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25/03/2009 | FRANCE | N°08-41627

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 mars 2009, 08-41627


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 29 janvier 2008), que le 28 février 1998, M. X... a conclu avec la société Karelis un contrat d'agent commercial ; qu'après avoir mis fin aux relations contractuelles par lettre du 12 janvier 2006, M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de son contrat d'agent commercial en contrat de travail et de demandes en paiement de diverses sommes ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré le conseil de

prud'hommes incompétent pour connaître du litige entre les parties, al...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 29 janvier 2008), que le 28 février 1998, M. X... a conclu avec la société Karelis un contrat d'agent commercial ; qu'après avoir mis fin aux relations contractuelles par lettre du 12 janvier 2006, M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de son contrat d'agent commercial en contrat de travail et de demandes en paiement de diverses sommes ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré le conseil de prud'hommes incompétent pour connaître du litige entre les parties, alors, selon le moyen :
1°/ que l'existence d'un contrat de travail est établie lorsque le juge constate la conjonction du pouvoir de direction et de contrôle de l'employeur et le lien de subordination subséquent du travailleur ; qu'en écartant l'existence d'un contrat de travail quand elle constatait que M. X... était tenu de se rendre à la réunion hebdomadaire de la société Karelis aux cotés des autres salariés, qu'il disposait d'un bureau et d'un poste de travail dans les locaux de l'entreprise, que le gérant lui imposait les «lignes directrices» de l'activité et qu'il se rendait sur les chantiers et participait à la mise en oeuvre de travaux pour le compte de la société Karelis qui ne relevaient pas de sa compétence d'agent commercial, la cour d'appel a violé les articles L. 121-1 et L. 120-3 du code du travail, devenus L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;
2°/ que la requalification d'un contrat d'agent commercial en contrat de travail dépend des conditions matérielles et financières dans lesquelles l'activité du travailleur est exercée ; qu'une telle requalification doit être opérée lorsque l'agent commercial travaille de manière exclusive pour une seule entreprise et n'a pas la possibilité matérielle d'effectuer des opérations pour son propre compte ; qu'en se bornant à relever, pour écarter la demande de requalification en contrat de travail, que M. X... ne prouvait pas que la société Karelis lui avait interdit de prospecter d'autres clients, sans rechercher ni vérifier s'il était en pratique matériellement et financièrement en mesure d'exercer une activité d'agent commercial pour le compte d'autres entreprises que la société Karelis et de développer une clientèle personnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de articles L. 121-1 et L. 120-3 du code du travail, devenus L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, d'une part que si M. X... assistait à une réunion hebdomadaire dans les locaux de l'entreprise où il disposait d'un bureau, il gérait seul son emploi du temps et ses congés sans avoir à rendre de comptes et n'était pas tenu de se tenir à disposition de la société pour y recevoir des directives ou y accomplir un travail déterminé, d'autre part que l'intéressé ne justifiait pas avoir été contraint ni de participer à la mise en oeuvre de travaux ne relevant pas de sa compétence d'agent commercial, ni d'avoir une activité professionnelle exclusive pour la société Karelis ; qu'elle a pu en déduire, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inutile, que l'existence d'un lien de subordination, et partant d'un contrat de travail, n'était pas caractérisée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Pinet et Didier, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré le conseil de prud'hommes matériellement incompétent au profit du tribunal de grande instance pour connaître de la demande de Monsieur X... en requalification du contrat d'agent commercial en contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 120-3 du code du travail prévoit que les personnes physiques immatriculées au registre des agents commerciaux sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ouvrage par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à cette immatriculation ; qu'il est constant que cette présomption de non salariat qui avait été instaurée par la loi du 11 février 1994 a été supprimée par la loi du 19 janvier 2000, puis rétablie par celle du 1er août 2003 ; qu'en l'espèce, M. X... ayant été embauché le 28 février 1998, la loi applicable est celle du 11 février 1994 instaurant la présomption de salariat ; que, quant à l'application de celle-ci, il résulte d'un extrait du registre spécial des agents commerciaux délivré le 20 mars 2006 que, conformément à ce qui était convenu dans son contrat, M. X... était immatriculé en cette qualité depuis le 10 mars 1998, et que son inscription avait été renouvelée le 31 mars 2003 ; que la société Karelis est en conséquence fondée à se prévaloir de la présomption de non salariat prévue à l'article L. 120-3 du code du travail, présomption simple qu'il appartient à M. X... de renverser ; que celui-ci doit donc prouver qu'il existait dans ses rapports avec la société Karelis un lien de subordination se caractérisant par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui avait le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, lien qui était incompatible avec la qualification d'agent commercial figurant dans le contrat du 28 février 1998 ; que s'agissant des horaires de travail, M. X... fait valoir que son employeur contrôlait et suivait son emploi du temps, et qu'il devait assister à une réunion hebdomadaire le lundi matin dans les locaux de l'entreprise avec les autres salariés ; il produit en ce sens des attestations émanant de son père, M. Claude X..., de son épouse, Mme Sylvie X..., de M. Eric Y..., technicien dans la même entreprise, de M. Jany Z..., stagiaire dans la même entreprise, qui confirment l'existence d'une réunion hebdomadaire obligatoire, et tendent à prouver qu'il était tenu de remettre son emploi du temps de la semaine tous les lundis matin ; que, cependant, alors que l'obligation d'assister à une réunion hebdomadaire ne peut être assimilée à un horaire de travail imposé par l'employeur, celui-ci verse aux débats le témoignage de M. A..., agent commercial de la société Karelis, selon lequel en dehors de la réunion du lundi matin qui permettait de faire le point des affaires en cours, il avait l'habitude de gérer seul son emploi du temps sans que son employeur soit au courant de son planning et encore moins de ses horaires de travail ; qu'à cet égard, M. B..., salarié technicocommercial de la société Karelis, a confirmé que M. X... et M. A..., en leur qualité d'agent commercial, n'avaient aucun horaire fixe de sorte qu'ils géraient leur temps et leurs congés sans rendre de compte à personne ; que le témoignage de M. C..., technicien de bureau d'études au sein de la société Karelis, a émis le même avis en ce qui concerne M. X... ; que M. D..., qui travaille avec la société Karelis en tant qu'artisan menuisier a indiqué quant à lui avoir toujours constaté que M. X... était libre de son emploi du temps et de ses mouvements ; qu'en l'état de ces éléments, l'appelant ne rapporte pas la preuve qu'il ait travaillé selon un horaire de travail imposé par son employeur, et ses agendas qui contiennent la chronologie de son emploi du temps au jour le jour, notamment de ses rendez-vous avec ses clients, ne vont nullement en ce sens ; que s'agissant du lieu de travail, M. X... fait valoir qu'il disposait d'un bureau et d'un poste de travail dans les locaux de la société Karelis, et que cet élément consacre à lui seul une relation subordonnée entre salarié et employeur ; que néanmoins, il résulte de ce qui précède qu'il n'était pas tenu de se tenir dans ce bureau à des horaires précis, à la disposition de son employeur, pour y recevoir des directives ou y accomplir un travail déterminé, de sorte que ce ledit bureau ne peut être considéré que comme lui ayant été attribué pour les commodités de ses fonctions ; que s'agissant des directives qui lui étaient données, M. X... soutient qu'il était tenu de se rendre sur des chantiers où il effectuait des travaux étrangers à sa mission d'agent commercial ; qu'il produit en ce sens les mêmes attestations émanant de son père, de son épouse, de M. Y..., de M. Z..., auxquelles s'ajoutent celles de clients de la société Karelis, comme M. E..., M. F..., M. G..., selon lesquels il effectuait des livraisons de matériaux sur les chantiers et participait même à leur mise en oeuvre, Mme Sylvie X... ajoutant qu'il faisait tous les devis, plans et métrés ; que ces témoignages sont toutefois contredits par ceux de M. C... pour qui M. X... se rendait sur les chantiers pour entretenir des relations avec les clients, de M. H..., charpentier, et de M. D..., menuisier, selon lesquels M. X... venait parfois faire visiter un chantier à des clients potentiels, mais n'intervenait pas en ce qui concernait les commandes, la livraison et la pose des fenêtres ; que M. A..., collègue de M. X... précise que si des lignes directrices étaient données aux agents commerciaux par le gérant de la société Karelis, ils n'étaient pas tenus de s'y plier ; que concernant les congés annuels de l'appelant, la thèse selon laquelle il était tenu de les prendre et organiser selon les impératifs de la société Karelis est démentie par la secrétaire de celle-ci, Mme