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17/12/2008 | FRANCE | N°07-43974

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 décembre 2008, 07-43974


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M.
X...
, engagé le 12 septembre 2000 par la société GKN France en qualité de consultant a été licencié le 20 décembre 2003 pour motif économique ;

Sur le moyen pris en ses deux premières branches :

Vu l'article L. 321-1 alinéa 1, devenu l'article L. 1233-3 du code du travail ;

Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse l'arrêt retient que l'employeur ne peut se prévaloir de difficultés économiques prée

xistantes à l'embauche du salarié ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre de licenciement fai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M.
X...
, engagé le 12 septembre 2000 par la société GKN France en qualité de consultant a été licencié le 20 décembre 2003 pour motif économique ;

Sur le moyen pris en ses deux premières branches :

Vu l'article L. 321-1 alinéa 1, devenu l'article L. 1233-3 du code du travail ;

Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse l'arrêt retient que l'employeur ne peut se prévaloir de difficultés économiques préexistantes à l'embauche du salarié ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre de licenciement faisait état de l'aggravation des difficultés économiques et de leur extension aux autres sociétés du groupe postérieurement à l'engagement du salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le moyen pris en sa troisième branche :

Vu l'article L. 321-1 alinéa 1, devenu l'article L. 1233-3 du code du travail ;

Attendu que l'arrêt retient encore que le poste du salarié n'a pas été supprimé mais externalisé ;

Qu'en statuant ainsi alors que l'externalisation des tâches par recours à une entreprise extérieure constitue une suppression de poste au sens de l'article L. 321-1, alinéa 1, devenu l'article L. 1233-3 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen pris en sa quatrième branche :

Vu l'article L. 321-1 devenu l'article 1233-4 du code du travail ;

Attendu que l'arrêt retient enfin que l'employeur ayant seulement proposé au salarié des emplois de commerciaux d'une technicité et d'une rémunération inférieure à son poste de consultant réseaux, a méconnu son obligation de reclassement ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'à défaut d'emplois relevant de la même catégorie que celui qu'occupe le salarié, l'employeur doit lui proposer les postes disponibles de catégorie inférieure, la cour d'appel qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si l'absence de postes équivalents tant dans l'entreprise qu'au sein du groupe ne rendait pas le reclassement impossible, a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et ordonné le remboursement des indemnités de chômage, l'arrêt rendu le 13 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M.
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aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Global Knowledge Network France,

Ce moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que Monsieur
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avait été licencié le 20 décembre 2003 sans cause réelle et sérieuse et ‘ avoir condamné la société GKN à lui payer la somme de 82 800 euros à titre de dommages-intérêts.

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement qui a été adressée à l'appelant le 20 décembre 2003, et qui fixe les limites du litige est ainsi conçue : " Au cours des dernières semaines, il a été largement exposé et débattu devant le Comité d'entreprise des graves difficultés économiques auxquelles la Société GLOBAL KNOWLEDGE NETWORK est confrontée. La situation économique de la Société s'est particulièrement détériorée au cours des trois dernières années, les pertes s'étant également accrues au niveau du groupe.

En France, la Société n'a cessé d'accumuler des pertes depuis 1997, et ce malgré un apport de 50 millions de Francs de sa société mère en décembre 2000, par augmentation de capital ; Depuis, cette détérioration a continué de se poursuivre sans aucune perspective d'amélioration, et ce en dépit du soutien de sa société mère, qui elle même connaît des pertes depuis 2000. Cette détérioration de la situation, qui aujourd'hui touche l'ensemble de l'activité du groupe, est due à un vif déclin du marché de la formation informatique en même temps qu'à une concurrence de plus en plus forte. Face à ce constat et en l'absence de perspective d'amélioration, une réorganisation de la Société ainsi qu'un repositionnement sur le marché sont nécessaires afin de permettre à la Société de faire face à ces difficultés et de retrouver sa compétitivité. C'est dans ces conditions que les instances dirigeantes américaines, européennes et françaises ont décidé de procéder à une réorganisation et à une nouvelle stratégie qui implique une réduction des effectifs par la suppression de certains postes. Il a notamment été décidé la suppression des formations à faibles rentabilités et un réajustement des activités aux nouveaux besoins réduits du marché. C'est dans ce cadre que la Société est obligée, dans la catégorie professionnelle à laquelle vous appartenez, de supprimer l'ensemble des postes d'instructeurs non diplômés ou certifiés Cisco et ainsi de supprimer votre poste. Vous n'avez pas donné suite aux offres de reclassement qui vous ont été proposées. Dans ces conditions, nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif économique " ; que tout licenciement économique suppose la survenance d'un fait nouveau depuis l'engagement du salarié concerné au regard de l'évolution de la situation financière de l'entreprise ; qu'en l'espèce la lettre de licenciement précitée énonce sans ambiguïté que dès l'embauche de M.

