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19/05/2009 | FRANCE | N°07-40147

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 mai 2009, 07-40147


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé par les sociétés SATV et ATEV en qualité de chauffeur de car, a reçu du dirigeant de ces sociétés un courrier daté du 19 septembre 2003 ainsi libellé : " Suite à votre comportement que je considère intolérable envers les dirigeants et employés de la société SATV à Pignans (insultes, forcing dans les bureaux, menaces répétées depuis des mois) ainsi que le refus de prendre votre travail ce matin sous prétexte de maladie (...), je me trouve donc dans

l'obligation de vous licencier pour fautes graves entravant la bonne marche...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé par les sociétés SATV et ATEV en qualité de chauffeur de car, a reçu du dirigeant de ces sociétés un courrier daté du 19 septembre 2003 ainsi libellé : " Suite à votre comportement que je considère intolérable envers les dirigeants et employés de la société SATV à Pignans (insultes, forcing dans les bureaux, menaces répétées depuis des mois) ainsi que le refus de prendre votre travail ce matin sous prétexte de maladie (...), je me trouve donc dans l'obligation de vous licencier pour fautes graves entravant la bonne marche de la société ATEV ainsi que de la société SATV.... " ; que l'employeur, après avoir convoqué le salarié à un entretien préalable, a notifié à celui-ci son licenciement par lettre du 7 octobre 2003 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1232-6 , L. 1232-1 et L. 1235-1, du code du travail ;
Attendu que pour juger le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et condamner en conséquence " solidairement " les sociétés au paiement d'indemnités de rupture et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt, après avoir retenu que le salarié avait été licencié par la lettre du 19 septembre 2003, relève que l'imputation de fausse déclaration de maladie n'est nullement prouvée et que les autres faits allégués sont imprécis et invérifiables ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre de licenciement pour faute grave, du 19 septembre 2003, reprochait au salarié des intrusions dans les bureaux, ainsi que des insultes et des menaces répétées envers les dirigeants et les employés de la société SATV, ce dont il résultait que la lettre mentionnait des motifs matériellement vérifiables et que, dès lors, il appartenait aux juges du fond d'en apprécier le caractère réel et sérieux, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article L. 3121-1 du code du travail et l'article 17 de l'annexe 1 de la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport ;
Attendu que , pour condamner "solidairement " les sociétés au paiement d'une somme au titre des "heures d'amplitude", l'arrêt retient que, selon le salarié, l'employeur considérait à tort comme heures d'amplitude et rémunérait à un taux réduit des heures durant lesquelles le salarié était à sa totale disposition, à savoir notamment le temps passé auprès des clients qu'il accompagnait lors de voyages touristiques ; qu'il est établi que le salarié était amené à faire de fréquents déplacements éloignés ou même à l'étranger, ce dont il résulte que la société ne peut sérieusement soutenir que l'intéressé pouvait rentrer chez lui pendant ces "heures d'amplitude" ; qu'en réalité, ce temps pendant lequel le salarié était à la disposition de son employeur et ne pouvait vaquer à des occupations personnelles est un temps de travail et doit être rémunéré comme tel ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur soutenait avoir rémunéré les heures de coupure dans des conditions plus favorables que celles prévues par la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport, applicable, et sans caractériser que durant les temps litigieux, le salarié se trouvait à la disposition de son employeur et se conformait à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné "solidairement" les sociétés au paiement d'indemnités de rupture, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une somme au titre des heures qualifiées d'amptitude, l'arrêt rendu le 31 octobre 2006, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour les sociétés SATV et ATEV.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement, prononcé pour faute grave, de Monsieur X... et de lui AVOIR en conséquence accordé une indemnité de préavis, une indemnité de licenciement et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la lettre du 19 septembre 2003 constitue une lettre de licenciement et les tentatives faites ultérieurement par l'employeur pour essayer de régulariser la procédure de licenciement en convoquant le salarié à un entretien préalable ou en qualifiant ce courrier de notification d'une mise à pied conservatoire sont sans effet ; qu'en ce qui concerne la cause du licenciement pour faute grave, cette lettre qui fixe les limites du litige est ainsi motivée : « Suite à votre comportement que je considère intolérable envers les dirigeants et employés de la société SATV à Pignans (insultes, forcing dans les bureaux, menaces répétées depuis des mois) ainsi que le refus de prendre