LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 425-1, alinéa 4, du code du travail, recodifié sous l'article L. 2411-5, alinéa 2 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'une unité économique et sociale a été reconnue entre les sociétés Motive, CBM distribution et Procède, par jugement du 7 mars 2002 ; que des institutions représentatives du personnel ont été mises en place, M. X... ayant été élu membre de la délégation unique du personnel, le 14 mai 2002 ; que par arrêt du 17 septembre 2003 (pourvoi n° 02-60.320), la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé la décision au motif que toutes les sociétés concernées n'avaient pas été régulièrement convoquées ; que M. X... a été licencié pour faute grave, le 20 octobre 2003, sans que l'employeur ait saisi l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation ; que revendiquant la qualité de salarié protégé, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande d'annulation de son licenciement ;
Attendu que pour débouter le salarié de cette demande, l'arrêt confirmatif énonce qu'à la suite de l'arrêt de cassation du 17 septembre 2003, l'institution représentative du personnel doit être considérée, en vertu de l'article 625 du code de procédure civile, comme n'ayant jamais existé, de sorte que le salarié n'était pas protégé au moment de son licenciement ;
Attendu, cependant, que l'annulation d'un jugement reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale ne fait perdre aux salariés élus leur qualité de membre de l'institution représentative mise en place dans ce cadre qu'à compter du jour où elle est prononcée ; que ces salariés bénéficient, à partir de cette date, du délai de protection de six mois prévu à l'article L. 425-1, alinéa 4, du code du travail, recodifié sous l'article L. 2411-5, alinéa 2 ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Motive aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour M. Mohamed X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande en nullité de son licenciement et du paiement de ses salaires en raison de la protection dont il bénéficiait comme ancien délégué du personnel durant les six mois suivant l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 17 septembre 2003, soit jusqu'au 16 mars 2004 ;
AUX MOTIFS QU' « aux termes de l'article L. 425-1 les anciens représentants élus du personnel restent protégés pendant six mois après l'expiration de leur mandat ou, comme en l'espèce, la disparition de l'institution.
Excipant de ce texte, il considère que l'institution a disparu à la date de l'arrêt de la Cour de Cassation du 17 septembre 2003, en sorte qu'il était encore protégé le 20 octobre 2003, date de son licenciement.
Toutefois cette analyse méconnaît les dispositions de l'article 625 du nouveau code de procédure civile ainsi libellé :
« Sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.
Elle entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ».
Il s'ensuit logiquement que l'institution est considérée comme n'ayant jamais existé, en sorte que Monsieur Mohamed X... n'était pas salarié protégé au moment de son licenciement, lequel pouvait dont être prononcé sans autorisation administrative.
En conséquence, Monsieur Mohamed X... doit être débouté de sa demande d'annulation du licenciement et des demandes afférentes d'indemnités » (arrêt attaqué p. 4).
ALORS QUE si l'institution de la délégation unique du personnel de la Société MOTIVE a disparu à la suite de l'arrêt de la Cour de Cassation du 17 septembre 2003 annulant le jugement du Tribunal d'Instance qui en constatait l'existence, Monsieur X... n'en bénéficiait pas moins d'une protection de six mois comme ancien délégué du personnel, le délai courant de la disposition de la délégation du personnel résultant de l'arrêt de la Cour de Cassation, jusqu'au 16 mars 2004 ; que la disposition de l'article 625 du NCPC d'ordre purement procédural ne pouvait affecter la disposition de fond de l'article L. 425.1 alinéa 3 du Code du Travail érigeant une protection spécifique ; que la Cour d'Appel a violé les articles 625 du NCPC et L. 425-1 alinéa 3 du Code du travail ;
ET QUE cette protection spécifique entraînait la nullité du licenciement intervenu durant le délai de six mois et le paiement des salaires de Monsieur X... pendant le même temps ; que la Cour d'AIX-en-PROVENCE a violé, à ce titre encore, les mêmes articles 625 du NCPC et L. 425.1 alinéa 3 du Code du Travail.