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24/06/2009 | FRANCE | N°07-41919

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 juin 2009, 07-41919


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 23 février 2007) que M. X... a été engagé le 2 février 2000, par la société Adrexo, en qualité de distributeur de documents publicitaires et journaux gratuits suivant contrat à durée indéterminée ne mentionnant pas s'il était conclu à temps plein ou à temps partiel et prévoyant une rémunération au rendement en fonction du nombre de documents distribués ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à la requalification de son contrat d

e travail en contrat à temps plein et au paiement de rappels de salaires et ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 23 février 2007) que M. X... a été engagé le 2 février 2000, par la société Adrexo, en qualité de distributeur de documents publicitaires et journaux gratuits suivant contrat à durée indéterminée ne mentionnant pas s'il était conclu à temps plein ou à temps partiel et prévoyant une rémunération au rendement en fonction du nombre de documents distribués ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein et au paiement de rappels de salaires et congés payés ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à M. X..., la différence entre la rémunération perçue de décembre 2001 au 31 juillet 2005 et celle résultant de l'application de la convention collective de la distribution directe de février 2004, alors, selon le moyen, que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, par un tribunal impartial ; que tel n'est pas le cas lorsque le juge, se départissant de son obligation de neutralité, fait reposer sa décision sur un préjugé ou un parti pris défavorable à l'une des parties, dont il écarte en particulier la thèse par une pétition de principe, rompant ainsi l'égalité des armes ; qu'à ce titre, l'existence d'un simple doute légitime sur l'impartialité du juge, suffit à caractériser l'atteinte au droit au procès équitable ; qu'en l'espèce, en se fondant, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet, sur une pétition posant en principe que les contrats conclus par la société Adrexo "permettent en fait à l'employeur de s'assurer d'un salariat suffisamment disponible pour satisfaire ses besoins et de faire ainsi peser sur celui-ci ses propres risques commerciaux en tournant la réglementation sur le travail à temps partiel", ou encore que "cette répartition du travail entre de très nombreux salariés, les place chacun dans la dépendance de l'employeur qui décide du volume de distribution", ce qui "est de nature à affecter le libre choix de tournées supplémentaires dont le nombre et l'importance dépendent d'abord du bon vouloir de l'employeur", la cour d'appel a exprimé un préjugé et un parti pris général manifestement défavorables à la société Adrexo, dont elle n'a dès lors pu objectivement apprécier la thèse et les éléments de preuve ; qu'en suscitant ainsi un doute légitime sur son impartialité et sur le respect de l'égalité des armes, la cour d'appel a méconnu les exigences du procès équitable et a violé l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a procédé à l'analyse des dispositions contractuelles et des éléments de fait qui lui étaient soumis, n'a pas statué par une pétition de principe empreinte de partialité ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur fait également grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il n'y a pas lieu à requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet lorsque, les conditions d'exécution du contrat ne plaçant pas le salarié dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et ne l'obligeant pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur, il a la possibilité d'exercer un autre emploi, s'il le souhaite ; qu'il s'ensuit que, quand c'est le même contrat de travail qui se poursuit, aux mêmes conditions d'exécution, au cours de deux périodes successives et que, durant la première, le salarié a pu exercer parallèlement un autre emploi, il s'en évince nécessairement qu'au cours de la seconde, il avait pareillement la possibilité de le faire, peu important qu'il ne l'ait pas fait ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. X... avait travaillé du 2 février 2000 au 30 novembre 2001 en parallèle pour la mairie d'Alençon qui plus est à temps plein et pour la société Adrexo et en a déduit à juste titre qu'au cours de cette période-là la présomption de temps complet invoquée par le salarié était détruite ; que, dès lors, en considérant au contraire que cette présomption devait s'appliquer pour la période postérieure au 1er décembre 2001, tandis que les stipulations et les conditions d'exécution du contrat de travail à temps partiel étaient demeurées rigoureusement identiques, ce dont il résultait nécessairement que le salarié avait la possibilité, s'il le souhaitait, d'exercer également un autre emploi au cours de la seconde période, comme il l'avait fait effectivement au cours de la première, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient nécessairement de ses propres constatations, a violé les articles L. 121-1 et L. 212-4-3 du code du travail ;

