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10/03/2009 | FRANCE | N°07-18313

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 mars 2009, 07-18313


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 15 mai 2007), que la société civile immobilière Les Trois Chênes (la SCI), ayant pour associés M. et Mme X..., a conclu le 6 janvier 1989 un contrat de crédit-bail immobilier avec la société Pyramides bail aux droits de laquelle vient la société foncière et financière Monceau (la Foncière) dont M. Y... était le directeur général, pour le financement de la construction et de l'aménagement d'un bâtiment destiné à accueillir un fonds de commerce exploité en f

ranchise de la société "Au Vieux Chêne" dirigée par M. Z... ; que M. et Mme X...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 15 mai 2007), que la société civile immobilière Les Trois Chênes (la SCI), ayant pour associés M. et Mme X..., a conclu le 6 janvier 1989 un contrat de crédit-bail immobilier avec la société Pyramides bail aux droits de laquelle vient la société foncière et financière Monceau (la Foncière) dont M. Y... était le directeur général, pour le financement de la construction et de l'aménagement d'un bâtiment destiné à accueillir un fonds de commerce exploité en franchise de la société "Au Vieux Chêne" dirigée par M. Z... ; que M. et Mme X... se sont rendus cautions solidaires des engagements pris par la SCI ; que celle-ci ayant cessé de payer les loyers, la Foncière les a assignés en paiement ; qu'ayant été condamnés à payer une certaine somme au crédit-bailleur par un arrêt du 27 mars 2002, M. et Mme X... ont introduit un recours en révision à la suite de la condamnation pénale de M. Z... et de M. Y... ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la Foncière fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable le recours en révision, alors, selon le moyen :

1°/ que le recours en révision est ouvert s'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; qu'en estimant que la Foncière avait commis une fraude au sens de ce texte dans le cadre de l'instance ayant abouti à l'arrêt rendu le 27 mars 2002, dès lors qu'il apparaissait à la lecture d'un jugement rendu par le tribunal correctionnel de Nanterre le 13 septembre 2002 que "l'opération de crédit-bail s'inscrit dans le cadre d'un vaste système frauduleux mis en place par le franchiseur Z... et le représentant de la Foncière, D. Pineau, qui a abouti à leur condamnation pénale", cependant que le juge pénal avait à l'inverse considéré que la Foncière était la victime et non l'instigatrice ou la complice de l'escroquerie et qu'au contraire les franchisés se trouvaient être les bénéficiaires du système frauduleux mis à jour, qu'ils connaissaient parfaitement, la cour d'appel, qui a d'ailleurs elle-même constaté que les franchisés bénéficiaient des rétrocessions frauduleuses, n'a pas caractérisé la fraude imputée à la Foncière et a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 595, 1° du code de procédure civile ;

2°/ qu'en constatant successivement que le mécanisme frauduleux révélé par l'instruction pénale permettait à la société Impact de rétrocéder aux franchisés, sous forme d'avoir, une partie de ces sommes, ce qui leur permettait de disposer d'un fonds de roulement pour régler diverses dépenses lors de l'ouverture des magasins, puis que M. et Mme X... ont été, comme les autres franchisés, victimes du système frauduleux mis en place, longuement exposé par le tribunal correctionnel, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs irréductible et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en affirmant que la fraude de la Foncière s'évinçait de la décision du juge pénal ayant établi que l'opération de crédit-bail s'inscrivait "dans le cadre d'un vaste système frauduleux mis en place par le franchiseur Z... et le représentant de la Foncière, D. Pineau, qui a abouti à leur condamnation pénale", ce dont elle a déduit que la Foncière se trouvait impliquée dans le système de surfacturation frauduleux, cependant que le juge pénal avait expressément souligné que les délits imputables à M. Y... avaient été commis au préjudice des sociétés Eurobail et Foncière, la cour d'appel a dénaturé la décision du juge pénal et a violé l'article 4 du code de procédure civile et l'article 1134 du code civil ;

