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25/02/2009 | FRANCE | N°07-42963

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 février 2009, 07-42963


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Auctionspress le 1er septembre 1975 ; que, par lettre-contrat du 12 juillet 1984, les parties sont convenues qu'elle devenait, à sa demande, journaliste-collaboratrice extérieure chargée de l'article hebdomadaire des ventes futures de province ; qu'en arrêt de travail pour maladie du 26 mai 2004 au 23 juin 2006, elle a été déclarée inapte définitive à son poste par le médecin du travail à l'issue d'un examen de reprise, sans deuxième visite en raison du danger immédiat ; qu'ayant été licenciée le

19 octobre 2006, pour inaptitude physique et impossibilité de reclassem...

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Auctionspress le 1er septembre 1975 ; que, par lettre-contrat du 12 juillet 1984, les parties sont convenues qu'elle devenait, à sa demande, journaliste-collaboratrice extérieure chargée de l'article hebdomadaire des ventes futures de province ; qu'en arrêt de travail pour maladie du 26 mai 2004 au 23 juin 2006, elle a été déclarée inapte définitive à son poste par le médecin du travail à l'issue d'un examen de reprise, sans deuxième visite en raison du danger immédiat ; qu'ayant été licenciée le 19 octobre 2006, pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier et le deuxième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 122-24-4, alinéa 1, devenu L. 1226-2 du code du travail ;
Attendu que pour décider que le licenciement est fondé sur une cause réelle est sérieuse, et débouter la salariée de sa demande en paiement d'indemnités, l'arrêt retient que la lettre de licenciement fait référence non seulement à l'inaptitude définitive au poste notifiée par le médecin du travail dans son avis du 5 septembre 2006, mais aussi à l'inaptitude définitive et totale à tous postes dans l'entreprise sans préconisation, indiquée par ce médecin le 13 septembre, que la société a donc bien cherché une solution de reclassement après l'avis d'inaptitude du 5 septembre, que dans ce dernier avis, il était préconisé une recherche dans le groupe, or la société justifie de sa recherche infructueuse auprès des autres sociétés ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'employeur avait recherché une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformation de postes ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives au licenciement, l'arrêt rendu le 3 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Auctionspress aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Auctionspress à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille neuf.
Moyens annexés au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de Mme X... en paiement d'un rappel de salaires et dit que sa rémunération mensuelle était de 3 443, 70 ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de la lettre du 12 juillet 1984, Mme X... était employée en qualité de journaliste-collaboratrice extérieure (coefficient 133 inchangé) chargée de l'article des « ventes futures de province » ; QU'il n'est pas fait référence à un horaire de travail, mais seulement à la rédaction de l'article précité ; QUE s'il existe un débat sur la charge de travail, celle-ci n'a jamais été quantifiée en nombre d'heures par les parties, ni dans la lettre du 12 juillet 1984, ni dans d'autres écrits ; que cette discussion est intervenue après que le conflit soit né pour d'autres raisons ; QUE cet article constituait l'unique prestation de Mme X... au profit de la société qui la rémunérait en outre sous forme de droits d'auteurs forfaitaires pour toute exploitation secondaire (convention du 15 mai 2000) du même travail ; QU'il résulte des termes mêmes de la lettre du 12 juillet 1984 que Mme X... rédigeait le même article qu'auparavant, à l'époque où elle était rémunérée à plein temps ; QU'elle a accepté une réduction de rémunération en échange d'un passage à temps partiel et ne s'en est pas émue pendant 20 ans ; QUE la rémunération n'était donc pas la contrepartie du temps passé mais celle le la production intellectuelle ; QUE la notion de durée de travail ne figure que sur les bulletins de paye, et a pu être fixée à 112 h 75 puis 120 h le mois suivant-jusqu'en décembre 1990, puis 169 h en 1991, avant de revenir à 120 h pendant le litige, sans aucune incidence sur les émoluments et sans changement de travail ; QU'à la lecture des pièces du dossier les bulletins de salaire étaient rédigés à la main jusqu'en décembre 1990, et c'est à l'occasion d'une première