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03/06/2008 | FRANCE | N°07-86433

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 juin 2008, 07-86433


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean- Jacques, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 17 juillet 2007, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe de Joaquim Y..., Areski A..., Claude B..., Patrick C... et Manuel D... du chef de diffamation publique envers un particulier ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 23 et suivants, 29, 32 et suivants, 42 de

la loi du 29 juillet 1881, 593 du code de procédure pénale, défaut de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean- Jacques, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 17 juillet 2007, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe de Joaquim Y..., Areski A..., Claude B..., Patrick C... et Manuel D... du chef de diffamation publique envers un particulier ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 23 et suivants, 29, 32 et suivants, 42 de la loi du 29 juillet 1881, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé les prévenus des fins de la poursuite sans peine ni dépens ;
" aux motifs que le tribunal a très exactement analysé les éléments du dossier pour caractériser l'élément constitutif de la publicité de la diffusion de l'écrit à partir des déclarations de certains prévenus quant à la possibilité pour le personnel extérieur d'accéder au restaurant et quant à la distribution de la lettre d'information à des salariés d'entreprises extérieures au restaurant administratif ; qu'il ne s'agit nullement d'une probabilité mais d'un fait avéré admis par les prévenus eux- mêmes ; que là encore, sur le caractère diffamatoire de l'écrit, la cour fait sienne l'argumentation des premiers juges suivant lesquelles, la lettre d'information du syndicat CGT dresse indiscutablement un portrait de la partie civile attentatoire à son honneur et à sa considération ; que cette dernière y est effectivement présentée comme un chef autoproclamé allant jusqu'à arracher des affiches syndicales et se complaisant dans une lutte permanente contre le personnel, allant jusqu'à priver ces membres de leurs droits les plus élémentaires ; que plusieurs de ces griefs, s'ils étaient établis, seraient d'ailleurs constitutifs du délit d'entrave prévu et puni par l'article L. 431-1 du code pénal ; que sur ce point également, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a établi le caractère diffamatoire des propos poursuivis ; que, sur l'excuse de bonne foi, il n'est pas sans intérêt de qualifier techniquement et précisément la nature de l'écrit litigieux qui ne s'analyse pas en un tract stricto sensu mais comme une lettre diffusée certes à intervalles irréguliers mais destinée à l'information des adhérents ; qu'ainsi, l'écrit daté du 7 septembre 2004 évoque plusieurs autres conflits ou sujets d'opposition, avec la mise en cause d'autres responsables de l'entreprise, Schuster, Sarti et Tharcis ; que, s'agissant d'un écrit s'inscrivant donc dans une polémique syndicale entretenue à travers divers sujets depuis des mois, voire des années, les critères de la bonne foi définis par la jurisprudence doivent être transposés sur le terrain de la liberté d'expression syndicale ; qu'il est avéré que l'écrit litigieux ne pouvait, par comparaison de date, répondre au courrier daté de la veille adressé au syndicat CGT ; que cet écrit ne peut donc qu'être analysé comme une réaction épidermique, voire une contre- attaque, à la mise en garde adressée alors que la lettre, improprement qualifiée de tract, était au moment de la réception, rédigée et dactylographiée ; que le but d'une telle information apparaît légitime dans la mesure où dès la création du journal d'information, le syndicat en fixait l'objectif de faire un outil pour faire avancer la vérité ; que comme le dit le tribunal, la légitimité pour un syndicat représentatif de contester les pratiques d'un cadre au sein de l'entreprise ne saurait être remise en cause ; que, pour le surplus, Jean- Jacques X... n'est pas pris à parti à titre personnel mais en sa qualité de fer de lance de la direction, véritable décideur pour ce qui concerne le maintien d'un ordre jugé suranné ; qu'à aucun moment, la partie civile n'est attaquée sur sa personne ; qu'aucune mention extérieure à sa fonction n'est soulevée, fut- ce de façon allusive ; que la lettre d'information se veut un épisode supplémentaire du combat syndical engagé entre le syndicat et la direction de l'établissement, avec une pétition, une note de service, une dénonciation à l'inspection du travail ; que la personnalisation réalisée n'est pas détachée dudit conflit ; que la liberté d'expression syndicale constitue l'un des fondements essentiels de toute société démocratique caractérisée par le pluralisme, la tolérance et l'esprit d'ouverture ; que la Cour européenne des droits de l'homme a ainsi eu l'occasion, à plusieurs reprises, de rappeler la nécessité d'un juste équilibre à ménager entre la nécessité de protéger le droit à la liberté d'expression et celle de protéger les droits et la réputation de la personne mise en cause ; que le ton humoristique d'ailleurs dénué, contrevient aux allégations de Jean- Jacques X... de connotation anti- vérité autonome considérablement le ton général de la publication et caractérise une certaine prudence dans l'expression, la partie civile se voyant qualifiée tour à tour de chef autoproclamé, zélé, pratiquant des méthodes révolues et auteur de basses besognes en lieu et place de la direction ; que tout à fait logiquement la lutte syndicale se focalisait sur la personne, symbolisant l'autorité de manière non anonyme, ce qui justifie l'accroche de son nom patronyme ; que le ton adopté dans cette prise à partie et les termes choisis ne s'analysent donc nullement comme une prise à partie destinée à atteindre la personne mais dirigée contre le responsable mis en avant par la direction ; qu'il y a lieu en conséquence, d'admettre les prévenus au bénéfice de l'excuse de bonne foi ;
" alors que, d'une part, en affirmant que l'écrit litigieux ne s'analyse pas en un tract stricto sensu mais comme une lettre diffusée, certes à intervalles irréguliers, mais destinée à l'information des adhérents, tout en relevant, par ailleurs, que ce tract a été distribué à d'autres personnes que les adhérents, la cour d'appel s'est prononcée par motifs contradictoires et a violé les textes susvisés ;
" alors que, d'autre part, ayant relevé que l'écrit litigieux évoque plusieurs autres conflits ou sujets d'opposition avec la mise en cause d'autres responsables de l'entreprise, que s'agissant d'un écrit s'inscrivant dans une polémique syndicale entretenue à travers divers sujets depuis des mois, voire des années, les critères de la bonne foi doivent être transposés sur le terrain de la liberté d'expression syndicale, le but d'une telle information apparaît légitime dans la mesure où dès la création du journal d'information, le syndicat en fixait l'objectif de faire un outil pour faire avancer la vérité, tout en relevant que le document a été distribué en dehors des adhérents, la cour d'appel, qui qualifie le tract tantôt de lettre diffusée à intervalles irréguliers, destinée à l'information des adhérents, tantôt de journal d'information, s'est prononcée par motifs contradictoires et a violé les textes susvisés ;
" alors que, de troisième part, le demandeur rappelait que si la nature même de la polémique syndicale exige qu'une certaine liberté de ton soit admise, il n'en est rien lorsqu'il s'agit d'une mise en cause personnelle, les prévenus l'ayant mis en cause personnellement comme l'a constaté le tribunal, sans mention de ses fonctions au sein de l'entreprise, sa personne étant l'objet de l'accroche à l'attention du lecteur, le demandeur invitant la cour d'appel à constater qu'un courrier daté de la veille, adressé au syndicat CGT par la direction de l'entreprise, demandait de cesser de mettre en cause personnellement les gens ; qu'ayant constaté le caractère diffamatoire de l'écrit puis, pour retenir l'excuse de bonne foi, que l'écrit litigieux ne pouvait répondre au courrier daté de la veille émanant de l'employeur, adressé au syndicat, qu'il ne peut être analysé comme une réaction épidermique voire une contre- attaque à la mise en garde adressée, dès lors que l'écrit litigieux était rédigé et dactylographié, que Jean- Jacques X... n'est pas pris à parti à titre personnel mais en sa qualité de fer de lance de la direction, véritable décideur pour ce qui concerne le maintien d'un ordre jugé suranné, qu'à aucun moment la partie civile n'est attaquée sur sa personne, qu'aucune mention extérieure à sa fonction n'est soulevée fut- ce de façon allusive, la cour d'appel, qui a dénaturé l'écrit litigieux, a entaché sa décision de manque de base légale, au regard des textes susvisés ;
" alors que, de quatrième part, le demandeur faisait valoir que sa mise en cause personnelle, comme l'a retenu le tribunal, était une réponse à un courrier daté de la veille, adressé au syndicat CGT par la direction par lequel il était demandé de « cesser de mettre en cause personnellement les gens » ; qu'en affirmant que par comparaison de date l'écrit litigieux ne pouvait être une contre- attaque à la lettre de la direction dès lors qu'il était, au moment de la réception, rédigé et dactylographié, sans rechercher si en maintenant la diffusion de cet écrit les prévenus n'avaient pas agi délibérément alors qu'ils avaient été mis en garde par l'employeur d'avoir à ne pas mettre en cause personnellement les gens et si ce comportement n'était pas exclusif de la bonne foi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors que, de cinquième part, le tract litigieux a pour accroche « X... commandements de l'UIP FAN ou l'Évangile selon Saint- X... » et met en cause personnellement et exclusivement le demandeur ; qu'en affirmant que le demandeur n'est pas pris à parti à titre personnel mais en sa qualité de fer de lance de la direction, véritable décideur pour ce qui concerne le maintien d'un ordre jugé suranné, qu'à aucun moment la partie civile n'est attaquée sur sa personne, aucune mention extérieure à sa fonction n'est soulevée fut- ce de façon allusive, que le ton humoristique, atténue considérablement le ton général de la publication et caractérise une certaine prudence dans l'expression, la partie civile se voyant qualifiée tour à tour de chef autoproclamé, zélé, pratiquant des méthodes révolues, et auteur de basses besognes en lieu et place de la direction, cependant que le tract litigieux allègue que le demandeur de sa propre initiative « pratique les méthodes que nous croyions révolues et qui reprennent vie avec les fers de lance E... et F... », après qu'il a été allégué que « arracher les affiches de la CGT dans les aires de repos et les pointeuses était croyons- nous la basse besogne qui avait été confiée à celui qui décide à l'UIP FAN » ; qu'il ressort de ce tract qu'il est imputé personnellement au demandeur d'avoir été au- delà de la mission qui lui aurait été confiée ; que dès lors, en affirmant que le ton adopté dans la prise à partie et les termes choisis ne s'analysent nullement comme une prise à partie destinée à atteindre la personne mais dirigés contre le responsable mis en avant par la direction, la cour d'appel n'a pas caractérisé la bonne foi et a violé les textes susvisés ;
" alors que, enfin, en affirmant que l'écrit litigieux se veut un épisode supplémentaire du combat syndical engagé entre le syndicat et la direction avec une pétition, une note de service, une dénonciation à l'inspection du travail, que la personnalisation de l'écrit n'est pas détaché de ce conflit, sans relever le lien entre ces différents faits et les allégations diffamatoires portées à l'encontre du demandeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs répondant aux conclusions dont elle était saisie, a, sans insuffisance ni contradiction, exposé les circonstances particulières invoquées par le prévenu et énoncé les faits sur lesquels elle s'est fondée pour justifier l'admission à son profit du bénéfice de la bonne foi ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Ménotti conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-86433
Date de la décision : 03/06/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 17 juillet 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 jui. 2008, pourvoi n°07-86433


Composition du Tribunal
Président : M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.86433
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