LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... André,
contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 9 octobre 2007, qui, pour infractions à la législation sur les contributions indirectes et à la réglementation sur l'organisation et l'assainissement du marché du vin, l'a condamné à des amendes et pénalités fiscales ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 509, 515 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et omission de statuer ;
"en ce que l'arrêt, saisi de l'appel général formé par André X..., prévenu, a statué uniquement sur les actions douanière et civile ;
"alors que l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans la limite fixée par l'acte d'appel et par la qualité de l'appelant ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces de la procédure et des mentions de l'arrêt qu'André X..., prévenu, a interjeté appel de « l'ensemble des dispositions du jugement rendu » lequel avait prononcé à son encontre, sur l'action publique, huit amendes d'un montant de 100 euros chacune, de sorte que saisie de cet appel et nonobstant le caractère irrecevable de l'appel du ministère public, la cour se trouvait saisie de la cause quant à l'action publique et devait statuer sur l'appel interjeté par le prévenu sur l'action publique ; qu'en conséquence, en se prononçant uniquement sur les actions douanière et civile, la cour a violé les textes visés au moyen" ;
Attendu que la citation délivrée à la requête de l'administration des douanes et droits indirects ne concernant que des infractions passibles de sanctions fiscales, le moyen, qui remet en cause l'étendue de la saisine de la juridiction correctionnelle, est inopérant ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 235 du livre des procédures fiscales, 496 et 497 du code procédure pénale ;
"en ce qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le ministère public, déclaré irrecevable en son appel, en application des dispositions de l'article L. 235 du livre des procédures fiscales, a été entendu en ses observations ;
"aux motifs que le prévenu, André X..., doit répondre de fausse déclaration de récolte, de fausse déclaration de stock, de fausses déclarations de tirage ou défaut de déclaration de tirage ainsi que de fabrication de vins mousseux ne pouvant prétendre à l'appellation « champagne » ; que ces infractions ne sont pas punies d'une peine d'emprisonnement de telle sorte que l'appel du ministère public sera déclaré irrecevable ; que le ministère public a cependant été justement entendu en ses seules observations parfaitement recevables en sa qualité de partie jointe ;
"alors que le ministère public, fût-il partie jointe, ne peut être entendu en ses réquisitions ou observations dès lors que son appel a été déclaré irrecevable ; qu'en déclarant néanmoins le ministère public recevable « en ses simples observations à l'audience », après avoir déclaré son appel irrecevable, la cour a violé les textes visés au moyen" ;
Attendu qu'après avoir constaté que l'action fiscale était seule en cause et déclaré irrecevable l'appel du procureur de la République, l'arrêt énonce que le ministère public, partie jointe, est entendu en ses observations ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des articles L. 235 du livre des procédures fiscales, 458 et 512 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 407, 408, 1791, 1794-3 et 1804 du code général des impôts, article 2 de la loi n°77-523 du 23 mai 1977, 593 du code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif a déclaré André X... coupable d'avoir, courant 2000, 2001 et 2002, procédé à de fausses déclarations de récoltes, de stocks, de tirage ou défaut de déclaration de tirage et de fabrication de vin mousseux à l'intérieur de la Champagne viticole délimitée et a condamné le prévenu au paiement de deux pénalités proportionnelles de 70 000 euros chacune pour les deux premières infractions et à une pénalité proportionnelle de 60 000 euros au titre l'infraction de fabrication de vin mousseux à l'intérieur de la Champagne viticole délimitée ;
"aux motifs adoptés que le 28 avril 2003, la direction régionale des douanes se présentait pour un contrôle au siège de l'exploitation de la SCEV Lenique, représentée par son gérant, André X... ; que des anomalies étaient constatées par les agents des douanes ; - un manquant de trois mille cinquante et une bouteilles de 0,75 litre de vin blanc mousseux de moins de quinze mois, issus du tirage du 14 mai 2002 – un manquant de cinq mille deux cents cinquante bouteilles de 0,75 litre de vin blanc mousseux provenant de tirages mais non présentes sur l'exploitation ; qu'entendu sur ces constatations, André X... reconnaissait effectuer un tirage non déclaré par an d'environ mille bouteilles qu'il prétendait réserver à sa consommation personnelle ; que s'agissant des autres constatations, il affirmait qu'en raison de la tempête de 1999, le toit de son hangar s'était effondré cassant deux à trois mille bouteilles ; qu'il ajoutait avoir été victime d'un incendie le 7 avril 2003 qui avait dégradé entre vingt-cinq et trente mille bouteilles ; qu'il convient de constater qu'André X... ne renverse pas les constations matérielles effectuées par les agents des douanes ;
"et aux motifs propres que l'inventaire contradictoire révélait un manquant de deux cent soixante sept bouteilles de 0,375 litres, deux cent soixante -et-une bouteilles de 0,75 litres, cinquante-six magnums et deux bouteilles de quatre litres de vin AOC Champagne, trois mille cinquante-et-une bouteilles de 0,75 litres de vin AOC Champagne de moins de quinze mois et relevaient la présence de trois mille cinquante-et-une bouteilles vides placées au milieu d'un tas de bouteilles pleines de vins AOC de Champagne ; que le prévenu qui n'avait fait aucune diligence auprès du service régional de la viticulture, indiquait que suite à une fuite de cuve le 14 mai 2002, il n'avait pas pu tirer la quantité qu'il avait effectivement déclarée de trente et un mille cent treize bouteilles mais seulement vingt huit mille soixante-deux bouteilles et que pour combler le manquant, il avait remplacé la différence de trois mille cinquante-et-une bouteilles non tirées par des bouteilles vides de récupération ou neuves non utilisées ; que le prestataire de service facturait cependant et néanmoins un tirage de trente et un mille cent-treize bouteilles le prévenu étant mal venu de contester la facture en prétendant qu'elle serait fausse ; qu'au demeurant il est établi que le prévenu avait acquis trente-neuf mille cent quatre-vingt-douze bouteilles de plus par rapport aux tirages légaux sur une période de trois ans dont le prévenu soutient vainement que les facturations seraient fausses alors qu'acquittées ; qu'après avoir allégué d'une destruction de bouteilles lors d'un incendie le 7 avril 2003, le prévenu admettait avoir tiré sans déclaration, mille sept cent cinquante bouteilles de vin mousseux par an, soit cinq mille deux cent cinquante bouteilles sur la période non prescrite, bouteilles produites bien évidemment avec des surplus de production non déclarée ; qu'en ne mentionnant pas sur les déclarations de récolte 2000, 2001 et 2002 la production ayant permis d'élaborer les cinq mille trois cent cinquante bouteilles de 0,75 litres, le prévenu a contrevenu à l'obligation prévue et réprimée par les dispositions des articles 1791 et 1794-3° du code général des impôts ; que, tenu de renseigner une déclaration des stocks annuelle au 31 juillet de l'année, le prévenu n'a pas sur les déclarations 2000, 2001 et 2002 mentionné les cinq mille trois cent cinquante bouteilles précitées et partant, manqué à l'obligation prévue et réprimée par les mêmes dispositions que ci-dessus ; qu'en majorant les quantités réellement tirées le 14 mai 2002 et en ne déclarant pas le tirage des cinq mille trois cent cinquante bouteilles, le prévenu a également manqué à ses obligations déclaratives telles que prescrites par les dispositions ci avant ; que, par ailleurs qu'en élaborant cinq mille trois cent cinquante bouteilles avec les raisins au-delà du plafond limite de classement, le prévenu a également contrevenu aux dispositions de l'article 2 de la loi n° 77523 et encourt les sanctions prévues à l'article 1804 code général des impôts ; que c'est vainement que le prévenu critique les procès-verbaux dès lors qu'ils font foi jusqu'à preuve contraire non rapportée en l'espèce ; que, bien plus le prévenu, incapable d'expliquer les distorsions relevées sur la base de ses propres déclarations et des constatations auxquelles il était procédé contradictoirement ne saurait exciper de ses manquements à ses obligations déclaratives voire tirer argument de sinistres ou de sa prétendue consommation personnelle fantaisiste, alors que le dommage n'a même pas été invoqué auprès de la compagnie d'assurances ou encore tirer argument de pratiques d'achats sans de fausses factures, pour justifier sa carence et son incurie dans la gestion de ses affaires ;
"alors que le juge est tenu de répondre aux chefs péremptoires des conclusions d'appel ; que, dans ses conclusions, André X... contestait les reconstitutions et déductions opérées par les agents des douanes dès lors qu'aucune constatation matérielle ne venait justifier le chiffrage opéré et qu'aucune bouteille, capsules, muselet et sucre n'avait été mis en évidence en distorsion avec les constatations comptables, qu'aucun stock n'a été trouvé ; qu'en se fondant néanmoins sur les seules reconstitutions et déductions faites par l'administration fiscale sans répondre au moyen précité, la cour a violé les textes visés au moyen" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt qu'André X... est poursuivi, sur le fondement d'un procès-verbal d'infractions dressé par des agents des douanes, pour avoir, en qualité de gérant d'une société d'exploitation viticole, au titre des campagnes 2000, 2001 et 2002, d'une part, déposé des fausses déclarations de récolte et de stock, d'autre part, fabriqué du vin mousseux à l'intérieur de la zone délimitée d'appellation champagne ;
Attendu que, pour l'en déclarer coupable, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé ces infractions en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 749 et 750 du code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré André X... coupable d'avoir, courant 2000, 2001 et 2002, procédé à de fausses déclarations de récoltes, de stocks, de tirage ou défaut de déclaration de tirage et de fabrication de vin mousseux à l'intérieur de la Champagne viticole délimitée et a condamné le prévenu au paiement de deux pénalités proportionnelles de 70 000 euros chacune pour les deux premières infractions et à une pénalité proportionnelle de 60 000 euros au titre de l'infraction de fabrication de vin mousseux à l'intérieur de la Champagne viticole délimitée et d'avoir dit que la contrainte judiciaire pourra s'appliquer conformément aux dispositions des articles 749 et 750 du code de procédure pénale ;
"alors qu' il résulte des articles 749 et 750 du code de procédure pénale, entrés en vigueur le 1er janvier 2005, que la contrainte judiciaire, y compris en cas d'inexécution volontaire de condamnations à des amendes fiscales ou douanières, ne peut être ordonnée que par le juge de l'application des peines ; qu'en jugeant que la contrainte judiciaire pourra s'appliquer conformément aux dispositions précitées, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen" ;
Attendu que, le demandeur étant sans intérêt à critiquer les énonciations surabondantes de l'arrêt rappelant les dispositions d'un texte de loi sans en faire application, le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 1 500 euros les sommes qu'André X... devra payer, d'une part, à l'Institut national de l'origine et de la qualité, d'autre part au Comité interprofessionnel du vin de Champagne, au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Rognon conseiller rapporteur, Mme Nocquet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;