LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la SCI Wouri du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les Mutuelles du Mans IARD ;
Donne acte aux consorts X... de leur reprise d'instance aux lieu et place de M. Herbert X..., décédé le 17 juin 2008 ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni des conclusions d'appel
ni de l'arrêt que la société civile immobilière Wouri (la SCI) ait soutenu que l'existence d'une divergence quant à l'occupation partielle de l'immeuble vendu n'était pas susceptible de mettre en cause la validité de la vente mais d'engager la responsabilité du vendeur pour défaut de délivrance ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement retenu, que l'offre concernait un bien libre de toute occupation et supposait que la question de la commission d'agence était résolue quant à son montant, que l'offre ne correspondait pas aux conditions de vente puisqu'elle concernait un bien libre de toute occupation, que cette acceptation n'avait pas été donnée dans les délais prévus, que cette offre avait été renouvelée à trois reprises par la SCI, que la réitération des offres d'achat signifiait que le représentant de la SCI Wouri savait que son offre ne correspondait pas aux termes du mandat et qu'il fallait une acceptation des époux X... pour la vente d'un bien libre au lieu d'un bien en partie occupé et que la question de la commission d'agence soit résolue, la cour d'appel qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes a pu en déduire qu'il n'y avait pas eu accord des parties sur la chose et sur le prix ;
D'où il suit que pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que la vente n'avait pu se former à raison de l'attitude de la SCI et que celle-ci ne pouvait reprocher à l'agence immobilière le fait que les époux X... n'aient pas accepté ses conditions, la cour d'appel a pu en déduire que cette agence immobilière n'avait commis aucune faute ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 septembre 2007), retient dans ses motifs que la procédure de la SCI Wouri ne pouvait être considérée comme fautive, même si elle n'était pas fondée et que la demande de dommages-intérêts formée pour procédure abusive devait être rejetée et dans le dispositif confirmait le jugement qui l'avait condamnée pour procédure abusive ;
Qu'en statuant ainsi la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société civile immobilière Wouri à payer la somme de 10 000 euros aux époux X... et la somme de 1 000 euros à la société Citya immobilier Berge Casala, l'arrêt rendu le 13 septembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat aux Conseils pour la SCI Wouri.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la Sci Wouri de sa demande tendant à voir ordonner la réitération forcée de la vente et de l'avoir condamnée à payer aux époux X... la somme de 10. 000 euros et à la société Citya immobilier Berge Casala la somme de 1. 000 euros ;
AUX MOTIFS QUE sur l'existence d'une vente la sci Wouri estime qu'un accord sur la chose et sur le prix est intervenu avec les époux X..., tandis que ceux-ci considèrent qu'il n'y a pas eu d'accord ;
Qu'aucune promesse synallagmatique de vente n'a été signée entre les parties, qui aurait dû préciser clairement les termes d'un accord ; que cet accord est seulement susceptible de résulter du mandat donné par les vendeurs à l'agence Citya immobilier Bergé-Casala, de l'offre formulée par l'acquéreur, des courriers échangés ; qu'il convient en conséquence de vérifier la réalité de cet accord tant sur le prix que sur la chose au vu de ces documents ;
Que c'est à la partie qui s'en prévaut d'en apporter la preuve ;
Que le mandat donné aux époux X... à l'agence Citya immobilier Bergé-Casala précise que les biens à vendre seront le jour de la signature de l'acte libres de toute location ou occupation ou loués suivant l'état locatif ci-annexé ; qu'il n'y a pas d'état locatif annexé, mais une mention rez-de-jardin loué ;
Que le mandat qui est pourtant unique, inscrit sous le numéro 1230 au registre des mandats de la société Citya, présente une version d'origine datée du 16 février 2003 signée par les mandants en dernière page mais non paraphée et une version dont toutes les pages ont été paraphées par les mandants ; que dans la version paraphée, la mention rez-de-jardin loué y figure aussi mais dactylographiée et il est ajouté « et compte tenu garage n° C double loué jusqu'à fin novembre 2003 » ;
Qu'en tout état de cause, ce mandat a été donné pour un bien dont une partie, l'appartement en rez-de-jardin, était loué et sans engagement des vendeurs de donner congé pour revendre ;
Qu'un bien loué, même en partie, est forcément dévalorisé par rapport à un bien libre ;
Que le prix fixé au mandat pour ce bien en partie loué est de 450. 000 euros net vendeur plus honoraires d'agence 22. 500 euros, soit 472. 500 euros frais d'agence inclus ;
