LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 6 février 2007), que M. X... a été engagé par la société Centre médical spécialisé « Le Mont-Blanc » (CMS) à compter du 1er décembre 1967 en qualité de commis de cuisine avec application de la Convention collective nationale de l'hospitalisation privée ; qu'en 1995, il est passé au service de la société Expresself, aux droits de laquelle se trouve la société Avenance Entreprises, à la suite de la décision de la société CMS de confier la gestion de son service hôtellerie à cette dernière ; qu'en 1996, par application de l'avenant n° 3 relatif au changement de prestataire de services de la Convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités, il est passé au service de la société Sodexho qui a repris le marché ; que, par lettre du 19 février 1999, il a été licencié par la société Sodexho pour inaptitude médicale définitive à son poste de travail ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse dirigée contre la société CMS et de sa demande de condamnation in solidum de l'ensemble des sociétés à lui payer une indemnité réparant la perte d'une chance de percevoir, au titre du régime conventionnel de prévoyance de l'hospitalisation privée, une rente en complément de sa pension d'invalidité, alors, selon le moyen :
1° / que lorsque les conditions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 1224-1 du code du travail, ne sont pas réunies, le transfert du contrat de travail d'un salarié d'une entreprise à une autre constitue une modification de ce contrat qui ne peut intervenir sans son accord exprès, lequel ne peut résulter de la seule poursuite du travail ; qu'en jugeant constitutif d'un tel accord le seul fait pour le salarié d'avoir accepté de signer un avenant à son contrat de travail après que lui a été imposé le transfert de son contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2° / qu'en statuant ainsi sans aucunement rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée par le salarié, si ce dernier n'avait pas été tenu dans l'ignorance du caractère volontaire de l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail alors en vigueur, (actuellement article L. 1224-1 du code du travail), et de la possibilité qui devait lui être offerte de refuser le transfert de son contrat, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du code civil ;
3° / que le transfert du contrat de travail d'un salarié d'une entreprise à une autre constitue une modification de ce contrat, dont la proposition au salarié est soumise au délai de l'article L. 321-1-2 du code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 1222-6 du code du travail, lorsqu'elle procède d'une cause économique ; qu'en refusant de faire application de ces dispositions, quand il était acquis aux débats que le transfert du contrat de travail de M. X... s'inscrivait dans le cadre d'une restructuration décidée pour motif économique, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1-2 du code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 1222-6 du code du travail ;
4° / qu'à tout le moins en ne caractérisant pas les conditions de la cession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions ;
Mais attendu que le changement d'employeur qui constitue une novation du contrat de travail ne peut, sauf dispositions législatives contraires, résulter que d'une acceptation expresse du salarié ; qu'il en résulte que la procédure prévue par l'article L. 321-1-2 devenu l'article L. 1222-6 du code du travail ne s'applique pas au cas de changement d'employeur résultant du transfert d'un service ou de sa gestion à un tiers ;
Et attendu que l'arrêt qui n'avait pas à caractériser autrement les circonstances économiques de l'opération constate que le salarié avait expressément accepté que son contrat de travail soit repris par la société Expresself après avoir été informé des modalités de l'opération qui relevait d'une application volontaire de l'article L. 122-12, alinéa 2, devenu l'article L. 1224-1 du code du travail et bénéficié d'un délai de réflexion suffisant pour faire son choix ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Yves X... de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité réparant la perte d'une chance de percevoir, au titre du régime de prévoyance conventionnel UHP, une rente en complément de sa pension d'invalidité.
