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27/01/2009 | FRANCE | N°07-44057

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 janvier 2009, 07-44057


Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite du redressement puis de la liquidation judiciaires de la société Grimaud logistique, relevant du groupe Ziegler, M. X..., qui exerçait les mandats de délégué du personnel et de délégué syndical, a été licencié le 7 mai 2003 pour motif économique, en vertu d'une autorisation donnée le 24 avril précédent par l'inspecteur du travail des transports ; que cette décision administrative a été annulée le 23 octobre 2003 par le Ministre des transports qui a refusé d'autoriser le licenciement, le recours formé contre sa décision ét

ant rejeté le 27 janvier 2005 par la juridiction administrative ; qu'après...

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite du redressement puis de la liquidation judiciaires de la société Grimaud logistique, relevant du groupe Ziegler, M. X..., qui exerçait les mandats de délégué du personnel et de délégué syndical, a été licencié le 7 mai 2003 pour motif économique, en vertu d'une autorisation donnée le 24 avril précédent par l'inspecteur du travail des transports ; que cette décision administrative a été annulée le 23 octobre 2003 par le Ministre des transports qui a refusé d'autoriser le licenciement, le recours formé contre sa décision étant rejeté le 27 janvier 2005 par la juridiction administrative ; qu'après avoir vainement demandé sa réintégration à la société Ziegler France, M. X... a saisi le juge prud'homal de demandes indemnitaires ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal des sociétés Ziegler France et Balspeed France :
Attendu que les sociétés Ziegler France et Balspeed France font grief à l'arrêt de juger que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la première au paiement de dommages-intérêts et d'une indemnité de licenciement, alors, selon le moyen :
1° / que le transfert de l'activité d'une entreprise ne peut entraîner l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, devenu l'article L. 1224-1 du code du travail et la poursuite des contrats de travail des salariés affectés à cette entité avec le cessionnaire que s'il s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Ziegler France n'avait racheté que le matériel de manutention de la société Grimaud logistique avant d'en entreprendre l'exploitation directe après la liquidation judiciaire de cette société et d'y affecter d'anciens personnels de celle-ci ; qu'elle a également constaté qu'une partie seulement des produits de l'activité de la société Grimaud logistique avait été transférée au profit de la société Ziegler France ; qu'en décidant cependant qu'il y a eu transfert à son profit d'une entité économique autonome, elle n'a pas déduit les conséquences de ses propres constatations desquelles il ressortait que l'identité dont relevait l'activité de manutention n'avait pas été maintenue, et elle a violé le texte susvisé ;
2° / qu'à supposer qu'il y ait eu transfert partiel de l'activité, dans un tel cas les salariés ne passent au service du nouvel employeur que s'ils sont affectés à l'activité transférée ; qu'en l'espèce, la société Grimaud logistique exerçait une activité de stockage, logistique et déménagements ; que la cour d'appel a constaté que la société Ziegler France s'était bornée à reprendre le matériel de manutention de la société Grimaud logistique et le personnel affecté à l'exploitation de ce matériel, à l'exclusion des agents de transport et des chauffeurs routiers, ainsi qu'une partie seulement des activités de la société Grimaud logistique ; qu'en affirmant que le contrat de travail de M. X... avait été transféré à la société Ziegler France sans rechercher si ce salarié, chauffeur routier, était affecté à l'activité transférée, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article L. 122-12, alinéa 2, devenue l'article L. 1224-1, du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté qu'après la liquidation judiciaire de la société Grimaud logistique, appartenant au même groupe, la société Ziegler France avait, sans autorisation judiciaire, poursuivi l'exploitation de l'activité exercée par cette société, en reprenant à cette fin le matériel qu'elle lui louait antérieurement, en s'attribuant des contrats, des factures et une clientèle appartenant à la société Grimaud logistique et en employant un nombre élevé de salariés auparavant au service de cette dernière, pour maintenir au profit du groupe le chiffre d'affaires réalisé par cette entreprise ; qu'elle a pu déduire de ces constatations, le transfert à la société Ziegler France de l'ensemble de l'entité économique qu'exploitait antérieurement la société Grimaud logistique et dont relevait M. X... ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de M. X... :
Vu l'article L. 1134-1 du code du travail ;
Attendu que ce texte impose seulement au salarié qui se plaint d'une discrimination prohibée de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'il revient alors à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;
