d'un plein temps diminué du nombre des heures d'emploi au Sivos de Berjou, et du SMIC applicable), et après déduction des salaires bruts perçus sur la période non prescrite (mars 2000 à mai 2004), et renvoyé les parties à effectuer le calcul de cette créance, alors, selon le moyen :

1°/ que la distinction entre contrat de travail à temps complet et contrat de travail à temps partiel constitue une summa divisio, de sorte que tout contrat de travail est soit à temps complet, soit à temps partiel, sans pouvoir aucunement être partiellement à temps complet ; qu'ainsi, dès lors qu'il est établi que le salarié qui réclame la requalification de son contrat à temps partiel effectue, à côté de ce temps partiel, un autre temps partiel chez un autre employeur, la requalification du premier contrat de travail en contrat à temps complet est nécessairement exclue ; qu'il s'en évince en particulier que le salarié, qui est en mesure d'avoir effectivement un autre emploi, fût-ce de courte durée, à côté de son temps partiel, n'est ainsi pas dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail, ni contraint de se tenir en permanence à la disposition de son employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme X... exerçait de manière régulière une autre activité professionnelle à côté de ses fonctions de distributeur chez la société Adrexo ; qu'en considérant néanmoins que cet autre emploi partiel, au prétexte erroné qu'il était de courte durée, n'empêchait pas la requalification du contrat avec la société Adrexo en contrat à temps complet, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 212-14-3 du code du travail ;

2°/ qu'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet du contrat de travail à temps partiel qui ne contient pas de stipulation relative à la répartition de l'horaire de travail sur les jours de la semaine ou les semaines du mois quand il est établi que le salarié, travaillant effectivement à temps partiel, n'est pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler chaque semaine et/ou chaque mois, et n'est pas tenu de se tenir constamment à la disposition de son employeur ; que tel est le cas lorsque le salarié est en mesure de s'organiser pour avoir une autre activité à côté de son temps partiel ; qu'à cet égard, la prévisibilité de son rythme de travail par le salarié qui n'est tenu de fournir qu'une prestation hebdomadaire, et n'a ainsi à travailler obligatoirement qu'un seul jour de la semaine, n'est pas subordonnée à la connaissance à l'avance par ce salarié de la durée exacte de cette prestation hebdomadaire ; qu'en effet, le salarié, du moment qu'il sait qu'il n'aura à travailler qu'un jour de la semaine qu'il peut prévoir avec un délai suffisant, est en mesure de s'organiser pour disposer librement des autres jours de la semaine, abstraction faite du volume ou de la durée exacts de sa prestation hebdomadaire, dont l'éventuelle variation d'une semaine sur l'autre ne lui impose aucunement de rester à la disposition permanente de son employeur ; qu'en l'espèce, en se fondant exclusivement sur l'absence de connaissance à l'avance par Mme X... de la quantité exacte et partant de la durée exacte de chaque distribution hebdomadaire, pour en déduire, de manière inopérante, qu'elle aurait été tenue de se tenir à la disposition permanente de son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-14-3 du code du travail ;

Mais attendu que, selon l'article L. 3123-14 du code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit ; qu'il mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en présence d'un contrat de travail écrit, il appartient à l'employeur qui conteste l'existence d'un contrat à temps plein de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte du travail convenu, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de son employeur ;

Et attendu qu'ayant constaté, d'abord, que les contrats ne mentionnaient ni la durée du travail ni la répartition de cette durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, ensuite, que la salariée, qui ne découvrait l'étendue de sa tournée hebdomadaire que lorsqu'elle se rendait au dépôt pour y recevoir, avec les consignes de l'employeur, la quantité de documents à distribuer et connaître son secteur de distribution, était dans l'obligation de signer les feuilles de route détaillant sa charge de travail, sans pouvoir la refuser plus d'une fois sous peine d'être rayée d'office du registre du personnel, enfin, que l'examen de ces feuilles de routes et des bulletins de paie révélait les variations constantes et non négligeables des volumes à distribuer d'une semaine à l'autre, obligeant la salariée qui ne pouvait les refuser sous peine de sanction, à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, la cour d'appel qui en a déduit que la société Adrexo n'établissait pas que Mme X..., laissée dans l'ignorance du rythme auquel elle pourrait travailler chaque semaine, effectuait un travail à temps partiel, a légalement justifié sa décision ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que l'employeur fait également grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :

1°/ que le harcèlement moral, tel que défini à l'article L. 122-49 du code du travail, suppose l'existence d'agissements répétés ; que tel n'est pas le cas lorsqu'une décision unique défavorable au salarié, prise par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, ne produit ses effets de façon répétitive que du seul fait que le contrat de travail est un contrat à exécution successive ; qu'en l'espèce, où Mme X... ne tenait de son contrat de travail aucun droit à être maintenue dans un secteur de distribution déterminé, chacune des feuilles de route de novembre 2003 au 3 mai 2004 l'affectant au seul secteur centre-ville mairie, au lieu de l'affecter à plusieurs secteurs comme auparavant, ne résultait que de l'exécution successive de la décision unique prise en novembre 2003 par la société Adrexo, dans le cadre de son pouvoir de direction, de modifier les tâches confiées à l'intéressée ; qu'en considérant au contraire qu'il avait commis des agissements répétés de harcèlement moral lors de chaque remise des feuilles de route, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°/ qu'en se bornant à affirmer qu'il avait commis des agissements répétés de harcèlement moral ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de la salariée ou de compromettre son avenir professionnel, et en se bornant donc à reproduire les dispositions alternatives de l'article L. 122-49 du code du travail sans préciser, ni a fortiori caractériser, quel type de préjudice les agissements prétendument constitutifs de harcèlement moral avaient pu causer à Mme X..., la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-49 du code du travail ;

Mais attendu que les juges du fond, qui ont constaté que ce n'est qu'après que Mme X... eut saisi le conseil de prud'hommes de sa contestation relative à l'ancienneté que l'employeur avait, de façon répétée, limité les missions de la salariée au seul secteur du centre-ville, ce qui impliquait une baisse de sa rémunération, a caractérisé des agissements de harcèlement moral ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu qu'après avoir retenu que le contrat de travail de Mme X... avait été suspendu entre le mois de mars 1999 et le mois d'octobre 2000 et que l'intéressée, qui n'avait pas travaillé entre le 9 mars 1999 et le 15 octobre 2000, ne soutenait pas que pendant la période de suspension de son contrat de travail elle était en droit de percevoir de son employeur des sommes au titre de ce contrat, la cour d'appel, qui a rejeté la demande de remise de bulletins de paie pour ladite période, a condamné la société Adrexo à payer à Mme X... un rappel de salaire, outre les congés payés correspondants, à compter du mois de mars 2000, selon les modalités arrêtées dans son arrêt ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs contradictoires, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le cinquième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu qu'après avoir relevé que Mme X... avait, à compter de 2002, effectué des remplacements du chef de centre pendant les congés payés et les jours de RTT de ce dernier, de sorte qu'elle pouvait prétendre, à raison de sept semaines par an en 2002 et 2003, à un supplément de rémunération, la cour d'appel a condamné la société Adrexo à payer, de ce chef, à Mme X... un rappel de salaire à compter de mars 2000 ;

Qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que Mme X... avait droit, à compter de mars 2000, selon les modalités arrêtées dans sa décision, au paiement de rappels de salaires sur la base d'un temps plein et sur la base du salaire d'un chef de centre, l'arrêt rendu le 16 février 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Adrexo.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que Mme X..., salarié à temps partiel de la société Adrexo (exposante), a droit au paiement d'un rappel de salaire outre les congés payés correspondants à compter de mars 2000, selon les modalités arrêtées aux motifs de l'arrêt (rappel de salaire brut sur la base d'un plein temps diminué du nombre des heures d'emploi au Sivos de Berjou, et du SMIC applicable), et après déduction des salaires bruts perçus sur la période non prescrite (mars 2000 à mai 2004) et renvoyé les parties à effectuer le calcul de cette créance ;