I..., qui atteste que M. X... durant les six années qu'elle avait passées au sein de cette société, avait toujours pris ses congés aux dates qu'il désirait ; que M. X... se réclame aussi du témoignage de M. Z... qui, ayant travaillé au sein de la société comme stagiaire, atteste qu'il avait été désigné par M. J..., gérant, pour être son tuteur ; que ces propos ne sont néanmoins pas conformes à son contrat de qualification et de préparation au baccalauréat professionnel de commerce qui prévoyait que M. J..., désigné comme son tuteur, devait organiser son emploi du temps, et le faire participer à plusieurs séquences de formation, notamment aux côtés des agents commerciaux de l'entreprise ; qu'il résulte de ces éléments que si M. X... a effectivement participé à la mise en oeuvre de travaux qui ne relevaient pas de sa compétence d'agent commercial, la preuve n'est pas rapportée qu'il ait reçu des ordres en ce sens ou qu'il y ait été contraint par son prétendu employeur ; que s'agissant du pouvoir disciplinaire sous lequel tout salarié est censé travailler, l'appelant ne propose pas de démontrer que son supérieur hiérarchique lui aurait adressé des remarques, des mises en garde ou des avertissements sur la manière d'exécuter son travail, et ait usé à son égard d'un quelconque pouvoir de sanction ou d'une mesure d'interdiction, notamment en ce qui concerne la faculté qu'il revendiquait de prendre une autre carte professionnelle ; qu'il résulte encore des pièces de la procédure que conformément aux stipulations de son contrat, M. X... était rémunéré par des commissions calculées en pourcentage sur le chiffre d'affaires et versées en fonction de l'avancement des travaux, c'est-à-dire aux différents stades de l'évolution de la construction : fabrication, livraison, paiement du solde de travaux ; qu'enfin, les avis d'imposition sur le revenu des époux X... pour les années 2000 à 2004 révèlent que contrairement à son épouse qui déclarait des salaires, M. X... a toujours déclaré des revenus d'activité non salariée pour des sommes qui s'élevaient à 21. 000 en début de période et qui atteignaient 40. 000 , puis 60. 000 en fin de période ; que dès lors, la preuve d'un lien de subordination ayant lié M. X... à la société Karelis n'étant pas établie, et la présomption de non salariat résultant de l'inscription de M. X... au registre du commerce n'étant pas renversée, il convient de confirmer la décision du conseil de Prud'hommes qui, s'étant déclaré matériellement incompétent au profit du tribunal de grande instance, a ordonné la transmission du dossier au greffe de cette dernière juridiction ;
1) ALORS QUE l'existence d'un contrat de travail est établie lorsque le juge constate la conjonction du pouvoir de direction et de contrôle de l'employeur et le lien de subordination subséquent du travailleur ; qu'en écartant l'existence d'un contrat de travail quand elle constatait que Monsieur X... était tenu de se rendre à la réunion hebdomadaire de la société Karelis aux cotés des autres salariés, qu'il disposait d'un bureau et d'un poste de travail dans les locaux de l'entreprise, que le gérant lui imposait les «lignes directrices» de l'activité et qu'il se rendait sur les chantiers et participait à la mise en oeuvre de travaux pour le compte de la société Karelis qui ne relevaient pas de sa compétence d'agent commercial, la cour d'appel a violé les articles L. 121-1 et L. 120-3 du code du travail (ancien), devenus L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail (nouveau) ;
2) ALORS QUE la requalification d'un contrat d'agent commercial en contrat de travail dépend des conditions matérielles et financières dans lesquelles l'activité du travailleur est exercée ; qu'une telle requalification doit être opérée lorsque l'agent commercial travaille de manière exclusive pour une seule entreprise et n'a pas la possibilité matérielle d'effectuer des opérations pour son propre compte ; qu'en se bornant à relever, pour écarter la demande de requalification en contrat de travail, que Monsieur X... ne prouvait pas que la société Karelis lui avait interdit de prospecter d'autres clients, sans rechercher ni vérifier s'il était en pratique matériellement et financièrement en mesure d'exercer une activité d'agent commercial pour le compte d'autres entreprises que la société Karelis et de développer une clientèle personnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de articles L. 121-1 et L. 120-3 du code du travail (ancien), devenus L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail (nouveau).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-41627
Date de la décision : 25/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 29 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 mar. 2009, pourvoi n°08-41627


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.41627
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