2°/ qu'en affirmant que les conditions d'exécution du contrat de travail à temps partiel de M. X... étaient telles, à compter du 1er décembre 2001, qu'elles le mettaient en permanence à la disposition de la société Adrexo et qu'elles ne lui permettaient donc pas d'avoir un autre emploi à temps partiel, sans rechercher quelles avaient été les conditions d'exécution du même contrat de travail avant cette date, à l'époque où le salarié occupait parallèlement un emploi à plein temps à la mairie d'Alençon, quand leur examen, résultant des pièces versées aux débats, ne pouvait que démontrer qu'elles étaient rigoureusement identiques avant comme après le 1er décembre 2001 et que dès lors les conditions d'exécution du contrat de travail n'avaient pas pu mettre l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer un autre emploi à temps partiel à compter de cette date, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 212-4-3 du code du travail ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions que la société Adrexo a soutenu que pour la période postérieure au 1er décembre 2001, les conditions de travail étaient identiques à celles de l'exécution de son travail avant cette date à une époque où il occupait un emploi de fonctionnaire municipal ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet du contrat à temps partiel qui ne contient pas de stipulation relative à la répartition de l'horaire de travail sur les jours de la semaine ou les semaines du mois quand il est établi que le salarié, travaillant effectivement à temps partiel, n'est pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler chaque semaine et/ou chaque mois, et n'est ainsi pas astreint de se tenir constamment à la disposition de son employeur ; que tel est le cas lorsque le salarié est en mesure de s'organiser pour avoir une autre activité à côté de son temps partiel ; qu'à cet égard, la prévisibilité de son rythme de travail par le salarié qui ne travaille qu'un seul ou même certains jours de la semaine selon des disponibilités qu'il fixe lui-même, n'exige pas qu'il connaisse en outre par avance la durée exacte de chaque prestation qu'il aura à exécuter les jours où il travaille, du moment que le salarié n'est pas contraint par l'employeur de travailler d'autres jours que ceux pour lesquels il s'est lui-même déclaré disponible soit lors de la conclusion du contrat de travail, soit de semaine en semaine, et qu'il peut ainsi maîtriser la répartition de son travail sur la semaine, et connaître suffisamment à l'avance ses jours libres ; qu'en l'espèce, en relevant, pour affirmer à tort que le distributeur n'était pas en mesure de connaître son rythme de travail et était contraint de rester en permanence à la disposition de l'employeur, qu'il ne pouvait connaître à l'avance la quantité de travail représentée par chaque distribution hebdomadaire obligatoire, ni donc la durée exacte de celle-ci, sans aucunement caractériser en quoi une éventuelle variation de cette durée pouvait en soi obliger le distributeur à travailler d'autres jours que ceux résultant de ses disponibilités contractuelles, et l'aurait ainsi empêché d'avoir une autre activité les jours de la semaine où il pouvait prévoir avec certitude et par avance ne pas être tenu de travailler, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants et insuffisants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

2°/ que le salarié à temps partiel qui ne travaille pas tous les jours de la semaine, mais seulement un, voire certains jours de la semaine selon des disponibilités qu'il connaît et a fortiori qu'il détermine lui-même, n'est ainsi ni dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail ni contraint de rester en permanence à la disposition de l'employeur ; qu'il est au contraire parfaitement en mesure de maîtriser la répartition de son travail sur les jours de la semaine, et partant d'avoir s'il le souhaite un emploi à côté de son temps partiel, les jours autres que ceux pour lesquels il se déclare disponible soit lors de la conclusion du contrat de travail, soit de semaine en semaine ; qu'à cet égard, le simple constat que le salarié effectue finalement sa prestation hebdomadaire un autre jour que celui correspondant aux disponibilités qu'il avait lui-même déterminées, n'implique aucunement en soi l'impossibilité où il se trouverait de prévoir son rythme de travail, ni l'obligation qui serait la sienne de se tenir en permanence à la disposition de l'employeur, du moment que cette différence entre les disponibilités fixées par le salarié et les jours d'exécution de sa prestation procède, non pas d'une contrainte imposée par l'employeur, mais d'une faculté laissée au salarié, eu égard à l'autonomie s'attachant à son activité, de choisir à sa convenance le moment et le jour d'exécution de sa prestation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le distributeur n'avait à effectuer qu'une tournée obligatoire par semaine, qu'il pouvait choisir le moment d'exécution de sa distribution, qu'il passait bien au dépôt selon ses disponibilités contractuelles et qu'il ne recevait alors des consignes précises que sur le sens de la tournée et son itinéraire, mais non sur le jour de la distribution ; qu'à cet égard, l'employeur soulignait que les distributeurs n'avaient pas d'obligation ferme en termes de jour de distribution, mais devaient seulement respecter un délai maximal fixé par le client ; qu'en se bornant dès lors, pour affirmer que le distributeur était dans l'impossibilité de connaître à quel rythme il devait travailler chaque semaine, à relever la circonstance, à elle seule inopérante, qu'il effectuait sa distribution d'autres jours de la semaine que ceux correspondant à ses disponibilités contractuelles, sans aucunement caractériser en quoi cela aurait résulté de consignes imposées par l'employeur, et non d'un choix du distributeur, libre de décider de ne pas effectuer les distributions le jour même de la prise des documents au dépôt, mais un autre jour à son gré dans le délai de distribution maximal laissé par le client, la cour d'appel a une nouvelle fois privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