4°/ que dans ses conclusions d'appel, la Foncière faisait valoir que M. et Mme X... étaient parfaitement au courant de cette surfacturation, ce que révélaient leurs écritures de première instance déposées le 19 août 1996 devant le tribunal de grande instance d'Agen ; que cette connaissance qu'avaient M. et Mme X... du mécanisme frauduleux a été confirmée par le juge pénal, qui a notamment relevé que les franchisés étaient "parfaitement au courant des procédés de surfacturation" ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher si M. et Mme X... ne connaissaient pas en réalité les éléments dont ils ont ensuite prétendu qu'ils avaient été dissimulés dans le cadre de la procédure ayant abouti à l'arrêt du 27 mars 2002, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 595, 1° du code de procédure civile ;

5°/ qu'en estimant que la fraude de la Foncière se trouvait avérée, tout en ne retenant finalement à l'encontre de celle-ci qu'un simple manquement à son devoir de conseil et d'information, cependant qu'à supposer établi ce manquement, le silence gardé sur ce point par la Foncière au cours de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 27 mars 2002 n'était pas de nature à constituer une fraude au sens de l'article 595, 1° du code de procédure civile, la cour d'appel a violé ce texte ;

Mais attendu qu'ayant retenu que M. Y... a été reconnu coupable d'avoir, en sa qualité de dirigeant de la société de crédit-bail et en connaissance de cause, payé des factures constatant des travaux d'aménagement partiellement ou totalement fictifs, que les factures du 8 juillet 1989 et du 22 septembre 1989 communiquées devant la cour d'appel seulement en juin 1999, portent une mention "bon pour accord" et une signature dont l'écriture n'est manifestement pas celle de M. et Mme X... et ont donné lieu à une acceptation frauduleuse, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, la dissimulation frauduleuse par la société de crédit bail, dans le premier procès civil, de la connaissance qu'elle avait nécessairement, par son dirigeant pénalement condamné, des surfacturations pratiquées au préjudice des preneurs, et a procédé à la recherche prétendument omise en constatant que la décision pénale avait permis à M. et Mme X... d'établir cette dissimulation, a, abstraction faite du motif surabondant critiqué à la première branche, et sans dénaturation ni contradiction, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la Foncière reproche à l'arrêt d'avoir dit que sa responsabilité envers M. et Mme X... était engagée, d'avoir fixé le préjudice de ces derniers à la somme principale de 592 897,32 euros, d'avoir ordonné la compensation entre cette somme et la condamnation du même montant prononcée contre eux, et de l'avoir en outre condamnée à leur payer la somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts complémentaires, alors, selon le moyen :

1°/ que méconnaît ses obligations l'établissement financier qui, ayant sur l'absence de réalisme du projet d'installation du franchisé des informations dont ce dernier ne dispose pas, s'abstient de les lui communiquer; qu'en considérant que la Foncière avait manqué à son obligation d'information et de conseil en n'avertissant pas M. et Mme X... du poids des loyers rendu exorbitant en raison de factures de travaux surévalués ou non causés, tout en constatant que l'instruction pénale avait établi que ce système de surfacturation permettait en réalité au franchiseur de rétrocéder aux franchisés les sommes ainsi détournées au préjudice des sociétés de crédit-bail, ce dont il s'évinçait nécessairement qu'il ne pouvait être reproché à la Foncière de n'avoir pas informé M. et Mme X... de l‘existence d'un système frauduleux dont elle ignorait l'existence à l'époque et dont elle a été la victime, cependant que les franchisés, qui connaissaient parfaitement ce système pour en être les bénéficiaires, sont eux-mêmes restés muets, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1147 du code civil ;

