LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 23 octobre 2007), que la caisse d'assurance vieillesse des artisans Ain, Rhône, Nord-Isère, aux droits de laquelle vient la caisse du Régime social des indépendants région Rhône (la caisse), estimant que M. X... ne remplissait plus depuis le 1er janvier 1999, date d'entrée en vigueur de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 modifiant l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, la condition de cessation d'activité en raison de la perception des redevances de la location-gérance de son fonds artisanal de maçonnerie, lui a réclamé le remboursement des arrérages de la pension de retraite qu'elle lui avait versés du 1er octobre 2000 au 30 septembre 2002, date de vente de ce fonds ; que M. X... a saisi d'un recours la juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de remboursement, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en statuant ainsi, tout en constatant que M. X... exerçait la fonction de gérant dans la SARL qu'il avait constituée, et qu'il percevait des revenus de la location gérance de ce même fonds, considérés comme des revenus professionnels en application de l'article L. 131-6, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, de sorte que cet assuré avait repris « une activité professionnelle dans l'entreprise exploitée à la date de la cessation d'activité non salariée », ce qui justifiait la suspension du service de sa pension de vieillesse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 634-6, alinéa 2, du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable en l'espèce, ainsi que des articles L. 613-1 et L. 622-3 du même code et du texte susvisé, qu'elle a violés par fausse application ;
2°/ qu'en se bornant à faire application séparément des dispositions de l'article 7 de la loi du 23 décembre 1998, devenu l'article L. 131-6, alinéa 3, et de l'article L. 634-6 du même code, sans rechercher si M. X... n'exerçait pas une activité professionnelle au sens de ces deux textes combinés, la cour d'appel a privé également sa décision de base légale au regard de ces derniers ;
3°/ qu'en relevant d'office le moyen tiré d'un éventuel exercice par l'assuré d'une activité de « faible importance », lequel n'avait été invoqué par aucune des parties et n'était donc pas dans le débat, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ qu'en procédant de la sorte, sans même soumettre le moyen qu'elle entendait relever à la discussion préalable des parties, la cour d'appel a violé également l'article 16 du code de procédure civile ;
5°/ qu'en faisant application des circulaires des 4 juillet 1984 et 9 avril 1985 pour justifier le maintien de la pension de retraite de M. X..., alors que ces deux circulaires étaient dépourvues de force légale et ne pouvaient déroger à l'application des textes législatifs, la cour d'appel a violé l'article 1er du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
6°/ que dès lors qu'ils ont constaté que M. X... avait continué à percevoir sa pension de retraite tout en exerçant une activité professionnelle non salariée, les juges du fond auraient dû en déduire que le paiement de ces pensions pendant cette période était indu en application de l'article L. 634-6 du code de la sécurité sociale, de sorte qu'en disant le contraire, ils ont violé l'article 1235 du code civil ainsi que le texte susvisé ;
Mais attendu que l'arrêt relève, d'une part, que l'intéressé a donné son fonds artisanal en location-gérance à une société à responsabilité limitée dont il est resté le gérant non rémunéré, d'autre part, qu'il conteste exercer une activité professionnelle ; qu'il retient à bon droit qu'il appartient au demandeur en restitution de sommes de prouver le caractère indu du paiement ;
Et attendu qu'il résulte des articles L. 131-6 et L. 242-1 du code de la sécurité sociale, tels que modifiés par l'article 7 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, que sont soumis à cotisations sociales les revenus tirés de la location d'un établissement artisanal lorsque ces revenus sont perçus par une personne qui exerce une activité dans l'entreprise louée, de sorte qu'il appartenait à la caisse d'apporter la preuve d'une reprise d'activité de l'intéressé dans l'établissement artisanal qu'il avait donné en location-gérance ;
Que par ce seul motif substitué à ceux critiqués par le pourvoi, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse du Régime social des indépendants région Rhône aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse du Régime social des indépendants région Rhône ; la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour la caisse du Régime social des indépendants (RSI) région Rhône venant aux droits de l'AVA de l'Ain Rhône Nord Isère.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la caisse du RSI ne peut pas réclamer à Monsieur René X... le remboursement des pensions de retraite versées ;
AUX MOTIFS QU'il appartient au demandeur en restitution des sommes de prouver le caractère indu du paiement ; qu'aussi, pour prospérer dans leur action en remboursement, les caisses doivent rapporter la preuve d'un trop perçu de pension ; que l'article 7 de la loi de finances du 23 décembre 1998 applicable au 1er janvier 1999 a modifié les articles L 131-6 et L 242-1 du code de la sécurité sociale en soumettant à cotisations sociales les revenus tirés de la location d'un établissement artisanal lorsque ces revenus sont perçus par une personne qui exerce une activité dans l'entreprise louée ; que le dirigeant même non rémunéré d'une société y exerce une activité dans la mesure où il en assume la direction générale ; que dès lors que le dirigeant loue le fonds artisanal à sa société, les loyers sont soumis à cotisations ; que l'article 7 précité ne modifie pas le droit à pension et la circulaire du 23 