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08/04/2009 | FRANCE | N°08-84907

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 avril 2009, 08-84907


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Daniel,

contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7e chambre, en date du 11 juin 2008, qui, pour exercice illégal de la profession d'expert-comptable et escroqueries, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement, dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve, 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 la Con

vention européenne des droits de l'homme, 5 et 9 de la Déclaration des droits de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Daniel,

contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7e chambre, en date du 11 juin 2008, qui, pour exercice illégal de la profession d'expert-comptable et escroqueries, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement, dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve, 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 la Convention européenne des droits de l'homme, 5 et 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 111-4, 121-3, 433-17 et 433-22 du code pénal, 2, 3 et 20, alinéas 1, 2 et 3 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, préliminaire, 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble les principes de la présomption d'innocence, des droits de la défense, de la légalité des délits et des peines et d'interprétation stricte de la loi pénale ;
" en ce que l'arrêt a déclaré le demandeur coupable d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable et accordé des dommages-intérêts à la partie civile ;
" aux motifs que, par une plainte, en date du 12 août 2005, Serge Y..., artisan à Chanteuges (43) dénonçait les agissements de Daniel X..., exerçant... à Saint-Etienne (42) sous l'enseigne A et B Conseil, une activité d'aide à la création et au développement d'entreprises, domiciliation commerciale, recouvrement de créances, aide assistance, gestions, conseils, formations ; que les fonctionnaires de police, saisis de cette plainte, procédaient à l'audition de nombreux chefs d'entreprise et il résultait de ces auditions que Daniel X..., quoique non inscrit au tableau de l'ordre des experts-comptables, s'était livré auprès d'eux à des travaux de comptabilité, qu'il s'était fait remettre l'intégralité des comptabilités, qu'il avait effectué des déclarations, opéré des saisies informatiques, établi des fiches de paie et dressé des bilans ; que l'ensemble de ces témoins pensait avoir eu affaire à un cabinet d'expert-comptable lors de la prise de contact et lors de la réalisation des travaux ; que les services fiscaux confirmaient que Daniel X... disposait des factures lorsqu'il établissait les comptabilités ; qu'Hervé Z..., expert-comptable mandaté par le conseil régional de l'ordre, indiquait, au vu des documents saisis, que Daniel X... s'était bien livré à une activité consistant à imputer comptablement les charges et les produits des entreprises ; que Daniel X... déclarait, le 23 novembre 2005, aux enquêteurs que l'activité d'« A et B Conseil » s'était limitée à du conseil et à de l'accompagnement dans les formalités administratives, sociales et financières des entreprises ; qu'une information judiciaire était ouverte au tribunal de grande instance de Saint-Etienne et Daniel X..., mis en examen du chef d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable, persistait, en contradiction manifeste avec l'ensemble des témoignages recueillis, à contester les faits, indiquant au magistrat instructeur qu'il effectuait la saisie informatique des données comptables des entreprises et qu'il ne dressait pas des bilans comme le font les experts-comptables ; (…) et que Daniel X... conteste avoir exercé des activités de comptable, affirmant s'être contenté de réaliser la saisie informatique de données comptables et avoir pu, à partir d'un logiciel, sortir des bilans prévisionnels pour certains de ses clients ; que, cependant, et ainsi que l'a pertinemment retenu le tribunal, par une motivation que la cour adopte expressément, les auditions particulièrement circonstanciées de MM. A..., B..., Serge Y..., K..., L..., M..., N..., C..., D..., E..., O..., P..., F..., Q..., R..., S... et de Mmes G... et E... permettent d'établir que Daniel X... se présentait comme comptable, qu'il s'occupait de l'ensemble des formalités