Attendu que, pour débouter M. X... de la demande indemnitaire qu'il formait, au titre d'une discrimination liée à l'exercice de ses activités syndicales, la cour d'appel a retenu que de très nombreux salariés ont été licenciés et non repris, que des élus du personnel on été repris en proportion supérieure et qu'il n'est ainsi pas justifié que l'intéressé ait fait l'objet de la discrimination syndicale alléguée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... invoquait également des agissements de son employeur entravant l'exercice de son mandat et de ses fonctions, qui pouvaient laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale, en sorte qu'il lui revenait de vérifier ces faits et de se prononcer sur les justifications de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de la demande en paiement de dommages-intérêts qu'il formait au titre d'une discrimination syndicale, l'arrêt rendu le 28 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne les sociétés Ziegler France et Balspeed France, M. Y..., ès qualités, et le CGEA de Bordeaux aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne, in solidum, les sociétés Ziegler France et Balspeed France, M. Y..., ès qualités, et le CGEA de Bordeaux à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP MONOD et COLIN, avocat aux Conseils pour les sociétés Ziegler France et Balspeed France, demanderesses au pourvoi principal
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la société ZIEGLER FRANCE à lui verser 40. 000 de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et 11. 982, 12 d'indemnité de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE l'autorisation de licencier délivrée par l'inspecteur du travail précise dans son article 2 que « le licenciement qui pourrait être notifié à M. X... à la suite de cette autorisation serait nul et de nul effet s'il s'avérait qu'un transfert d'entités économiques autonomes ait été effectué et que le contrat de travail de Jean-Claude X... aurait dû être transféré en application, d'une part, de l'article L. 122-12 alinéa 2 du code du travail et, d'autre part, des critères conventionnels applicables » ; que, si cette autorisation de licencier a été annulée au motif dirimant qu'aucun élément du dossier ne permettait d'établir que l'employeur ne pouvait être regardé comme ayant satisfait à l'obligation de recherche de reclassement qui lui incombait, il apparaît au regard des différents éléments du dossier, que les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail ont vocation à s'appliquer à la société ZIEGLER FRANCE ; qu'il sera tout d'abord relevé que, selon l'arrêt de la Cour de cassation du 9 mars 2005, la société ZIEGLER SERVICE a racheté le matériel de manutention de la société GRIMAUD LOGISTIQUE pour 300. 000 avant d'entreprendre l'exploitation directe après la liquidation judiciaire de GRIMAUD LOGISTIQUE et d'y affecter d'anciens personnels de GRIMAUD LOGISTIQUE ; qu'il résulte également du compte-rendu de ce même arrêt se référant à l'enquête menée par la SRPJ, qu'une partie des produits de l'activité de GRIMAUD LOGISTIQUE a été transférée au profit du groupe ZIEGLER, transferts matérialisés par la refonte d'un certain nombre de contrats et facturations initialement établis au profit de la SA GRIMAUD LOGISTIQUE ; qu'il résulte également des diverses lettres échangées entre les parties que la société ZIEGLER FRANCE ne peut sérieusement soutenir se trouver dans le cadre d'une application volontaire des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail et qu'il y a bien eu transfert à son profit d'une entité économique autonome ; qu'il y a lieu de se référer aux divers courriers adressés par Maître Y... à la société ZIEGLER FRANCE ou à son conseil et au protocole d'accord établi le 30 mars 2003 dans le cadre de la liquidation judiciaire de la SA GRIMAUD LOGISTIQUE, protocole que Maître Y... a refusé de ratifier devant les imprécisions de la situation ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, la société ZIEGLER FRANCE ne peut contester s'être placée dans la situation d'un transfert d'une entité économique constituée par un ensemble organisé de personnes et d'éléments incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre, et d'avoir été mise en face de ses responsabilités par Maître Y... qui n'a pas eu d'autre choix que de procéder aux licenciements en application de la loi afin de permettre la prise en charge des salariés par les AGS tout en refusant de signer le protocole d'accord à partir du moment où le groupe ZIEGLER ne voulait pas d'une cession officielle des éléments corporels et incorporels de GRIMAUD LOGISTIQUE ; qu'il apparaît ainsi que la reprise de 431 salariés entraînait nécessairement le transfert des contrats et des activités de GRIMAUD LOGISTIQUE ; que, dans ce cadre, il ne peut être fait de distinction entre les salariés participant de cette entité économique ; qu'il résulte de l'article L. 122-12 du code du travail que s'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; que, par ailleurs, le champ d'application de l'article L. 122-12 du code du travail ne peut se réduire aux seuls salariés désignés par la société ; que ces dispositions s'appliquent de plein droit au cas de transfert d'une entité économique, tel