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12/03/2009 | FRANCE | N°07-20403

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 mars 2009, 07-20403


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... ayant souscrit un contrat d'assurance automobile auprès de la société mutuelle Aréas, aux droits de laquelle se trouve la mutuelle d'assurance Aréas dommages (l'assureur) par l'intermédiaire d'un agent général, son fils, M. Y..., conduisant en état d'ivresse, a causé un accident de la circulation au cours duquel Nadine Z..., épouse A..., a été tuée, et son mari, M. A..., ainsi que leur fils, Arnaud, ont été blessés ; qu'un tribunal correctionnel a c

ondamné M. Y... pour homicide involontaire par conducteur sous l'empire d'...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... ayant souscrit un contrat d'assurance automobile auprès de la société mutuelle Aréas, aux droits de laquelle se trouve la mutuelle d'assurance Aréas dommages (l'assureur) par l'intermédiaire d'un agent général, son fils, M. Y..., conduisant en état d'ivresse, a causé un accident de la circulation au cours duquel Nadine Z..., épouse A..., a été tuée, et son mari, M. A..., ainsi que leur fils, Arnaud, ont été blessés ; qu'un tribunal correctionnel a condamné M. Y... pour homicide involontaire par conducteur sous l'empire d'un état alcoolique, blessures involontaires, délit de fuite et conduite d'un véhicule à une vitesse excessive ; que l'assureur, appelé à l'instance, n'ayant pas comparu et ne s'étant pas fait représenter, a interjeté appel de la décision et a invoqué la nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle ; qu'un arrêt du 20 février 2003 a déclaré l'exception de nullité irrecevable faute d'avoir été soulevée en première instance ; que l'assureur a fait assigner devant un tribunal de grande instance Mme X..., M. Y..., M. A..., en son nom personnel et pour son fils mineur Arnaud, Mme B..., veuve Z..., en présence de la Société nationale des chemins de fer français (la SNCF), représentant la Caisse de retraite du personnel de la SNCF, et de l'Union des mutuelles des cheminots, afin de voir prononcer la nullité du contrat d'assurance et voir condamner Mme X..., in solidum avec M. Y..., à lui rembourser les sommes déjà versées aux victimes de l'accident ; que le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages est intervenu volontairement à l'instance ;