AUX MOTIFS QU'il doit être retenu en l'espèce que l'absence de contrat de travail écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition, fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d'une part, qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel, d'autre part, que la salariée n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur ; … que la Sarl Adrexo fait valoir encore que Madame X... n'était pas en permanence à sa disposition, puisqu'elle a pu mener concurremment un emploi auprès du Sivos de Berjou, la période d'emploi au Presses Bagnolaises n'étant pas en cause du fait de la prescription ; que pour cet emploi à temps très partiel n'excédant pas quelques heures par semaine il doit être considéré que Madame X... ne se tenait effectivement pas pendant la durée de cet emploi, à la disposition de la Sarl Adrexo ; mais que, pour le surplus, hormis pour la durée très limitée de l'emploi au Sivos de Berjou, il est établi que Madame X... devait se tenir constamment le reste du temps à la disposition de la Sarl Adrexo et était dans l'impossibilité de prévoir à l'avance, son rythme et sa charge de travail pour chaque semaine, l'employeur n'apportant pas la preuve contraire ; que, de ce fait, Madame X... peut prétendre à un rappel de salaire brut sur la base d'un plein temps diminué du nombre des heures d'emploi au Sivos de Berjou, et du SMIC applicable dont les dispositions législatives sont d'ordre public, et après déduction des salaires bruts perçus sur la période non prescrite (mars 2000 à mai 2004) ;

ALORS QUE la distinction entre contrat de travail à temps complet et contrat de travail à temps partiel constitue une summa divisio, de sorte que tout contrat de travail est soit à temps complet, soit à temps partiel, sans pouvoir aucunement être partiellement à temps complet ; qu'ainsi, dès lors qu'il est établi que le salarié qui réclame la requalification de son contrat à temps partiel effectue, à côté de ce temps partiel, un autre temps partiel chez un autre employeur, la requalification du premier contrat de travail en contrat à temps complet est nécessairement exclue ; qu'il s'en évince en particulier que le salarié, qui est en mesure d'avoir effectivement un autre emploi, fût-ce de courte durée, à côté de son temps partiel, n'est ainsi pas dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail, ni contraint de se tenir en permanence à la disposition de son employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme X... exerçait de manière régulière une autre activité professionnelle à côté de ses fonctions de distributeur chez la société Adrexo ; qu'en considérant néanmoins que cet autre emploi partiel, au prétexte erroné qu'il était de courte durée, n'empêchait pas la requalification du contrat avec la société Adrexo en contrat à temps complet, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, à violé l'article L. 212-14-3 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que Mme X..., salarié à temps partiel de la société Adrexo (exposante), a droit au paiement d'un rappel de salaire outre les congés payés correspondants à compter de mars 2000, selon les modalités arrêtées aux motifs de l'arrêt (rappel de salaire brut sur la base d'un plein temps diminué du nombre des heures d'emploi au Sivos de Berjou, et du SMIC applicable), et après déduction des salaires bruts perçus sur la période non prescrite (mars 2000 à mai 2004) et renvoyé les parties à effectuer le calcul de cette créance ;