AUX MOTIFS QUE si l'article L. 122-12 du Code du travail ne s'applique pas de plein droit au personnel rattaché au personnel rattaché au service de cuisine et de restauration participant à la prise en charge globale des malades d'un établissement de santé, public ou privé, dès lors qu'il n'en constitue pas une entité économique distincte, les parties au transfert d'un tel service peuvent néanmoins convenir de se soumettre volontairement aux dispositions de ce texte, ce qui suppose l'accord exprès de chaque salarié concerné auquel le transfert ne peut s'imposer ; que tel a été le cas en l'espèce, au vu des stipulations du contrat de restauration conclu le 23 février 1995 entre le CMS et la société EXPRESSSELF (article 4. 1 : « Conformément à l'article L. 122-12, EXPRES SELF reprend le personnel nécessaire à la bonne marche du restaurant dans les mêmes conditions qu'auparavant et l'emploie sous sa seule responsabilité ») et de l'accord donné par Monsieur X... aux termes de l'avenant à son contrat de travail, en date du 2 mars 1995 ; que le salarié invoque à tort la méconnaissance par l'employeur des dispositions de l'article L. 321-1-1 du Code du travail, applicables à la seule modification du contrat de travail pour motif économique, étrangère à la situation de l'intéressé ; qu'il soutient en vain qu'il n'aurait pas donné un accord éclairé au terme d'un délai de réflexion suffisant, alors qu'il ressort des pièces produites (pièce n° 7 du CMS, « note aux services cuisine / restaurant »), que le directeur de l'établissement de santé a avisé les salariés, dès le 6 février 1995 (date de cette note), que la société EXPRESSELF serait présente dans leurs locaux le 9 février pour une réunion d'information générale, à l'attention du personnel, ce dont il se déduit nécessairement que tous les salariés concernés ont été informés des modalités du transfert du service de cuisine et de restauration et que Monsieur X... a bénéficié d'un délai suffisant d'environ un mois pour prendre parti sur le transfert de son contrat de travail ; qu'aux termes de l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités, une entreprise entrant dans le champ d'application de celui-ci qui se voit attribuer un marché précédemment confié à une autre entreprise entrant également dans son champ d'application, est tenue de poursuivre les contrats de travail des salariés, en sorte que Monsieur X..., qui a, une nouvelle fois, donné son accord à son transfert par la signature d'un avenant à son contrat de travail, n'est pas fondé à critiquer le transfert conventionnel d'activité entre les sociétés EXPRESSELF et SODEXHO ; qu'en outre, si le refus du salarié de changer d'employeur ne constitue pas en lui-même, hors le cas du maintien du plein droit du contrat de travail avec le nouvel employeur en application de l'article L. 122-12, d'accepter un changement d'affectation rendu nécessaire, comme en l'espèce, par la perte d'un marché, qui ne modifie pas le contrat de travail, constitue un motif de licenciement ; qu'il s'en déduit à l'évidence qu'un refus par Monsieur X... de signer l'avenant litigieux du 22 mai 1996 avec la société SODHEXO n'aurait pas eu pour effet de le voir réintégrer l'entreprise initiale, régie par la convention collective dont il demande le bénéfice, en sorte que son allégation selon laquelle son consentement aurait été « forcé » est en tout cas inopérante au regard de ses prétentions ; qu'enfin, et à titre subsidiaire, le Conseil de prud'hommes a exactement énoncé, répondant ainsi à une argumentation non reprise en cause d'appel, qu'en l'absence de transfert d'une entité économique autonome et au cas d'une application contractuelle, comme en l'espèce, des dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail, le statut collectif antérieur ne survit pas, en sorte que les dispositions de l'article L. 132-8, alinéa 7 du même Code ne sont en principe pas applicables ; qu'au surplus, en tenant pour acquise une application contractuelle de ces dispositions (cf. article 1 de l'avenant Expresself-X... du 2 mars 1995, p. 2), les premiers juges ont retenu à juste titre que le délai de survie de quinze mois de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée n'aurait pu se poursuivre au-delà du 31 mai, voire du 2 juin 1996, en sorte que Monsieur X... n'avait en tous cas plus aucun droit au titre du régime de prévoyance conventionnel UHP lorsqu'à la date du 1er août 1997, il s'st vu attribuer une pension d'invalidité 2eme catégorie par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie ; que c'est donc par l'exacte appréciation des éléments de la cause que le Conseil de prud'hommes a rejeté les prétentions de l'intéressé.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE l'article L. 122-12 alinéa 2 du Code du travail dispose que : « s'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fond, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise » ; que cet article s'applique toutes les fois qu'il y a transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise (Ass. Plen. 16 mars 1990, n° 89-45. 730) ; que la Cour de cassation définit l'entité économique comme « un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objet propre » (Cass. Soc. 7 juillet 1998, n° 96-21. 451) ; que les parties peuvent convenir de se soumettre volontairement aux dispositions de l'article L. 122-12, lorsque celui-ci n'est pas applicable de plein droit ; qu'il faut impérativement obtenir l'accord de chaque salarié, le transfert ne s'imposant pas à eux, leur consentement est alors nécessaire ; que dans le cas présent, l'application volontaire des dispositions de l'article L. 122-12 est confirmée en l'article 4. 