2°/ qu'en affirmant que la Foncière ne pouvait se prévaloir du fait que les franchisés avaient bénéficié des rétrocessions issues des surfacturations de travaux, dès lors que ce système avait été mis en place de concert avec le franchiseur et M. Y..., ancien dirigeant de la Foncière, cependant que le juge pénal avait expressément souligné que les délits imputables à M. Y... avaient été commis au préjudice des sociétés Eurobail et Foncière, de sorte que le sort de M. Y... ne pouvait être assimilé à celui de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que la Foncière a manqué à ses obligations contractuelles, notamment de conseil et d'information, d'abord en ne procédant ni à une étude financière sérieuse du projet des franchisés, ni à une étude d'implantation, ni à une vérification du patrimoine de M. et Mme X..., ensuite en omettant de suivre les procédures de contrôle élémentaires applicables aux établissements financiers, enfin en mettant à la charge de M. et Mme X... un loyer qui s'est avéré exorbitant en raison des factures de travaux surévaluées ou non causées ; que l'arrêt retient encore que le système de surfacturation mis en place de concert entre le franchiseur et le représentant de la société de crédit-bail immobilier, pour permettre aux franchisés, démunis d'apports, de disposer d'un fonds de roulement lors de l'ouverture des magasins, ne permettait pas à M. et Mme X... d'exercer effectivement les pouvoirs de maître d'ouvrage que le contrat leur déléguait ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société foncière et financière Monceau aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. et Mme X... la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me A..., avocat aux Conseils pour la société foncière et financière Monceau.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable le recours en révision formé contre l'arrêt du 27 mars 2002 ;

AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article 595, 1°, du nouveau Code de procédure civile, le recours en révision, qui peut être exercé pendant l'instance en cassation, est ouvert s'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; qu'il ressort des motifs du jugement du Tribunal correctionnel de NANTERRE, ci-après exposés, que l'opération de crédit-bail s'inscrit dans le cadre d'un vaste système frauduleux mis en place par le franchiseur B... et le représentant légal de la Société PYRAMIDES BAIL, D. Y..., qui a abouti à leur condamnation pénale ; que Monsieur et Madame X... ont été, comme les autres franchisés, victimes du système frauduleux mis en place, longuement exposé par le tribunal correctionnel, et constituant le fait nouveau justifiant l'ouverture du recours en révision ; qu'en ne procédant ou faisant procéder à aucune étude financière sérieuse du projet des franchisés, à aucune étude d'implantation, à aucune vérification du patrimoine personnel des candidats, en ne suivant pas les procédures de contrôle élémentaires applicables aux établissements financiers, en se désintéressant de la viabilité du projet, et en mettant ensuite à la charge des franchisés un loyer qui s'est avéré exorbitant en raison de factures de travaux surévalués ou non causées, la société a gravement manqué à l'ensemble de ses obligations professionnelles, notamment de conseil et d'information ; qu'elle fait vainement valoir que les époux X... ont bénéficié, grâce aux surfacturations, d'une rétrocession d'avoirs, reconnues dans leur plainte du 19 août 1993, dès lors que ce système avait été mis en place de concert avec le franchiseur et par son propre représentant, D. Y..., pour permettre aux franchisés, démunis d'apport, de disposer d'un fonds de roulement lors de l'ouverture du magasin ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE le recours en révision est ouvert "s'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue" ; qu'en estimant que la Société MONCEAU MURS, venant aux droits de la Société PYRAMIDES BAIL, avait commis une fraude au sens de ce texte dans le cadre de l'instance ayant abouti à l'arrêt rendu le 27 mars 2002, dès lors qu'il apparaissait à la lecture d'un jugement rendu par le Tribunal correctionnel de NANTERRE le 13 septembre 2002 que "l'opération de crédit-bail s'inscrit dans le cadre d'un vaste système frauduleux mis en place par le franchiseur B... et le représentant de la société PYRAMIDES BAIL, D. Y..., qui a abouti à leur condamnation pénale" (arrêt attaqué, p. 8 in fine), cependant que le juge pénal avait à l'inverse considéré que la Société PYRAMIDES BAIL était la victime et non l'instigatrice ou la complice de l'escroquerie et qu'au contraire, les franchisés se trouvaient être les bénéficiaires du système frauduleux mis à jour, qu'ils connaissaient parfaitement, la cour d'appel, qui a d'ailleurs elle-même constaté que les franchisés bénéficiaient des rétrocessions frauduleuses (arrêt attaqué, p. 10 in fine), n'a pas caractérisé la fraude imputée à la Société MONCEAU MURS et a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 595, 1°, du Code de procédure civile ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QU'en constatant successivement que le mécanisme frauduleux révélé par l'instruction pénale "permettait à la société IMPACT de rétrocéder aux franchisés, sous forme d'avoir, une partie de ces sommes, ce qui leur permettait de disposer d'un fonds de roulement pour régler diverses dépenses lors de l'ouverture des magasins" (arrêt attaqué, p. 10 in fine), puis que "Monsieur et Madame X... ont été, comme les autres franchisés, victimes du système frauduleux mis en place, longuement exposé par le tribunal correctionnel" (arrêt attaqué, p. 11 § 4), la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs irréductible et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QU'en affirmant que la fraude de la Société MONCEAU MURS, venant aux droits de la Société PYRAMIDES BAIL, s'évinçait de la décision du juge pénal ayant établi que l'opération de crédit-bail s'inscrivait "dans le cadre d'un vaste système frauduleux mis en place par le franchiseur B... et le représentant de la société PYRAMIDES BAIL, D. Y..., qui a abouti à leur condamnation pénale" (arrêt attaqué, p. 8 in fine), ce dont elle a déduit que la Société PYRAMIDES BAIL se trouvait impliquée dans le système de surfacturation frauduleux (arrêt attaqué, p. 12 § 1), cependant que le juge pénal avait expressément souligné que les délits imputables à Monsieur Y... avaient été "commis au préjudice des sociétés EUROBAIL et PYRAMIDES BAIL" (jugement du 13 septembre 2002, p. 63 § 8), la cour d'appel a dénaturé la décision du juge pénal et a violé l'article 4 du Code de procédure civile et l'article 1134 du Code civil ;