AUX MOTIFS QU'il importe peu qu'une partie de la distribution s'effectue hors la vue de l'employeur et hors de ses établissements, dès lors qu'enfermée dans des consignes précises (dates de prise en charge, composition et volume des poignées, lieux de la tournée, délai de distribution) elle peut faire l'objet de contrôles et que la durée d'exécution ne dépend pas du salarié qui choisit seulement le moment de l'exécution de sa tâche mais sans maîtriser sa durée, qui résulte essentiellement du volume de documents à distribuer et des lieux de distribution déterminés par l'employeur ; qu'il doit être retenu en l'espèce que l'absence de contrat de travail écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition, fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d'une part, qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel, d'autre part, que la salariée n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur ; … que, selon les explications fournies par les parties, les distributeurs doivent se rendre au dépôt auquel ils sont rattachés pour se faire remettre la feuille de route indiquant le travail à effectuer dans la journée ou la semaine et recevoir les consignes nécessaires du chef de centre, préparer les documents à distribuer selon les consignes données en les triant selon leur nature et les plier, ce travail pouvant être effectué à domicile, avant de réaliser la tournée de distribution selon les consignes de l'employeur ; qu'alors que la quantité de documents à distribuer voire même le secteur de distribution, varient constamment selon la demande de l'employeur, il en résulte que lors de la conclusion du contrat de travail, la salariée ignorait la quantité exacte de travail qu'elle serait appelée à fournir et donc la durée exacte de son emploi, et que ce n'était que lorsqu'elle se rendait chaque semaine au dépôt pour recevoir la quantité de documents à distribuer et signer la feuille de route, qu'elle était informée de la quantité de travail à fournir pour la semaine considérée ; … que, si l'employeur établit au moyen d'une étude des feuilles de route de Mme Durlin rapprochées des cadencements définis aux termes de la convention collective nationale de 2004, en fonction des documents à distribuer et de la densité du secteur de distribution, que Mme X... faisait un travail à temps partiel, la Sarl Adrexo ne renverse pas la présomption de travail à temps plein dès lors qu'elle n'établit pas que la salariée était à même de prévoir avec un délai de prévenance minimum, le rythme auquel elle devait travailler et dont elle reconnaît qu'il était par nature variable ; que c'est donc à tort et contre les termes du contrat de travail jamais modifié depuis 1997, que la Sarl Adrexo soutient que Mme X... connaissait son rythme de travail et effectuait les vacations de distribution qu'elle acceptait selon ses disponibilités personnelles ; qu'en effet, le contrat prévoyait que les missions s'exerçaient sous l'autorité de la direction ou de son représentant désigné par la société, que le salarié devait se rendre au bureau désigné selon les instructions données au fur et à mesure des besoins de la société, que le salarié déclarait accepter que l'employeur puisse limiter le travail confié aux distributions ou opérations régulières définies et précisées au contrat, et surtout que tout distributeur convoqué à deux reprises pour une distribution et qui ne se serait pas présenté, serait rayé d'office des registres du personnel de la société sauf absence justifiée au préalable, comme ayant manifesté par cette attitude une volonté expresse de démission ; que c'est donc sans fondement que la Sarl Adrexo soutient que Mme X... travaillait à son gré dès lors qu'elle ne pouvait sans risque d'être licenciée, refuser deux propositions de distribution, peu important que l'employeur n'ait pas cru devoir résilier le contrat en cette hypothèse, dès lors qu'il se réservait néanmoins la possibilité de le faire ; que la Sarl Adrexo fait valoir que les feuilles de routes représentaient autant d'avenants au contrat initial, qui constataient l'information et l'accord de la salariée sur ses conditions de travail ; que ce moyen est inopérant dès lors que le contrat initial ne fixait pas le temps minimum pour lequel Mme X... était employée, ni le quantum des heures complémentaires, et que surtout, la salariée était dans l'obligation de signer les feuilles de route détaillant sa charge de travail remises lors de la prise en charge de la distribution à effectuer pour la semaine ou partie de semaine considérée, feuilles de route dont la salariée n'était pas informée à l'avance et qu'elle ne pouvait refuser plus d'une fois aux termes de son contrat de travail, au risque d'être « rayée d'office des registres du personnel », l'ensemble ayant pour effet de contourner les dispositions relatives au travail à temps partiel ; que l'examen de feuilles de route et des bulletins de paie démontre des variations constantes et non négligeables d'une semaine à l'autre, dans les quantités de documents à distribuer et donc dans les charges et les temps de travail de la salariée ; que cette variation de charge de travail résulte même des propres pièces et écritures de l'employeur qui reconnaît notamment « En effet, l'activité économique de distribution connaît une grande variation des volumes à distribuer entre les jours, les semaines et les mois d'une année ; ... Ces variations sont imprévisibles à échéance de quelques jours, dans une échelle de 100 à 700% de l'activité minimale du distributeur. Cette variation ne permet pas de déterminer a priori une durée du travail et de fixer des horaires intangibles » ; et qu'en raison des termes de son contrat de travail, Mme X... ne pouvait sans risque de sanction refuser ces variations dans la charge de travail, ce qui établit qu'elle devait se tenir constamment à la disposition de son employeur ; qu'ainsi la Sarl Adrexo ne rapporte pas la preuve que la salariée n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition ;