2 du premier contrat de sous-traitance conclu le 23 février 1995 avec la société EXPRES SELF, intitulé « Contrat de fourniture de repas à forfait » : «... en conséquence, le client s'engage irrévocablement à reprendre le personnel en place au moment de la rupture du contrat » ; que Monsieur Yves X... a expressément donné son accord matérialisant son consentement par la signature d'un avenant à son contrat de travail conclu avec la société EXPRESSSELF et dont l'instrumentum précise « article 1 — Engagement : vous êtes embauché dans notre société à partie du 1 er mars 1995 pour une durée indéterminée, votre contrat de travail avec le centre médical spécialisé « Le Mont Blanc » est reprise par la société EXPRESSELF dans le cadre de l'article L. 122-12 du Code du travail ; que si l'article L. 321-1-2 du Code du travail dispose que « lorsque l'employeur, pour l'un des motifs énoncés à l'articles L. 321-1 envisage une modification substantielle des contrats de travail, en en informe chaque salarié par lettre recommandée avec accusé de réception. La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié est réputé avoir accepté la notification proposée », il ne peut être fait application de cet article que dans le cadre d'une procédure de licenciement économique ce qui n'est aucunement le cas en l'espèce ; qu'en application de l'article 3 « Poursuite des contrats de travail » de l'avenant 3 du 26 février 86 de la convention collective nationale de la restauration collective à laquelle sont soumises les deux sociétés, la société SODHEXO était tenue de poursuivre le contrat de travail de Monsieur Yves X..., sans qu'aucun accord de sa part ne soit nécessaire ; que la Cour de cassation écarte l'application de l'article L. 132-8 du Code du travail mais lorsqu'il y est fait référence par la volonté contractuelle des parties (Cass. Soc. Du 24 février 1993 n° 90-40. 104 Bull. civ. V, n° 67) ; qu'en effet, en l'absence de transfert d'une entité économique autonome, le statut collectif antérieur ne survit pas (Cass. Soc. 20 janvier 1998, n° 95-41. 942) ; qu'en tout état de cause, même si l'article L. 132-8 avait été applicable, Monsieur Yves X... ne pouvait se prévaloir de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée ; qu'en effet cette convention prévoit en son article III C 3 B que : « tout salarié âgé de moins de 60 ans en état d'invalidité permanente totale ou partielle reconnu par la sécurité sociale recevra une rente d'invalidité que ne se cumulera pas avec l'indemnité journalière d'incapacité temporaire totale de travail ou de longue maladie » ; qu'à compter du premier août 97, Monsieur Yves X... s'est vu attribuer une pension d'invalidité 2eme catégorie par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute Savoie ; que c'est seulement à compter de cette date que ses droits au titre du régime de prévoyance conventionnel aurait été ouverts ; qu'à cette date, et à supposer que l'article L. 132-8 eut été applicable, le délai de survie de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée ne courait que jusqu'au 31 mai 1996 dans le cadre du premier transfert et jusqu'au 31 juillet 1996 dans le cadre du second transfert ; que Monsieur Yves X... ne peut se prévaloir d'aucun avantage individuel acquis, ses éventuels droits au titre de la prévoyance ayant été ouvert postérieurement à l'expiration du délai de survie de la convention collective, en effet, selon la jurisprudence, seuls les droits déjà ouverts dont a déjà bénéficié le salarié peuvent être qualifiés d'avantages individuels acquis ; que Monsieur Yves X... ne pouvait donc se prévaloir de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée, ce qu'il n'a jamais fait avant l'existence du présent litige, seule la convention collective nationale de la restauration collective lui était applicable.
ALORS QUE lorsque les conditions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 1224-1 du Code du travail, ne sont pas réunies, le transfert du contrat de travail d'un salarié d'une entreprise à une autre constitue une modification de ce contrat qui ne peut intervenir sans son accord exprès, lequel ne peut résulter de la seule poursuite du travail ; qu'en jugeant constitutif d'un tel accord le seul fait pour le salarié d'avoir accepté de signer un avenant à son contrat de travail après que lui a été imposé le transfert de son contrat de travail, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
ALORS de surcroît QU'en statuant ainsi sans aucunement rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée par le salarié, si ce dernier n'avait pas été tenu dans l'ignorance du caractère volontaire de l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail alors en vigueur, (actuellement article L. 1224-1 du Code du travail), et de la possibilité qui devait lui être offerte de refuser le transfert de son contrat, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil.
ALORS enfin QUE le transfert du contrat de travail d'un salarié d'une entreprise à une autre constitue une modification de ce contrat, dont la proposition au salarié est soumise au délai de l'article L. 321-1-2 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 1222-6 du Code du travail, lorsqu'elle procède d'une cause économique ; qu'en refusant de faire application de ces dispositions, quand il était acquis aux débats que le transfert du contrat de travail de Monsieur Yves X... s'inscrivait dans le cadre d'une restructuration décidée pour motif économique, la Cour d'appel a violé l'article L. 321-1-2 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 1222-6 du Code du travail.
QU'à tout le moins en ne caractérisant pas les conditions de la cession, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions