LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie de ce qu'elle se désiste de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Lyon ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Adia, entreprise de travail temporaire a adressé, le 17 mai 2002, à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie (la caisse), une déclaration d'accident du travail, sans formuler de réserves, concernant la chute dont sa salariée, Mme X..., avait été victime, le 15 mai 2002 alors qu'elle était mise à la disposition de la société Découp system ; que la caisse a pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle le 12 juin 2002 ; que la victime a bénéficié d'arrêts de travail au titre de cet accident jusqu'au 9 septembre 2003, date à laquelle son état a été déclaré consolidé conformément à l'avis de son médecin traitant et du médecin-conseil ; qu'à réception de son compte employeur, la société a saisi la juridiction de sécurité sociale d'un recours tendant à ce que les décisions de prise en charge initiale de l'accident et de prise en charge des prolongations d'arrêts de travail lui soient déclarées inopposables ;
Attendu que pour faire droit au recours de la société, l'arrêt retient que nonobstant l'absence de réserves de la part de l'employeur, la caisse avait une obligation d'information concernant les points susceptibles de faire grief et notamment d'assurer le caractère contradictoire de la procédure avant de prendre une décision qui serait opposable à l'employeur, que la caisse a pris sa décision sans donner connaissance à l'employeur des arrêts de travail s'étant succédés postérieurement au certificat initial ainsi que de l'avis du médecin-conseil alors que cet élément a été fondamental dans la décision finale et qu'en outre la caisse n'avait donné aucun délai à l'employeur pour venir consulter le dossier et présenter d'éventuelles observations avant sa prise de décision ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses énonciations que la caisse avait pris sa décision de prendre en charge l'accident dont Mme X... avait été victime, dès le 12 juin 2002, au vu de la seule déclaration d'accident transmise par l'employeur, sans procéder à aucune mesure d'instruction, l'avis du médecin-conseil visé par l'arrêt ne concernant que la fixation de la date de consolidation et ayant été émis postérieurement, de sorte qu'elle n'était pas tenue d'une obligation d'information préalable à sa décision, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Adia aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Adia ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie la somme de 2 250 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boutet, avocat aux Conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la décision de la Commission de Recours Amiable de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de HAUTE-SAVOIE et d'avoir dit inopposable à la Société ADIA la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident du travail dont sa salariée, Madame Suzanne X..., avait été victime le 15 mai 2002 et de ses suites ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la Société ADIA avait transmis à la CPAM de HAUTE-SAVOIE le 17 mai 2002 une déclaration d'accident du travail concernant Madame X... sa salariée ; qu'un certificat médical initial prévoyant un arrêt de travail jusqu'au 5 juin 2002 était joint ; qu'il était constant que la prise en charge au titre de la législation professionnelle avait été accordée le 12 juin 2002 ; que nonobstant l'absence de réserves de la part de l'employeur, la caisse avait une obligation d'information concernant les points susceptibles de faire grief et notamment d'assurer le caractère contradictoire de la procédure avant de prendre une décision qui serait opposable à l'employeur ; que ce dernier devait, dans cette hypothèse, pouvoir connaître les éléments du dossier fondant la décision de la caisse et avoir la possibilité de présenter des observations au soutien de ses intérêts ; qu'en l'espèce la caisse avait pris sa décision sans donner connaissance à l'employeur des pièces du dossier et notamment des arrêts de travail s'étant succédé postérieurement au certificat initial ainsi que de l'avis du médecin conseil ; qu'il ne pouvait être contesté que cet élément avait été fondamental dans la décision finale et que l'employeur devait avoir connaissance de celui-ci afin de voir dans quelle mesure l'accident de sa salariée était susceptible de lui être opposé dans le cadre de la législation professionnelle ; qu'en outre la caisse n'avait donné aucun délai à l'employeur pour venir consulter le dossier et présenter d'éventuelles observations avant sa prise de décision ; qu'en conséquence, la Société ADIA ne pouvait se voir opposer un accident du travail au vu d'une simple déclaration initiale et en l'absence de toute information concernant l'évolution médicale de la salariée