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13/05/2008 | FRANCE | N°06-43949

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 mai 2008, 06-43949


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, s'estimant victime d'une discrimination liée à ses fonctions syndicales ayant des conséquences sur sa carrière et sa rémunération, M. X... employé depuis 1993 comme technicien de laboratoire plasturgie par la société Coflexip aux droits de laquelle se trouve la société Flexi France ( la société) , titulaire de plusieurs mandats représentatifs et conseiller prud'homme, a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ; que des organisations syndicales sont interve

nues à l'instance ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de M. X....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, s'estimant victime d'une discrimination liée à ses fonctions syndicales ayant des conséquences sur sa carrière et sa rémunération, M. X... employé depuis 1993 comme technicien de laboratoire plasturgie par la société Coflexip aux droits de laquelle se trouve la société Flexi France ( la société) , titulaire de plusieurs mandats représentatifs et conseiller prud'homme, a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ; que des organisations syndicales sont intervenues à l'instance ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de M. X... :
Attendu qu'il est fait grief à l' arrêt d'avoir débouté M. X... de sa demande en paiement de sommes réparant les préjudices matériel et moral résultant de la discrimination syndicale liée au blocage injustifié de son coefficient et à l'absence d'évolution de sa carrière et d'augmentation individuelle de salaire et d'avoir débouté les syndicats de leur demande d'indemnisation formulée au titre de l'article L. 411-11 du code du travail, alors, selon le moyen, que pour déterminer si un salarié qui se plaint d'une évolution de carrière défavorable a fait l'objet d'une discrimination syndicale, le juge doit effectuer un étude comparative des salaires et des coefficients des salariés de l'entreprise qui se trouvent dans une situation identique ou comparable à la sienne au regard de leur niveau professionnel, de leur ancienneté et de leur diplôme et ne peut se contenter de se référer à des moyennes ou des pratiques en vigueur dans l'entreprise ;
1°/ que , s'agissant du coefficient, en se bornant à comparer la situation de M. X... à celle de ses collègues ainsi qu'aux habitudes de l'entreprise en matière d'augmentation de salaires et de promotions, sans procéder à une étude comparative des salaires et des coefficients des salariés de l'entreprise ayant la même ancienneté et un diplôme équivalent et sans tenir compte, ainsi qu'elle y était précisément invitée, notamment des coefficients d'embauche et des niveaux de diplômes des autres salariés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-45 et L. 412-2 du code du travail ;
2°/ que, s'agissant de la rémunération, en se bornant à comparer, pour les années 2002 et 2003, le montant du salaire de M. X... avec la grille de salaires des personnes travaillant avec lui dans le laboratoire et de celles classées au coefficient 305 ainsi qu'avec la moyenne des salaires de ces dernières ainsi que celle des salariés classés au coefficient 270, sans vérifier si tous ces salariés se trouvaient dans une situation identique à la sienne au regard de leur ancienneté, de leur diplôme et de leur niveau professionnel et sans étendre cette vérification aux salariés travaillant dans les autres services de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-45 et L. 412-2 du code du travail ;
3°/ que les juges du fond en se bornant à comparer les augmentations de salaire de M. X... sur la période 1996 à 2001 à celles des salariés travaillant au sein de son service et se trouvant dans une situation équivalente à la sienne sans s'intéresser à ceux appartenant aux autres services de l'entreprise et se trouvant également dans une situation identique, ont violé les articles L. 122-45 et L. 412-2 du code du travail ;
4°/ que le fait que des représentants syndicaux du même syndicat travaillant dans un autre service que celui de M. X... bénéficient des salaires les plus élevés de cette entité est impropre à démontrer qu'il n'est pas victime d'une discrimination syndicale quant à sa rémunération ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 122-45 et L. 412-2 du code du travail ;
5°/ qu'enfin aucun texte légal n'exige, pour que la discrimination syndicale d'un salarié soit reconnue, que le salarié ait préalablement à son action en justice formulé une réclamation auprès de son employeur ; qu'en reprochant à M. X... de ne pas avoir fait de réclamation préalable auprès de son employeur pour le débouter de ses demandes au titre de la discrimination syndicale, la cour d'appel a violé, en y ajoutant une condition qui n'y figure pas, les articles L. 122-45 et L. 412-2 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, en présence d'une discrimination syndicale invoquée a, par motifs propres et adoptés, vérifié les conditions dans lesquelles s'était déroulée la carrière de l'intéressé et sa rémunération avait été fixée et a retenu, après avoir comparé sa situation à celle de salariés placés dans une situation identique, qu'il n'avait pas été traité de manière différente quant à l'évolution de sa carrière et de sa rémunération ; qu'abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deux dernières branches, elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen du pourvoi incident de la société Flexi France :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné sous astreinte le remboursement à M. X... d'une somme correspondant au temps de RTT retenu au titre de l'absence pour raison syndicale, alors, selon le moyen, que l'obligation pesant sur l'employeur de payer à l'échéance normale comme temps de