informatisation de la paye qu'on voit apparaître la mention 169 heures, qui sera toujours reprise jusqu'à la naissance du conflit ; QU'il n'est ni établi, ni même soutenu, que les parties aient eu des discussions contractuelles lors de ce changement de janvier 1991 ; QUE Mme X... met en parallèle, d'une part la moyenne des ventes par numéro (56, 19 en 1997, 48, 71 en 2004) d'autre part celle de 1984 (34 ventes) ; Mais QU'elle n'opère pas de comparaison entre les ventes de 1990, année qui ne fait l'objet d'aucune discussion, et celles de 1991, or il ressort de ses pièces que cette moyenne était respectivement de 43, 7 et 46, 7, soit un taux d'augmentation sans commune mesure avec les 169 / 120 invoqués ; qu'encore une fois il n'est fait état d'aucune discussion sur la charge de travail à l'époque ; QU'enfin passé le temps d'adaptation, l'application des balises d'imprimeries constitue un automatisme chez les professionnels de l'écrit et n'est pas de nature à augmenter la charge de travail ; QU'enfin, il n'est nullement démontré que l'usage du logiciel X Press et l'utilisation de l'intranet aient accru cette charge, bien au contraire ; qu'en tout état de cause, ces méthodes de transmission présentent un caractère secondaire par rapport à la charge d'écriture et de recherche documentaire ; QUE dans ces conditions, la rémunération convenue présentait un caractère forfaitaire, et que le changement de mention lors de l'informatisation de la paye en janvier 1991 n'a aucun lien avec la charge de travail ou les conventions des parties ; que dès lors, ce travail et la rémunération forfaitaire étant restés les mêmes tout au long de la relation contractuelle, rien ne justifie que la rémunération soit réévaluée en référence à un plein temps ; QUE le jugement sera réformé, et Mme X... déboutée de sa demande de rappel de salaires ; qu'il convient de fixer la dernière rémunération mensuelle à la somme de 3 443, 70 ;
1) ALORS QUE l'employeur n'est pas admis à faire valoir que les mentions du bulletin de salaire qu'il a lui-même établi sont erronées ; que dès lors qu'il était constant qu'à partir de 1991, les bulletins de salaire avaient mentionné une durée de 169 heures et non plus de 120, sans modification de la rémunération globale, il était établi que l'employeur avait modifié le taux horaire de la rémunération ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 143-3, L. 143-4 et R. 143-2 du code du travail ;
2) ALORS QUE subsidiairement, c'est à l'employeur qu'il incombe de prouver que les mentions qu'il a lui-même portées sur le bulletin de salaire, relativement au temps de travail et au montant de la rémunération, sont erronées ; que dès lors, la cour d'appel, qui a fait peser sur la salariée la charge de prouver que son temps de travail avait effectivement augmenté en 1991 sans augmentation corrélative de la rémunération, alors que cette augmentation de l'horaire était mentionnée sur les bulletins de salaire, a violé les articles L. 143-3, L. 143-4 et R. 143-2 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil ;
3) ALORS QU'en tout état de cause, en cas de litige, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en faisant peser sur la seule salariée la preuve de ce qu'elle avait effectué 120 heures de travail par mois jusqu'en 1991 puis 169 heures ensuite, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 212-1-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Mme X... en paiement de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail :
AUX MOTIFS QUE le statut de journaliste professionnel de Mme X... n'est pas contesté ; QUE ses fonctions ne correspondent à aucun des emplois classés au coefficient 133 de la convention collective des journalistes : son travail était isolé et limité à un seul type d'article, ce qui interdit toute assimilation à celui d'un chef de rubrique, ou d'une secrétaire de rédaction ; QU'elle exerçait bien les fonctions de rédacteur spécialisé au sens de la convention collective des journalistes ; QUE cependant la lettre du 12 juillet 1984 confirme le coefficient 133 qu'elle avait antérieurement, et qu'il s'agit là d'une garantie contractuelle ; QU'en cela c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a ordonné la remise de bulletins de salaire mentionnant ce coefficient et non le coefficient 105 ; QUE, s'agissant de la dénomination, la lettre de 1984 ne donne pas valeur contractuelle à la dénomination, et que les termes de journaliste et de collaboratrice extérieure sont des références à des notions usuelles qui ne correspondent pas à un emploi défini ; QUE dans ces conditions, l'emploi de rédacteur