administratives relatives aux fiches de paye et aux déclarations diverses, qu'il tenait la comptabilité des entreprises considérées en saisissant les factures et autres documents qui lui étaient remis et qu'il établissait des bilans dont plusieurs des personnes entendues indiquent qu'ils étaient remis en l'état aux services fiscaux ; que cette activité caractérise les éléments intentionnel et matériel du délit d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable, les travaux auxquels se livrait le prévenu étant bien des travaux de comptabilité, tels que prévus par l'ordonnance du 19 septembre 1945 ; que c'est, dès lors, à bon droit, que le tribunal correctionnel de Saint-Etienne a retenu la culpabilité de Daniel X... du chef d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable ; que la cour confirmera la décision de culpabilité de ce chef de prévention ;
" 1°) alors que, le monopole des experts-comptables s'entend exclusivement des activités portant appréciation, certification et authentification de la comptabilité des entreprises ; qu'en se bornant à relever que l'expert-comptable mandaté par l'ordre avait confirmé que le demandeur se serait bien livré à l'exercice illégal de la profession d'expert-comptable et qu'il ressortait des déclarations des dirigeants de sociétés auditionnés que l'intéressé se serait présenté auprès d'eux comme comptable et se serait occupé de diverses formalités (fiches de paie, saisie de factures et documents, édition de bilan), sans autrement caractériser la réalisation d'actes précis portant appréciation, certification ou authentification de comptabilité, la cour a privé sa décision de toute base légale au regard des textes cités au moyen ;
" 2°) alors que, c'est à l'accusation qu'incombe la charge de rapporter la preuve de l'infraction poursuivie en vertu du principe de la présomption d'innocence ; qu'en se fondant, pour retenir la culpabilité du demandeur, sur les seuls témoignages recueillis par les services de police dans les premiers temps d'une enquête pénale, voire par de simples agents des services fiscaux, et non corroborés par un quelconque élément de preuve matérielle en l'absence de la moindre confrontation du prévenu avec les déclarants à un stade antérieur de la procédure, la cour a violé la présomption d'innocence, ensemble les droits de la défense " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, et sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 8 du code de procédure pénale, 313-1 du code pénal, des articles préliminaire 2, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a considéré que la prévention portant sur des faits situés entre 1998 et courant 2005 n'était pas atteinte par la prescription et a déclaré le requérant coupable des faits d'escroquerie au préjudice de l'association FAF-SAB et a prononcé sur les intérêts civils ;
" aux motifs que l'enquête révélait, par ailleurs, que Daniel X... avait établi au nom des entreprises dont il s'occupait de la comptabilité, des dossiers fictifs de demande d'aide de fonds d'assurance formation des salariés de l'artisanat du bâtiment (FAF. SAB) ; qu'il était reproché à Daniel X... d'avoir constitué des dossiers à l'aide de faux documents (fausses attestations de présence à des stages, faux bulletins de salaires avec des montants majorés) et d'avoir ainsi obtenu, de façon indue, au nom des entreprises, des subventions du FAF. SAB, tout en prenant le soin de se faire rétrocéder ultérieurement les subventions allouées à celles-ci ; qu'il s'avérait que le FAF. SAB avait octroyé des sommes considérables à différentes entreprises au titre des formations prétendument dispensées par Daniel X..., dans le cadre de la structure « A et B Conseil » de 1998 à 2004, et dans le cadre de la « SARL DND Conseil » dont il était le gérant, en 2003-2004 ; que des investigations menées par les services fiscaux auprès de treize entreprises démontraient que trente et un salariés visés par des formations dont la prise en charge avait été demandée auprès du FAF. SAB, n'avaient jamais suivi de formation assurée par l'entreprise de Daniel X... et que l'intégralité des paiements perçus par les entreprises de la part du FAF. SAB avait été reversée à Daniel X... sous forme de chèques ou d'espèces ; que, par ailleurs, les services de police ont procédé à l'audition de très nombreux entrepreneurs, pour la plupart d'origine étrangère, desquelles il ressort, à l'évidence, que Daniel