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03/02/2009 | FRANCE | N°06-19355

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 février 2009, 06-19355


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Cofis que sur le pourvoi provoqué relevé par la société GAN assurances IARD ;
Donne acte à la SCP Brouard-Daude, en qualité de liquidateur de la société Cofis, de sa reprise d'instance ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 juin 2006), que le 11 avril 2001, la société GAN assurances IARD (le GAN) a assigné la société Cofis en redressement judiciaire ; que le 4 octobre 2002, M. X..., sa

larié de la société Cofis, a assigné celle-ci aux mêmes fins ; que la société Cof...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Cofis que sur le pourvoi provoqué relevé par la société GAN assurances IARD ;
Donne acte à la SCP Brouard-Daude, en qualité de liquidateur de la société Cofis, de sa reprise d'instance ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 juin 2006), que le 11 avril 2001, la société GAN assurances IARD (le GAN) a assigné la société Cofis en redressement judiciaire ; que le 4 octobre 2002, M. X..., salarié de la société Cofis, a assigné celle-ci aux mêmes fins ; que la société Cofis a déclaré son état de cessation des paiements le 16 décembre 2002, et a été mise en liquidation judiciaire le 17 décembre 2002, la date de cessation des paiements étant fixée au 17 juin 2001 ; que sur appel de la société Cofis, la cour d'appel a dit, le 9 décembre 2003, n'y avoir lieu à liquidation judiciaire et a condamné le GAN à payer à la société Cofis la somme de 180 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par l'assignation délivrée par le GAN, sans justifier de l'échec préalable des poursuites en recouvrement d'une créance injustement majorée et contestable, ni de l'impossibilité pour la société Cofis de lui payer les 1 036,44 euros dont elle restait débitrice par compensation et par la persistance fautive dans sa poursuite, et constitué par la ruine de l'amorce d'un redressement de son assurée en 2002 ; que le 28 avril 2004, la société Cofis a assigné le GAN en réparation des préjudices résultant pour elle des opérations de liquidation judiciaire ; que le 22 novembre 2004, le tribunal a dit que l'autorité de chose jugée rendait irrecevables les demandes de la société Cofis ;
Attendu que le liquidateur de la société Cofis fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré cette société recevable mais mal fondée dans ses demandes dirigées contre le GAN, alors, selon le moyen :
1°/ que l'arrêt du 9 décembre 2003 ayant définitivement jugé qu'il n'y avait pas lieu à liquidation judiciaire de la société Cofis et condamné le GAN, à l'origine de la procédure collective, à verser à cette société des dommages-intérêts pour avoir engagé sa responsabilité dans la survenance des difficultés d'exploitation enregistrées par l'entreprise, la cour d'appel ne pouvait, sans violer l'autorité de chose jugée s'attachant à cette décision, estimer que le lien de causalité entre les préjudices résultant de la liquidation judiciaire et l'abus de droit à agir contre l'assureur n'était pas établi ; qu'ainsi l'arrêt est entaché d'une violation de l'article 1351 du code civil ;
2°/ que la cour d'appel ne pouvait considérer qu'en raison de l'assignation du 4 octobre 2002 de M. X... en redressement judiciaire de la société Cofis, le dépôt le 16 décembre suivant par la gérante de cette société, au greffe du tribunal, de l'état de cessation des paiements en invoquant les difficultés de cette personne morale auraient pareillement entraîné la liquidation judiciaire prononcée le 17 décembre 2002, sans rechercher si, précisément, lesdites difficultés d'exploitation n'étaient pas nées de l'action téméraire entreprise par le GAN ; que l'arrêt est dès lors entaché d'un manque de base légale au regard des dispositions de l'article 1382 du code civil ;