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, le 2 janvier 2001, la Société GKN France " n'a cessé d'accumuler des pertes depuis 1997, malgré un apport de 50 millions de Francs de sa Société mère en décembre 2000 " que c'est donc à juste titre que l'appelant soutient que son employeur ne pouvait se prévaloir de circonstances économiques qui étaient connues de lui dès l'embauche et qui ne pouvaient constituer pour cette raison une cause de licenciement fondée sur des faits nouveaux ; qu'un tel licenciement est discrétionnaire et donc illégal ; que M.
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ajoute à juste titre, sans être sérieusement contredit, que son poste ainsi que plusieurs autres de sa catégorie ont de l'aveu même de l'employeur, été externalisés et non supprimés, ce qui ne correspond pas à une suppression de poste ; Considérant enfin que la Société GKN ne peut affirmer que M.

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a refusé un reclassement, alors que les postes qui lui ont alors été proposés ne constituaient pas des offres satisfaisantes de reclassement, puisque que de nature différente et de rémunération très inférieure ; Considérant en effet que GKN n'a pas proposé à M.

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des postes de consultant réseaux, mais seulement des postes commerciaux d'une technicité inférieure à son poste ; que dans ces conditions, et sans qu'il y ait lieu d'examiner la question subsidiaire de l'ordre des licenciements, il convient de juger que le licenciement critiqué est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'eu égard à la perte de ressources de M.
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au regard de sa perte de salaire et de sa perception exclusive de l'indemnité versée par l'ASSEDIC pendant 3 ans il convient d'allouer à l'appelant une somme de 82 800,00 à titre de dommages-intérêts Considérant qu'eu égard aux conditions du licenciement effectué par GKN, dans les conditions ci-dessus rapportées il convient de faire application des dispositions de l'article L. 122-14-4 2ème § à hauteur de 6 mois ;

ALORS D'UNE PART, QU'il appartient au juge d'apprécier la réalité et le sérieux du motif économique invoqué par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que la lettre de licenciement, telle que rappelée par l'arrêt, justifiait la rupture par le fait que depuis l'année 2000, qui était celle de l'engagement de Monsieur
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, la détérioration de la situation économique et financière de la société s'était accrue malgré le soutien de la société mère et que cette détérioration de la situation touchait, la fin de l'année 2003, l'ensemble du groupe qui subissait des pertes sans perspective d'amélioration ; qu'il s'en déduisait que la société GKN invoquait bien comme cause de licenciement des faits nouveaux survenus depuis l'engagement du salarié dont il appartenait aux juges de vérifier s'il justifiaient la suppression d'emploi à l'origine du licenciement ; que la Cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'aggravation des difficultés économiques de la société et leur extension au groupe auquel elle appartenait, dont faisait état la lettre de licenciement, ne constituaient pas une cause économique de licenciement, a violé l'article L. 122-14-2 du Code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART QUE l'aggravation des résultats négatifs d'une société depuis plusieurs années et la dégradation importante de la situation économique et financière de l'ensemble du groupe auquel elle appartient constitue une cause économique de licenciement que l'employeur peut invoquer pour justifier la suppression de l'emploi d'un salarié quand bien même de certaines difficultés économiques auraient préexisté à l'engagement de ce salarié au sein de l'entreprise ; que la Cour d'appel qui s'est bornée, pour déclarer le licenciement de Monsieur
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« discrétionnaire et illégal », à faire état de ce que les résultats déficitaires depuis 1997 de la société GKN France, malgré un apport de 50 millions de francs de la société mère en décembre 2000, étaient connus dés l'embauche du salarié en janvier 2001, statuant ainsi par un motif inopérant, sans rechercher comme elle y était invitée, si la dégradation de la situation économique et financière de la société GKN France mais également du Groupe GKN Inc à partir de l'année 2001 jusqu'au moment du licenciement, en décembre 2003, n'avaient pas rendu nécessaires les mesures de réorganisation décidées qui avaient conduit au licenciement de Monsieur
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, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3 et L. 321-1 du Code du travail ;

ALORS DE TROISIEME PART QUE la suppression d'un poste, même si elle s'accompagne de la reprise des tâches accomplies par le salarié licencié par un intervenant indépendant extérieur à l'entreprise, est une suppression d'emploi ; qu'en déniant la réalité de la suppression du poste d'instructeur de Monsieur
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au motif que son poste ainsi que plusieurs autres de sa catégorie ont été externalisés et non supprimés, la Cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du Code du travail ;

ET ALORS ENFIN QUE dans le cadre de son obligation de reclassement dans l'entreprise, l'employeur peut proposer au salarié concerné par une mesure de licenciement des postes de nature différente et de catégorie inférieure à celui qu'il occupait précédemment dès lors qu'il n'existe pas d'emploi disponible de même catégorie ; qu'en déduisant la méconnaissance par la société GKN de son obligation de reclassement de ce qu'il avait été seulement proposé à Monsieur
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des emplois de commerciaux d'une technicité et d'une rémunération inférieures à son poste de consultant réseaux sans rechercher si la société GKN ne justifiait pas de recherches auprès des différentes sociétés du groupe demeurées infructueuses en raison des difficultés économiques rencontrées par ces dernières et si les postes proposés au salarié ne constituaient pas les seuls disponibles, tous les postes de la catégorie des instructeurs à laquelle appartenait Monsieur
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ayant été supprimés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 321-1 et L. 122-14. 3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-43974
Date de la décision : 17/12/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 déc. 2008, pourvoi n°07-43974


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.43974
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