3°/ qu'il ressort des constatations mêmes de l'arrêt qu'aux termes du contrat de travail conclu entre le distributeur et l'employeur, ce dernier s'obligeait uniquement à garantir au salarié, dans le cadre de sa distribution hebdomadaire obligatoire, une quantité de travail minimale ; qu'en revanche, aucune obligation n'était stipulée concernant les tournées facultatives qui pouvaient être librement refusées par le distributeur auquel, réciproquement, l'employeur n'était pas tenu d'en proposer ; qu'en retenant cependant, à l'appui de la requalification de ce contrat en contrat à temps complet, que le nombre et l'importance des tournées supplémentaires facultatives dépendaient d'abord du bon vouloir de l'employeur, quand la variation éventuelle de ces distributions, qui étaient susceptibles d'être librement refusées par le distributeur et qui ne lui étaient pas contractuellement dues, ne pouvait en rien l'empêcher de prévoir son rythme de travail ni l'obliger à se tenir à la disposition permanente de l'employeur, la cour d'appel, qui s'est derechef fondée sur un motif inopérant, a une fois encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

Mais attendu que selon l'article L. 3123-14 du code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit ; qu'il mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en présence d'un contrat de travail écrit, il appartient à l'employeur qui conteste l'existence d'un contrat à temps plein de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte du travail convenu, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de son employeur ;

Et attendu, qu'ayant constaté d'une part, que les contrats de l'intéressé ne mentionnaient ni la durée du travail ni la répartition de cette durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, d'autre part que le salarié tenu d'effectuer des tournées hebdomadaires dont ni l'ampleur ni la durée n'étaient quantifiées, subissait quels que soient ses jours de disponibilité, la contrainte des horaires d'ouverture du dépôt, variables selon les ordres aléatoires des clients, donc de l'employeur, enfin que le volume de distribution décidé par l'employeur le plaçait dans une situation de dépendance de nature à affecter le libre choix des tournées supplémentaires, la cour d'appel qui en a déduit que l'employeur n'établissait pas que le salarié, laissé dans l'ignorance du rythme auquel il pourrait travailler chaque semaine, effectuait un travail à temps partiel, a, sans encourir les griefs des moyens, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Adrexo aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Adrexo ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

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Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Adrexo.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné un employeur, la société Adrexo (exposante), à payer à son salarié à temps partiel, Monsieur X..., la différence entre la rémunération perçue de décembre 2001 au 31 juillet 2005 et celle résultant de l'application de la convention collective de la distribution directe de février 2004 ;

AUX MOTIFS QUE les feuilles de route font apparaître à compter du 1er décembre 2001, que si le salarié passait bien au dépôt à des heures d'ailleurs variables de la journée selon ses « disponibilités contractuelles » et recevait alors des consignes précises quant au sens de la tournée et son itinéraire, elle lire il distribuait les imprimés d'autres jours de la semaine, variant eux-mêmes d'une semaine à l'autre ; qu'ainsi la mention de jours disponibles sur le contrat est dépourvue de signification réelle quant aux obligations des parties et permet en fait à l'employeur de s'assurer d'un salariat suffisamment disponible pour satisfaire ses besoins et de faire peser quasi exclusivement sur celui-ci ses propres risques commerciaux en tournant la réglementation sur le travail à temps partiel ; que cette répartition du travail entre de très nombreux salariés, les place chacun dans la dépendance de l'employeur qui décide du volume de distribution ; qu'elle-même est de nature à affecter le libre choix de tournées supplémentaires dont le nombre et l'importance dépendent d'abord du bon vouloir de l'employeur ;

ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, par un tribunal impartial ; que tel n'est pas le cas lorsque le juge, se départissant de son obligation de neutralité, fait reposer sa décision sur un préjugé ou un parti pris défavorable à l'une des parties, dont il écarte en particulier la thèse par une pétition de principe, rompant ainsi l'égalité des armes ; qu'à ce titre, l'existence d'un simple doute légitime sur l'impartialité du juge, suffit à caractériser l'atteinte au droit au procès équitable ; qu'en l'espèce, en se fondant, pour requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet, sur une pétition posant en principe que les contrats conclus par la société Adrexo « permettent en fait à l'employeur de s'assurer d'un salariat suffisamment disponible pour satisfaire ses besoins et de faire ainsi peser sur celui-ci ses propres risques commerciaux en tournant la réglementation sur le travail à temps partiel », ou encore que « Dette répartition du travail entre de très nombreux salariés, les place chacun dans la dépendance de l'employeur qui décide du volume de distribution », ce qui « est de nature à affecter le libre choix de tournées supplémentaires dont le nombre et l'importance dépendent d'abord du bon vouloir de l'employeur », la cour d'appel a exprimé un préjugé et un parti pris général manifestement défavorables à la société Adrexo, dont elle n'a dès lors pu objectivement apprécier la thèse et les éléments de preuve ; qu'en suscitant ainsi un doute légitime sur son impartialité et sur le respect de l'égalité des armes, la cour d'appel a méconnu les exigences du procès équitable et a violé l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné un employeur, la société Adrexo (exposante), à payer à son salarié à temps partiel, Monsieur X..., la différence entre la rémunération perçue de décembre 2001 au 31 juillet 2005 et celle résultant de l'application de la convention collective de la distribution directe de février 2004 ;

AUX MOTIFS QUE lors de la conclusion du contrat de travail le 2 février 2000, Claude X... était fonctionnaire municipal à plein temps ; qu'il a quitté la fonction publique le 1er décembre 2001 ; qu'il ne saurait dès lors prétendre avoir été à la disposition permanente de la Sarl Adrexo avant son départ de la mairie d'Alençon ; que ces constatations ruinent la présomption de plein temps invoquée à l'encontre de la Sarl Adrexo pour la période où le salarié était fonctionnaire municipal, s'agissant alors bien d'un temps partiel ; qu'il en va autrement pour la période postérieure au 1er décembre 2001 ; qu'à partir de cette date, en effet, l'intéressé était exposé à devoir travailler tous les jours de la semaine et que tel a bien été le cas d'après les feuilles de route et les relevés informatiques ; ... qu'à compter du 1er décembre 2001, date de son départ de la fonction publique, le salarié se trouvait placé dans les mêmes conditions que les autres distributeurs ... ; qu'en définitive, la Sarl Adrexo à qui cette charge incombe n'établit pas que M. X..., à compter du 1er décembre 2001, était en mesure de connaître, dans le délai de prévenance précité, à quel rythme il pourrait travailler chaque semaine ; qu'en réalité, M. X... était employé selon des modalités unilatéralement décidées et modifiées par l'employeur à la disposition duquel il était contrainte de se tenir en permanence sans pouvoir envisager, notamment, de compléter ses revenus en concluant un autre contrat de travail à temps partiel ;

1°- ALORS QU'il n'y a pas lieu à requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet lorsque, les conditions d'exécution du contrat ne plaçant pas le salarié dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et ne l'obligeant pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur, il a la possibilité d'exercer un autre emploi, s'il le souhaite ; qu'il s'ensuit que, quand c'est le même contrat de travail qui se poursuit, aux mêmes conditions d'exécution, au cours de deux périodes successives et que, durant la première, le salarié a pu exercer parallèlement un autre emploi, il s'en évince nécessairement qu'au cours de la seconde, il avait pareillement la possibilité de le faire, peu important qu'il ne l'ait pas fait ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. X... avait travaillé du 2 février 2000 au 30 novembre 2001 en parallèle pour la mairie d'Alençon (qui plus est à temps plein) et pour la société Adrexo et en a déduit à juste titre qu'au cours de cette période-là la présomption de temps complet invoquée par le salarié était détruite ; que, dès lors, en considérant au contraire que cette présomption devait s'appliquer pour la période postérieure au 1er décembre 2001, tandis que les stipulations et les conditions d'exécution du contrat de travail à temps partiel étaient demeurées rigoureusement identiques, ce dont il résultait nécessairement que le salarié avait la possibilité, s'il le souhaitait, d'exercer également un autre emploi au cours de la seconde période, comme il l'avait fait effectivement au cours de la première, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient nécessairement de ses propres constatations, a violé les articles L. 121-1 et L. 212-4-3 du code du travail ;

2°- ALORS QUE, en affirmant que les conditions d'exécution du contrat de travail à temps partiel de M. X... étaient telles, à compter du 1er décembre 2001, qu'elles le mettaient en permanence à la disposition de la société Adrexo et qu'elles ne lui permettaient donc pas d'avoir un autre emploi à temps partiel, sans rechercher quelles avaient été les conditions d'exécution du même contrat de travail avant cette date, à l'époque où le salarié occupait parallèlement un emploi à plein temps à la mairie de Montargis, quand leur examen, résultant des pièces versées aux débats, ne pouvait que démontrer qu'elles étaient rigoureusement identiques avant comme après le 1er décembre 2001 et que dès lors les conditions d'exécution du contrat de travail n'avaient pas pu mettre l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer un autre emploi à temps partiel à compter de cette date, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 212-4-3 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'AVOIR condamné un employeur, la société Adrexo (exposante), à payer à son salarié à temps partiel, Monsieur X..., la différence entre la rémunération perçue de décembre 2001 au 31 juillet 2005 et celle résultant de l'application de la convention collective de la distribution directe de février 2004 ;

AUX MOTIFS QUE se trouve en cause la mesure du temps de travail nécessaire à l'exécution des tâches composant une distribution et non les plages horaires à l'intérieur desquelles cette exécution peut intervenir ; qu'il n'importe qu'une partie de la distribution s'effectue hors la vue de l'employeur et dans les lieux ne dépendant pas de lui, dès lors qu'enfermée dans des consignes précises (horaires de prise en charge subordonnées à l'ouverture du dépôt, constitution des poignées, tri de la tournée, délai de distribution, retour des documents non distribués, surveillance par des inspecteurs salariés, sanctions) elle est étroitement contrôlée et que le temps d'exécution ne dépend pas du salarié qui choisit seulement le moment de celle-ci mais ne maîtrise pas sa durée imposée tant par le volume de documents et les conditions de circulation sur la voie publique que les délais et itinéraires variant au gré de l'employeur ; ... que la société Adrexo ne justifie dès lors pas de l'impossibilité de quantifier le temps de travail notamment par un système déclaratif, le cas échéant dans le cadre d'un accord définissant un barème de référence, alors qu'elle pratique déjà des contrôles a posteriori et que la convention collective de 2004 va dans ce sens ; qu'elle ne démontre ainsi pas se livrer à une activité caractéristique l'empêchant de déterminer le temps de travail effectif de ses distributeurs ; ... que le contrat de travail ne mentionne ni la durée du travail ni même s'il est conclu pour un horaire normal ou pour un horaire à temps partiel ; qu'il ne définit pas davantage la répartition de cette durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ni les conditions de la modification de cette répartition ; qu'un tel contrat de travail, qui ne répond pas aux exigences légales, fait présumer que l'emploi est à temps complet ; que l'employeur qui conteste cette présomption peut rapporter la preuve, d'une part, qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle lire il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur ; ... que selon les explications fournies les distributeurs doivent se rendre au dépôt auquel ils sont rattachés pour se faire remettre la feuille de route du travail qu'ils auront à effectuer dans la journée et recevoir les consignes nécessaires du chef de centre, préparer les documents à distribuer selon les consignes données en les triant selon leur nature et les plier, ce travail pouvant être effectué à domicile ; que le temps passé par chaque distributeur dépend uniquement de sa « dextérité » à préparer sa tournée et de la cadence de distribution qu'il adopte ; qu'un contrôleur vérifie si les tournées ont été effectuées correctement ; qu'à l'occasion le salarié est tenu de distribuer les documents dans un certain délai, voire un jour, dans un sens et suivant un horaire déterminés s'agissant par exemple de publicité promotionnelle pour des opérations fixées à des dates précises, avec obligation de ramener au dépôt les exemplaires non distribués ;

QU'il en résulte qu'à compter du 1er décembre 2001, date de son départ de la fonction publique, le salarié se trouvait placé dans les mêmes conditions que les autres distributeurs et ignorait quel serait son volume de travail jusqu'à ce qu'il signe la feuille de route ; que pesait donc sur lui l'obligation de faire hebdomadairement une tournée sans possibilité de la refuser quelles qu'en soient les conditions, tout refus constituant un manquement, qualifié même de faute grave, en cas de répétition ; que cette charge de travail, à s'en tenir à la tournée obligatoire, peut, selon les dires de l'employeur lui-même varier de 1 à 4 ; que le salarié se trouve donc dans l'impossibilité absolue de prévoir à l'avance son rythme de travail ; qu'à cet égard l'existence d'une garantie contractuelle quant au nombre de boîtes aux lettres à servir, lorsqu'il est exceptionnellement mentionné, constitue un minimum au-dessus duquel aucune faculté de refus n'est prévue ; qu'en effet, le salarié reste tenu d'effectuer sa tournée hebdomadaire dont l'ampleur, ni par suite la durée, ne sont quantifiées ; que dans les faits, quels que soient les jours de disponibilité, rarement mentionnés, du reste, le salarié subit la contrainte des horaires d'ouverture du dépôt ; que ces horaires variant à l'évidence selon les ordres aléatoires des clients donc de l'employeur, aggravaient encore l'incertitude dans laquelle le salarié se trouvait quant à son rythme de travail ; que les feuilles de route font apparaître à compter du 1er décembre 2001, que si le salarié passait bien au dépôt à des heures d'ailleurs variables de la journée selon ses « disponibilités contractuelles » et recevait alors des consignes précises quant au sens de la tournée et son itinéraire, elle lire il distribuait les imprimés d'autres jours de la semaine, variant eux-mêmes d'une semaine à l'autre ; qu'ainsi, la mention de jours disponibles sur le contrat est dépourvue de signification réelle quant aux obligations des parties et permet en fait à l'employeur de s'assurer d'un salariat suffisamment disponible pour satisfaire ses besoins et de faire peser quasi exclusivement sur celui-ci ses propres risques commerciaux en tournant la réglementation sur le travail à temps partiel ; que cette répartition du travail entre de très nombreux salariés, les place chacun dans la dépendance de l'employeur qui décide du volume de distribution ; qu'elle-même est de nature à affecter le libre choix de tournées supplémentaires dont le nombre et l'importance dépendent d'abord du bon vouloir de l'employeur ; qu'en définitive, la Sari Adrexo à qui cette charge incombe n'établit pas que Claude X..., à compter du 1er décembre 2001, était en mesure de connaître, dans le délai de prévenance précité, à quel rythme il pourrait travailler chaque semaine ; qu'en réalité Claude X... était employé selon des modalités unilatéralement décidées et modifiées par l'employeur à la disposition duquel il était contraint de se tenir en permanence sans pouvoir envisager, notamment, de compléter ses revenus en concluant un autre contrat de travail à temps partiel ;

1°- ALORS QU'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet du contrat à temps partiel qui ne contient pas de stipulation relative à la répartition de l'horaire de travail sur les jours de la semaine ou les semaines du mois quand il est établi que le salarié, travaillant effectivement à temps partiel, n'est pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler chaque semaine et/ ou chaque mois, et n'est ainsi pas astreint de se tenir constamment à la disposition de son employeur ; que tel est le cas lorsque le salarié est en mesure de s'organiser pour avoir une autre activité à côté de son temps partiel ; qu'à cet égard, la prévisibilité de son rythme de travail par le salarié qui ne travaille qu'in seul ou même certains jours de la semaine selon des disponibilités qu'il fixe lui-même, n'exige pas qu'il connaisse en outre par avance la durée exacte de chaque prestation qu'il aura à exécuter les jours où il travaille, du moment que le salarié n'est pas contraint par l'employeur de travailler d'autres jours que ceux pour lesquels il s'est lui-même déclaré disponible (soit lors de la conclusion du contrat de travail, soit de semaine en semaine), et qu'il peut ainsi maîtriser la répartition de son travail sur la semaine, et connaître suffisamment à l'avance ses jours libres ; qu'en l'espèce, en relevant, pour affirmer à tort que le distributeur n'était pas en mesure de connaître son rythme de travail et était contraint de rester en permanence à la disposition de l'employeur, qu'il ne pouvait connaître à l'avance la quantité de travail représentée par chaque distribution hebdomadaire obligatoire, ni donc la durée exacte de celle-ci, sans aucunement caractériser en quoi une éventuelle variation de cette durée pouvait en soi obliger le distributeur à travailler d'autres jours que ceux résultant de ses disponibilités contractuelles, et l'aurait ainsi empêché d'avoir une autre activité les jours de la semaine où il pouvait prévoir avec certitude et par avance ne pas être tenu de travailler, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants et insuffisants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

2°- ALORS QUE le salarié à temps partiel qui ne travaille pas tous les jours de la semaine, mais seulement un voire certains jours de la semaine selon des disponibilités qu'il connaît et a fortiori qu'il détermine lui-même, n'est ainsi ni dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail ni contraint de rester en permanence à la disposition de l'employeur ; qu'il est au contraire parfaitement en mesure de maîtriser la répartition de son travail sur les jours de la semaine, et partant d'avoir s'il le souhaite un emploi à côté de son temps partiel, les jours autres que ceux pour lesquels il se déclare disponible (soit lors de la conclusion du contrat de travail, soit de semaine en semaine) ; qu'à cet égard, le simple constat que le salarié effectue finalement sa prestation hebdomadaire un autre jour que celui correspondant aux disponibilités qu'il avait lui-même déterminées, n'implique aucunement en soi l'impossibilité où il se trouverait de prévoir son rythme de travail, ni l'obligation qui serait la sienne de se tenir en permanence à la disposition de l'employeur, du moment que cette différence entre les disponibilités fixées par le salarié et les jours d'exécution de sa prestation procède, non pas d'une contrainte imposée par l'employeur, mais d'une faculté laissée au salarié, eu égard à l'autonomie s'attachant à son activité, de choisir à sa convenance le moment et le jour d'exécution de sa prestation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le distributeur n'avait à effectuer qu'une tournée obligatoire par semaine, qu'il pouvait choisir le moment d'exécution de sa distribution, qu'il passait bien au dépôt selon ses disponibilités contractuelles et qu'il ne recevait alors des consignes précises que sur le sens de la tournée et son itinéraire, mais non sur le jour de la distribution ; qu'à cet égard, l'employeur soulignait que les distributeurs n'avaient pas d'obligation ferme en termes de jour de distribution, mais devaient seulement respecter un délai maximal fixé par le client ; qu'en se bornant dès lors, pour affirmer que le distributeur était dans l'impossibilité de connaître à quel rythme il devait travailler chaque semaine, à relever la circonstance, à elle seule inopérante, qu'il effectuait sa distribution d'autres jours de la semaine que ceux correspondant à ses disponibilités contractuelles, sans aucunement caractériser en quoi cela aurait résulté de consignes imposées par l'employeur, et non d'un choix du distributeur, libre de décider de ne pas effectuer les distributions le jour même de la prise des documents au dépôt, mais un autre jour à son gré dans le délai de distribution maximal laissé par le client, la cour d'appel a une nouvelle fois privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

3°- ALORS QU'il ressort des constatations mêmes de l'arrêt qu'aux termes du contrat de travail conclu entre le distributeur et l'employeur, ce dernier s'obligeait uniquement à garantir au salarié, dans le cadre de sa distribution hebdomadaire obligatoire, une quantité de travail minimale ; qu'en revanche, aucune obligation n'était stipulée concernant les tournées facultatives qui pouvaient être librement refusées par le distributeur auquel, réciproquement, l'employeur n'était pas tenu d'en proposer ; qu'en retenant cependant, à l'appui de la requalification de ce contrat en contrat à temps complet, que le nombre et l'importance des tournées supplémentaires facultatives dépendaient d'abord du bon vouloir de l'employeur, quand la variation éventuelle de ces distributions, qui étaient susceptibles d'être librement refusées par le distributeur et qui ne lui étaient pas contractuellement dues, ne pouvait en rien l'empêcher de prévoir son rythme de travail ni l'obliger à se tenir à la disposition permanente de l'employeur, la cour d'appel, qui s'est derechef fondée sur un motif inopérant, a une fois encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-41919
Date de la décision : 24/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 23 février 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jui. 2009, pourvoi n°07-41919


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Luc-Thaler, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.41919
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