ALORS QU'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet du contrat de travail à temps partiel qui ne contient pas de stipulation relative à la répartition de l'horaire de travail sur les jours de la semaine ou les semaines du mois quand il est établi que le salarié, travaillant effectivement à temps partiel, n'est pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler chaque semaine et/ou chaque mois, et n'est pas tenu de se tenir constamment à la disposition de son employeur ; que tel est le cas lorsque le salarié est en mesure de s'organiser pour avoir une autre activité à côté de son temps partiel ; qu'à cet égard, la prévisibilité de son rythme de travail par le salarié qui n'est tenu de fournir qu'une prestation hebdomadaire, et n'a ainsi à travailler obligatoirement qu'un seul jour de la semaine, n'est pas subordonnée à la connaissance à l'avance par ce salarié de la durée exacte de cette prestation hebdomadaire ; qu'en effet, le salarié, du moment qu'il sait qu'il n'aura à travailler qu'un jour de la semaine qu'il peut prévoir avec un délai suffisant, est en mesure de s'organiser pour disposer librement des autres jours de la semaine, abstraction faite du volume ou de la durée exacts de sa prestation hebdomadaire, dont l'éventuelle variation d'une semaine sur l'autre ne lui impose aucunement de rester à la disposition permanente de son employeur ; qu'en l'espèce, en se fondant exclusivement sur l'absence de connaissance à l'avance par Mme X... de la quantité exacte et partant de la durée exacte de chaque distribution hebdomadaire, pour en déduire, de manière inopérante, qu'elle aurait été tenue de se tenir à la disposition permanente de son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-14-3 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que Mme X..., salariée à temps partiel de la société Adrexo (exposante), a droit au paiement d'un rappel de salaire outre les congés payés correspondants à compter de mars 2000, selon les modalités arrêtées aux motifs de l'arrêt (rappel de salaire brut sur la base d'un plein temps diminué du nombre des heures d'emploi au Sivos de Berjou, et du SMIC applicable, et après déduction des salaires bruts perçus sur la période non prescrite (mars 2000 à mai 2004) et renvoyé les parties à effectuer le calcul de cette créance ;

AUX MOTIFS QU'il convient de considérer que les salaires antérieurs à mars 2000 sont atteints par la prescription ; … qu'il est établi que Mme X... n'a pas travaillé entre le 9 mars 1999 et le 15 octobre 2000 ; … qu'alors que les pièces de l'employeur démontrent en elles-mêmes que Mme X... n'entendait pas démissionner, mais refusait les missions, celui-ci n'a pas tiré les conséquences de la position prise par la salariée, ce qu'il n'était certes pas tenu de faire, et a accepté ce faisant la suspension du contrat, faute d'en prononcer la rupture ; … que Mme X... peut prétendre à un rappel de salaire brut sur la base d'un plein temps diminué du nombre des heures d'emploi au Sivos de Berjou, et du SMIC applicable dont les dispositions législatives sont d'ordre public, et après déduction des salaires bruts perçus sur la période non prescrite (mars 2000 à mai 2004) ;

ALORS QUE, ayant constaté dans ses motifs que le contrat de travail avait été suspendu entre le 9 mars 1999 et le 15 octobre 2000, la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître les conséquences légales de ses propres constatations, dire au dispositif que Mme X... a droit à un rappel de salaire outre les congés payés correspondants à compter de mars 2000 ; qu'en se prononçant de la sorte au prix d'une confusion manifeste entre la date d'effet de la prescription et la date de reprise du travail par la salariée, elle a violé les articles L. 140-1 et suivants du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné un employeur, la société Adrexo (exposante), à payer à son salarié à temps partiel, Mme X..., la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

AUX MOTIFS QUE Mme X... soutient que l'employeur lui a retiré les remplacements du chef de centre dès le 16 avril 2004 ; que cependant aucun élément ne vient étayer cette affirmation contestée, alors qu'elle a été en arrêt de travail ininterrompu dès le 3 mai 2004 ; que Mme X... fait valoir que l'employeur a limité ses secteurs d'activité au seul secteur 007 centre ville mairie, depuis son retour de congé maladie en novembre 2002 ; que cette assertion est pour partie démentie par les pièces du dossier qui démontrent que si la variété des secteurs a diminué en 2003 avec une diminution du niveau habituel de rémunération, ce n'est qu'à compter de novembre 2003 qu'elle a été affectée exclusivement au secteur du centre ville entraînant une baisse sensible du volume moyen d'activité et de rémunération ; or que cette diminution peut être mise en relation avec la saisine en mai 2003 du conseil de prud'hommes par Mme X... de la contestation relative à son ancienneté ; que la Sarl Adrexo se prévaut de l'acceptation des feuilles de route fixant l'accord des parties sur le secteur de distribution ; que cependant cet argument est inopérant dès lors que la signature d'une feuille de route, par ailleurs contrainte ainsi que cela a déjà été exposé supra, ne signifie pas un refus de travail sur d'autres secteurs, refus qui ne sont même pas expressément allégués par l'employeur ; qu'alors que la Sarl Adrexo n'excipe d'aucune proposition concrète qui aurait été refusée par Mme X... et d'aucune cause interne quant à une baisse de son volume d'activité qui justifierait objectivement la limitation de l'activité de Mme X... et alors que le contrat de travail précise que les propositions de missions étaient à l'initiative de l'employeur, il convient de considérer que l'employeur en ne lui proposant chaque semaine que des missions sur un seul secteur principalement de novembre 2003 au 3 mai 2004 alors qu'auparavant la salariée officiait régulièrement sur plusieurs secteurs, a commis lors de chaque remise des feuilles de route, des agissements répétés de harcèlement moral qui ont eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de la salariée ou de compromettre son avenir professionnel ; que le préjudice qui en est résulté sera réparé au vu des éléments du dossier, à hauteur de 5 000 euros ;