ALORS, EN QUATRIEME LIEU, QUE dans ses conclusions d'appel (signifiées le 19 mars 2007, p. 15 § 4 à 6), la Société FONCIERE ET FINANCIERE MONCEAU faisait valoir que "Monsieur et Madame X... étaient parfaitement au courant de cette surfacturation", ce que révélaient leurs écritures de première instance déposée le 19 août 1996 devant le Tribunal de grande instance d'AGEN ; que cette connaissance qu'avaient les époux X... du mécanisme frauduleux a été confirmée par le juge pénal, qui a notamment relevé que les franchisés étaient "parfaitement au courant des procédés de surfacturation" (jugement du tribunal correctionnel du 13 septembre 2002, p. 33 § 5) ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher si Monsieur et Madame X... ne connaissaient pas en réalité les éléments dont ils ont ensuite prétendu qu'ils avaient été dissimulés dans le cadre de la procédure ayant abouti à l'arrêt du 27 mars 2002, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 595, 1°, du Code de procédure civile ;

ET ALORS, EN DERNIER LIEU, QU'en estimant que la fraude de la Société MONCEAU MURS se trouvait avérée, tout en ne retenant finalement à l'encontre de celle-ci qu'un simple manquement à son devoir de conseil et d'information (arrêt attaqué, p. 12 § 1), cependant qu'à supposer établi ce manquement, le silence gardé sur ce point par la Société MONCEAU MURS au cours de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 27 mars 2002 n'était pas de nature à constituer une fraude au sens de l'article 595, 1°, du Code de procédure civile, la cour d'appel a violé ce texte.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la Société FONCIERE ET FINANCIERE MONCEAU avait engagé sa responsabilité envers Monsieur et Madame X..., d'avoir fixé le préjudice de ces derniers à la somme principale de 592.897,32 , d'avoir ordonné la compensation entre cette somme et la condamnation du même montant prononcée contre eux, et d'avoir en outre condamné la Société FONCIERE ET FINANCIERE MONCEAU à leur payer la somme de 60.000 à titre de dommages et intérêts complémentaires ;

AUX MOTIFS QU' il résulte du jugement rendu le 13 septembre 2002 par le Tribunal correctionnel de NANTERRE, devant lequel ont comparu dix prévenus, et de l'arrêt de la Chambre correctionnelle de la Cour d'appel de VERSAILLES du 26 mai 2004, frappé d'un pourvoi en cassation rejeté le 16 novembre 2005 : - que les sociétés EUROBAIL et PYRAMIDES BAIL, qui pratiquaient des opérations de crédit-bail immobilier, avaient été contactées par un groupe important, dit VIEUX CHENE, dont les frères B... étaient les dirigeants, pour financer l'implantation de magasins de meubles et de literie sur l'ensemble du territoire national par des sociétés ou commerçants avec lesquels ils avaient passé des contrats de franchise ; - que de 1989 à 1992, plus de 300 contrats de crédit-bail immobiliers ont été consentis aux franchisés ; que l'historique du présent contrat correspond exactement au schéma décrit par le tribunal correctionnel ; que Dominique Y..., directeur général des deux sociétés, procédait à l'instruction des dossiers de crédit-bail mais ne pratiquait aucune sélection, ne procédait à aucune vérification sur le site d'implantation du magasin, sur le patrimoine personnel des candidats, pourtant cautions du paiement des loyers, ne soumettait les projets à aucun examen sérieux et que la quasi-totalité des candidats a été acceptée sans contrôle et sans intervention du comité d'engagement ; - que la Société IMPACT s'était vue confier la maîtrise d'oeuvre et la coordination des travaux d'aménagement de la quasi-totalité des magasins des franchisés ; qu'elle centralisait les factures des entreprises sous-traitantes ayant réalisé les travaux et les transmettait à une société du groupe VIEUX CHENE, où elles étaient revêtues d'une mention "bon pour accord" censée émaner des franchisés alors qu'elles étaient en réalité signées par des salariés de la société et n'étaient réellement signés par les franchisés que quelques jours ou semaines plus tard et étaient ensuite transmises par Pierre B... à Dominique Y..., directeur général ; que les deux sociétés de crédit-bail réglaient immédiatement les factures à la Société IMPACT sans aucun contrôle, étant précisé qu'elles ne disposaient pas de salariés propres mais utilisaient des cadres d'une Société COGEREP (dont Monsieur Y... était également directeur général et actionnaire) ; - que l'instruction a permis d'établir que le coût des travaux était évalué en moyenne au double de leur valeur réelle ou était parfois purement fictif ; que ce système permettait à la Société IMPACT de rétrocéder aux franchisés, sous forme d'avoirs, une partie de ces sommes, ce qui leur permettait de disposer d'un fonds de roulement pour régler diverses dépenses lors de l'ouverture des magasins ; - que Pierre B... a été reconnu coupable d'avoir, notamment, fait des faux en écritures privées de commerce ou de banque, en établissant des devis surévalués, des factures surévaluées ou non causées, en signant ou faisant signer pour acceptation des factures au lieu et place des personnes dont l'acceptation était requise ; que Dominique Y... a été reconnu coupable d'avoir sciemment recelé des faux en écriture privée, notamment par dissimulation, détention, transmission de factures émises par la Société IMPACT sur les SA EUROBAIL et PYRAMIDES BAIL qu'il savait falsifiées par apposition de "bon pour" et de signatures n'émanant pas des bénéficiaires supposés des travaux d'aménagement facturés, et de s'être rendu complice par aide ou assistance, notamment en acceptant de payer des factures émises sur les sociétés EUROBAIL et PYRAMIDES BAIL par la Société IMPACT constatant des travaux d'aménagement qu'il savait surfacturés et partiellement ou totalement fictifs, des escroqueries reprochées à Pierre B... ; que par ses fonctions de directeur général et de mandataire social, il a engagé la responsabilité de la SA PYRAMIDES BAIL envers Monsieur et Madame X... ; qu'enfin, les dirigeants de la Société IMPACT ont également été poursuivis et condamnés ; que Monsieur et Madame X... ont été, comme les autres franchisés, victimes du système frauduleux mis en place, longuement exposé par le tribunal correctionnel et constituant le fait nouveau justifiant l'ouverture du recours en révision ; que, notamment, les factures du 8 juillet 1989 (593.000 F) et du 22 septembre 1989 (1.977.382,22 F et 3.605.440 F) présentant un total HT de 5.207.270 F et communiquées seulement devant la cour en juin 1999, portent une mention "Bon pour accord" et une signature dont, manifestement, l'écriture n'est pas la leur et ont donné lieu à une acceptation frauduleuse ; que le système n'a pas permis aux époux X..., d'ailleurs profanes en la matière, d'exercer effectivement les pouvoirs de maître de l'ouvrage que le contrat leur déléguait ; que le coût initial total prévu était de 3.900.000 F ; que le montant du supplément de travaux accepté le 5 octobre 1989 par Monsieur X... demeure ignoré ; que, par suite des fausse factures et surfacturations, le compte d'établissement, base de calcul du loyer, a atteint plus de 9.750.000 F ; que le loyer mis à leur charge a ainsi augmenté dans des proportions démesurées et qu'ils se sont trouvés très rapidement dans l'incapacité de faire face à leurs obligations ; que les époux X... font valoir à juste titre que la société a gravement manqué à ses obligations contractuelles ; que cette dernière a communiqué en février 2006, soit 17 ans après la conclusion du contrat, une étude de marché sur la zone de VILLENEUVE SUR LOT et des comptes d'exploitation pour les deux magasins (ameublement et literie), mais que ces documents, sommaires et qui ne comportent ni nom, ni date, ni signature, n'établissent nullement que le dossier des époux X... ait été traité différemment des autres ; qu'en ne procédant ou faisant procéder à aucune étude financière sérieuse du projet des franchisés, à aucune étude d'implantation, à aucune vérification du patrimoine personnel des candidats, en ne suivant pas les procédures de contrôle élémentaires applicables aux établissements financiers, en se désintéressant de la viabilité du projet, et en mettant ensuite à la charge des franchisés un loyer qui s'est avéré exorbitant en raison de factures de travaux surévalués ou non causées, la société a gravement manqué à l'ensemble de ses obligations professionnelles, notamment de conseil et d'information ; qu'elle fait vainement valoir que les époux X... ont bénéficié, grâce aux surfacturations, d'une rétrocession d'avoirs, reconnues dans leur plainte du 19 août 1993, dès lors que ce système avait été mis en place de concert avec le franchiseur et par son propre représentant, D. Y..., pour permettre aux franchisés, démunis d'apport, de disposer d'un fonds de roulement lors de l'ouverture du magasin ;

