LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a collaboré en tant que journaliste rémunéré à la pige avec la société Prisma presse à compter de septembre 1986, pour les besoins du magazine « Cuisine gourmande » ; qu'il a fait valoir ses droits à la retraite au 30 septembre 2004 ; qu'estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la société Prisma presse et relatif à la qualité de journaliste de M. X..., qui est préalable :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal formé par M. X... :
Vu les articles 22 et 23 de la convention collective nationale des journalistes professionnels ;
Attendu que, pour débouter M. X... de ses demandes de rappel sur primes d'ancienneté et de congés payés afférents, l'arrêt retient que, selon les articles 22 et 23 de la convention collective, les « appointements » constitués par le salaire minimum majoré de la prime d'ancienneté « représentent la somme minimum que chacun doit percevoir pour la durée d'un mois de travail normal » ; qu'il en résulte que la « prime d'ancienneté » n'intervient que comme une majoration du salaire minimal garanti et non pas comme une prime s'ajoutant au salaire quel que soit son montant ; que M. X... ne prétend pas que les piges qui lui étaient versées étaient d'un montant inférieur au tarif minimum de la pige augmentée des majorations pour ancienneté applicable à sa forme de presse, ni même que la rémunération de ses piges ramenée à un salaire horaire a été inférieure au SMIC augmenté de ces mêmes majorations et qu'il n'est fourni ni explications ni pièce en ce sens ;
Attendu, cependant, qu'aux termes des articles 22 et 23 de la convention collective nationale des journalistes professionnels, les salaires correspondant aux qualifications professionnelles doivent être majorés de la prime d'ancienneté, dès lors que les salariés remplissent les conditions d'ancienneté prévues ; que ces appointements représentent la somme minimum que chacun doit percevoir pour la durée d'un mois de travail normal ; qu'il en résulte que la prime d'ancienneté, calculée pour le pigiste par référence au SMIC, s'ajoute au salaire de base de l'intéressé, quel que soit son montant ;
Qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes relatives à la prime d'ancienneté, y compris celle tendant à la remise de bulletins de salaires rectifiés, l'arrêt rendu le 19 décembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Prisma presse aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Prisma presse à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille neuf.
Moyen annexé au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X....
MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes de rappel sur prime d'ancienneté dans la profession et sur prime d'ancienneté dans l'entreprise et de congés payés afférents, et de revalorisation des sommes dues au titre de la participation ;
AUX MOTIFS QUE l'article 22 de la convention collective applicable, relatif aux minima garantis de salaire, prévoit les dispositions suivantes :« En raison de la disparité des catégories d'entreprises de presse, il est convenu que le salaire minimum national et le tarif minimum de la pige sont fixés pour chaque forme de presse. Les grilles hiérarchiques correspondant aux qualifications professionnelles, par forme de presse, sont annexées à la présente convention.Les salaires correspondant à ces qualifications doivent être majorés, s'il y a lieu, de la prime d'ancienneté. Ces appointements représentent la somme minimum que chacun doit percevoir pour la durée d'un mois de travail normal, tel qu'il est défini à l'article 29 de la présente convention.… Toute stipulation de traitement inférieure aux dispositions que prévoient la présente convention et ses annexes sera considérée comme nulle de plein droit.Les accords régissant chaque forme de presse ainsi que les barèmes de salaires correspondants sont annexés à la présente convention » ;
QUE selon l'article 23 concernant la prime d'ancienneté :« Les barèmes minima des traitements se trouvent majorés d'une prime d'ancienneté calculée de la façon suivante :Ancienneté dans la profession en qualité de journaliste professionnel :- 3 % pour cinq années d'exercice ;- 6 % pour dix années d'exercice ;- 9 % pour quinze années d'exercice ;- 11 % pour vingt années d'exercice.Ancienneté dans l'entreprise en qualité de journaliste professionnel :- 2 % pour cinq années de présence ;- 4 % pour dix années de présence ;- 6 % pour quinze années de présence ;- 9 % pour vingt années de présence.Sera considéré comme temps de présence dans l'entreprise, pour le calcul de l'ancienneté, le temps passé dans les différents établissements de l'entreprise » ;
QUE l'annexe fixant les rémunérations minimales des pigistes telle que prévue à l'article 22 ci-dessus n'a pas été établie ;
QUE selon les articles 22 et 23 précités, les « appointements » constitués par le salaire minimum majoré de la prime d'ancienneté « représentent la somme minimum que chacun doit percevoir pour la durée d'un mois de travail normal » ;qu'il en résulte que la « prime d'ancienneté » n'intervient que comme une majoration du salaire minimal garanti et non pas comme une prime s'ajoutant au salaire quel que soit son montant ; que Monsieur X... ne prétend pas que les piges qui lui étaient versées étaient d'un montant inférieur au tarif minimum de la pige augmentée des majorations pour ancienneté applicable à sa forme de presse, ni même que la rémunération de ses piges ramenée à un salaire horaire a été inférieure au SMIC augmenté de ces mêmes majorations et il n'est fourni ni explications ni pièce en ce sens ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses demandes relatives à la prime d'ancienneté, y compris celle tendant à la remise de bulletins de salaire rectifiés ;
ALORS QUE la prime d'ancienneté prévue par l'article 23 de la convention collective des journalistes n'est pas réservée aux seuls journalistes percevant le minimum de traitement prévu au barème ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande de prime d'ancienneté pour la période non prescrite, au motif qu'il n'avait pas prétendu que les piges qui lui étaient versées étaient d'un montant inférieur au tarif minimum de la pige augmentée des majorations pour ancienneté applicable à sa forme de presse, ni que la rémunération de ces piges ramenée à un salaire horaire ait été inférieure au SMIC augmenté de ces mêmes majorations, la Cour d'appel a violé les articles 22, 23 et 27 de la convention collective nationale des journalistes.
