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25/02/2009 | FRANCE | N°07-19583

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 février 2009, 07-19583


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Ballande du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Axa Global Risks ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 31 mai 2007), que la société Ballande (le maître de l'ouvrage) a confié à la société Socalet (l'entrepreneur) assurée, par l'intermédiaire de la société Groupe RCB courtier, auprès de la société Uni Europe aux droits de laquelle est venue la société Axa Global Risks, des travaux d'isolation et d'étanchéité de la couver

ture d'un entrepôt; que l'entrepreneur a procédé à la pose, sur la couverture existante...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Ballande du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Axa Global Risks ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 31 mai 2007), que la société Ballande (le maître de l'ouvrage) a confié à la société Socalet (l'entrepreneur) assurée, par l'intermédiaire de la société Groupe RCB courtier, auprès de la société Uni Europe aux droits de laquelle est venue la société Axa Global Risks, des travaux d'isolation et d'étanchéité de la couverture d'un entrepôt; que l'entrepreneur a procédé à la pose, sur la couverture existante constituée de panneaux isolants (plaques Fesco Board), d'une mousse polyuréthanne (produit V Foam N) revêtue d'un épiderme de protection (produit Foam Deck) ; qu'en raison des désordres affectant l'étanchéité réalisée, le maître de l'ouvrage a assigné l'entrepreneur en paiement du coût de sa réfection ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1792 du code civil en sa rédaction applicable en Nouvelle Calédonie ;
Attendu que si l'édifice construit à prix fait, périt en tout ou en partie par le vice de la construction, même par le vice du sol, les architecte et entrepreneur en sont responsables pendant dix ans ;
Attendu que pour condamner l'entrepreneur à payer au maître de l'ouvrage la somme de 2 900 000 francs CFP au titre de la réfection de la surface de la zone affectée par les fuites d'eau, l'arrêt retient que la responsabilité de l'entrepreneur doit être limitée au préjudice résultant pour le maître de l'ouvrage, des désordres constatés par l'expert judiciaire, en l'espèce, l'apparition de fuites d'eau dans l'entrepôt en deux endroits du bâtiment ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le vice affectait l'intégralité du revêtement d'étanchéité réalisé par l'entrepreneur, la cour d‘appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité l'indemnisation de la société Ballande à la somme de 2 900 000 francs CFP, et condamné la société Socalet à lui payer cette somme, l'arrêt rendu le 31 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;
Condamne la société Socalet aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Socalet, la condamne à payer à la société Ballande la somme de 2 500 euros ; condamne la société Ballande à payer à la société Groupe RCB la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du vingt-cinq février deux mille neuf par M. Cachelot conseiller le plus ancien faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Ballande.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir limité à 2.900.000 FCFP la somme allouée à la société Ballande dans le cadre de la garantie décennale des constructeurs et d'avoir condamné la société Socalet à payer à la société Ballande la somme de 2.900.000 FCFP augmentée de la variation de l'indice du coût de la construction entre le 10 juillet 1999 et la date de la présente décision ;
Aux motifs adoptés des premiers juges que nonobstant le petit nombre de fuites avérées et l'absence de trace de rouille sur les tôles, au lieu des fuites, l'expert conclut à une aggravation inéluctable et rapide du phénomène, l'eau ne pouvant que pénétrer de plus en plus la mousse, puis corroder les bacs acier jusqu'à effondrement partiel de la toiture ; qu'en présence des défauts relevés affectant les matériaux mis en oeuvre, spécialement la mousse de polyuréthanne totalement déformée et décollée de la toiture, le tribunal doit, sans méconnaître le caractère préfixe et libératoire du délai décennal, considérer que la ruine de la couverture objet des travaux litigieux était acquise avant l'expiration de ce délai ; que la responsabilité pleine et entière de la société Socalet doit être retenue par le tribunal au titre de la garantie décennale des constructeurs ;