3°/ que le jugement du 17 décembre 2002, prononçant la liquidation judiciaire de la société Cofis étant intervenu notamment sur l'action du GAN, ce qui avait eu pour conséquence la mise en place de la procédure collective avec toutes les conséquences en découlant, la cour d'appel ne pouvait, sans violer l'article 1382 du code civil, considérer que la relation causale entre la procédure abusive engagée par cet assureur et les préjudices qui en sont résultés n'était pas établie ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient exactement qu'il appartient à la société Cofis d'établir que les dommages allégués, consécutifs selon elle aux opérations de liquidation judiciaire dont elle a fait l'objet, sont directement en relation avec l'abus du droit d'agir en justice retenu par l'arrêt du 9 décembre 2003, les constatations de fait ou les qualifications données à ces faits figurant dans les motifs de cette décision étant dépourvues d'autorité de la chose jugée ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt constate qu'à l'assignation du GAN s'est ajoutée celle de M. X... qui était titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible toujours impayée au 17 décembre 2002, et dont une tentative de recouvrement au moyen d'une saisie-vente s'était soldée par un procès-verbal de carence, et la déclaration de cessation des paiements de la société Cofis assortie d'une demande de liquidation judiciaire laquelle n'avait pas été faite dans la croyance erronée à l'existence d'obligations envers le GAN, que tant dans son rapport que dans ses conclusions au cours de l'instance d'appel du jugement d'ouverture, le liquidateur rappelait que la gérante de la société Cofis imputait les difficultés rencontrées par cette personne morale à des problèmes de santé de son époux, à une baisse d'activité et à de nombreux litiges et que l'actif de la société s'élevait à la somme de 36 599 euros et le passif déclaré à celle de 1 073 437 euros dont 367 811 euros à titre privilégié ; que l'arrêt en déduit que l'ouverture d'emblée de la liquidation judiciaire le 17 décembre 2002, loin d'avoir été déterminée par l'abus de droit reproché au GAN, aurait été pareillement décidée si cette faute n'avait pas été commise et que la relation causale entre cette faute et les dommages allégués liés à la mise en oeuvre de la liquidation judiciaire n'est pas caractérisée ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et attendu que par suite du rejet du pourvoi principal, le pourvoi provoqué éventuel du GAN est devenu sans objet ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal ;
Condamne la SCP Brouard-Daude, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit - à l'appui du pourvoi principal - par Me Rouvière, avocat aux Conseils pour la SCP Brouard-Daude, ès qualités.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société COFIS recevable mais ma fondée en ses demandes dirigées contre la compagnie GAN ASSURANCES.
AUX MOTIFS QUE la demande antérieurement formée par la société COFIS avait pour objet la réparation du préjudice subi à compter du 11 avril 2001 en raison de la formulation et du maintien d'une demande abusive et que cet objet est distinct de celui de la demande aujourd'hui soumise à la Cour qui tend à la réparation des dommages prétendument subis du fait de la mise en liquidation judiciaire de la société COFIS entre le 17 décembre 2002 et le 9 décembre 2003 et de ceux qui résulteraient de « l'abus de droit persistant à travers l'exécution de l'arrêt du 9 décembre 2003 » ; qu'il s'ensuit que les prétentions de la société COFIS ne se heurtent pas à la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée ; que le lien de causalité entre les préjudices allégués consécutifs à la liquidation judiciaire de la société COFIS et l'abus de droit d'agir en justice imputé au GAN, l'appelante soutient qu'il a été jugé par l'arrêt du 9 décembre 2003 que ce sont les difficultés d'exploitation induites par cet abus de droit commis par l'assureur qui ont conduit à sa liquidation judiciaire ; que cependant le GAN fait cependant valoir qu'il appartient à la société COFIS d'établir que les dommages allégués, consécutifs, selon elle, aux opérations de liquidation judiciaire dont elle a fait l'objet -c'est à dire tous les chefs de demandes énumérés ci-dessus hormis ceux tendant au paiement des sommes de 80.000 euros pour « abus de droit répété », 8.807,21 