et des certificats et avis émis postérieurement à ce titre ; qu'il y avait lieu de confirmer le jugement déféré ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la Société ADIA avait transmis, sans réserves, le 17 mai 2002 à la CPAM de HAUTE-SAVOIE une déclaration selon laquelle sa salariée Madame Suzanne X..., mise à la disposition de la Société DECOUP SYSTEM, avait été le 15 mai 2002 victime d'un accident du travail lui ayant occasionné une fracture de l'épaule droite ; que l'intéressée avait bénéficié d'arrêts de travail jusqu'au 9 septembre 2003 ; que la Société ADIA soutenait qu'elle n'avait été ni informée des conclusions de l'instruction de l'affaire, ni mise en demeure de vérifier la pertinence des arrêts de travail successifs consentis à sa préposée ; que la lecture des pièces montrait que l'organisme n'avait pas fait précéder sa décision de prise en charge d'un avis à l'employeur de venir consulter le dossier dans un délai raisonnable ; qu'il importait, même si l'accident avait été déclaré sans réserves, que l'employeur ait la possibilité de faire valoir ses observations éventuelles avant toute prise de décision ; que la preuve n'était pas rapportée que l'organisme ait communiqué à l'employeur, sur sa demande, l'ensemble des certificats médicaux lui ayant permis de verser des indemnités journalières à Madame X... ; qu'il importait que l'employeur soit mis en mesure de contrôler le bien fondé des arrêts de travail accordés à ses salariés et qu'il puisse, à tout moment, en critiquer le bien fondé, en sollicitant une expertise judiciaire ; que dans ces conditions le Tribunal estimait que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle par la CPAM de HAUTE-SAVOIE de l'accident du travail et de ses suites subi par Madame X..., salariée de la Société ADIA, l'avait été de manière non contradictoire et devait, en conséquence, être déclaré inopposable à cette entreprise ;
ALORS D'UNE PART QUE la caisse primaire d'assurance maladie qui reconnaît le caractère professionnel d'un accident au seul vu de la déclaration d'accident du travail émise sans réserves par l'employeur et du certificat médical initial sans procéder à aucune mesure d'instruction n'est pas tenue d'une obligation d'information préalable ; qu'en décidant que nonobstant l'absence de réserves de l'employeur, la CPAM de HAUTE-SAVOIE était tenue de l'informer des points susceptibles de lui faire grief et d'assurer le caractère contradictoire de la procédure avant toute décision, la Cour d'Appel a violé l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale ;
ALORS D'AUTRE PART QUE dans ses conclusions d'appel, la CPAM de HAUTE-SAVOIE avait fait valoir qu'en l'absence de réserves émises par la Société ADIA, elle avait décidé la prise en charge de l'accident du travail dont Madame X... avait été victime le 15 mai 2002 au seul vu de la déclaration d'accident du travail et du certificat médical initial sans procéder à aucune mesure d'instruction et sans solliciter l'avis du médecin conseil, l'avis du médecin conseil dont la Société ADIA avait fait état en référence à la décision de la Commission de Recours Amiable étant l'avis par lequel le médecin conseil avait fixé la date de consolidation des blessures au 9 septembre 2003 ; qu'en affirmant, pour dire inopposable à la Société ADIA la décision de prise en charge de cet accident et de ses suites, que la CPAM de HAUTE-SAVOIE avait pris sa décision sans donner connaissance à l'employeur des pièces du dossier et notamment de l'avis du médecin conseil, élément fondamental dans la décision finale, sans répondre aux conclusions d'appel de la caisse primaire d'assurance maladie faisant valoir qu'elle avait pris sa décision au seul vu de la déclaration d'accident du travail et du certificat médical initial sans procéder à une mesure d'instruction et contestant avoir recueilli l'avis du médecin conseil sur la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE l'obligation d'information préalable édictée par l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale ne porte que sur l'instruction de la demande de reconnaissance du caractère professionnel d'un accident et non, postérieurement à la décision de prise en charge, sur les éléments médicaux relatifs à la prise en charge des suites de l'accident, de la date de celui-ci jusqu'à la consolidation ou la guérison des blessures ; que la Cour d'Appel qui, pour déclarer la décision de prise en charge de l'accident du travail et de ses suites inopposables à la Société ADIA, a relevé que la CPAM de HAUTE-SAVOIE n'avait pas communiqué à l'employeur les arrêts de travail s'étant succédé après le certificat initial lui ayant permis de verser des indemnités journalières ainsi que l'avis du médecin conseil, a violé derechef les articles L 411-1, L 431-1, L 433-1, L 441-6, R 433-13, R 441-7, R 441-11, R 441-13, R 442-1 et R 442-2 du Code de la Sécurité Sociale.