X... effectuait, pour le compte de ces derniers, des demandes de formation fictive pour des salariés et se faisait remettre le montant intégral des financements accordés par le FAF. SAB ; que, si, lors de son audition devant les enquêteurs, Daniel X... reconnaîssait que pour certaines attestations de présence le nom de la personne figurant sur l'attestation de présence n'était pas celui de la personne ayant effectué le stage, il déclarait devant le magistrat instructeur : " Je ne conteste pas que certains stages n'étaient pas réels, en ce sens que je n'ai pas formé les salariés mais les chefs d'entreprise. Ce sont les chefs d'entreprise qui ont profité des stages " ; que Daniel X... ne contestait pas, au demeurant, la fausseté de certaines attestations de présence des prétendus stagiaires ayant, soi-disant, acquis un niveau n° IV en gestion PME, lesdites attestations étant signées de sa main ; qu'il s'avérait que, suite à la cessation d'activité d'« A et B Conseil », mentionnée au registre du commerce et des sociétés le 5 octobre 2005 mais intervenue le 31 mars 2005, les locaux, situés... à Saint-Etienne et appartenant à une société civile immobilière Yandon dont Daniel X... était le gérant, étaient à nouveau occupés par une société " N et G Conseil " dont le gérant était Omar H... et l'associé, le fils de Daniel X... ; et qu'il est reproché à Daniel X... d'avoir commis des escroqueries, en organisant des stages fictifs de formation à la gestion des entreprises, rémunérés par le fonds d'assurance formation des salariés de l'artisanat du bâtiment et des travaux publics (FAF. SAB) ; que Daniel X..., après avoir contesté la réalité de ces escroqueries, finissait par reconnaître que certains stages n'avaient pas été effectués, tout en soutenant, qu'en tout état de cause, les stages de formation étaient dispensés aux chefs d'entreprises ; qu'une première enquête, réalisée par les services fiscaux, avait révélé que sur treize entreprises vérifiées, trente et un salariés, dont la prise en charge avait été demandée et pour lesquels le FAF. SAB avait versé le coût de formation, n'avaient suivi aucune formation auprès des sociétés A et B Conseil ou " D. N. D " dirigées par Daniel X... ; que, par ailleurs, les services de police ont procédé à l'audition de très nombreux entrepreneurs et notamment MM. Serge Y..., Ishan I..., Ozkan C..., Thierry D..., M..., L..., Mustapha E..., O..., Emir P..., Yusuf F..., Q..., Yasar F..., et Mmes J... et E... ; que, comme l'a indiqué avec justesse le tribunal, il résulte de ces auditions que Daniel X..., profitant de l'ascendant qu'il avait sur les entrepreneurs, pour la plupart d'origine étrangère, effectuait pour le compte de ces derniers des demandes de formation fictives pour des salariés et se faisait remettre le montant intégral des financements accordés par le FAF. SAB ; que les salariés concernés, ouvriers du bâtiment, pour certains illettrés et comprenant le français avec difficulté, ne pouvaient suivre une quelconque formation à la gestion des entreprises ; que, si quelques entrepreneurs ont pu comprendre le mécanisme de l'escroquerie à laquelle ils participaient, la plupart d'entre eux voyaient dans les sommes récupérées indûment par Daniel X... la contrepartie du travail de comptabilité qu'il réalisait ; qu'en établissant des dossiers de formation fictifs, de fausses attestations de stage et en émettant de fausses factures, Daniel X... s'est rendu coupable des infractions d'escroqueries visées par la prévention ; qu'à l'audience de la cour d'appel, le prévenu n'a pas nié le principe et la réalité des escroqueries commises par lui, se bornant à contester le nombre de celles-ci et l'étendue du préjudice subi par le FAF. SAB ; qu'à cet égard, après examen des enquêtes faites successivement par les services fiscaux et par les services de police, les escroqueries suivantes ont pu être recensées par le truchement de vingt et une entreprises XX pour un montant total de 162 243, 36 euros ; que la cour, tout en confirmant la décision de culpabilité du prévenu du chef d'escroqueries, ramène à la somme de 162 243, 36 euros le montant des dommages-intérêts alloués au fonds d'assurance formation des salariés de l'artisanat, du bâtiment et des travaux publics en réparation de son préjudice matériel, la somme de 5 000 euros attribuée en première instance sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale étant maintenue ;