euros et 1.036,44 euros- sont directement en relation avec l'abus de droit à agir en justice retenu à l'encontre de l'intimé par la décision du 9 décembre 2003 et non discuté par celui-ci, sans que l'appelante puisse se borner à faire référence aux motifs de l'arrêt du 9 décembre 2003 ; qu'en effet, les constatations de fait ou les qualifications données à ces faits figurant dans des motifs, dépourvus de l'autorité de la chose jugée, ne s'imposent nullement dans la présente instance ; qu'en premier lieu, à l'assignation du GAN , tendant au prononcé du redressement judiciaire de la société COFIS, s'est ajoutée, le 4 octobre 2002, comme il a été dit ci-dessus, celle tendant aux mêmes fins, délivrée à la requête de Monsieur Michel X..., ancien salarié de la société COFIS licencié pour motif économique en 1997 ; que Monsieur X... était titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible sur la société COFIS puisqu'elle résultait d'un arrêt confirmatif de cette Cour du 12 septembre 2001, qu'en dépit de son montant modeste (11.291,20 francs), cette créance était toujours impayée le 17 décembre 2002, étant ici précisé que l'huissier de justice chargée de procéder à une saisie-vente en vue de son recouvrement avait dû établir un procès verbal de carence ainsi que le mentionne l'assignation du 4 octobre 2002 susvisée, laquelle satisfait à toutes les prescriptions de l'article 7 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ; qu'en deuxième lieu, la société COFIS a, par sa gérante, procédé le 16 décembre 2002 au dépôt au greffe du tribunal de commerce de la déclaration de son état de cessation de paiements et que le 17 décembre 2002, elle a demandé l'ouverture pour elle-même d'une procédure de liquidation judiciaire ainsi que le rappelle le jugement du même jour ouvrant cette procédure ; qu'il ne saurait être utilement soutenu que ce dépôt et cette demande ont été faits dans la croyance erronée à l'existence d'obligations envers le GAN puisqu'à cette même audience du 17 décembre 2002, la société COFIS avait également déposé des conclusions tendant à la condamnation du GAN à la restitution « d'un trop versé » de 7.006,99 euros et au paiement de dommages-intérêts pour abus de droit d'agir en justice ; qu'au surplus, tant dans son rapport établi le 8 juillet 2003 en application des dispositions de l'article L. 621-11 du Code de commerce que dans ses conclusions du 15 septembre 2003 tendant à la confirmation du 17 décembre 2002, le mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société COFIS rappelait que sa gérante imputait les difficultés rencontrées par cette personne morale à des problèmes de santé de son époux, à une baisse d'activité et à de nombreux litiges en cours ; que les conclusions précitées mentionnaient que l'actif appréhendé s'élevait à la somme de 36.599 euros et le passif déclaré à celle de 1.073.437 euros, dont 367.811 euros à titre privilégié ; que ces données éclairent l'initiative ci-dessus mentionnée prise en décembre 2002 par la société COFIS, même si elle a ensuite soutenu, en cause d'appel du jugement susvisé, qu'en dépit de quelques difficultés passagères liées à la conjoncture des marchés publics, son redressement n'était nullement compromis et qu'elle n'était pas en état de cessation de paiement ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la décision du tribunal de commerce de Paris du 17 décembre 2002 d'ouvrir d'emblée une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société COFIS, loin d'avoir été déterminée par l'abus de droit reproché au GAN, aurait été pareillement prise si cette faute n'avait pas été commise de sorte que l'intimé est fondé à faire valoir que la relation causale entre cette faute et les dommages allégués liés à la mise en oeuvre de la liquidation judiciaire n'est pas caractérisée ; qu'en conséquences, que les demandes de l'appelante tendant à la réparation de tels dommages ne peuvent être accueillies ;