Que ce prix correspond à un bien en partie loué ;
Qu'après une première offre d'achat à un prix inférieur le 5 août (en réalité mars) 2003, la Sci Wouri a présenté le 10 mars 2003 à l'agence immobilière mandataire une offre au prix de 450. 000 euros avec en sus une commission de 10. 000 euros, étant précisé que la vente ne pourra se réaliser que si les droits de préemption, dont l'immeuble vendu peut faire l'objet, ne sont pas exercés par leurs titulaires respectifs, précision étant ici faite qu'il devra être justifié à l'acquéreur du congé émanant du locataire de la partie de l'immeuble louée soit le rez-de-jardin, étant ajouté que si la vente est acceptée, la vente aura lieu avec entrée en jouissance par la prise de possession réelle à compter de la signature de l'acte authentique, lesdits biens devant être libres à cette date de toute occupation quelconques ainsi que tous meubles meublant et objets mobiliers, à l'exception de la cuisine encastrée, immeuble par destination ;
Que cette offre précise expirer le mercredi 12 mars 2003 à 17h, le bénéficiaire de l'offre devra faire connaître son intention d'accepter cette offre avant cette date, par tout moyen à sa convenance, à l'expiration du délai ci-dessus fixé, la présente offre sera caduque, l'acceptation de l'offre par le bénéficiaire et la réalisation des conditions suspensives rendra la vente parfaite les parties étant d'accord sur la chose et sur le prix ;
Que cette offre concerne un bien libre de toute occupation ; qu'elle suppose que la question de la commission d'agence ait été résolue quant à son montant ;
Que cette offre ne correspondant pas exactement aux conditions de vente, puisqu'elle concerne un bien libre de toute occupation, elle suppose une acceptation pour que la preuve soit parfaite ;
Que cette acceptation n'étant pas donnée dans les délais prévus, cette offre a été renouvelée par la Sci Wouri le 12 mars 2003 jusqu'au 17 mars 2003 à 12h, le 17 mars 2003 jusqu'au 21 mars 2003 à 12h, le 21 mars 2003 jusqu'au 26 mars 2003 à 12h, le 26 mars 2003 jusqu'au 28 mars 2003 à 14h, le 28 mars 2003 jusqu'au 31 mars 2003 à 14h et le 31 mars 2003 jusqu'au 1er avril 2003 à 17h ;
Que la réitération des offres d'achat signifie bien que le représentant de la Sci Wouri savait que cette offre ne correspondait pas aux termes du mandat et qu'il fallait, et une acceptation des époux X... pour la vente d'un bien libre au lieu d'en partie occupé, et que la question de la commission d'agence soit résolue ;
Que M. X... écrira le 1er avril à la Sci Wouri : « Monsieur, pour faire suite à votre proposition d'achat de la maison sise... au prix de 450. 000 euros net pour nous, nous vous faisons une contre proposition avec les meubles pour une valeur supplémentaire de 5. 000 euros, soit un total de 455. 000 euros. Fait à Gruenwald / München le 1er avril 2003 » ; que compte tenu de ce que la question de l'occupation du bien reste sans réponse, cette contre-proposition ne peut être prise pour une acceptation de l'offre de la Sci Wouri ni pour une modification des termes du mandat selon lequel le bien est vendu en partie loué ;
Que M. Y..., de la Sci Wouri, écrira à Citya immobilier le 1er avril 2003 : « j'ai pris note que Mme et M. X... avaient accepté l'offre d'achat renouvelé par mes soins le 31 mars écoulé relative à la maison sise... à le Cannet … conformément au souhait de Mme et M. X..., je reprendrai lors de la réalisation de la vente, tout le mobilier meublant l'appartement du premier étage … moyennant un prix forfaitaire de 5. 000 euros » ; que M. Y..., de la Sci Wouri donne au courrier de M. X... un sens qui lui convient mais qui ne correspond pas aux termes de ce courrier ;
Qu'il n'y a jamais eu d'accord des vendeurs et de l'acquéreur pour la vente d'un bien libre ni à 450. 000 euros ni à 455. 000 euros ;
Que M. Y... ne peut contraindre les époux X... à lui vendre à des conditions qu'ils n'ont jamais proposées ; que la Sci Wouri ne prouve pas qu'un accord valant vente est intervenu avec les époux X... ;
ALORS QUE la vente est parfaite, entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ;
D'où il résulte qu'en écartant l'existence d'une vente en raison d'une divergence quant à l'occupation partielle de l'immeuble au moment de la vente lorsque la question de savoir si un bien est vendu libre ou occupé ne constitue qu'un élément accessoire de la vente, qui ne remet pas en cause la validité de celle-ci, mais permet seulement à l'acquéreur d'engager la responsabilité du vendeur pour défaut de délivrance, la Cour d'appel a violé les articles 1108, 1138 et 1583 du Code civil ;