août 1999 relative à sa mise en oeuvre évoque uniquement la question des cotisations sociales et aucunement le droit à pension ; que l'article L 634-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la modification législative du 21 août 2003 disposait qu'une pension de vieillesse était versée à un artisan sous la condition de la cessation définitive de l'activité ; que la combinaison de ces deux textes a alors conduit les organismes sociaux à se poser la question de savoir si les pensions servies postérieurement au 1er janvier 1999 devaient faire l'objet d'une procédure en répétition pour indû ; qu'à cette question, une première lettre ministérielle du 15 février 2000 a répondu qu'il pourra être procédé à la suspension pour l'avenir et après notification du service des pensions puis une seconde lettre ministérielle du 31 juillet 2000 a indiqué qu'une action en répétition de l'indu pourra être exercée pour les arrérages versés après le 1er octobre 2000 ; que cette même lettre souligne que les dispositions relatives à l'interdiction de cumuler un emploi et une retraite peuvent être appliquées conformément aux instructions contenues dans la circulaire du 4 juillet 1984 modifié par la circulaire du 9 avril 1985 ; que ladite circulaire apportait un assouplissement à l'ordonnance du 30 mars 1982 qui interdisait tout cumul entre revenus de retraite et revenus d'activité ; qu'en effet, elle admettait le cumul entre une pension de retraite et une activité de faible importance ; que la circulaire qualifiait d'activité de faible importance celle qui procurait un revenu annuel inférieur au tiers du salaire minimum de croissance et spécifiait que le revenu pris en considération était le revenu moyen perçu au cours des 5 années précédant celle de prise d'effet de la pension ; qu'ainsi, aucun texte ni législatif ni réglementaire dispose que les revenus d'une location gérance interdisent l'obtention d'une pension de retraite ; que la loi et la circulaire d'application se limitent à réglementer les cotisations ; que seule, la lettre ministérielle du 31 juillet 2000, par une analyse de deux textes combinés entre eux, le prévoit ; que cette lettre est interne aux services concernés et il n'est pas établi qu'elle ait été publiée dans un bulletin officiel ; qu'elle ne peut pas recevoir la qualification de directive dans la mesure où elle ne revêt pas un caractère impératif ; qu'en effet, en énonçant qu'une action en répétition de l'indu pourra être exercée elle se borne à évoquer une possibilité et non une obligation ; que dès lors, cette lettre sur laquelle s'appuient les caisses n'est pas opposable aux administrés et ne s'impose pas au juge ; que les caisses ne justifient donc pas du fondement légal de leur action ; qu'en outre, les caisses ne démontrent pas que René X... percevait de la location gérance des revenus d'un montant les excluant de la définition de faible activité donnée par la circulaire du 4 juillet 1984 modifiée par la circulaire du 9 avril 1985 ; qu'en conséquence, les caisses ne rapportant pas la preuve d'un paiement indu ne peuvent pas réclamer à René X... le remboursement des pensions de retraite versées et le jugement entrepris doit être infirmé ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en statuant ainsi, tout en constatant que Monsieur X... exerçait la fonction de gérant dans la SARL qu'il avait constituée, et qu'il percevait des revenus de la location gérance de ce même fonds, considérés comme des revenus professionnels en application de l'article L 131-6 alinéa 3 du Code de la sécurité sociale, de sorte que cet assuré avait repris « une activité professionnelle dans l'entreprise exploitée à la date de la cessation d'activité non salariée », ce qui justifiait la suspension du service de sa pension de vieillesse, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L 634-6 alinéa 2 du Code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable en l'espèce, ainsi que des articles L 613-1 et L 622-3 du même code et du texte susvisé, qu'elle a violés par fausse application ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en se bornant à faire application séparément des dispositions de l'article 7 de la loi du 23 décembre 1998, devenu article L 131-6 alinéa 3, et de l'article L 634-6 du même code, sans rechercher si Monsieur X... n'exerçait pas une activité professionnelle au sens de ces deux textes combinés, la Cour d'appel a privé également sa décision de base légale au regard de ces derniers ;
ALORS, DE TROISIÈME PART, QU'en relevant d'office le moyen tiré d'un éventuel exercice par l'assuré d'une activité de « faible importance », lequel n'avait été invoqué par aucune des parties et n'était donc pas dans le débat, la Cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE QUATRIÈME PART, QU'en procédant de la sorte, sans même soumettre le moyen qu'elle entendait relever à la discussion préalable des parties, la Cour d'appel a violé également l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE CINQUIÈME PART, QU'en faisant application des circulaires des 4 juillet 1984 et 9 avril 1985 pour justifier le maintien de la pension de retraite de Monsieur X..., alors que ces deux circulaires étaient dépourvues de force légale et ne pouvaient déroger à l'application des textes législatifs, la Cour d'appel a violé l'article 1er du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
ALORS, ENFIN, QUE, dès lors qu'ils ont constaté que Monsieur X... avait continué à percevoir sa pension de retraite tout en exerçant une activité professionnelle non salariée, les juges du fond auraient dû en déduire que le paiement de ces pensions pendant cette période était indu en application de l'article L 634-6 du Code de la sécurité sociale, de sorte qu'en disant le contraire, ils ont violé l'article 1235 du Code civil ainsi que le texte susvisé.