Moyen annexé au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Prisma Presse SNC.
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à payer à M. X... la somme de 4.100 euros à titre de prime de départ à la retraite avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes, ainsi que la somme de 1.500 au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « les demandes en paiement de primes d'ancienneté et de départ à la retraite par M. X... sont fondées sur des dispositions de la convention collective nationale des journalistes, laquelle, aux termes de son article 1er "règle les rapports entre les employeurs et les journalistes professionnels, salariés des entreprises, tels qu'ils sont définis à l'article L.761-2 du Code du travail".Selon l'alinéa 1er de l'article L.761-2 du Code du travail, le journaliste professionnel est celui qui a pour occupation régulière et rétribuée l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources. L'article 1 alinéa 1 de la convention collective précitée reprend cette définition.M. X... justifie par la production d'une attestation en date du 25 novembre 2005 du président de la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels (CCIJP) qu'il est titulaire d'une telle carte depuis le 1er janvier 1974 en tant que stagiaire et du 1er juin 1977 en tant que titulaire.Il n'est versé aux débats aucun écrit formalisant les relations entre les parties. Toutefois, celles-ci s'accordent à dire que M. X... collaborait avec la société Prisma presse, entreprise publiant différents magazines périodiques, comme journaliste pigiste exerçant des fonctions de rédacteur, qualité mentionnée sur les "bordereaux de paiement de piges" qui lui étaient délivrés.Il est acquis aux débats que M. X... collaborait avec d'autres entreprises de presse que la société Prisma presse, celle-ci indiquant elle-même qu'il mettait à profit l'absence de clause d'exclusivité entre eux.M. X... fournit ses avis d'imposition à l'impôt sur le revenu et bulletins de paie ou de piges depuis 1982 jusqu'à son départ à la retraite en septembre 2004, dont il résulte, que, conformément au tableau qu'il a établi à partir de ces documents, ses revenus pendant cette période provenaient chaque année pour une proportion de 52% à 99% de son activité de journaliste pour la société Prisma presse ou d'autres sociétés de presse, la moyenne s'établissant à environ 75%.
Il est dès lors suffisamment établi que M. X... avait une activité régulière et rémunérée de journaliste pour le compte de plusieurs publications périodiques et qu'il en tirait l'essentiel de ses ressources. Pendant toute la période considérée et jusqu'à sa retraite, M. X... avait par conséquent la qualité de journaliste professionnel.Aux termes des articles L.761-2 alinéa 4 et L.761-3 du code du travail, toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail ; cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties et toute stipulation contraire à ces dispositions est nulle.Ainsi, le contrat à titre onéreux liant M. X... à la société Prisma presse est présumé être un contrat de travail, au moins depuis septembre 1993 comme le revendique l'appelant, sauf à la société à rapporter la preuve contraire.Alors que la société Prisma presse ne fournit ni explications, ni pièces, permettant de renverser la présomption de salariat bénéficiant à M. X..., celui-ci démontre que, depuis 1994 au moins, il a régulièrement, et pratiquement chaque mois, perçu des rémunérations de la société Prisma presse.En outre, les "bordereaux de paiement" qui lui ont été remis par la société Prisma Presse portent tous la mention d'une fonction de rédacteur et de l'application aux relations entre les parties de la convention collective nationale de travail des journalistes, M. X... bénéficiait d'un treizième mois et de la participation aux résultats de l'entrepriseIl s'ensuit, qu'alors que la société Prisma presse ne produit pas d'éléments probants contraires, les éléments fournis par M. X... corroborent la présomption légale salariat. M. X... peut en conséquence se prévaloir de la qualité de journaliste professionnel salarié de la société Prisma presse et du bénéfice de la convention collective nationale de travail des journalistes » ;
1. ALORS QUE le correspondant n'est pas un journaliste professionnel même s'il a pour occupation principale, régulière et rétribuée l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et même s'il en tire le principal de ses ressources, dès lors qu'il ne reçoit pas d'appointements fixes ; qu'en l'espèce, il était constant que le montant des piges versées par la société PRISMA PRESSE à M. X... variait d'un mois sur l'autre ; que la Cour d'appel a elle-même constaté que les revenus de M. X... provenant de son activité de journaliste pour la société PRISMA PRESSE ou d'autres sociétés de presse variaient dans une proportion de 52% à 99% ; qu'il en résultait que M. X... ne percevait pas d'appointements fixes et ne pouvait avoir la qualité de journaliste professionnel ; qu'en lui attribuant toutefois la qualité de journaliste professionnel, la Cour d'appel a violé l'article L 761-2 du code du travail ;
2. ALORS QUE l'entreprise de presse n'est présumée être l'employeur que de celui dont l'activité de journaliste, au sein de cette entreprise, lui procure l'essentiel de ses revenus ; qu'en l'espèce, la société PRISMA PRESSE faisait valoir que les revenus que M. X... tirait de son activité pour le compte de celle-ci ne constituaient pas le principal de ses revenus ; qu'en se bornant à constater que l'activité de M. X... aussi bien pour le compte de la société PRISMA PRESSE que pour d'autres sociétés de presse lui procurait l'essentiel de ses ressources, pour en déduire que M. X... était présumé être salarié de la société PRISMA PRESSE, sans rechercher quelle était la part de revenus provenant de sa collaboration avec la société PRISMA PRESSE, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de L 761-2 du code du travail ;