travail le temps nécessaire à l'exercice du mandat représentatif, est limitée aux heures dont le nombre est fixé par la loi ou par un accord collectif plus favorable, et ne s'étend pas à celles qui sont prises en fonction de circonstances exceptionnelles dont il appartient au salarié, en cas de contestation de l'employeur, d'établir l'existence ainsi que la conformité de leur utilisation avec l'objet du mandat représentatif préalablement à tout paiement par l'employeur ; qu'en l'espèce, pour considérer que l'employeur était tenu de payer un rappel de salaire correspondant à des heures de délégation dépassant le contingent mensuel, la cour d'appel, après avoir constaté qu'aucun événement urgent ne requérait la présence de M. X... aux Etat-Unis et que l'ordre de mission de ce dernier dix jours avant le départ n'était pas signé par un responsable autorisé, a estimé que quelle que soit l'appréciation portée sur la légitimité de ce déplacement, l'employeur ne pouvait unilatéralement transformer une absence non rémunérée en absence liée à la prise de congés payés ou d'un temps de récupération ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 412-20, L. 424-1 et L. 434-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas dit que l'employeur était tenu de payer un rappel de salaires correspondant à des heures de délégation dépassant le contingent mensuel du crédit d'heures alloué aux représentants du personnel, a retenu à bon droit que, quelle que soit l'appréciation donnée sur la légitimité du déplacement effectué par M. X..., l'employeur ne pouvait unilatéralement transformer une absence non rémunérée en absence liée à la prise de congés payés ou d'un temps de récupération sans que le salarié ait donné son accord ; que le moyen manque en fait ;
Mais sur le second moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 122-45 et L. 412-2 du code du travail ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande de paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel résultant de la discrimination syndicale liée à la prime de résultat groupe, dite PRG, et pour débouter les syndicats de leur demande d'indemnisation formulée sur le fondement de l'article L. 411-11 du code du travail, la cour d'appel qui rappelle que cette prime est composée de deux parties, dont une discrétionnaire, a constaté que pour les années 1998 et 2000 M. X... avait été défavorisé puisqu'il se situait dans les dernières positions et qu'il avait été le seul en 1999 à ne pas la percevoir, mais a conclu qu'il résultait de l'analyse du document sur la prime et la rémunération totale des salariés du laboratoire qu'aucune discrimination ne pouvait être déduite des chiffres produits et qu'il n'appartient pas au juge de substituer son appréciation à celle de l'employeur en ce qui concerne les critères d'attribution retenus pour le versement de cette prime ; Attendu cependant, que lorsque le salarié produit des éléments qui laissent supposer l'existence d'une discrimination liée à son appartenance syndicale, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors d'une part qu'il résultait de ses constatations que M. X... n'avait pas perçu la prime versée à d'autres salariés se trouvant dans une situation similaire, d'autre part, que l' exercice d'un pouvoir discrétionnaire ne constitue pas un élément objectif excluant toute discrimination, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le premier moyen du pourvoi incident :
Vu l'article 6 de l'accord national du 21 juillet 1975 sur la classification professionnelle dans la métallurgie ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que la garantie de classement qu'il institue est réservée au seul titulaire d'un des diplômes professionnels visés par son annexe I ;
Attendu que pour condamner la société à reclasser le salarié au coefficient 305 niveau V échelon 1 de l'annexe 1 de l'accord susvisé, la cour d'appel énonce que le diplôme d'enseignement scientifique et technique universitaire (DESTU) est au moins équivalent au diplôme universitaire de technologie (DUT), puisque tous deux sont délivrés par l'université, le premier étant acquis au titre de la formation continue en un an, alors que le second est un diplôme délivré aux étudiants en deux ans ; que si la convention collective prévoit pour un diplôme de formation professionnelle que le coefficient d'accueil est 255, la société a considéré que le DESTU et le DUT étaient équivalents, puisqu'elle a recruté M. X... au coefficient 255, prévu par ladite convention pour les salariés titulaires du DUT, et qu'elle lui a accordé ensuite le coefficient 270 conformément aux dispositions de la convention ; qu'au vu de la convention collective, des diplômes, de l'ancienneté de M. X... et de sa fiche de poste, l'application d'un coefficient 305 doit être retenue ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le diplôme d'enseignement scientifique et technique universitaire, DESTU, ne figure pas parmi les diplômes de l'annexe I ouvrant droit à la garantie de classement minimal prévue par la convention collective, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... et les syndicats de leurs demandes liées à l'attribution de la prime dite PRG et en ce qu'il a condamné la société à reclasser le salarié dans le coefficient 305 niveau V échelon 1, l'arrêt rendu le 16 mai 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Flexi France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X..., à l'Union syndicale des travailleurs de la métallurgie de la Seine-Maritime et à l'Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-43949
Date de la décision : 13/05/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 16 mai 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 mai. 2008, pourvoi n°06-43949


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.43949
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