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01/04/2009 | FRANCE | N°08-84367

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 avril 2009, 08-84367


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Alain,

contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel d'AGEN, en date du 15 mai 2008, qui a ordonné son placement sous surveillance judiciaire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 7 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 112-1, 112-2-3° du code pénal, 723-29, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que la chamb

re de l'application des peines de la cour d'appel a ordonné, à titre de mesure de sûreté et aux seu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Alain,

contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel d'AGEN, en date du 15 mai 2008, qui a ordonné son placement sous surveillance judiciaire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 7 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 112-1, 112-2-3° du code pénal, 723-29, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que la chambre de l'application des peines de la cour d'appel a ordonné, à titre de mesure de sûreté et aux seuls fins de prévenir la récidive, le placement sous surveillance judiciaire d'Alain X... jusqu'au 30 mai 2011 ;

" aux motifs qu'aux termes de l'article 723-29 du code de procédure pénale lorsqu'une personne a été condamnée à une peine privative de liberté égale ou supérieure à 10 ans pour un crime pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru, le juge le l'application des peines peut, sur réquisition du procureur de la République, ordonner à titre de mesure de sûreté et aux seules fins de prévenir une récidive dont le risque paraît avéré, qu'elle sera placée sous surveillance judiciaire dès sa libération ;

" en l'espèce, Alain X... a été condamné à une peine privative de liberté égale à 10 ans et le procureur de la République après avoir demandé au juge de l'application des peines de procéder à une expertise psychiatrique ce l'intéressé a requis son placement sous surveillance judiciaire ; pour rejeter cette requête les premiers juges ont fait valoir que la dangerosité présumée d'Alain X... était hypothétique, future et incertaine ; ce faisant, ils ont fait une mauvaise interprétation de l'article susvisé qui ne fait état que d'un risque avéré et non d'un risque certain qui bien évidemment est absolument imprévisible ; or, en l'espèce, l'expertise diligentée par le docteur Y... le 8 octobre 2007 en vue de l'examen de la requête fait état d'un risque avéré : " en situation d'adversité affective, ou plus généralement de circonstances qui mettraient en danger l'estime qu'il a de lui-même, l'intéressé pourrait être à nouveau amené à une certaine dangerosité... en raison de cette fragilité, et de ce risque avéré, qui l'expose éventuellement à des faits qui pourraient constituer une récidive, il nécessite des soins.... " ; les expertises de l'année précédente du docteur Z... et du docteur A... vont d'ailleurs exactement dans le même sens (page 13 du rapport) : " cette dangerosité demeurera... elle semble inaccessible aux efforts psychothérapiques ; à cet égard les soins délivrés sont louables mais apparaissent inefficaces ; à cet égard, les efforts de réinsertion sociale déployés par Alain X... sont remarquables, mais ne parviendront jamais à nous garantir absolument contre une nouvelle émergence pulsionnelle " ; ainsi, Alain X... va se trouver à sa libération dans une situation similaire à celle qu'il connaissait lorsqu'il est passé à l'acte en février 1998 : un travail, une vie de couple installée ; cela ne l'a pas empêché de commettre le crime pour lequel il a été condamné ; dès lors, quels que soient les efforts accomplis, la dangerosité d'Alain X... étant constatée et le risque de récidive paraissant avéré, il y a lieu d'infirmer la première décision et de placer Alain X... sous surveillance judiciaire les mesures d'assistance et de contrôle qui lui seront notifiées par le juge de l'application des peines comprendront notamment une injonction de soins ;

" alors que, d'une part, le principe de non rétroactivité des lois pénales plus sévères, conventionnellement garanti, s'applique à toute mesure relevant de la matière pénale, quelle que soit la qualification retenue par le droit interne ; que la surveillance judiciaire ne peut être prononcée qu'à l'encontre de personnes condamnées à une peine privative de liberté égale ou supérieure à dix ans pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru ; que les mesures de sûreté constituant la surveillance judiciaire, identiques au suivi socio-judiciaire et à la mise à l'épreuve, relèvent indéniablement de la matière pénale au sens des dispositions conventionnelles ; qu'en ordonnant le placement sous surveillance judiciaire d'Alain X..., condamné à une peine de 10 ans de réclusion criminelle le 22 janvier 2002 pour des faits commis le 23 février 1998, avant l'entrée en vigueur, le 17 juin 1998, de la loi instituant le suivi socio judiciaire, peine qu'Alain X... n'a jamais encouru, la cour d'appel a méconnu le principe de non rétroactivité des lois pénales plus sévères tel qu'il est garanti par l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

" alors que, d'autre part, le placement sous surveillance judiciaire ne peut être prononcé que si le risque de récidive, avéré, n'est ni éventuel, ni incertain, ce risque devant, en tout état de cause, être strictement interprété s'agissant de mesures attentatoires à la liberté individuelle ; qu'il résulte du jugement infirmé par la cour d'appel que, selon l'expert, la dangerosité d'Alain X..., hypothétique et incertaine, l'expose « éventuellement à des faits qui pourraient constituer une récidive » ; qu'ainsi, c'est en violation de l'article 723-29 du code de procédure pénale que la cour d'appel a ordonné un placement sous surveillance judiciaire tout en constatant que la dangerosité d'Alain X..., éventuelle, l'expose à un risque éventuel, et non certain, de récidive " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, par arrêt de la cour d'assises de la Corrèze du 22 janvier 2002, Alain X... a été condamné à dix ans de réclusion criminelle pour des faits de viol commis le 28 février 1998 ; que, par jugement du 31 janvier 2002, le tribunal de l'application des peines a déclaré recevable la requête du procureur de la République demandant son placement sous surveillance judiciaire et l'a rejetée au motif que le risque de récidive était incertain ; que, saisie de l'appel du ministère public, la chambre de l'application des peines a infirmé le jugement et a ordonné le placement d'Alain X... sous surveillance judiciaire jusqu'au 30 mai 2011, en retenant que l'expertise psychiatrique constatait sa dangerosité et l'existence d'un risque avéré de récidive ;

Attendu que, d'une part, en plaçant Alain X... sous le régime de la surveillance judiciaire pour des faits commis à une date où la peine de suivi socio-judiciaire n'était pas encourue, la chambre de l'application des peines a fait l'exacte application des dispositions de l'article 42 de la loi du 12 décembre 2005, selon lesquelles les articles 723-29, 1°, 2°, et 3°, 723-31 à 723-36 et 723-39 du code de procédure pénale régissant la surveillance judiciaire sont immédiatement applicables aux condamnés dont le risque de récidive est constaté après la date d'entrée en vigueur de la loi, lesdites dispositions étant compatibles avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme dès lors que cette mesure de sûreté, limitée à la durée des réductions de la peine, constitue une modalité d'exécution de celle-ci ;

Que, d'autre part, la chambre de l'application des peines, qui a caractérisé l'existence d'un risque avéré de récidive par des motifs procédant de son appréciation souveraine, a justifié sa décision au regard des dispositions de l'article 723-29 susvisé ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Ponroy conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Pometan conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-84367
Date de la décision : 01/04/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'application des peines de la Cour d'appel d'Agen, 15 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 avr. 2009, pourvoi n°08-84367


Composition du Tribunal
Président : Mme Ponroy (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.84367
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