votre travail ce matin sous prétexte de maladie (un témoin vous a entendu dire hier soir dans la cour que vous alliez tomber malade cette nuit et vous êtes coutumier du fait), je me trouve donc dans l'obligation de vous licencier pour fautes graves entravant la bonne marche de la société ATEV ainsi que la société SATV. Je me suis vu, en tant que directeur de la société SATV et gérant de la société ATEV, contraint de porter plainte contre vous pour en finir avec vos agissements. A ce jour, je vous interdis de pénétrer dans les locaux de la société. Vous recevrez par courrier tous le documents vous concernant et vous êtes prié de bien vouloir me restituer la carte bancaire, la carte AS 24, les disques de contrôlographe en votre possession sous 48 heures par courrier recommandé au siège de la société ATEV » ; que les faits allégués sont, à l'exception de la remise en cause de la maladie, imprécis et invérifiables ; qu'en ce qui concerne l'imputation de fausse déclaration de maladie, elle n'est nullement prouvée et, au contraire, le salarié produit un bulletin d'hospitalisation ; que, contrairement à ce qu'a retenu le Conseil, le licenciement ne peut être considéré comme ayant une cause réelle et sérieuse ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la lettre du 19 septembre 2003 qui informait Monsieur X... que la société ATEV se voyait contrainte de le licencier et qu'en conséquence celui-ci se voyait interdire de pénétrer dans les locaux de la société, constituait à l'évidence la notification d'une mise à pied à titre conservatoire dans l'attente de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement ; qu'en affirmant que cette lettre constituait la lettre de licenciement, la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'qu'à supposer même que la lettre du 19 septembre 2003 fût la lettre de licenciement, celle-ci, en reprochant au salarié des « insultes, forcing dans les bureaux et menaces répétées depuis des mois », formulait un motif précis et vérifiable dont il appartenait à la Cour d'appel d'apprécier le bien fondé ; qu'en affirmant l'inverse, la Cour d'appel a violé l'article L. 122-14-2 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR alloué à Monsieur X... une somme de 3.888,02 au titre des heures qualifiées d'amplitude ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des propres pièces de l'employeur que Monsieur X... était amené à faire de fréquents déplacements éloignés ou même à l'étranger ; que les bulletins de salaire démontrent le paiement de très nombreuses « primes de nuit » incompatibles avec un travail essentiellement consacré au transport scolaire ; que dès lors, elle ne peut sérieusement être admise à soutenir que le salarié pouvait rentrer chez lui pendant ce qu'elle qualifiait d'heures d'amplitude ; qu'en réalité, ce temps durant lequel le salarié était à la disposition de son employeur et ne pouvait vaquer à des occupations personnelles est un temps de travail effectif et doit être rémunéré comme tel ;
ALORS, D'UNE PART, QU'aux termes de l'article 17 de l'Accord du 16 juin 1961 annexé à la Convention collective du transport routier et tel que modifié par un accord collectif national en date du 18 avril 2002, ne constitue pas du temps de travail effectif devant être rémunéré comme tel mais un temps de « coupure », le temps d'attente passé par le « personnel roulant voyageurs » entre deux vacations dès lors que, durant celui-ci, le salarié se trouve un lieu autre que le lieu où il a pris son service ; qu'il résulte par ailleurs du même article que lorsque les « coupures » ont lieu dans un dépôt aménagé dédié aux conducteurs de l'entreprise, celles-ci sont indemnisées à hauteur de 25% d'une heure de travail effectif tandis qu'elles sont indemnisées à hauteur de 50 % d'une heure de travail effectif lorsqu'elles ont lieu dans « tout autre lieu extérieur et pour les journées intégralement travaillées dans les activités occasionnelles et touristiques » ; qu'ainsi, aux termes de l'article 17 de l'Accord du 16 juin 1961, le temps passé par un chauffeur à attendre les clients dans le cadre d'activités touristiques ne constitue pas du temps de travail effectif devant être rémunéré comme tel ; qu'en postulant l'inverse, la Cour d'appel a violé l'article 17 de l'Accord du 16 juin 1961 annexé à la Convention collective nationale du transport routier dans sa version issue de l'Accord collectif du 18 avril 2002 ;
ET ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en allouant à Monsieur X... l'ensemble des sommes qu'il réclamait au seul prétexte que celui-ci n'effectuait pas seulement du transport scolaire et qu'il ne pouvait donc pas toujours rentrer chez lui entre deux services, sans avoir seulement constaté que les heures d'astreinte qui lui avaient été payées correspondaient bien toutes à du temps de travail effectif tel qu'elle l'avait défini, la Cour d'appel, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-40147
Date de la décision : 19/05/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 31 octobre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 mai. 2009, pourvoi n°07-40147


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.40147
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