1°/ ALORS QUE l'arrêt du 9 décembre 2003 ayant définitivement jugé qu'il n'y avait lieu à liquidation judiciaire de la société COFIS, et condamné la Compagnie GAN Assurances, à l'origine de la procédure collective, à verser à cette société des dommages-intérêts pour avoir engagé sa responsabilité dans la survenance des difficultés d'exploitation enregistrées par l'entreprise, la Cour d'appel ne pouvait, sans violer l'autorité de chose jugée s'attachant à cette décision, estimer que le lien de causalité entre les préjudices résultant de la liquidation judiciaire et l'abus de droit à agir retenu contre l'assureur n'était pas établi ; qu'ainsi, est entaché d'une violation de l'article 1351 du Code Civil ;
2°/ ALORS QUE la Cour d'appel ne pouvait considérer qu'en raison de l'assignation du 4 octobre 2002 de Monsieur X... en redressement judiciaire de la société COFIS ; le dépôt, le 16 décembre suivant par la gérante de cette société, au greffe du tribunal de l'état de cessation de paiement en invoquant les difficultés de cette personne morale, auraient pareillement entraîné la liquidation judiciaire prononcé le 17 décembre 2002, sans rechercher si, précisément, lesdites difficultés d'exploitation n'étaient pas nées de l'action téméraire entreprise par le GAN, que l'arrêt est dès lors entaché d'un manque de base légale au regard des dispositions de l'article 1382 du Code civil ;
3°/ ALORS QUE le jugement du 17 décembre 2002, prononçant la liquidation judiciaire de la Société COFIS étant intervenu notamment sur l'action de la compagnie GAN assurances, ce qui avait eu pour conséquence la mise en place de la procédure collective avec toutes les conséquences en découlant, la Cour d'appel ne pouvait, sans violer l'article 1382 du Code Civil considérer que la relation causale entre la procédure abusive engagée par cet assureur et les préjudices qui en sont résultés n'était pas établi ;
Moyen produit - à l'appui du pourvoi provoqué - par Me de Nervo, avocat aux Conseils pour la société GAN assurances IARD.
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaquéD'AVOIR rejeté l'exception de chose jugée et d'avoir déclaré recevable l'action de la société Cofis
AUX MOTIFS QUE l'intimé faisait valoir que la demande d'indemnisation de la société Cofis lors de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 9 décembre 2003, devait être qualifiée de demande d'indemnisation toutes causes confondues ; que la société Cofis était donc irrecevable en ses demandes ; que cependant, aux termes de ses conclusions d'appel du jugement du 17 décembre 2002, la société Cofis avait fait valoir qu'elle avait subi un préjudice incontestable en raison de l'utilisation par le GAN d'un moyen de contrainte non justifié ; que la procédure n'aurait pas dû être engagée ; que le GAN avait fautivement maintenu sa demande ; qu'il en résultait que la demande antérieurement formée par la société Cofis avait pour objet la réparation du préjudice subi à compter du 11 avril 2001, en raison de la formation et du maintien d'une procédure abusive ; que cet objet était distinct de la demande tendant à la réparation des dommages subis du fait de la mise en liquidation judiciaire de la société Cofis entre le 17 décembre 2002 et le 9 décembre 2003 et de ceux qui résulteraient de l'abus de droit persistant dans l'exécution de l'arrêt du 9 décembre 2003 ; que la demande ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée ;
ALORS QU'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande, tous les moyens et prétentions qui sont nés d'une situation donnée l'opposant à son adversaire ; que la Cour d'appel a constaté que la première instance concernait une demande formée par la même partie et ayant pour fondement le même comportement reproché à la même compagnie d'assurances, à savoir l'introduction et le maintien d'une procédure en redressement judiciaire ; que la Cour d'appel, en repoussant l'exception tirée de la chose jugée, a violé l'article 1351 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 06-19355
Date de la décision : 03/02/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 juin 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 fév. 2009, pourvoi n°06-19355


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Rouvière, Me de Nervo

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:06.19355
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