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12/02/2009 | FRANCE | N°08-11762

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 février 2009, 08-11762


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen relevé d'office, après avertissement donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article 5 du décret n° 70-1277 modifié portant création d'un régime de retraite complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'un agent d'une collectivité territoriale bénéficie du régime de retraite complémentaire qu'il institue, dès lors

qu'il n'est pas affilié pour les mêmes services, au régime spécial de la Caisse nati...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen relevé d'office, après avertissement donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article 5 du décret n° 70-1277 modifié portant création d'un régime de retraite complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'un agent d'une collectivité territoriale bénéficie du régime de retraite complémentaire qu'il institue, dès lors qu'il n'est pas affilié pour les mêmes services, au régime spécial de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été affilié, de 1967 à 2000, au régime complémentaire géré par l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (l'IRCANTEC) à raison de son activité de musicien au sein de l'orchestre de Paris ; qu'il a été parallèlement recruté et titularisé en 1982 en qualité de professeur au sein de l'école nationale de musique de la commune du Raincy et affilié de ce chef auprès de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; qu'ayant demandé en 2000 la liquidation de ses droits à pension auprès de l'IRCANTEC, celle-ci lui a refusé le bénéfice des droits correspondant à la période courant de 1982 à 2000 ; que M. X... a saisi la juridiction civile d'un recours ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. X..., l'arrêt, après avoir rappelé que celui-ci avait exercé parallèlement deux activités distinctes de 1982 à 2000, retient que les dispositions combinées de l'article 59 du décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 modifié relatif au régime de la CNRACL, L. 87 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 5 du décret susvisé s'opposent à ce que celui-ci puisse percevoir une pension de l'IRCANTEC au titre des années pendant lesquelles il était également affilié à la CNRACL ;

Qu'en statuant ainsi alors que les services au titre desquels M. X... était affilié auprès de l'IRCANTEC ne donnaient pas lieu à affiliation auprès de la CNRACL, la cour d'appel a violé par fausse interprétation le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne l'IRCANTEC aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'IRCANTEC, condamne l'IRCANTEC à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes tendant à voir condamner l'IRCANTEC à lui verser une pension de retraite calculée au regard de l'ensemble des cotisations qu'il a versées à cette institution de 1967 à juin 2000,

AUX MOTIFS QUE le tribunal a rejeté les demandes en estimant qu'il n'y avait pas discrimination en l'espèce, le demandeur ne démontrant pas qu'il lui serait fait un sort plus défavorable que celui réservé à des personnes ayant comme lui cumulé un emploi d'agent de collectivité locale et un statut de salarié. ; Que l'appelant critique ce jugement en faisant valoir que le tribunal a retenu une définition trop restrictive de la discrimination qui est contraire à celle de la Cour européenne des droits de l'homme qui considère que la discrimination consiste à traiter de manière différente, sauf justification objective et raisonnable, des personnes placées dans une situation comparable à la définition du Conseil d'Etat qui retient la notion de personnes placées dans une situation analogue. ; qu'il se trouvait malgré le cumul d'emplois dans une situation analogue à celle des autres musiciens salariés de l'Orchestre de Paris qui n'avaient qu'un seul employeur ; que les textes interdisant le cumul et notamment l'article 5 du décret du 23 décembre 1970 modifié ont institué une discrimination entre les salariés affiliés au régime de I'IRCANTEC alors qu'il n'existe aucune justification objective et raisonnable étant précisé que l'interdiction du cumul de plusieurs pensions de retraite pour la même période d'affiliation a été abrogée par l'article 65 de la loi du 21 août 2003- dite loi Fillion-modificative de l'article L. 87 du code des pensions civiles et militaires de sorte qu'il n'existe plus d'obstacle législatif à ce qu'un fonctionnaire territorial occupant par ailleurs un emploi salarié perçoive à la retraite deux pensions de régime différents au titre des mêmes périodes travaillées (dispositions entrées en vigueur le 1er janvier 2004). Que l'IRCANTEC réplique qu'il n'existe aucune discrimination dès lors que toute personne ayant comme monsieur X... cumulé un emploi d'agent de collectivité locale et un statut de salarié se verrait opposer le même refus de cumuler les pensions en application des dispositions légales et réglementaires et que monsieur X... ne démontre ni n'allègue qu'il lui soit fait un sort plus défavorable que celui réservé à des personnes ayant, comme lui, cumulé un emploi d'agent de collectivité locale et un statut de salarié. ; Qu'il n'y a discrimination dans la jouissance d'un droit garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, prise notamment en son article 14 et en l'article 1er de son protocole additionnel, que lorsque est imposé sans justification objective et raisonnable un traitement différent à des personnes se trouvant dans des situations analogues ou comparable ; que les dispositions applicables au jour de l'ouverture des droits à la retraite de monsieur X... à savoir l'article 59 du décret du 9 septembre 1965 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la CNRACL, l'article L. 87 du code des pensions civiles et militaires de retraite et l'article 5 du décret 70-1277 du 23 décembre 1970 modifié relatif au régime de retraite de l'IRCANTEC s'opposaient à ce qu'il puisse percevoir une pension de cet organisme au titre des années pendant lesquelles il était également affilié au régime spécial de la Caisse Nationale de Retraite des Agents des Collectivités Locales. ; que ce refus, opposé dans les conditions précitées, du bénéfice d'une pension de retraite ne constitue pas une discrimination dans la jouissance des droits sociaux dès lors que la règle de non cumul alors en vigueur s'applique à tous les salariés exerçant les mêmes activités dans des conditions semblables et se trouvant de fait dans une situation juridique initiale analogue à la sienne. ; que de ce fait, monsieur X..., qui ne se trouve pas dans une situation analogue ou comparable à celle des autres musiciens de l'Orchestre de Paris ne cumulant pas un autre emploi d'agent de collectivité locale avec leur activité artistique pour l'Orchestre et qui ne démontre pas qu'il se trouve dans une situation plus défavorable que d'autres personnes ayant comme lui cumulé un emploi d'agent de collectivité territoriale et un emploi salarié, ne peut prétendre au bénéfice d'une pension de retraite de la part de l'IRCANTEC pour la période visée à la demande, le fait que les dispositions légales et réglementaires aient été postérieurement modifiées étant sans effet sur sa situation.