1°- ALORS QUE le harcèlement moral, tel que défini à l'article L. 122-49 du code du travail, suppose l'existence d'agissements répétés ; que tel n'est pas le cas lorsqu'une décision unique défavorable au salarié, prise par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, ne produit ses effets de façon répétitive que du seul fait que le contrat de travail est un contrat à exécution successive ; qu'en l'espèce, où Mme X... ne tenait de son contrat de travail aucun droit à être maintenue dans un secteur de distribution déterminé, chacune des feuilles de route de novembre 2003 au 3 mai 2004 l'affectant au seul secteur centre ville mairie, au lieu de l'affecter à plusieurs secteurs comme auparavant, ne résultait que de l'exécution successive de la décision unique prise en novembre 2003 par la société Adrexo, dans le cadre de son pouvoir de direction, de modifier les tâches confiées à l'intéressée ; qu'en considérant au contraire que la société Adrexo avait commis des agissements répétés de harcèlement moral lors de chaque remise des feuilles de route, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°- ALORS QU'en se bornant à affirmer que la société Adrexo avait commis des agissements répétés de harcèlement moral ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de la salariée ou de compromettre son avenir professionnel, et en se bornant donc à reproduire les dispositions alternatives de l'article L. 122-49 du code du travail sans préciser, ni a fortiori caractériser, quel type de préjudice les agissements prétendument constitutifs de harcèlement moral avaient pu causer à Mme X..., la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-49 du code du travail.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Mme X... a droit au paiement d'un rappel de salaire à compter de mars 2000 sur la base du salaire d'un chef de centre outre les congés payés correspondants, selon les modalités arrêtées aux motifs de l'arrêt (rémunération équivalente au supplément de salaire entre un distributeur payé au SMIC et un chef de centre pour 128 heures par an comprises dans le rappel au titre du temps plein, sans en déduire le sommes allouées au titre des distributions hors zone) et renvoyé les parties à effectuer le calcul de cette créance ;

AUX MOTIFS QU'il résulte de la confrontation des pièces et des écritures des parties que Mme X... à compter de 2002 a effectué des remplacements du chef de centre pendant les congés payés et jours de RTT de ce dernier ; … que Mme X... peut prétendre à raison de 7 semaines par an en 2002 et 2003 congés RTT (elle ne travaillait pas pendant la prise des congés 2004) à un supplément de rémunération équivalant à la différence entre celle du chef de centre qu'elle remplaçait effectivement et celle de distributrice, à hauteur de 128 heures par année ainsi que l'employeur l'a reconnu sur ce point sur l'année 2002 ;

ALORS QUE, ayant constaté dans ses motifs que Mme X... avait remplacé occasionnellement le chef de centre à compter de 2002 et qu'elle pouvait prétendre à ce titre à un supplément de rémunération pour 2002 et 2003, la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître les conséquences légales de ses propres constatations, dire au dispositif que Mme X... a droit, de ce chef, à un rappel de salaire outre les congés payés correspondants à compter de mars 2000 ; que, ce faisant, elle a violé les articles L. 140-1 et suivants du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-41925
Date de la décision : 24/06/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 16 février 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jui. 2009, pourvoi n°07-41925


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.41925
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