spécialisé étant expressément visé par la convention collective et correspondant au poste de la salariée, celle-ci ne saurait en critiquer l'emploi ; que la société devra lui remettre des bulletins de paye et une attestation d'Assédic conformes à la présente décision, du 1e janvier 2004 jusqu'à la date de la rupture sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard à compter du 31e jour suivant la notification de la présente décision ; QUE Mme X... dénonce la tentative de déstabilisation et les pressions exercées entre le printemps 2004 et la date de rupture du contrat, en liaison avec son refus de travailler au siège, et la longue maladie qui a suivi ; QUE l'examen des pièces révèle les faits suivants :- la modification du titre et du coefficient n'est pas à l'origine du litige ;- c'est seulement la perspective de devoir passer une journée à Paris chaque semaine avec la rédaction qui a cristallisé les oppositions-la nécessité de réunir l'équipe de rédaction et de bénéficier du fonds documentaire de l'entreprise justifiait amplement la demande qui était faite : QUE l'obligation de se déplacer un jour par semaine à Paris ne remettait pas en cause le statut de collaborateur extérieur ;- QU'elle avait accepté en 1984 le principe de dépannages à l'imprimerie et au bureau, donc de tels déplacements – QU'en ce qui concerne la maladie, l'indemnisation de Mme X... a été maintenue par la Société au-delà de ses droits conventionnels, et même s'il s'agissait d'une erreur dont elle s'est aperçue ensuite, elle ne s'est pas montrée déloyale ou brutale envers la salariée ; QU'au terme de cet arrêt de deux ans c'est Mme X..., qui a commis une faute en ne se rendant pas à la convocation de la visite médicale, sans raison valable et sans avertir l'employeur ; QU'elle sera donc déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat ;
ALORS QU'un salarié qui travaille à son domicile à Nantes depuis plus de vingt ans, dont le contrat de travail mentionne qu'il occupe les fonctions de « journaliste collaborateur extérieur » et ne s'est engagé à venir au siège de l'entreprise à Paris que de façon exceptionnelle, ne peut se voir imposer de venir travailler au siège de l'entreprise un jour par semaine, sans aucune indemnité de transport et tandis que la mention de « collaborateur extérieur » est supprimée des bulletins de salaire pour être remplacée par celle de « rédacteur spécialisé » ; que dès lors, en cherchant à imposer de telles modifications du contrat à Mme X..., l'employeur avait exécuté de mauvaise foi le contrat de travail ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de Mme X... en paiement d'indemnités de rupture pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
AUX MOTIFS QUE selon la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, la rupture a été prononcée pour inaptitude physique ; QUE dans cette lettre, il est expressément fait référence à l'inaptitude définitive au poste, notifiée par le médecin du travail dans son avis du 5 septembre 2006, mais aussi à l'inaptitude définitive et totale à tous postes dans l'entreprise sans préconisation, indiquée par ce médecin le 13 septembre ; QUE la société a donc bien cherché une solution de reclassement après l'avis d'inaptitude du 5 septembre ; QUE dans ce courrier du 13 septembre le médecin du travail préconisait une recherche dans le groupe, or la Société justifie de sa recherche infructueuse auprès des autres sociétés (courriers du 15 septembre) ; QUE dans ces conditions, la société Auctionspress s'est acquittée de son obligation de reclassement, et que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse : que la demande de dommages-intérêts doit être rejetée ;

ALORS QUE l'avis du médecin du travail concluant à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail ; que les motifs de l'arrêt, qui se borne, pour juger que l'employeur « a donc bien cherché une solution de reclassement après l'avis d'inaptitude du 5 septembre », à relever que le médecin du travail avait conclu à l'inaptitude définitive et totale à tous postes dans l'entreprise sans préconisation, le 13 septembre, ne permettent pas de déterminer à quelles recherches de reclassement interne l'employeur aurait procédé ; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-24-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-42963
Date de la décision : 25/02/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 03 mai 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 fév. 2009, pourvoi n°07-42963


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.42963
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