" alors que l'escroquerie est une infraction instantanée ; que le point de départ du délai de prescription de cette infraction se situe au jour de la remise de la chose ; que le report exceptionnel du point de départ de la prescription au jour de la dernière remise ne peut intervenir que lorsque des manoeuvres frauduleuses répétées sont exécutées et se poursuivent sur une longue période formant entre elles un tout indivisible et provoquant des remises successives ; qu'en ne relevant pas d'office le moyen d'ordre public tiré de la prescription partielle des faits poursuivis au titre des années 1998 à 2005, lors même que toute indivisibilité était nécessairement exclue entre des manoeuvres frauduleuses de réalisation complexe, impliquant des entreprises intermédiaires et différentes pour chaque entreprise concernée, la cour a privé sa décision de motifs et a violé les articles 313-1 du code pénal, ensemble l'article 8 du code de procédure pénale " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt que Daniel X... est poursuivi du chef d'escroqueries au préjudice du fonds d'assurance-formation des salariés de l'artisanat, du bâtiment et des travaux publics, pour avoir établi des dossiers de formation fictifs, à partir de documents falsifiés et en utilisant des entreprises intermédiaires, et ainsi trompé ledit fonds pour le déterminer à remettre, entre 1998 et 2005, des sommes pour un montant de 555 173, 25 euros ;
Attendu que, pour écarter la prescription, les juges énoncent, par motifs adoptés, que ces manoeuvres frauduleuses, répétées selon un mécanisme identique, au préjudice d'un même organisme, forment entre elles un tout indivisible qui permet de fixer le point de départ de la prescription à la dernière remise ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que la dernière remise des fonds s'est opérée moins de trois ans avant le premier acte interruptif de prescription, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et 66 de la Constitution, 132-19, 132-24, 313-1, 433-17 et 433-22 du code pénal, 2, 3 et 20, alinéas 1, 2 et 3 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe constitutionnel d'individualisation des peines ;
" en ce que l'arrêt a condamné le demandeur à la peine de trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans ;
" aux motifs que, sur la peine, nonobstant la gravité des faits reprochés au prévenu qui milite en faveur d'une nécessaire sévérité, celui-ci présente, au vu des éléments soumis à l'examen de la cour, des gages de réinsertion, notamment par un emploi qui lui permet de vivre, désormais honnêtement, du produit de son travail ; que la prise en compte de ces considérations conduit la cour à privilégier une peine d'emprisonnement mixte, partie ferme pour assurer une indispensable répression, en corrélation avec l'importance du trouble causé à l'ordre public, et partie avec sursis et mise à l'épreuve pour exercer un suivi judiciaire de l'intéressé, et ce, afin, tout à la fois, d'éviter, autant que faire se peut, une possible récidive et d'assurer, sous le contrôle du juge de l'application des peines, l'indemnisation des victimes ;
" alors que le prononcé d'une peine d'emprisonnement sans sursis doit être spécialement motivé au regard des faits et de la personnalité du prévenu ; qu'en se bornant à faire référence à la « gravité des faits reprochés » et à la nécessité d'« assurer une indispensable répression en corrélation avec l'importance du trouble causé à l'ordre public », la cour d'appel a recouru à une motivation générale et impersonnelle et a méconnu le principe constitutionnel de l'individualisation des peines " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a prononcé une peine d'emprisonnement sans sursis par des motifs qui satisfont aux exigences de l'article 132-19 du code pénal ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 313-1 du code pénal, 1315 du code civil, 2, 418, 464, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a condamné le demandeur à payer au fonds d'assurance formation des salariés de l'artisanat, du bâtiment et des travaux publics (FAF. SAB) la somme de 162 243, 36 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel ;
" aux motifs que l'enquête révélait, par ailleurs, que Daniel X... avait établi au nom des entreprises dont il s'occupait de la comptabilité, des dossiers fictifs de demande d'aide du fonds d'assurance formation des salariés de l'artisanat du bâtiment (FAF. SAB) ; qu'il était reproché à Daniel X... d'avoir constitué des dossiers à l'aide de faux documents (fausses attestations de présence à des stages, faux bulletins de salaires avec des montants majorés) et d'avoir ainsi obtenu, de façon indue, au nom des entreprises, des subventions du FAF. SAB, tout en prenant le soin de se faire rétrocéder ultérieurement les subventions allouées à celles-ci ; qu'il s'avérait que le FAF. SAB avait octroyé des sommes considérables à différentes entreprises au titre des formations prétendument dispensées par Daniel X... dans le cadre de la structure « A et B Conseil », de 1998 à 2004, et dans le cadre de la « SARL DND Conseil » dont il était le gérant, en 2003-2004 ; que des investigations menées par les services fiscaux auprès de treize entreprises démontraient que trente et un salariés visés par des formations dont la prise en charge avait été demandée auprès du FAF. SAB, n'avaient jamais suivi de formation assurée par l'entreprise de Daniel X... et que l'intégralité des paiements perçus par les entreprises de la part du FAF. SAB avait été reversée à Daniel X... sous forme de chèques ou d'espèces ; que, par ailleurs, les services de police ont procédé à l'audition de très nombreux entrepreneurs, pour la plupart d'origine étrangère, desquelles il ressort, à l'évidence, que Daniel X... effectuait, pour le compte de ces derniers, des demandes de formation fictive pour des salariés et se faisait remettre le montant intégral des financements accordés par le FAF. SAB ; que, si, lors de son audition devant les enquêteurs, Daniel X... reconnaissait que pour certaines attestations de présence le nom de la personne figurant sur l'attestation de présence n'était pas celui de la personne ayant effectué le stage, il déclarait devant le magistrat instructeur : " Je ne conteste pas que certains stages n'étaient pas réels, en ce sens que je n'ai pas formé les salariés mais les chefs d'entreprise. Ce sont les chefs d'entreprise qui ont profité des stages " ; que Daniel X... ne contestait pas, au demeurant, la fausseté de certaines attestations de présence des prétendus stagiaires ayant, soi-disant, acquis un niveau n° IV en gestion PME, les dites attestations étant signées de sa main ; qu'il s'avérait que, suite à la cessation d'activité d'« A et B Conseil », mentionnée au registre du commerce et des sociétés le 5 octobre 2005 mais intervenue le 31 mars 2005, les locaux, situés... à Saint-Etienne et appartenant à une SCI Yandon dont Daniel X... était le gérant, étaient à nouveau occupés par une société " N et G Conseil " dont le gérant était Omar H... et l'associé, le fils de Daniel X... ; qu'il apparaissait manifeste que la SARL " N et G Conseil ", immatriculée le 16 août 2005, au registre du commerce et des sociétés de Montbrison et ayant pour objet : " Conseils, formations, assistance en gestion " était une structure destinée à permettre à Daniel X... de poursuivre son activité ; et qu'il est reproché à Daniel X... d'avoir commis des escroqueries, en organisant des stages fictifs de formation à la gestion des entreprises, rémunérés par le fonds d'assurance formation des salariés de l'artisanat du bâtiment et des travaux publics (FAF. SAB) ; que Daniel X..., après avoir contesté la réalité de ces escroqueries, finissait par reconnaître que certains stages n'avaient pas été effectués, tout en soutenant, qu'en tout état de cause, les stages de formation étaient dispensés aux chefs d'entreprises ; qu'une première enquête, réalisée par les services fiscaux avait révélé que sur treize entreprises vérifiées, trente et un salariés dont la prise en charge avait été demandée et pour lesquels le FAF. SAB avait versé le coût de formation, n'avaient suivi aucune formation auprès des sociétés A et B Conseil ou " D. N. D " dirigées par Daniel X... ; que, par ailleurs, les services de police ont procédé à l'audition de très nombreux entrepreneurs et notamment MM. Serge Y..., Ishan I..., Ozkan C..., Thierry D..., M..., L..., Mustapha E..., O..., Emir P..., Yusuf F..., Q..., Yasar F..., et Mmes J... et E... ; que, comme l'a indiqué avec justesse le tribunal, il résulte de ces auditions que Daniel X..., profitant de l'ascendant qu'il avait sur les entrepreneurs, pour la plupart d'origine étrangère, effectuait pour le compte de ces derniers des demandes de formation fictives pour des salariés et se faisait remettre le montant intégral des financements accordés par le FAF. SAB ; que les salariés concernés, ouvriers