LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l' arrêt suivant :
Donne acte aux consorts X... et Y... du désistement de leur pourvoi ;
Donne acte aux consorts Z..., G..., H..., I..., J..., K..., L..., M..., N..., H..., O... et P... du désistement partiel de leur pourvoi au profit de M. A..., des consorts B..., des consorts C..., de Mme D... et de Mme E... ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal et du pourvoi provoqué qui est recevable :
Attendu que différentes personnes, ci- après dénommées les consorts Z..., ont souscrit par l' intermédiaire de M. F..., alors que celui- ci exerçait les fonctions de directeur salarié de la Société épargne actuelle puis à compter du 30 septembre 1994 de gérant de la société Point Privilège, sociétés de courtage d' assurances multi- produits bénéficiant toutes deux du statut de " correspondant AFER ", des conventions de trésorerie de la société Business Group Eurofinance (BGE) ainsi que des obligations de la société Business Group Funding (BGF), deux sociétés luxembourgeoises du groupe Business Group Hermes (BGH), qui ont par la suite été mises en liquidation judiciaire ; qu' elles ont assigné l' Association française d' épargne et de retraite (AFER), le GIE AFER et la Société épargne actuelle en réparation du préjudice moral et financier subi du fait de la perte de leur épargne en faisant notamment valoir qu' elles n' avaient souscrit les placements proposés que dans la croyance que ceux- ci étaient recommandés par l' AFER ;
Attendu que les consorts Z... et autres font grief à l' arrêt confirmatif attaqué (Paris, 25 mars 2005) de les avoir déboutés de leurs demandes, alors, selon le moyen :
1° / qu' il résulte des énonciations de l' arrêt attaqué que M. Guy F... avait été directeur salarié, du 1er octobre 1989 au 30 septembre 1994, de la Société épargne actuelle, qui était une société bénéficiant du statut de « correspondant AFER » jusqu' au 20 mars 1996, date à laquelle elle était devenue « déléguée régionale AFER » ; qu' en cette qualité, il faisait souscrire des adhésions à l' AFER et plaçait l' épargne des clients soit sur le contrat AFER, soit dans d' autres produits ; qu' après son départ de la Société épargne actuelle, M. F... avait créé la société Point Privilège et que, à sa demande, cette société avait été autorisée à utiliser le titre de « correspondant AFER » et, afin de l' aider à démarrer son activité, son ancien employeur s' était engagé à lui procurer une assistance logistique et financière ; qu' il avait continué à placer des contrats AFER, les obligations Business Group Hermes (BGH) et avait également fait souscrire des conventions de trésorerie de la société BGE, ainsi que des obligations de la BGF, sociétés appartenant au groupe BGH, mises par la suite en liquidation judiciaire au Luxembourg ; que l' arrêt attaqué constate encore qu' il n' était pas contesté que M. F... avait fait un large usage du logo AFER, notamment au moyen de papiers à lettres, de cartes de visite, d' objets publicitaires et de manifestations sponsorisées etc …, utilisation qui était justifiée par sa qualité de « correspondant AFER » ; qu' en niant, dès lors, l' existence d' un mandat apparent cependant que ces constatations caractérisaient l' existence d' un mandat apparent donné par l' AFER à M. F..., la cour d' appel n' a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l' article 1998 du code civil ;
2° / que la croyance en l' existence d' un mandat apparent est légitime et n' oblige nullement les tiers à vérifier les pouvoirs du mandant dès lors que les circonstances autorisaient cette absence de vérification ; que les circonstances ci- dessus rappelées, à savoir que M. F... avait été autorisé à utiliser le titre de correspondant AFER, qu' il avait continué de placer des contrats AFER dans le cadre de la société Point Privilège et fait un large usage du logo AFER (papier à lettres, cartes de visite, objets publicitaires et manifestations sponsorisées) autorisait les exposants à ne pas vérifier les pouvoirs de M. F... et de la société Point Privlège ; qu' en statuant comme elle l' a fait, la cour d' appel a encore violé l' article 1998 du code civil ;