ALORS, D'UNE PART, QUE méconnaît ses obligations l'établissement financier qui, ayant sur l'absence de réalisme du projet d'installation du franchisé des informations dont ce dernier ne dispose pas, s'abstient de les lui communiquer ; qu'en considérant que la Société PYRAMIDES BAIL avait manqué à son obligation d'information et de conseil en n'avertissant pas Monsieur et Madame X... du poids des loyers, rendu "exorbitant en raison de factures de travaux surévalués ou non causés" (arrêt attaqué, p. 12 § 1), tout en constatant que l'instruction pénale avait établi que ce système de surfacturation permettait en réalité au franchiseur de rétrocéder aux franchisés les sommes ainsi détournées au préjudice des sociétés de crédit-bail (arrêt attaqué, p. 10 in fine), ce dont il s'évinçait nécessairement qu'il ne pouvait être reproché à la Société PYRAMIDES BAIL de n'avoir pas informé Monsieur et Madame X... de l'existence d'un système frauduleux dont elle ignorait l'existence à l'époque et dont elle a été la victime, cependant que les franchisés, qui connaissaient parfaitement ce système pour en être les bénéficiaires, sont eux-mêmes restés muets, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1147 du Code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en affirmant que la Société FONCIERE ET FINANCIERE MONCEAU ne pouvait se prévaloir du fait que les franchisés avaient bénéficié des rétrocessions issues des surfacturations de travaux, dès lors que ce système avait été mis en place de concert par le franchiseur et Monsieur Y..., ancien dirigeant de la Société PYRAMIDES BAIL (arrêt attaqué, p. 12 § 1), cependant que le juge pénal avait expressément souligné que les délits imputables à Monsieur Y... avaient été "commis au préjudice des sociétés EUROBAIL et PYRAMIDES BAIL" (jugement du 13 septembre 2002, p. 63 § 8), de sorte que le sort de Monsieur Y... ne pouvait être assimilé à celui de la Société PYRAMIDES BAIL, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 07-18313
Date de la décision : 10/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 15 mai 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 mar. 2009, pourvoi n°07-18313


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.18313
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