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18/03/2009 | FRANCE | N°07-45682

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2009, 07-45682


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé par la société anonyme Haden Drysys par un contrat de travail du 11 juin 1996 en qualité de directeur commercial, directeur général ; qu'il a été nommé directeur général par le conseil d'administration le 31 mars 2004 ; qu'il a démissionné de son mandat le 8 novembre 2005 ; que la société a été mise en redressement, puis en liquidation judiciaires les 21 novembre et 16 décembre 2005 ; que M. X... a été licencié pour motif économique le 28

décembre 2005 par le liquidateur judiciaire ; qu'il a saisi la juridiction prud'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé par la société anonyme Haden Drysys par un contrat de travail du 11 juin 1996 en qualité de directeur commercial, directeur général ; qu'il a été nommé directeur général par le conseil d'administration le 31 mars 2004 ; qu'il a démissionné de son mandat le 8 novembre 2005 ; que la société a été mise en redressement, puis en liquidation judiciaires les 21 novembre et 16 décembre 2005 ; que M. X... a été licencié pour motif économique le 28 décembre 2005 par le liquidateur judiciaire ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la fixation au passif de la société Haden Drysys de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture d'un contrat de travail ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal du liquidateur judiciaire :

Attendu que le liquidateur judiciaire fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes, alors, selon le moyen, que les fonctions de directeur général étant, en principe, celles d'un mandataire social et ne pouvant dès lors s'exercer dans le cadre d'un lien de subordination, la cour d'appel, qui avait constaté que M. X... avait été engagé en qualité de directeur général et que ses fiches de paye mentionnaient cette fonction, ne pouvait considérer qu'il était « directeur général salarié », sans rechercher concrètement en quoi avaient consisté ses fonctions et si elles s'étaient exercées dans le cadre d'un lien de subordination ; qu'en omettant cette recherche, elle a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 225-51-1 du code de commerce et L. 121-1, devenu L. 1221-1, du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu à bon droit qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui en invoque le caractère fictif d'en rapporter la preuve, et a relevé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que le liquidateur judiciaire était défaillant dans l'administration de la preuve ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :

Vu l'article 1315 du code civil ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande de rappel de salaire du 1er au 29 décembre 2005 et de congés payés afférents, l'arrêt retient qu'il ne justifie pas avoir travaillé durant cette période ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à l'employeur de prouver que le salaire n'était pas dû, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents pour la période du 1er au 29 décembre 2005, l'arrêt rendu le 30 octobre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCP Ouiziville - de Keating, ès qualités, à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la SCP Ouiziville - de Keating, ès qualités.