Sur le moyen unique du pourvoi provoqué, tel que reproduit en annexe :
Attendu que la SNCF fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action de l'assureur en annulation du contrat souscrit par Mme X... ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que la forclusion édictée par l'article 385-1, alinéa 1er, du code de procédure pénale ne concerne que l'action civile engagée devant la juridiction pénale et ne s'oppose pas à ce que l'assureur invoque contre son assuré devant la juridiction civile une cause de non-garantie, sans toutefois que puissent être remises en question les obligations de l'assureur envers la victime ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 113-8 du code des assurances ;
Attendu que la nullité du contrat est encourue pour réticence ou fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ;
Attendu que pour débouter l'assureur de sa demande tendant à l'annulation du contrat souscrit le 15 mai 2001 par Mme X..., l'arrêt retient que l'agent général d'assurances, dans son attestation, avait déclaré que Mme X..., lorsqu'elle s'était présentée pour souscrire cette police, lui avait demandé "si son fils qui ne portait pas le même nom qu'elle pourrait conduire le véhicule", que lui ayant fait connaître que cela était possible, Mme X... s'était bien gardée de l'aviser que son fils avait eu un retrait de permis de conduire peu auparavant, et qu'il lui était apparu que cette souscription avait été uniquement faite pour obtenir un tarif moins élevé et dissimuler les antécédents de ce dernier ; que M. Gilles X... ayant témoigné que lors de la souscription de la police d'assurance, son épouse avait demandé que leur fils soit désigné en tant que conducteur principal, il résultait de ces deux témoignages, sur ce point concordants, que la désignation de M. Y... en qualité de conducteur habituel avait non seulement été expressément examinée par les parties mais qu'elle était, au surplus, entrée dans le champ contractuel, qu'il ressortait en effet des explications de l'agent général que la fausse déclaration intentionnelle commise selon lui par Mme X... avait consisté, non pas dans la non-déclaration de M. Y... en qualité de conducteur habituel du véhicule assuré, mais dans la dissimulation de ses antécédents de circulation routière, mais que l'assureur n'était pas admissible à soutenir, tout à la fois, que la fausse déclaration intentionnelle résultait de la non-désignation du véritable conducteur principal et de la dissimulation d'antécédents, quand elle était nécessairement alternative ; que l'on devait par conséquent déduire de l'ensemble de ces éléments que l'assureur ne démontrait pas que Mme X..., dont la bonne foi devait être présumée, et qui avait spontanément admis lors de l'enquête de police que son fils Jimmy Y... était le conducteur habituel du véhicule assuré, aurait commis lors de la souscription de l'assurance une fausse déclaration intentionnelle ayant consisté dans la non-déclaration de celui-ci en telle qualité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que l'assureur invoquait expressément l'existence d'une fausse déclaration intentionnelle résultant d'une dissimulation des antécédents du conducteur habituel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il ce qu'il a déclaré recevable la société Aréas dommages à se prévaloir devant la cour d'appel de la nullité du contrat d'assurance souscrit le 15 mai 2001 par Mme X..., l'arrêt rendu le 11 septembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne Mme X... et M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes présentées de ce chef ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP MASSE-DESSEN et THOUVENIN, avocat aux Conseils pour la société Aréas dommages, demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un assureur (la mutuelle AREAS, l'exposante) de sa demande tendant à l'annulation du contrat souscrit le 15 mai 2001 par un automobiliste (Mme Joëlle X...) ;
AUX MOTIFS QUE M. C..., dans son attestation recueillie le 2 novembre 2004, déclarait que Mme X..., lorsqu'elle s'était présentée à lui pour souscrire cette police, avait demandé «si son fils qui ne portait pas le même nom qu'elle pourrait conduire le véhicule» ; que l'attestant, qui indiquait lui avoir fait connaître que cela était possible, soulignait que Mme X... s'était en revanche bien gardée de l'aviser que son fils avait eu un retrait de permis de conduire peu auparavant, et en concluait, d'un côté, que cette dissimulation, «suivant les termes du contrat, rendait celui-ci nul pour fausse déclaration», de l'autre que «cette souscription était uniquement faite pour obtenir un tarif moins élevé et dissimuler les antécédents de son fils» ; que M. Gilles X..., dans son attestation rédigée le 13 janvier 2003, témoignait pour sa part s'être présenté avec son épouse, lors de la souscription de la police d'assurance, et affirmait que celle-ci avait indiqué vouloir régler l'assurance, mais avait demandé que son fils fût désigné en tant que conducteur principal ; qu'il résultait de ces deux témoignages, sur ce point concordants, que la désignation de M. Y... en qualité de conducteur habituel avait non seulement été expressément examinée par les parties mais était, au surplus, entrée dans le champ contractuel ; qu'il ressortait en effet des explications de l'agent général que la fausse déclaration intentionnelle commise selon lui par Mme X... avait consisté, non pas dans la non-déclaration de M. Y... en qualité de conducteur habituel du véhicule assuré, mais dans la dissimulation de ses antécédents de circulation routière, étant à cet égard observé que l'assureur n'était pas admissible à soutenir, tout à la fois, que la fausse déclaration intentionnelle résultait de la non-désignation du véritable conducteur principal et de la dissimulation d'antécédents, quand elle était nécessairement alternative ; que l'on devait par conséquent déduire de l'ensemble de ces éléments que la société AREAS ne démontrait pas que Mme X..., dont la bonne foi devait être présumée et qui avait spontanément admis lors de l'enquête de police que son fils Jimmy Y... était le conducteur habituel du véhicule assuré, aurait commis lors de la souscription de l'assurance une fausse déclaration intentionnelle ayant consisté dans la non-déclaration de celui-ci en telle qualité ;
ALORS QUE si l'assureur invoque l'existence de plusieurs fausses déclarations intentionnelles, le juge a l'obligation de vérifier qu'aucune d'elles n'entache le contrat de nullité ; qu'en écartant la cause de nullité fondée sur la dissimulation des antécédents du conducteur habituel au prétexte, juridiquement erroné, que la fausse déclaration intentionnelle ne pouvait résulter tout à la fois de la non-désignation du véritable conducteur principal et de la dissimulation d'antécédents, et qu'elle était nécessairement alternative, après avoir pourtant admis que la fausse déclaration intentionnelle consistait en l'espèce en une dissimulation des antécédents du conducteur habituel, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 113-8 du Code des assurances ;
ALORS QUE, à tout le moins, la réticence ou la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré entraîne la nullité du contrat lorsqu'elle change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur ; qu'en s'abstenant de vérifier en fait, comme elle y était invitée, que la déclaration inexacte sur les antécédents du conducteur habituel constituait une fausse déclaration intentionnelle ayant diminué l'opinion du risque pour l'assureur, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 113-8 du Code des assurances.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un assureur (la mutuelle AREAS, l'exposante) de sa demande de réduction proportionnelle de l'indemnité d'assurance ;
AUX MOTIFS QUE, ainsi qu'il avait été souligné ci-dessus à propos de la fausse déclaration intentionnelle, c'était à l'agent général de l'assureur stipulant qu'il appartenait de renseigner utilement et complètement la police qu'il soumettait à la signature de Mme X..., en prenant soin, notamment, de remplir la rubrique «conducteur dénommé» de façon à ne laisser subsister aucune ambiguïté sur l'identité du conducteur déclaré comme l'utilisateur habituel du véhicule assuré ; qu'il en résultait qu'il ne pouvait davantage être reproché à Mme X... une omission ou une déclaration inexacte au sens de l'article L. 113-9 du Code des assurances, de sorte que la demande présentée par la société AREAS sur le fondement de la règle de réduction proportionnelle de l'indemnité d'assurance, édictée par le troisième alinéa de ce texte, devait être rejetée ;
ALORS QUE que la demande subsidiaire de l'assureur fondée sur une déclaration inexacte des antécédents du conducteur habituel a été examinée par référence aux motifs ayant écarté toute fausse déclaration intentionnelle ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen emportera donc, par application de l'article 625 du nouveau Code de procédure civile, l'annulation par voie de conséquence du chef ici critiqué.
Moyen produit par Me de NERVO, avocat aux Conseils pour la SNCF, demanderesse au pourvoi provoqué
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR déclaré recevable l'action de la société Areas dommage en annulation du contrat souscrit par Madame X...