du bâtiment, pour certains illettrés, et comprenant le français avec difficulté, ne pouvaient suivre une quelconque formation à la gestion des entreprises ; que, si quelques entrepreneurs ont pu comprendre le mécanisme de l'escroquerie à laquelle ils participaient, la plupart d'entre eux voyaient dans les sommes récupérées indûment par Daniel X... la contrepartie du travail de comptabilité qu'il réalisait ; qu'en établissant des dossiers de formation fictifs, de fausses attestations de stage et en émettant de fausses factures, Daniel X... s'est rendu coupable des infractions d'escroqueries visées par la prévention ; qu'à l'audience de la cour d'appel, le prévenu n'a pas nié le principe et la réalité des escroqueries commises par lui, se bornant à contester le nombre de celles-ci et l'étendue du préjudice subi par le FAF. SAB ; qu'à cet égard, après examen des enquêtes faites successivement par les services fiscaux et par les services de police, les escroqueries suivantes ont pu être recensées :
Entreprises montants versés par FAF. SAB : Baytak (PPF) 7 520, 00 euros Kaygin Mursel 14 096, 00 euros Mutlu Faraetin (Yasine Carrelage) 3 394, 00 euros
P... Emir 10 581, 00 euros Citak Cafer 4 120, 00 euros Yenil Kaygin Sevda 3 656, 00 euros
O... Levet 4 207, 00 euros EURL Deco Space 2 818, 00 euros
F... Yasar 16 968, 00 euros Mutlu Carrelage 10 443, 00 euros SARL Decoplac 12 713, 00 euros SARL AB Deco 18 779, 00 euros Benel Inan Claire 3 962, 00 euros La clef de voûte Serge Y... 4 276, 00 euros Entreprise STF Ishan Akbaba 9 689, 00 euros Euro plomberie Thierry D... 1 849, 00 euros AB Bâtiment Ozkan C... 5 467, 20 euros Entreprise N... 10 314, 00 euros Madjij Bounouar 3 386, 40 euros Entreprise L... 10. 839, 36 euros Entreprise M... 3 165, 40 euros Total du préjudice 162 243, 36 euros ; que la cour, tout en confirmant la décision de culpabilité du prévenu du chef d'escroqueries, ramène à la somme de 162 243, 36 euros le montant des dommages-intérêts alloués au fonds d'assurance formation des salariés de l'artisanat, du bâtiment et des travaux publics en réparation de son préjudice matériel, la somme de 5 000 euros attribuée en première instance sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale étant maintenue ;
" 1°) alors que, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; qu'en condamnant le demandeur à payer à l'association FAF. SAB des dommages-intérêts au titre des formations réalisées dans les sociétés Baytak, KM2P, F..., E... carrelage, O... et Yasin carrelage lors même qu'aucune pièce versée au dossier de la procédure ne concernait cette première société et qu'aucun justificatif de versement des fonds par la partie civile n'était produit s'agissant des cinq autres, la cour a inversé la charge de la preuve et a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs ;
" 2°) alors que, qu'en condamnant le demandeur à payer à l'association FAF. SAB des dommages-intérêts au titre des formations réalisées dans les sociétés Yenil Kaygin Sevda, Benel Inan Claire, Europlomberie Thierry D..., entreprise N... et Madjij Bounouar, lors même qu'il ressortait des pièces produites par le requérant devant la cour que de telles formations avaient bien été effectuées, excluant ainsi tout caractère fictif, élément conforté par les motifs mêmes du réquisitoire définitif de renvoi du parquet faisant état de la « réalité des stages » réalisés par les salariés d'Europlomberie et de la société Elec 42 dirigée par Madjij Bounouar, la cour a derechef privé sa décision de motifs " ;
Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du préjudice résultant pour la partie civile des agissements du prévenu, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
Qu'ainsi, le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 3 000 euros la somme que Daniel X... devra payer au Fonds d'assurance-formation des salariés de l'artisanat, du bâtiment et des travaux publics au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Canivet-Beuzit conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-84907
Date de la décision : 08/04/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 11 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 avr. 2009, pourvoi n°08-84907


Composition du Tribunal
Président : M. Dulin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bouthors, Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.84907
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