Et aux motifs propres que la requête introductive d'instance mentionne des désordres affectant le système d'étanchéité mis en oeuvre par la société Socalet ; qu'elle ajoute que malgré des interventions et reprises ponctuelles réalisées par la société Socalet, ces désordres se sont aggravés et ont entraîné des infiltrations d'eau dans l'entrepôt, ce qui motive sa demande de remplacement complet du système d'étanchéité ; que l'expert judiciaire a constaté une détérioration de l'épiderme de protection Foam Deck de la mousse polyuréthane sur toute la toiture de l'entrepôt Ballande ; qu'il a indiqué que la détérioration du produit polyuréthane Pur conduisait à l'apparition de fuites d'eau dans l'entrepôt en deux endroits, au niveau de la réception et d'une zone de stockage ; qu'il a également précisé que la surface totale de la toiture était de 8.314 m² ; qu'au cours des débats, il a été indiqué, et non contesté que les désordres affectant l'étanchéité de la toiture, à savoir les infiltrations d'eau, ne concernent qu'une partie de celle-ci, soit une surface approximative de 400 m² ; qu'il n'est pas inutile de rappeler que la société Socalet n'a pas réalisé la toiture de l'entrepôt et que son intervention à la demande de la société Ballande s'est limitée à la réalisation de travaux d'isolation thermique et d'étanchéité sur une structure préexistante, en l'espèce la toiture de l'entrepôt ; que le fait que le système d'étanchéité mis en oeuvre par la société Socalet a été appliqué sur la couverture ou toiture de cet entrepôt étant établi, il ne paraît pas sérieux de lui demander de prendre en charge la reconstruction intégrale de la toiture de cet entrepôt ; que la responsabilité de la société Socalet doit être limitée au préjudice qui en est résulté pour la société Ballande ; que ce préjudice résulte des désordres constatés par l'expert judiciaire, en l'espèce, l'apparition de fuites d'eau dans l'entrepôt en deux endroits du bâtiment (réception et zone de stockage) ; que l'étendue limitée de ces désordres résulte également des procès-verbaux de constat d'huissier versés aux débats ; que la réparation d'un préjudice repose sur le principe de l'équivalence quantitative, selon lequel la réparation du dommage doit être intégrale mais ne peut excéder le montant du préjudice subi ; que selon les chiffres fournis par l'expert judiciaire, le coût de la réfection totale de la toiture de l'entrepôt s'élève à la somme de 58.000.000 FCFP pour une surface totale d'environ 8000 m² ; que sur cette base, la surface de la zone affectée par les fuites d'eau, que la Cour est en mesure d'estimer à 400 m², correspond à 1/20ème de la surface totale de la toiture ; qu'au vu de ces chiffres et données, la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour évaluer le préjudice subi par la société Ballande à la somme de 2.900.000 FCFP ;
ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut méconnaître les termes du litige, tels qu'ils sont fixés par les conclusions respectives des parties ; que la société Ballande réclamait dans ses conclusions d'appel la reprise totale du système d'étanchéité de la toiture, comme l'avait préconisé l'expert judiciaire, qui avait chiffré ces travaux de reprise à 58.000.000 FCFP ; qu'en énonçant qu'il ne paraît pas sérieux de demander à la société Socalet de prendre en charge la reconstruction intégrale de la toiture de cet entrepôt, et que l'expert a chiffré le coût de la réfection totale de la toiture de l'entrepôt à 58.000.000 FCFP, pour limiter la réparation du préjudice subi par la société Ballande du fait du vice affectant l'ensemble du système d'étanchéité de la toiture au coût de reprise des seules parties de cette toiture affectées de fuites d'eau, c'est-à-dire atteintes de désordres affectant leur structure même, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART QUE si l'édifice, construit à prix fait, périt en tout ou en partie par le vice de la construction, les entrepreneurs en sont responsables pendant dix ans et doivent réparer le vice lui-même, et non pas seulement les désordres qui en découlent ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'expert judiciaire a constaté une détérioration générale, sur toute la toiture de l'entrepôt, du système d'étanchéité mis en place par la société Socalet ; qu'en limitant la réparation du dommage causé à la société Ballande par le vice affectant l'intégralité du système d'étanchéité de la couverture de son entrepôt aux seules fuites d'eau existantes, cependant que la société Socalet était tenue de réparer le vice en reprenant l'intégralité du système d'étanchéité de la couverture, la cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil dans sa rédaction applicable en la cause ;
