LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Rennes, 10 mai 2007) que par contrat du 16 septembre 1998 les époux X... ont confié à la société Huonnic devenue société Maisons Korrigan une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour la construction d'une maison ; que le gros oeuvre et le lot couverture ont été confiés à M. Y..., et le lot menuiseries extérieures à M. Z... ; qu'après expertises, M. X... a assigné les constructeurs en réparation des préjudices résultant des désordres affectant l'ouvrage et de l'inachèvement de celui-ci, que la société Maisons Korrigan a reconventionnellement demandé le paiement du solde des honoraires de maîtrise d'oeuvre ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que, s'ils avaient été prévus et chiffrés par le maître d'oeuvre concepteur, les travaux indispensables à l'achèvement de l'ouvrage et à son utilisation auraient dû être payés par le maître de l'ouvrage, et que celui-ci avait seulement subi, du fait de l'imprécision du descriptif, un préjudice dont il n'avait pas sollicité réparation, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendue omise relative à la responsabilité de la société Maisons Korrigan dans l'omission de ces travaux, et abstraction faite d'un motif surabondant, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté l'insuffisance des réservations, la cour d'appel, qui a souverainement évalué les modalités et le coût des reprises à 200 euros, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen du pourvoi incident, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que M. X... avait subi un préjudice de jouissance lié au retard d'achèvement de l'ouvrage, la cour d'appel a souverainement évalué le montant de l'indemnisation de ce préjudice ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi incident :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour déclarer la société Maisons Korrigan et M. Y... responsables in solidum des désordres concernant les murs de refend, et condamner la société Maisons Korrigan en solidarité, à payer à M. X... une certaine somme au titre de ce désordre, l'arrêt retient qu'il s'agit d'une erreur de réalisation avec une mauvaise surveillance des travaux par le maître d'oeuvre ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser la faute du maître d'oeuvre, qui n'est tenu que d'une obligation de moyen dans l'accomplissement de sa mission, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré la société Maisons Korrigan responsable des désordres concernant les murs de refend, et l'a condamnée à payer à M. X... une certaine somme à ce titre, l'arrêt rendu le 10 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la société Maisons Korrigans la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour M. X... .
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à la condamnation de la société KORRIGAN au paiement de la somme de 5.374,82 au titre des travaux indispensables mais non prévus ;
AUX MOTIFS QU'il est réclamé paiement du coût de travaux indispensables non prévus évalués par l'expert à 5.374,82 alors que le maître d'oeuvre indique qu'ils auraient été facturés en plus ; qu'il s'agit de l'évacuation des eaux pluviales, d'un drain, du raccordement aux eaux usées, du branchement électrique et d'un remblai qui sont indispensables à l'achèvement de l'ouvrage et à son utilisation et qui, s'ils auraient dû être prévus et chiffrés par le maître d'oeuvre concepteur, devaient être payés par le maître de l'ouvrage ; qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un contrat de construction de maison individuelle mais d'une mission de maîtrise d'oeuvre et le maître de l'ouvrage ne peut donc obtenir paiement de cette somme, ayant seulement subi un préjudice du fait de l'imprécision du descriptif, préjudice dont il n'a pas sollicité la réparation ;
1°) ALORS QUE la société KORRIGAN n'invoquait nullement la nature du contrat litigieux pour s'opposer à la demande de Monsieur X... et se bornait à faire valoir qu'il ne lui avait initialement pas été possible de prévoir les travaux indispensables à faire réaliser en supplément, explication que la Cour d'appel a écartée ; que dès lors, en déclarant, pour écarter la demande de réparation de Monsieur X... formulée à l'encontre de la société KORRIGAN du chef de ces travaux supplémentaires non prévus, que le contrat en cause n'était pas un contrat de construction de maison individuelle, sans susciter les observations préalables des parties sur ce point, la Cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire, en violation de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile.
2°) ET ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE ayant relevé que la société KORRIGAN avait omis de prévoir des travaux indispensables à l'achèvement de l'ouvrage et à son utilisation, la Cour d'appel ne pouvait débouter Monsieur X..., maître de l'ouvrage, de sa demande tendant à voir la société KORRIGAN supporter le coût de ces travaux supplémentaires indispensables à la construction de la maison individuelle stipulée par le contrat de maîtrise d'œuvre, sans rechercher si la société KORRIGAN, qui, aux termes de ce contrat, était notamment chargée d'une mission de conception architecturale, n'était pas entièrement responsable de l'omission de ces travaux dont l'expert judiciaire soulignait, sans être en cela contesté par les parties, qu'ils étaient « nécessaires à la réalisation du projet », que la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR limité à la somme de 200 la réparation due à Monsieur X... au titre des réservations insuffisantes ;
AUX MOTIFS QU'il s'agit d'une erreur de réalisation du maçon avec une mauvaise surveillance des travaux par le maître d'œuvre et que ceux-ci seront déclarés responsables in solidum, le coût des reprises étant de 200 sans qu'il soit nécessaire de reprendre les seuils pour 600 ;
ALORS QU'en omettant d'expliquer en quoi les désordres provoqués par les réservations insuffisantes, reconnus par la Cour d'appel, ne justifiaient pas les reprises des seuils pour 600, lors même que le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur A... préconisait cette reprise et que, dans leurs conclusions d'appel respectives, la société KORRIGAN et Monsieur Y... ne faisaient valoir aucun argument mettant en cause la solution ainsi retenue par l'expert A..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.
Moyens produits au pourvoi incident par Me Odent, avocat aux Conseils pour la société Maisons Korrigan.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la SARL MAISONS KORRIGAN responsable in solidum avec Monsieur Y... des désordres concernant les murs de refend et de l'avoir condamnée de ce chef en solidarité à payer à Monsieur X... la somme de 283 euros,
Au motif qu'il s'agit d'une erreur de réalisation du maçon avec une mauvaise surveillance des travaux par le maître d'oeuvre,
Alors qu'en n'expliquant pas en quoi le maître d'oeuvre avait mal surveillé l'exécution des travaux, quand le rapport d'expertise judiciaire affirmait qu'il s'agissait d'un défaut d'exécution isolé apparu en cours de travaux et imputable à la seule entreprise de maçonnerie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la SARL MAISONS KORRIGAN, Monsieur Y... et Monsieur Z... responsables in solidum de la moitié du préjudice de jouissance et d'avoir condamné in solidum de ce chef la SARL MAISONS KORRIGAN et Monsieur Y... à payer à Monsieur X... la somme de 31.500 euros,
Aux motifs que le préjudice de jouissance doit être calculé sur la base de 840 euros par mois de fin mars 2000 à décembre 2005, soit 68 x 840 = 57.120 euros, plus 7 mois de travaux d'achèvement » : 7 x 840 = 5.880 euros, soit 57.120 + 5.880 = 63.000 euros, dont la moitié = 31.500 euros à la charge des constructeurs,
Alors que la réparation du dommage ne peut excéder le montant du préjudice avéré, de telle sorte qu'il ne puisse y avoir pour la victime ni perte ni profit ; qu'en calculant le préjudice lié à l'impossibilité d'habiter l'immeuble sur la base de la valeur locative de l'habitation non achevée, et non du loyer effectivement payé par Monsieur X... pour se loger, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1147 du code civil.