LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° N 07-11.286 et K 07-12.710 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 septembre 2006), que la société Compagnie méditerranéenne d'exploitation des services d'eau (CMESE) est propriétaire d'un terrain grevé d'une servitude d'aqueduc consentie à la société du Canal de Provence et d'aménagement de la région provençale (société du Canal de Provence) ; que la partie du sol dans lequel passait la canalisation de celle-ci s'étant effondrée, la CMESE lui a demandé en vain de procéder à des travaux puis a fait procéder à des travaux de dérivation de la canalisation par une entreprise à qui elle a versé un acompte ; que le solde des travaux a été réglé par la société du Canal de Provence ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° N 07-11.286 :
Attendu que la société du Canal de Provence fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement du solde des travaux de déplacement de sa canalisation alors, selon le moyen, qu''il est institué au profit des collectivités publiques et de leurs concessionnaires, une servitude, ouvrant droit à indemnité, leur conférant le droit d'établir à demeure, dans les conditions les plus rationnelles et les moins dommageables à l'exploitation présente et future, en vue de l'irrigation, des canalisations souterraines dans les terrains privés non bâtis ; que la prise en charge des travaux de déplacement d'une canalisation rendus nécessaires par la détérioration du terrain d'assiette incombe au propriétaire du fonds débiteur de la servitude ; qu'en subordonnant, dès lors, l'obligation de ce dernier à la démonstration de sa faute ou de sa négligence, cependant qu'elle avait constaté que le déplacement de la canalisation de la société du Canal de Provence avait été rendu nécessaire par l'effondrement du terrain d'assiette de la servitude, la cour d'appel a violé les articles L. 152-3 et L. 152-4 du code rural ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le propriétaire du fonds était tenu à l'obligation passive de supporter le passage d'une canalisation, de ne rien faire qui en empêche le passage et de laisser la société du Canal de Provence procéder à toute intervention nécessaire à sa conservation et qui a retenu qu'il n'était ni établi que l'effondrement de la berge soit dû à une négligence de la CMESE, ni justifié qu'un barrage qu'elle exploitait soit à l'origine de cet effondrement, en a exactement déduit que la CMESE n'avait pas à prendre en charge les travaux de conservation de la canalisation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi n° K 07-12.710 :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour débouter la CMESE de sa demande de remboursement de la somme réglée pour faire dévier la canalisation de la société du Canal de Provence et lui ordonner de restituer la somme versée au titre de l'exécution provisoire du jugement, l'arrêt retient que la CMESE n'avait pas à prendre en charge les travaux de conservation de la canalisation, qu'elle a pris l'initiative de procéder à des travaux de déplacement de la canalisation pour éviter qu'elle ne se rompe et que, dans la mesure où elle a pris l'initiative de faire ces travaux de dérivation de la canalisation de la société du Canal de Provence sans que ladite société ne l'ait déférée en justice pour y procéder, elle doit conserver ses frais d'intervention à sa charge ;
Qu'en statuant sans répondre aux conclusions de la CMESE invoquant la gestion d'affaires, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens du pourvoi n° K 07-12.710 :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la société CMESE de ses demandes et ordonne la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement, l'arrêt rendu le 12 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société du Canal de Provence aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société du Canal de Provence et la condamne à verser à la société CMESE la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille huit.