AUX MOTIFS QUE l'assureur régulièrement appelé devant le juge pénal était recevable, même s'il n'avait pas comparu en première instance, à relever appel du jugement et à soumettre à la Cour d'appel, avant toute défense au fond, les exceptions visées par l'article 385-1 du code de procédure pénale ; que la présomption de renonciation ne valait que devant la juridiction devant laquelle il ne comparaissait pas ; que la forclusion instaurée par l'article 385-1 ne concernait que l'action civile engagée devant la juridiction pénale et ne s'opposait pas à ce que l'assureur invoque, devant le juge civil, une exception de non garantie ; que la société Areas était recevable à se prévaloir, devant le juge civil, de la nullité du contrat souscrit par Madame X... ;
ALORS QUE l'article 385-1 du code de procédure pénal, en son deuxième alinéa, dispose que «l'assureur mis en cause dans les conditions prévues par l'article 388-2 qui n'intervient pas au procès pénal est réputé renoncer à toute exception» ; que le même article 385-1 dispose en son premier alinéa, que l'exception de non-assurance doit être opposée par l'assureur in limine litis ; qu'il était constant que la société Areas, dûment mise en cause devant le tribunal correctionnel, n'avait pas comparu ; qu'elle était donc réputée avoir renoncé définitivement, de ce fait, à invoquer la nullité du contrat d'assurance souscrit par Madame X... ; qu'en jugeant autrement, la Cour d'appel a violé l'article 385-1 du code de procédure pénale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 07-20403
Date de la décision : 12/03/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 11 septembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 mar. 2009, pourvoi n°07-20403


Composition du Tribunal
Président : M. Gillet (président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.20403
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