3° / que l' énonciation selon laquelle le large usage fait par M. F... du logo AFER, notamment au moyen de papier à lettres, de cartes de visite, d' objets publicitaires et de manifestations sponsorisées était « justifié par sa qualité de « correspondant AFER » dont il n' était pas établi qu' il eût enfreint la « charte graphique » » est inopérante dès lors qu' il résulte des constatations de l' arrêt attaqué que la « charte du correspondant AFER » établie par l' AFER, était un document interne à l' AFER et qu' il se déduit, de cette constatation, que les clients de M. F... n' en avaient pas connaissance et ignoraient, par conséquent, en quelle qualité ce dernier plaçait les produits financiers autres que ceux de l' AFER qu' il diffusait ; que ce motif n' est par conséquent pas de nature à justifier le rejet de l' erreur légitime invoquée par les exposants au regard des dispositions de l' article 1998 du code civil ;
4° / qu' en tout état de cause sont inopérantes, ou à tout le moins insuffisantes, les énonciations selon lesquelles l' AFER avait pour seule activité la mise en oeuvre optimale d' un contrat collectif d' assurance sur la vie en vue de la retraite et que cet objet et l' appellation de ce contrat s' accompagnaient de modalités multiples destinées à assurer la transparence et la sécurité que pouvaient légitimement attendre les assurés qui s' adressaient à elle et que sa réputation de sérieux était indissociable de ces mesures destinées à assurer transparence et sécurité ; qu' en effet, en laissant M. F... et la société Point Privilège utiliser largement le logo AFER sans exercer aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles leur correspondant plaçait auprès de la clientèle les autres produits financiers qu' il diffusait, l' AFER a indéniablement commis une faute de négligence qui est à l' origine directe du préjudice subi par les exposants ; qu' est par conséquent inopérante pour justifier la solution de l' arrêt attaqué au regard des dispositions de l' article 1998 du code civil, la référence à la réputation de sérieux de l' AFER et aux conditions dans lesquelles les primes pour les produits AFER devaient être versées ;
5° / que dans leurs conclusions, les exposants faisaient valoir que dans le Sud- Est, la Société épargne actuelle, société anonyme dont le capital était entièrement détenu par l' Abeille Vie, diffusait exclusivement des produits d' assurance AFER, que M. F... entretenait une confusion avec l' AFER pour l' ensemble des placements qu' il proposait, y compris pour ceux qui étaient étrangers à l' AFER, qu' il présentait oralement comme sélectionnés par l' AFER en donnant aux exposants des gages écrits d' une telle sélection, que les fonds ont été remis à M. F... par les épargnants contre reçu à entête AFER, que les non- professionnels qu' ils étaient, étaient dans l' impossibilité de suspecter l' absence de lien entre l' AFER et les produits proposés par M. F... dont l' activité se déroulait dans des locaux où le sigle et le logo de l' AFER étaient omniprésents, qu' en ne s' expliquant pas sur ces moyens des conclusions, la cour d' appel a méconnu les dispositions de l' article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu' ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que l' AFER avait pour seule activité la mise en oeuvre optimale d' un contrat collectif assurance sur la vie en vue de la retraite dont les modalités de fonctionnement assuraient la transparence et la sécurité, que si M. F... avait fait un large usage du logo AFER que lui permettait sa qualité de " correspondant AFER ", les investissements litigieux portaient sur des obligations au porteur et des conventions de trésorerie ne comportant aucune référence à l' AFER, que les versements d' un montant important étaient effectués directement à l' ordre des sociétés luxembourgeoises, que les modalités de souscription de ces produits financiers, leur caractère confidentiel et leur rendement spéculatif sur la base d' une rémunération de 8 % l' an ne permettaient pas de les rattacher de manière vraisemblable au contrat d' assurance- vie proposé par l' AFER, la cour d' appel, qui a répondu en les écartant aux conclusions invoquées, a pu en déduire que ces circonstances auraient dû amener les investisseurs à vérifier la réalité du mandat allégué et a légalement justifié sa décision de ne pas reconnaître l' existence d' un mandat apparent de M. F... pour proposer ces placements pour le compte de l' AFER ; d' où il suit que le moyen n' est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi provoqué ;
Condamne les consorts Z... et B... aux dépens ;
Vu l' article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt- huit mai deux mille huit.