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que M. X... avait été lié à la société Haden Drysys par un contrat de travail et d'avoir en conséquence a fixé à son profit au passif de la société Haden Drysys France une créance de 78 160 et 7 816 au titre du préavis et des congés payés afférents, 20 249,06 au titre de l'indemnité conventionnelle de préavis et 7 443,58 et 744,35 au titre d'un rappel de salaires et congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE, préliminairement, il s'avère nécessaire de retracer le déroulement chronologique de la carrière de M. X... au sein de la société Haden Drysys ; QUE la société Haden Drysys France, créée en 1989, appartient à un groupe américain spécialisé dans la vente et l'étude de chaînes de montage et de peintures dans le monde de la construction automobile ; QUE M. X... a signé, à Birmingham, le 11 juin 1996 un contrat de travail rédigé en langue anglaise et en langue française aux termes duquel la société Haden France l'engage aux fonctions de directeur commercial ; QUE le contrat est soumis à la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie ; QUE ses fonctions sont contractuellement définies comme suit : « Le salarié exercera ses fonctions conformément aux instructions de la société et sous le contrôle et la surveillance du Président Directeur Général M. Philipp Z... et/ou de toute personne désignée à cet effet. En tant que directeur général, le salarié aura pour mission de remplir les fonctions de directeur général et de responsable du développement de l'entreprise, étant entendu que les devoirs et obligations du salarié qui ne sont pas essentiels à l'accomplissement de ses fonctions pourront être modifiés par la société dans l'intérêt de sa gestion, sans que cela constitue une modification substantielle du contrat. » ; QUE par lettre en date du 21 juin 1996, sur papier à en-tête de la société Haden Drysys international, ayant son siège à Birmingham, M. Ashley A..., directeur des ressources humaines, demande aux services comptables de la filiale française, d'inscrire M. X... sur les registres des salaires faisant référence à sa récente nomination comme « Managing Director » et rappelle les termes et conditions du contrat concernant la rémunération et la prise en charge d'un véhicule de fonction ; QUE les bulletins de paie, établis au nom de M. X..., dès son entrée en fonction mentionnent, tous, comme emploi : « directeur général » ; QUE M. X... a été nommé par le conseil d'administration de la filiale française comme administrateur au sein de cette société selon procès verbal des délibérations du 20 mars 2000 ; (…)
QUE, sur l'analyse des relations contractuelles, d'une part, pour la période de juin 1996 à mars 2000 (soit 3 ans et 9 mois), M. X... est titulaire d'un contrat de travail écrit apparent ; QU'il résulte des pièces versées aux débats, précédemment analysées, qu'il a exercé au sein de la société Haden Drysys France des fonctions salariées de directeur général ; QU'en présence d'un contrat apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ; QUE la charge de la preuve de l'absence de lien de subordination appartient donc aux intimés qui contestent la qualité de salarié de M. X... ; QUE le mandataire liquidateur comme l'Unedic ne versent aucun élément au soutien de leur contestation et ne démontrent aucunement la réalité d'un montage permettant de conférer à M. X... un statut injustifié et protecteur de salarié ; QUE les nominations de M. X... comme administrateur de la société ou comme directeur général, mandataire social, survenues postérieurement ne peuvent suffire à établir le caractère fictif du contrat de travail signé quatre ans plus tôt ; QU'à compter de mars 2000 jusqu'au 8 novembre 2005, date de la démission de M. X... de son mandat social, le contrat de travail a été suspendu ; QUE les parties n'invoquent ni ne caractérisent l'existence d'une novation, qui ne se présume pas, permettant de considérer que le contrat de travail a disparu avec tous ses effets ; QUE M. X... s'est vu conférer les plus larges pouvoirs lui permettant d'engager la société dans laquelle il a exercé les fonctions d'administrateur puis de directeur général ; QU'il n'existe pas dès mars 2000 de différenciation entre les fonctions que M. X... prétend exercer cumulativement ; QUE la dualité de rémunérations n'implique pas que deux rémunérations soient versées, le mandat social pouvant être exercé à titre gratuit ; QUE pour autant la dualité des rémunérations ne suffit pas à établir la dualité des fonctions ; QU'il n'est pas possible de distinguer, à partir des courriels échangés entre les cadres dirigeants de la société, des comptes-rendus d'activités sommaires et limités, dans l'exercice des fonctions occupées par M. X... celles de direction et celles techniques dans un lien de subordination ; QUE cette confusion entre ces fonctions a été amplifiée lors de création de la société slovaque confiée à la gérance de M.
X...
; QUE ce dernier a joué le rôle d'interface entre les filiales et la maison mère notamment lors des mouvements de fonds entre sociétés de 18 millions d'euros mis en exergue par le mandataire liquidateur dans son rapport du 1er novembre 2006 ; QU'enfin, à la date où M. X... a démissionné de ses fonctions de mandataire social, le contrat de travail suspendu a repris tous ses effets jusqu'au licenciement soit sur une période courant du 8 novembre au 28 décembre 2005 ; QU'en effet, la cessation du mandat social n'emporte pas de plein droit la résiliation du contrat de travail ; QU'il n'est nullement avéré qu'après sa démission de son mandat social, M. X... ait continué à exercer des fonctions sans rapport avec celles d'un salarié alors que le contrat de travail suspendu durant le mandat social a repris de plein droit ses effets ; QU'il ne peut être tiré argument du fait que M. X... ait répondu à une convocation du mandataire liquidateur ; QUE par lettre en date du 18 novembre 2005, adressée au conseil de la société Haden Drysys France, dont l'authenticité n'est nullement remise en cause il analyse la situation de la société et demande qu'il lui soit « confirmé qu'une telle présentation des faits recueille l'approbation de l'actionnaire principal. .. et de me transmettre le pouvoir qu'il me confie pour représenter Haden France » ; QU'il doit en être déduit qu'il a repris l'exercice à nouveau des fonctions salariées de directeur général salarié ;

ALORS QUE les fonctions de directeur général étant, en principe, celles d'un mandataire social et ne pouvant dès lors s'exercer dans le cadre d'un lien de subordination, la cour d'appel, qui avait constaté que M. X... avait été engagé en qualité de directeur général et que ses fiches de paye mentionnaient cette fonction, ne pouvait considérer qu'il était « directeur général salarié », sans rechercher concrètement en quoi avaient consisté ses fonctions et si elles s'étaient exercées dans le cadre d'un lien de subordination ; qu'en omettant cette recherche, elle a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 225-51-1 du code de commerce et L. 121-1, devenu L. 1221-1, du code du travail.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande de rappel de salaire pour la période du 21 novembre au 29 décembre 2005, avec les congés payés y afférents,

AUX MOTIFS QUE s'il appartient au salarié de prouver qu'il a droit au paiement de son salaire, il incombe en revanche à l'employeur de prouver qu'il a payé le salaire dû (…) ; que le salarié soutient avoir travaillé durant le mois de décembre 2005 ; qu'il n'en justifie aucunement ; que sa demande sera rejetée ;

ALORS QUE lorsque le salarié réclame le paiement d'un salaire prévu par son contrat de travail, c'est à l'employeur de prouver qu'il s'est acquitté du paiement du salaire ou qu'il était libéré de son obligation ; qu'en l'espèce, M. X... justifiait qu'il était lié du 21 novembre au 29 décembre 2005 à la société Haden Drysys par un contrat de travail qui avait repris tous ses effets depuis le 8 novembre 2005 ; que c'était donc à l'employeur de prouver qu'il était libéré de son obligation de versement du salaire pour cette période ; qu'en affirmant néanmoins qu'il appartenait au salarié de justifier qu'il avait travaillé au cours du mois de décembre 2005, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé les dispositions de l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-45682
Date de la décision : 18/03/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 30 octobre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2009, pourvoi n°07-45682


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.45682
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