qu'en l'espèce constitué par la reprise de plus d'un tiers du personnel ; que, par application de l'article L. 122-12 du code du travail, le contrat de travail de M. X... a été de plein droit transféré à la société ZIEGLER FRANCE ; que c'est à bon droit que le salarié a réclamé sa réintégration à cette dernière société, qui, par application de l'article L. 122-12-1 du code du travail, demeure, en tout cas, tenue des obligations du précédent employeur, la société GRIMAUD LOGISTIQUE, et par application de l'article L. 122-12 était tenue de poursuivre le contrat de travail, d'où il suit que la rupture de ce dernier lui est bien imputable et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ALORS QUE, D'UNE PART, le transfert de l'activité d'une entreprise ne peut entraîner l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail et la poursuite des contrats de travail des salariés affectés à cette entité avec le cessionnaire que s'il s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que la société ZIEGLER FRANCE n'avait racheté que le matériel de manutention de la société GRIMAUD LOGISTIQUE avant d'en entreprendre l'exploitation directe après la liquidation judiciaire de cette société et d'y affecter d'anciens personnels de celle-ci ; qu'elle a également constaté qu'une partie seulement des produits de l'activité de la société GRIMAUD LOGISTIQUE avait été transférée au profit du groupe ZIEGLER ; qu'en décidant, cependant, qu'il y a eu transfert à son profit d'une entité économique autonome, elle n'a pas déduit les conséquences de ses propres constatations desquelles il ressortait que l'identité dont relevait l'activité de manutention n'avait pas été maintenue, et elle a violé le texte précité ;
ALORS QUE D'AUTRE PART, à supposer qu'il y ait eu transfert partiel de l'activité, dans un tel cas, les salariés ne passent au service du nouvel employeur que s'ils sont affectés à l'activité transférée ; qu'en l'espèce, la société GRIMAUD LOGISTIQUE exerçait une activité de stockage, logistique et déménagements ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que la société ZIEGLER FRANCE s'était bornée à reprendre le matériel de manutention de la société GRIMAUD LOGISTIQUE et le personnel affecté à l'exploitation de ce matériel, à l'exclusion donc des engins de transports et des chauffeurs routiers, ainsi qu'une partie seulement de l'activité de la société GRIMAUD LOGISTIQUE ; qu'en affirmant que le contrat de travail de M. X... avait été transféré à la société ZIEGLER FRANCE sans rechercher si le salarié, chauffeur-routier, était affecté à l'activité transférée, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article L. 122-12 du code du travail.
Moyen produit par la SCP MASSE-DESSEN et THOUVENIN, avocat aux Conseils pour M. X... et le syndic CFDT des transports de la Gironde, demandeurs au pourvoi incident
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour discrimination syndicale.
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... prétend avoir été victime d'une discrimination syndicale prohibée par les articles L. 412-2 et L. 122-45 du Code du travail, caractérisée par le fait qu'il n'a pas été reclassé par la société ZIEGLER en raison de ses mandats ; qu'il fait valoir :- que le ministre du travail dans sa décision de refus d'autoriser son licenciement du 27 octobre 2003 n'a pas exclu l'existence d'un lien entre son licenciement et le refus de son reclassement,- qu'antérieurement, il avait été victime de multiples entraves à l'exercice de ses mandats et de ses fonctions de salarié, son employeur ayant même, après un accident de travail refusé d'adapter le matériel dont il se servait à son aptitude ; que toutefois,- de très nombreux salariés ont été licenciés et non repris (seulement 431 sur 1141 ayant été repris),- des élus de personnel ont été repris en nombre, en proportion supérieur,- il n'est pas justifié que Monsieur X... ait fait dans ces circonstances l'objet de la discrimination syndicale alléguée.
ALORS QU'au soutien de sa demande, Monsieur Jean-Claude X... faisait valoir qu'il avait fait l'objet de multiples entraves lors de la création de la cellule DP régionale à l'agence de BLANQUEFORT et été tenu à l'écart de toutes initiatives concernant l'activité de la région sud-ouest et que, par ailleurs, victime d'un accident du travail il s'était vu refuser par son employeur la remise des feuilles d'accident du travail puis imposer des conditions de travail incompatibles avec son état de santé ; que le ministre des transports, statuant sur la demande d'autorisation de licenciement le visant n'avait pas exclu le lien de la demande avec ses fonctions représentatives ; qu'en omettant d'examiner ces éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-45 et L. 412-2, alinéa 1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44057
Date de la décision : 27/01/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 28 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jan. 2009, pourvoi n°07-44057


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Monod et Colin, SCP Vuitton et Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.44057
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