ALORS D'UNE PART QUE toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ; que constitue un bien au sens de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme une pension de retraite ; que constitue une discrimination le fait de traiter de manière différente, sans justification objective et raisonnable, des personnes placées dans des situations comparables ; que deux salariés affiliés au titre de leur emploi dans un même régime de sécurité sociale sont placés dans une situation comparable ; que le fait de prendre en considération, pour restreindre le montant des droits à pension résultant de cette première activité, l'exercice parallèle d'une activité relevant d'un autre régime de sécurité sociale, constitue une discrimination prohibée par l'article 14 de la convention européenne des droits de l'homme, faute de justification objective et raisonnable ; qu'en affirmant, pour écarter toute discrimination, que la comparaison ne pouvait pas être opérée entre salariés affiliés au titre d'un même régime de sécurité sociale, mais uniquement entre salariés cumulant deux emplois relevant de deux régimes distincts de pension, la Cour d'appel a utilisé un critère de distinction inadéquat, violant ainsi l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel.

ALORS D'AUTRE PART QUE toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ; que constitue un bien au sens de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme une pension de retraite ; que l'exposant soutenait dans ses conclusions d'appel que les réglementations du régime de retraite de la CNRACL et de l'IRCANTEC avaient eu pour effet de créer une discrimination sans justification objective ni raisonnable entre les salariés qui n'exercent qu'un seul emploi d'une part, et ceux qui cumulent légalement un emploi salarié et un emploi de fonctionnaire territorial d'autre part ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef des conclusions, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-11762
Date de la décision : 12/02/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, REGIMES COMPLEMENTAIRES - Institution de prévoyance - Caisse de retraite complémentaire - Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités locales - Pension - Bénéfice - Condition

SECURITE SOCIALE, REGIMES SPECIAUX - Agents des collectivités locales - Régime de retraite - Régime de retraite complémentaire - Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités locales - Pension - Bénéfice - Condition SECURITE SOCIALE, REGIMES COMPLEMENTAIRES - Institution de prévoyance - Caisse de retraite complémentaire - Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités locales - Pension - Bénéfice - Conditions - Non affiliation pour les mêmes services au régime spécial de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales

Il résulte des dispositions de l'article 5 du décret n° 70-1277 modifié portant création d'un régime de retraite complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques qu'un agent d'une collectivité territoriale bénéficie du régime de retraite complémentaire qu'il institue dès lors qu'il n'est pas affilié, pour les mêmes services, au régime spécial de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales


Références :

article 5 du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 modifié portant création d'un régime de retraite complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 27 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 fév. 2009, pourvoi n°08-11762, Bull. civ. 2009, II, n° 46
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, II, n° 46

Composition du Tribunal
Président : M. Gillet
Rapporteur ?: M. Prétot
Avocat(s) : Me Odent, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.11762
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