ALORS ENSUITE, et en toute hypothèse, QU'à supposer qu'elle ne couvre pas le vice lui-même, la garantie décennale couvre les conséquences futures des désordres résultant des vices dont la réparation a été demandée au cours de la période de garantie ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'expert judiciaire a constaté une détérioration générale, sur toute la toiture de l'entrepôt, du système d'étanchéité mis en place par la société Socalet, qui a déjà conduit à l'apparition de fuites d'eau en deux endroits, et a conclu à une aggravation inéluctable et rapide du phénomène jusqu'à effondrement partiel de la toiture ; qu'en limitant cependant la réparation du dommage causé à la société Ballande par le vice affectant l'intégralité du système d'étanchéité de la couverture de son entrepôt aux seules fuites d'eau existantes, sans tenir compte des conséquences futures mais inéluctables des désordres résultant de ce vice, la cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil dans sa rédaction applicable en la cause ;
ALORS ENCORE QU'en ne s'expliquant pas sur l'ensemble des désordres constatés par l'expert judiciaire, qui consistaient d'abord en une dégradation générale de l'épiderme de protection Foam Deck de la mousse polyuréthanne sur toute la toiture, dont l'apparition de fuites d'eau dans l'entrepôt en deux endroits n'était qu'une conséquence, la cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil dans sa rédaction applicable en la cause ;
ALORS ENFIN et à titre subsidiaire, QUE les limites du litige étant fixées par les prétentions respectives des parties, le juge ne peut accorder au demandeur moins que ne lui offrait la partie adverse ; que dans ses conclusions d'appel en date du 2 octobre 2006 (p. 2 in fine), la société Socalet sollicitait, dans l'hypothèse où sa garantie décennale serait retenue, que sa dette à ce titre soit limitée à 15 % du montant des travaux de réfection de la toiture du bâtiment de la société Ballande SA ; qu'en limitant à 5 % (soit 1/20) du montant des travaux de réfection de la toiture du bâtiment de la société Ballande la condamnation de la société Socalet au titre de sa garantie décennale, la cour d'appel a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite l'action de la société Ballande dirigée contre la société Groupe RCB ;
Aux motifs adoptés des premiers juges que la société Ballande ne peut invoquer à l'égard de la société Groupe RCB que les règles de la responsabilité extra-contractuelle, puisqu'elle n'a pas été partie à un quelconque contrat conclu avec le courtier ; que la prescription décennale s'applique aux faits de l'espèce ; que le point de départ de la prescription de la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle est la date de la commission de la faute reprochée ; qu'il est constant que la société Ballande fait grief à la société Groupe RCB d'avoir émis, en date du 10 mai 1989, une attestation de nature à induire en erreur ; que cette attestation, selon le tampon figurant sur la copie figurant à la production de pièces initiales de la société Ballande, a été reçue le 20 mai 1988 ; que la prescription n'a pas pu être interrompue, selon les termes des débats, avant le mois de décembre 2000 (date des conclusions de la société Ballande) ; que la prescription est donc acquise à la société Groupe RCB ;
Aux motifs propres que c'est par des motifs pertinents que la cour entend adopter que le premier juge a exactement retenu que la prescription est acquise à la société groupe RCB ;
ALORS QUE les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; qu'en déclarant prescrite l'action en responsabilité extra-contractuelle de la société Ballande à l'encontre de la société Groupe RCB, au motif erroné que le point de départ de la prescription de la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle est la date de la commission de la faute reprochée, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07-19583
Date de la décision : 25/02/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nouméa, 31 mai 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 fév. 2009, pourvoi n°07-19583


Composition du Tribunal
Président : M. Cachelot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Odent, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Nicolaý, de Lanouvelle, Hannotin, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.19583
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