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25/02/2009 | FRANCE | N°06-46077

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 février 2009, 06-46077


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 10 octobre 2006), que M. X... a été engagé le 1er avril 1987 par la société Béton Chantiers du Lot suivant contrat de travail à durée indéterminée en qualité de centraliste ; que par lettre en date du 24 mai 2003, il a été licencié pour faute grave; qu'il a contesté ce licenciement devant la juridiction prud'homale ;

Attendu que la société employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement de M. X... ne reposait

pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamnée à...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 10 octobre 2006), que M. X... a été engagé le 1er avril 1987 par la société Béton Chantiers du Lot suivant contrat de travail à durée indéterminée en qualité de centraliste ; que par lettre en date du 24 mai 2003, il a été licencié pour faute grave; qu'il a contesté ce licenciement devant la juridiction prud'homale ;

Attendu que la société employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement de M. X... ne reposait pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamnée à verser au salarié diverses sommes au titre de la mise à pied, de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement, alors, selon le moyen :

1°/ que la faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat ou des relations de travail d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles le comportement de M. X... rendait « impossible la continuation du travail sans dommages pour l'entreprise », ce qui rendait nécessairement impossible la présence du salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis, et partant caractérisait une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;

2°/ que commet une faute grave le salarié qui, de manière délibérée, détourne une quantité importante de marchandises au préjudice de son employeur et au profit de tiers, en venant sur son lieu de travail pendant ses congés payés et en rédigeant une fausse facture pour masquer ses agissements ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles, alors qu'il se trouvait en congés, M. X... s'était rendu sur son lieu de travail durant la pause déjeuner de son remplaçant, avait fait fabriquer 6 m3 de béton (soit 6 tonnes) qu'il avait fait livrer à un ami, dont 1 m3 en mode automatique, normalement facturé et 5 m3 en mode manuel, sans que cette dernière fabrication ait donné lieu à facturation, ni à paiement, d'où résultait l'existence d'une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;

3°/ que les responsabilités assumées par le salarié, notamment à raison de son ancienneté dans l'entreprise, constituent un facteur aggravant de sa faute, justifiant la rupture immédiate du contrat de travail en cas de manquement délibéré et patent du salarié aux obligations de bonne foi, de loyauté et de probité ; qu'en l'espèce, en omettant de prendre en considération les responsabilités du salarié pour appréhender la gravité de son comportement, et en se fondant au contraire de manière inopérante sur son ancienneté, le caractère « isolé » du comportement fautif incriminé, et l'absence d'avertissement antérieur, éléments qui n'étaient pas de nature à ôter au détournement délibéré, au préjudice de l'employeur, d'une quantité importante de béton son caractère de faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu que si, le 12 mai 2003, alors qu'il se trouvait en situation de congés payés, M. X... s'était rendu sur son lieu de travail et qu'il avait procédé, entre 12 et 14 heures, durant la pause déjeuner de son remplaçant, à la fabrication de 6 m3 de béton qu'il avait fait livrer à un ami, confectionnant, selon le mode automatique, 1 m3 de béton qu'il avait normalement facturé, et selon le mode manuel, 5 m3 et ce, sans qu'aucun impératif technique ne justifie un tel changement dans le procédé de fabrication et sans que cette dernière fabrication n'ait donné lieu à facturation, ne serait-ce qu'à son nom, ni à paiement , de tels agissements émanaient d'un salarié à l'encontre duquel il n'était fait état d'aucun avertissement précédent ni d'aucune mesure disciplinaire qui aurait pu être prononcée antérieurement au licenciement, malgré une présence dans l'entreprise de plus de 16 ans ;

Qu'en l'état de ces constatations, elle a pu estimer, sans encourir les griefs du moyen, que les agissements du salarié ne suffisaient pas à caractériser une faute grave, compte tenu de leur caractère isolé , et,
usant du pouvoir qu'elle tient de l'article L.122-14-3, alinéa 1, phrase 1, et alinéa 2, devenu L.1232-1 et L.1235-1 du code du travail, décider que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Béton Chantiers du Lot aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Béton Chantiers du Lot,

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... ne reposait pas sur une faute grave et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société BETON CHANTIERS DU LOT à verser au salarié les sommes de 458,89 à titre de régularisation sur le salaire dû pendant la mise à pied, 4.200,94 au titre de l'indemnité de préavis et de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférent et de 5.471,96 à titre d'indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE le 12 mai 2003, alors qu'il se trouvait en situation de congés payés, Monsieur X... s'était rendu sur le site de Fumel où il exerçait habituellement les fonctions de centraliste, chargé d'exécuter les tâches de bétonnier et d'assurer des responsabilités complémentaires telles que la prise des commandes, la tenue du planning et la donnée des instructions de livraison et qu'il avait procédé, entre 12 et 14 heures, durant la pause déjeuner de son remplaçant, à la fabrication de 6 m3 de béton qu'il avait fait livrer à un ami, confectionnant, selon le mode automatique, 1 m3 de béton qu'il avait normalement facturé, et selon le mode manuel, 5 m3 et ce, sans qu'aucun impératif technique ne justifie un tel changement dans le procédé de fabrication et sans que cette dernière fabrication n'ait donné lieu à facturation, ne serait-ce qu'à son nom, ni à paiement ; que de tels agissements émanant d'un salarié à l'encontre duquel il n'était fait état d'aucun avertissement précédent ni d'aucune mesure disciplinaire qui aurait pu être prononcée antérieurement au licenciement, malgré une présence dans l'entreprise de plus de 16 ans, ne suffisaient pas à caractériser une faute grave, compte tenu de leur caractère isolé ; qu'ils étaient constitutifs d'une cause à la fois réelle, c'est-à-dire établie, objective et exacte, et suffisamment sérieuse pour rendre impossible la continuation du travail sans dommages pour l'entreprise et justifier le licenciement ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat ou des relations de travail d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles le comportement de Monsieur X... rendait « impossible la continuation du travail sans dommages pour l'entreprise », ce qui rendait nécessairement impossible la présence du salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis, et partant caractérisait une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE commet une faute grave le salarié qui, de manière délibérée, détourne une quantité importante de marchandises au préjudice de son employeur et au profit de tiers, en venant sur son lieu de travail pendant ses congés payés et en rédigeant une fausse facture pour masquer ses agissements ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles, alors qu'il se trouvait en congés, Monsieur X... s'était rendu sur son lieu de travail durant la pause déjeuner de son remplaçant, avait fait fabriquer 6 m3 de béton (soit 6 tonnes) qu'il avait fait livrer à un ami, dont 1 m3 en mode automatique, normalement facturé et 5 m3 en mode manuel, sans que cette dernière fabrication ait donné lieu à facturation, ni à paiement, d'où résultait l'existence d'une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;

ALORS, ENFIN, QUE les responsabilités assumées par le salarié, notamment à raison de son ancienneté dans l'entreprise, constituent un facteur aggravant de sa faute, justifiant la rupture immédiate du contrat de travail en cas de manquement délibéré et patent du salarié aux obligations de bonne foi, de loyauté et de probité ; qu'en l'espèce, en omettant de prendre en considération les responsabilités du salarié pour appréhender la gravité de son comportement, et en se fondant au contraire de manière inopérante sur son ancienneté, le caractère « isolé » du comportement fautif incriminé, et l'absence d'avertissement antérieur, éléments qui n'étaient pas de nature à ôter au détournement délibéré, au préjudice de l'employeur, d'une quantité importante de béton son caractère de faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-46077
Date de la décision : 25/02/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 10 octobre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 fév. 2009, pourvoi n°06-46077


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:06.46077
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