ALORS EN OUTRE QUE la Cour d'appel qui constatait que les vendeurs avaient fait, le 1er avril 2003, une contre-proposition portant sur la villa et les meubles au prix net pour eux de 455. 000 euros acceptée par l'acquéreur, ne pouvait dire que la vente ne s'était pas formée, sans dire en quoi les parties avaient entendu retarder la formation du contrat jusqu'au règlement de la question de l'occupation de la villa ; qu'elle a ainsi entaché son arrêt d'un manque de base légale au regard de l'article 1583 du Code civil ;
ALORS ENFIN QUE dans ses conclusions d'appel la SCI Wouri faisait valoir que les époux X... ne pouvaient prétendre avoir voulu vendre une villa occupée dès lors qu'ils avaient fait délivrer trois congés pour vendre au locataire avec droit de préemption pour le prix proposé (conclusions, p. 19) ; qu'en s'abstenant de toute réponse à ces conclusions de nature à montrer la volonté des vendeurs de vendre une villa libre, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la Sci Wouri de sa demande subsidiaire contre l'agence immobilière ;
AUX MOTIFS QUE la Sci Wouri estime que l'agence immobilière a mené ces négociations avec une légèreté blâmable ;
Qu'au vu de ce qui vient d'être rappelé, il ne peut être dit que la société Citya a commis une faute ; que la Sci Wouri ne peut reprocher à l'agence immobilière le fait que les époux X... n'aient pas accepté ses conditions ;
ALORS QUE l'agent immobilier engage sa responsabilité délictuelle à l'égard de l'acquéreur lorsque l'échec de l'opération est imputable aux fautes qu'il commet ;
D'où il résulte qu'en estimant que l'acquéreur ne pouvait reprocher à l'agence immobilière le fait que les vendeurs n'aient pas accepté ses conditions, lorsque l'agence n'avait pas clairement indiqué à l'acquéreur que l'immeuble vendu par son entremise était partiellement occupé, ce dont elle a déduit l'existence d'un désaccord entre les parties pour conclure à l'absence de vente, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
ALORS QU'EN OUTRE en s'abstenant de répondre aux conclusions de la Sci Wouri faisant valoir que l'agence immobilière s'était comportée de manière fautive en lui cachant ainsi qu'à son notaire le fait que le 29 avril 2003, les époux X... avaient dénoncé le mandat de vente et en acceptant avec bienveillance la dénonciation du mandat intervenue dans le délai irrévocable de trois mois alors que la vente avait été réalisée depuis le 10 mars 2003 et que M. et Mme X... avaient confirmé expressément dans le mandat le pouvoir de vendre donné à l'agence, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement disant que la SCI Wouri devra régler aux époux X...
B...
Z...
A... la somme de 10. 000 euros et à la société Citya Immobilier celle de 1. 000 euros pour procédure abusive ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur les demandes de dommages intérêts des époux X... et de l'agence immobilière :
Que la procédure de la SCI Wouri ne peut être considérée comme fautive même si elle n'était pas fondée ;
Que les demandes de dommages intérêts formées contre elle seront rejetées » (arrêt, p. 8) ;
ALORS QUE la Cour d'appel qui relevait dans sa motivation que « la procédure de la SCI Wouri ne peut être considérée comme fautive » ne pouvait dans son dispositif « confirme en toutes ses dispositions le jugement » qui avait condamné la SCI Wouri au paiement de dommages intérêts pour procédure abusive ; qu'elle a ainsi entaché son arrêt d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS DU JUGEMENT, à supposer qu'ils aient été adoptés implicitement par l'arrêt, QUE
« la SCI Wouri considérait que son offre, valable jusqu'au 01 avril à 17 heures, avait été acceptée et appuyait sa démonstration sur le fait que son offre avait ainsi été acceptée le 01 avril à 16 heures 59 soit une minute avant que son offre ne soit caduque ; agir en justice à partir d'éléments factuels aussi peu sérieux (et sans même offrir de démontrer que les horloges des différents télécopieurs utilisés aient été convenablement ajustées) caractérise le volonté d'instrumentaliser les procédures judiciaires pour contraindre les vendeurs à une vente. La SCI Wouri a donc commis une faute et a fait subir un préjudice moral et économique certain aux époux X... qui sera réparé par le versement d'une somme de 10. 000 euros ;
Que la SA CITYA Immobilier Berge Casala réclame également la réparation du préjudice subi en raison de cette procédure abusive, une somme de 1. 000 euros lui sera attribuée en réparation du préjudice moral provoqué par la présente procédure » (jugement, p. 5) ;
ALORS QUE, et à supposer que la Cour d'appel n'ait entendu rejeter que la demande de dommages intérêts présentée à raison de la procédure du second degré et adopter la motivation des premiers juges, qu'elle n'a pas alors caractérisé la faute commise par la SCI Wouri faisant dégénérer en abus son droit d'agir en justice, en violation de l'article 1382 du Code civil.